ROUSSEAU (JEAN-BAPTISTE), né à Paris en 1670, et mort à Bruxelles en 1741. Ode. Les cieux instruisent la terre Tout ce que leur globe enserre De sa puissance immortelle Son admirable structure Est la voix de la nature, Qui se fait entendre aux yeux. Dans une éclatante voûte L'univers, à sa présence, Cependant votre âme attendrie Hélas! que mes tristes pensées Et, quand la nature attentive De la douceur de mes soupirs. Fils d'un cordonnier, Rousseau reçut une excellente éducation dans les meilleurs colléges de Paris, et ne tarda pas à se faire un nom par de petites pièces de poésie, pleines d'esprit et d'imagination. Il avait à peine 20 ans, qu'il était déjà recherché par les personnes du plus haut rang et du goût le plus délicat. Il était déjà parvenu au comble de la gloire, lorsqu'il fut assailli par une foule de plumes médiocres et jalouses qui le plongèrent dans des malheurs qui le suivirent jusqu'au tombeau. On poussa la calomnie jusqu'à mettre sur son compte et à faire circuler des couplets dont on savait bien qu'il n'était point l'auteur: Rousseau eut l'imprudence de les attribuer à Saurin, qui porta l'affaire devant les tribunaux, et Rousseau n'ayant pu prouver son accusation, fut condamné comme calomniateur à un bañissement perpétuel. Il se retira en Suisse, où il publia la première édition de ses œuvres. De là il alla à Vienne, et trois ans après il passa à Bruxelles. Il fit un voyage à Londres et y publia une édition de ses ouvrages, en 2 vol. in-quarto. Cette édition lui rapporta dix mille écus qu'il plaça dans les fonds de la compagnie d'Ostende; mais cette compagnie ayant failli, il les perdit et retourna à Bruxelles dans une misère complète dont il ne put jamais se relever. Piron a fait cette épitaphe si connue : Ci-gît l'illustre et malheureux Rousseau. Le Brabant fut sa tombe et Paris son berceau. Qui fut trop longue de moitié : "Rien ne surpasse dans notre langue la richesse et l'éclat des belles Odes de Rousseau; la grâce et l'élégance harmonieuse de ses Cantates, genre nouveau, dont la création lui appartient, et dans lequel il est resté sans rival, quoiqu'il ait eu des imitateurs." (M. AMAR.) Rousseau occupe un rang très-distingué parmi nos plus illustres poètes lyriques, et s'il a aujourd'hui des rivaux, il n'en a pas eu de son temps, et n'a eu d'autre modèle que Malherbe.-Euvres complètes, Paris, 1820, 5 vol. in-octavo. LA MOTTE (ANTOINE HOUDARD DE), naquit en 1672 et mourut en 1731, à Paris. Le Portrait. (Fable.) De se faire tirer certain homme eut envie. Est ami des portraits : cet art qui nous copie Ce n'est pas là notre unique folie. Si je suis attrapé, si c'est là ma figure. Bon, dit l'un, on vous a fait noir; On vous allonge le visage ; On vous creuse la joue; on vous ride la peau : Et flatterie à part, vous êtes jeune et beau. Ou j'y brûlerai mon pinceau. Les connaisseurs partis, le peintre dit à l'homme : J'y consens, dit notre homme; à demain donc; adieu. S'il faut parler de bonne foi, Ce n'est point du tout lui, vous l'avez pris à gauche, La Motte écrivit de bonne heure pour le théâtre, et en embrassa tous les genres; mais peu de ses pièces se sont soutenues. Celle qui a eu le plus de succès est sa tragédie d'Inès de Castro. On lit encore avec plaisir sa comédie du Magnifique, où l'on trouve de l'esprit, des grâces et de la vérité. Ses opéras passent pour ce qu'il a de mieux. Ses Odes sont plus philosophiques que poétiques; elles ont des pensées dignes de Socrate, mais elles manquent de ce beau feu qui enlève dans Pindare, Horace et Rousseau. Parmi ses odes anacreontiques, il y en a de très-jolies. Ses Eglogues n'ont point le caractère du genre: on y trouve des descriptions de mœurs champêtres bien faites, mais ses bergers sont trop ingénieux. Quelques-unes de ses Fables sont estimées; mais en général elles n'ont d'autre mérite qu'un fonds et des dessins bien présentés. En général la poésie de La Motte est dure et sans harmonie. Sa traduction d'Homère, en vers français, le couvrit de ridicule. Sa prose, qu'on préfère à ses vers, est précieuse, épigrammatique et quelquefois forcée; mais on y reconnait toujours le philosophe et l'homme d'esprit. Dans aucun genre La Motte n'est au premier rang; dans tous il occupe une place honorable parmi les écrivains de son temps. Ami intime de Fontenelle, il vécut comme lui en vrai philosophe, et jouit d'une grande considération. Il était fils d'un chapelier, mais il ne rougit jamais de sa naissance. Il était de l'Académie française.-Ses œuvres sont en 10 vol. in octavo. CRÉBILLON (PROSPER JOLYOT DE), né à Dijon en 1674, mort à Paris en 1762. Description d'une Tempête. Mais signalant bientôt toute son inconstance, |