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on expose des faits vrais ou imaginés, ce qui comprend l'histoire, le roman et le poëme dans les descriptions on peint ce qu'on voit ou ce qu'on sent; c'est ce qui appartient plus particulièrement à l'orateur et au poëte. Nous allons considérer le style sous ces différens égards.

CHAPITRE II.

Du genre didactique.

Il y a des écrivains quine sauroient entrer

en matière sans arrêter le lecteur sur des notions préliminaires qu'ils disent absolument nécessaires à l'intelligence du sujet qu'ils traitent. C'est une espèce de dictionnaire qu'ils mettent à la tête de leurs ou vrages. Ils emploient des mots savans pour exprimer les choses les plus communes, ils changent la signification des termes les plus usités; en sorte que plusieurs traités sur un même sujet, écrits dans une même langue, ne paroissent que la traduction les uns des autres, et ne diffèrent que par variété des idiomes.

la

Chaque art, chaque science a des termes qui lui sont propres; mais on les a souvent trop multipliés. Il est ridicule d'avoir recours à une langue savante pour des idées qui ont des noms dans une langue vulgaire; c'est opposer un obstacle au progrès des

connoissances, et vouloir persuader qu'on sait beaucoup quand on sait des mots.

Il est encore fort inutile de ramasser à la tête d'un ouvrage les termes propres au sujet que l'on traite : il sera toujours temps de les expliquer quand on sera dans la né→ cessité de les employer. Alors l'application en rendra la signification plus sensible, et les gravera plus profondément dans la

mémoire.

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Si on abuse des mots, on abuse aussi des définitions. Un défaut où l'on tombe, c'est de les offrir au lecteur dans un moment où il ne peut pas encore les comprendre. A la vérité, l'explication suit de près; mais pourquoi commencer par dire une chose qui ne sera pas entendue? Ne seroit-il pas mieux de présenter les idées dans l'ordre où elles s'expliqueroient d'elles-mêmes? Çet abus vient de ce qu'on prend les définitions pour les principes de ce qu'on va dire, et on devroit plutôt les prendre pour le précis de ce qu'on a dit. Il faut que les analyses en préparent l'intelligence. C'est alors qu'elles répandront du jour, et que propres à rappeler en peu de mots toutes les propriétés

d'une chose, elles prépareront à de nouvelles recherches, et faciliteront de nouvelles analyses.

Mais il ne faut pas se faire une loi de tout définir. Il y a des choses qui sont claires par elles-mêmes, parce que ce sont des impressions qui sont connues par sentiment : il y en a, au contraire, qui sont obscures, qui se confondent entre elles, et où il est impossible de démêler des qualités par où elles puissent se distinguer. Il ne faut définir ni les unes ni les autres.

Aunombre des premières sont la lumière, le son, la saveur et en général toutes les affections que l'ame reçoit par les sens, et qu'elle conserve telles qu'elle les reçoit. Toutes ces choses ne peuvent être connues que par le sentiment que produit l'action des objets sur nos organes. Dire que la lumière, le son, etc., est une matière plus ou moins subtile, dont les parties ont telle figure, tel mouvement, ce n'est pas définir ce que nous sentons, c'est en donner la cause physique, et cette explication est même bien imparfaite.

Lorsqu'un sentiment est composé de

plusieurs affections, il peut se définir, c'està-dire, qu'on peut faire l'analyse des différentes affections dont il est formé : c'est "pourquoi les opérations de l'esprit et les passions de l'ame sont susceptibles de dé finitions.

côtés

Si nous considérons les choses par les par où elles different davantage, nous les distribuons en différentes classes, et nous les définissons par les propriétés qui les distinguent. Alors la loi que nous devons nous faire, c'est de mettre de l'ordre dans nos idées pour nous les rappeler plus facilement. Il faut se tenir en garde contre le préjugé où l'on est communément, que les définitions dévoilent la nature des cho ses. Il seroit dangereux de s'y méprendre; les erreurs des physiciens en sont une preuve sensible. Ce n'est que dans les mathéma, tiques, dans la morale et dans la métaphy» sique, que les définitions peuvent renfermer la nature des choses, c'est-à-dire, de quelques notions abstraites.

Quand nous considérons les différentes espèces que nous avons définies, nous voyons comment elles se distinguent plus ou moins.

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