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action, je dirais presque en évolution, elle rencon tre de toute part des forces étrangères, qui ellesmême animées d'une continuelle activité, la frappent constamment d'impressions diverses et la font jouir ou souffrir par la manière dont elles accueillent, favorisent ou empêchent son mouvement expansif.

Si donc l'ouvrage de M. Virey est destiné à faire quelque bien, ce ne sera pas seulement en ramenant les esprits à des spéculations physiologiques qu'ils ne sauraient négliger sans erreurs, mais en les conduisant à une science de l'ame, qui, plus vraie que celle à laquelle ils avaient foi, est plus propre en même temps à leur donner les croyances morales et politiques dont ne peuvent se passer les intelligences éclairées et les cœurs généreux. Ce sera peut-être aussi en les réconciliant avec des idées religieuses qui, dépouillées de mysticisme, satisfont la raison, et dans lesquelles il est consolant pour le sage de trouver une explication de sa condition présente et une révélation de sa destinée future. Comment ne pas concevoir ces espérances, quand on aperçoit tous les rapports qui lient entre elles la physiologie, la psycologie et la théologie, et quand on voit dans la connaissance de la vie et de l'ame un commencement de celle de Dieu, et dans l'étude de Dieu celle de la vie et de l'ame universelle: In Deo vivimus et sumus?

Voilà un des premiers morceaux de philosophie que l'auteur

ait écrit et publiés. Il aurait peut-être mieux fait de le supprimer ou de le refoudre. Cependant commé à tout prendre le fond de sa pensée y est suffisamment exprimé, il le laisse subsister tel qu'il se trouve dans les deux précédentes éditions.

M. KÉRATRY,

Né en 1769.

L'ontologie n'est pas une chose vaine, mais elle est d'une grande difficulté. Ce qu'elle recherche dans l'homme et la nature, ce n'est pas seulement ce qu'ils ont d'actuel et de visible, c'est leur passé et leur avenir, leur origine et leur destinée, c'est à dire ce qu'il y a en eux de plus intime et de plus caché. En outre, du créé elle passe à l'incréé, elle s'élève au Créateur, elle plonge dans les ténèbres de cette mystérieuse existence, elle en contemple profondément les ineffables attributs. Son objet est infini s'il était compris, tout serait compris, la théorie qui s'y rapporterait serait absolue, universelle; ce serait la toute philosophie. Par malheur, une telle théorie n'est point encore constituée; souvent tentée, quelque peu avancée par la coopération successive des penseurs de tous les âges, elle est loin cependant d'avoir le caractère d'une science; positive en quelques points, elle est incertaine en beaucoup d'autres : il y reste une foule de choses

à faire. Nous ne saurions donc refuser notre estime à l'écrivain qui, à son tour, a essayé d'y répandre quelques lumières nouvelles. S'y fùt-il porté avec plus de mouvement que de méthode, plus de sentiment que de raison, en homme que son sujet domine, ravit et trouble quelquefois; ce serait encore un service qu'il aurait rendu à la vérité; il aurait fait penser à des questions graves, profondes, inévitables: tel est un des mérites de M. Kératry dans l'ouvrage d'ontologie qu'il a publié sous le titre d'Inductions morales et physiologiques (1).

Nous allons en donner une rapide analyse.

Au commencement il n'y avait que l'Être; mais l'Être était intelligent. Il voulut créer, et soudain il pénétra le néant, vide immense où la matière et l'esprit étaient de toute éternité à l'état de possible; il leur prêta l'être, et les réalisa: ce fut en les combinant entre eux sous mille formes diverses. De ces combinaisons sortirent toutes les existences individuelles qui peuplent l'univers, et le varient à l'infini. Dans notre monde, il en résulta trois grandes espèces, les minéraux, les végétaux et les animaux, êtres mixtes qui présentent tous l'alliance de l'esprit, ou, pour mieux dire, de la force et de la matière, mais avec cette différence que dans les premiers, la force est sans unité et la matière sans organes; que, dans les seconds, il

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y a commencement, et dans les autres complément de l'unité virtuelle et de l'organisation matérielle. Ces ètres vivent en cet état tout le temps que le permettent les lois qui les régissent; après quoi ils meurent: et alors en chacun d'eux la force et la matière se retirent l'une de l'autre, non pour rentrer au néant, mais pour continuer à être, en passant sous de nouvelles formes et dans de nouvelles combinaisons. Telle est en particulier l'ame de l'homme, qui, dans le principe s'unit au corps pour s'en dégager ensuite et réparaître dans d'autres rapports, où sans doute elle reprend encore des organes, mais plus déliés et plus parfaits que ceux dont il jouit ici bas. Ainsi s'expliquent sous la loi de Dieu la création de l'être spirituel et de l'être matériel, leur union terrestre, leur séparation et leur restitution dans un autre monde.

Voilà quels sont les principaux points d'ontologie que M. Kératry a traités dans son ouvrage. Comme les développemens qu'il leur consacre consistent pour la plupart en descriptions à demi poétiques qu'un resumé ne saurait reproduire, ou en explications physiologiques et physiques dont nous ne sommes point assez juge, nous ne suivrons pas l'auteur dans tous les détails de son système; nous nous bornerons à en examiner trois opinions particulières, qui regardent spécialement la partie morale de la science.

Commençons par ses idées sur l'immortalité de l'ame. Quant au fond, elles ne s'écartent pas de

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