Page images
PDF
EPUB

Après une incarcération de deux années, Travot fut donc rendu aux soins de sa famille.

Hélas! l'épreuve avait été trop rude; le général ne recouvra plus la raison. Il languit quelque temps encore, et termina, en 1836, dans une maison de santé, une existence toute de gloire et de dévouement à la mère patrie....

Ainsi mourut une victime des passions politiques, un des plus braves compagnons de Napoléon Ier, un des plus courageux apôtres de l'honneur national, et auquel Fontenay-le-Comte éleva une statue.

Bénie soit la tombe qui renferme la dépouille mortelle du général Travot! Le héros qu'elle recouvre aura sa tradition perpétuée d'âge en âge, et cette tradition inspirera aux citoyens : l'amour de la France, le respect au malheur, la fidélité au Drapeau!

Que ton âme dorme en paix, Travot; ton souvenir est gravé dans tous les cœurs qui ont pour bannière la loyauté !......

L'heure de l'immortalité a fait entendre pour toi son tintement glorieux, et les échos des races futures répéteront à nos descendants qu'une couronne d'honneur a été mise sur ton front par la postérité.

Déjà le bronze a reproduit ta statue; mais à côté de ce souvenir, que ne peut nous ravir la mort, il en est un autre, plus précieux encore, qui continue tes nobles traditions, ton fils; ton fils, représentant de la France, et appelé, par ses talents et ses vertus, à marquer sa place parmi les illustrations contemporaines.

Dors donc en paix, Travot; ton fils continue la splendide destinée de ta famille.

Après ce court et sincère hommage, rendu à la mémoire de l'illustre général Travot, qu'il nous soit permis de conclure par cette phrase, que nous dicte le sentiment national :

Honneur à la patrie qui voit naître de tels citoyens; honneur à la contrée qui enfante de semblables héros.

VITICULTURE.

Leçons de M. le Professeur DU BREUIL, à Poligny, en 1862.

(Suite et fin).

M. Du Breuil trouve cette dépense trop élevée et donne la préférence aux toiles. Il propose de mettre les lignes de vignes à un mètre, puis à 60 centim., de manière à n'avoir qu'un grand et un petit espace consécutifs et faciles à couvrir par le même abri. Puis, au lieu de 80 centim. entre chaque cep, il y en aurait 95, afin de réparer l'inconvénient du rapprochement des lignes; mais cette modification n'altérerait en rien le nombre de ceps à l'hectare. Seulement, une ligne sera cultivée à la charrue et l'autre à bras d'homme. On n'oubliera pas que les ceps devront toujours être plantés en quinconce, afin que les racines se nuisent moins entr'elles, et que le soleil, la lumière et la chaleur arrivent plus

facilement sur chaque plant.

Les toiles auront un mètre carré, à 20 centimes; on les maintient par des traverses d'un mètre, placées tous les deux mètres au moyen d'ourlets, puis ces traverses sont attachées à un fil de fer. Les piquets qui supportent ce fil de fer se trouvent à 60 centim. de distance, fortifiés par une traverse placée obliquement: du côté du levant, le fil de fer est plus élevé de 10 centim. Dès que les toiles, de 50 ou 60 mètres de long sont tendues, elle doivent dépasser les lignes de vignes afin de les bien abriter; on attache alors les toiles après les piquets, au moyen de brins d'osier. L'inclinaison de ces abris favorise l'arrivée de la lumière et de la chaleur sur les plants, et les protège contre les vents et les pluies.

Ces toiles sont précieuses contre les gelées blanches d'avril et de mai, contre la coulure de mai-juin. Voyons maintenant la question de dépense par hectare et par an :

20 f. »> c.

Pour deux lignes de ceps de 100 mètres chaque, nous aurons:
Toile à 20 cent. le mètre: 100 mètres,
50 traverses à 1 centime,

Fixation des traverses sur la toile,

Sulfatage des toiles munies de traverses

17

50

Intérêt du capital, à 5 p. 010

2 >>

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Par hectare, 6,200 mètres de toile, à 24 fr. 70 cent. les 100 mètres, coûteront 1,531 fr. 40 cent.

La durée des toiles étant de 15 ans, les toiles coûteront 102 fr. par hectare et par an.

Les hangards nécessaires pour abriter ces toiles, en évaluant à 25 m. cubes l'espace nécessaire pour les abris d'un hectare, coûteront 80 fr.; ils dureront 20 ans; soit donc une dépense de 4 fr. par an.

Pour placer et déplacer les toiles, comptons 25 journées à 2 f. 50 c., ce sera une dépense de 62 f. 50 cent. par hectare.

La ligne qui ne pourra être cultivée qu'à bras d'homme, nécessitera aussi une augmentation de frais de journées que l'on peut évaluer à 26 f. par an.

Au résumé, toiles,

Hangards,

Manœuvre des toiles, .

Augmentation de frais de culture,

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

TOTAL par hectare et par an

Voyons maintenant le rendement :

qui, à 20 fr., donnent

Le rendement moyen des gros plants, par hectare, est de 90 hectolitres

1,800 fr.

La destruction par gelée blanche et coulure équivaut à la perte com

plète de 3 récoltes en 10 ans, soit par an

Or, les abris en toile ne coûtent par an que

Ils donnent donc un bénéfice net et annuel de

540 f. » c.

194 50

345 50

Ainsi donc, la culture à la charrue et l'emploi des toiles-abris procureront les bénéfices suivants :

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]

Cette différence, si grande avec le rapport de la méthode usitée dans le Jura, monterait de 400 fr. à 720 fr. si les fins plants étaient remplacés par l'enfariné.

Maladies. L'oïdium a été signalé pour la première fois en Angleterre, vers 1845, sur des vignes en serre; puis à Paris en 1849, sur des treilles, et depuis lors dans les vignobles. Tous les cépages en sont plus ou moins atteints; les ravages semblent d'autant plus intenses que la température est plus élevée; ainsi dans les treilles, ainsi dans le midi de la France. On ignore complètement les causes de ce fléau; les uns l'attribuent à un insecte, d'autres à un champignon. Toujours est-il que le bourgeon, la grappe, la feuille se couvrent de taches blanchâtres, grisâtres, couvertes d'une poussière très-fine, due à un champignon qui est cause en effet du mal; le grain s'arrête dans son développement et pourrit; le bois s'altère et il ne reste plus de sarment pour tailler l'année suivante; d'un autre côté, les racines finissent également par souffrir. Les traitements proposés et employés varient à l'infini. On a surtout conseillé et pratiqué le brossage de chaque grain, son revêtement avec de la colle forte, etc., etc.; vient ensuite le soufrage, que les Anglais employèrent les premiers en projetant la poussière sulfureuse sur les ceps de treilles préalablement mouillés : le soufre adhérant alors à la rafle, on était exposé à manger des grains souffrés et par conséquent fort désagréables au goût. En France, Rose Charmeux de Thomery se contenta de vaporiser le soufre dans ses serres en hiver, et c'est de là que naquit l'idée, depuis généralisée, de soufrer à sec.

[ocr errors]

On doit employer le soufrage comme moyen préventif, c'est-à-dire sur les bourgeons qui ont à peine 12 à 15 centimètres de long et sur les jeunes grappes, puis une seconde fois quand la vigne est en fleurs, enfin une 3e fois dès que le raisin entre en verjus. Dès que la pluie aura enlevé la poudre de soufre il faudra renouveler l'opération.

Le soufre sublimé n'est pas absolument nécessaire; de plus, il coûte fort cher, environ 60 fr. les 100 kilog. C'est ce qui amena la falsification du soufre dans les usines du midi, puis l'essai par M. Laforgue, de Béziers, du soufre brut, bien trituré : ce dernier ne coûte que 22 fr. les 100 kilog. et réussit tout aussi bien.

:

Le soufre se répand au moyen d'un soufflet armé d'une boite qui en contient jusqu'à 500 grammes: cet instrument, du prix de 5 fr., est beaucoup trop lourd et fatiguant. Mieux vaut un soufflet léger en maronnier d'Inde, et dans l'intérieur duquel on introduit le soufre il ne coûte que 2 fr. 50 cent., et le vigneron porte à sa ceinture un sac à soufre.M. Laforgue préfère une boite à soufre garnie d'une houpe en laine, avec laquelle il peut badigeonner le cep dans le cas où il est humide. L'expérience prouve que le soufflet devient absolument nécessaire pour les deux premières opérations, parce qu'il faut que la pou

dre passe entre tous les grains et que la boite suffise à compter du 3* soufrage. On dépense ordinairement 120 kilog. de soufre par hectare pour les trois opérations, dans le midi : la main-d'œuvre y est de 12 journées de femmes, à 1 fr. 10 cent. chacune.

E. B.

BIBLIOGRAPHIE.

Examen des principes de la Morale sociale,

PAR M. AULARD,

Inspecteur d'Académie à Lons-le-Saunier, membre honoraire.

La philosophie de notre temps s'était proposé et avait une double tâche à remplir d'abord, renverser la philosophie sensualiste et irréligieuse du XVIIIe siècle, déjà sérieusement ébranlée par les travaux de l'école écossaise; ensuite, s'enquérir de la méthode à suivre dans l'examen de la marche et des progrès de la pensée humaine, et, dans cette vue, opérer une excursion scientifique longue et sérieuse dans les spéculations du passé, et cela, non pour satisfaire un vain désir de curiosité, mais afin de pouvoir asseoir, abstraction faite des systèmes et des passions politiques, sur des données rationnelles, fruit de l'expérience des siècles, les assises de la société, et par suite, les fondements de l'ordre social.

Tel est le but de l'ouvrage de l'auteur, avec cette épigraphe, empruntée à l'orateur romain: Usus virtutis est maximus, civitatis gubernatio. Cic. de Rép. 1, 2.

Le premier et le plus grand usage à faire de la vertu, consiste dans la pratique d'un bon gouvernement.

La première idée qui se présentait dans l'ordre logique, aussi bien que dans l'ordre chronologique, était de bien faire comprendre et de démontrer jusqu'à l'évidence, la raison d'être de l'existence de l'homme en société. Cette existence est-elle d'institution divine, ou le résultat de la fraude, de la violence? On sait en quel sens Rousseau a résolu cette question, dans son discours sur l'inégalité des conditions et dans son contrat social: il suppose, à l'origine, l'homme isolé, solitaire, errant dans les forêts, en compagnie de la bète fauve, comme elle, sans langage, sans règlement, sans culte, comme elle, s'approchant de la femme, à la façon du måle, de la femelle; et sans souci aucun des enfants nés ou à naître. Le bon sens de l'auteur a bientôt fait justice de cette extravagante chimère: Si l'homme vit en société, c'est qu'il est né sociable, et de cette sociabilité tout lui donne l'explication : l'état de faiblesse attaché à sa naissance, et qui le vouerait à une mort aussi prompte que certaine, sans les soins empressés, sans l'assistance immédiate de celle dont il reçoit le jour; les sentiments de son cœur qui le portent à aimer; le besoin d'adorer en commun le grand Etre qui se révèle à sa raison comme le puissant auteur de l'univers.

Ainsi conduit par son humeur chagrine, à ne voir dans l'établissement de la famille qu'un incident fortuit, un jeu grossier du hasard, JeanJacques ne pouvait guère faire grâce à la propriété qui en est la consé

quence et le corollaire obligé. Ce n'est pas tant, en effet, pour en jouir de leur vivant, que pour la transmette à leur mort à des enfants chéris, que des parents cultivent une acquisition foncière, l'exploitent et la fertilisent. C'est donc bien moins du droit de premier occupant, que des sueurs qui l'ont fécondée et améliorée, que la propriété tire sa légitimité et reçoit sa consécration. Mais résultat nécessaire de la famille, elle devient, à son tour, la cause occasionnelle du hameau, de la bourgade, 'de la cité, par suite des groupes successifs attirés vers un terrain recommandé à leur confiance par le choix des premiers colons et par l'espoir d'échanges et de communications faciles.

Bien qu'appuyée sur ces deux fortes ancres de sauvetage, la famille et la propriété, il fallait à la société de plus en plus nombreuse et compacte, des lois civiles et religieuses, civiles pour sa sûreté, religieuses pour les aspirations de son cœur.

Cette aspiration religieuse, particulière à l'homme, suffirait à elle seule, au jugement de Cicéron, pour établir une barrière infranchissable entre lui et la brute, la brute réduite à l'instinct, soumise à la fatalité, marchant en aveugle et passivement dans la voie qui lui a été tracée; - comme telle, affranchie de toute obligation morale; l'homme doué de raison, de libre arbitre, et dès lors responsable de ses actes, astreint à des règles, des devoirs, des lois.

Ces lois imposées à lui seul, parce que seul il peut s'en rendre compte, accusent une origine diverse et des caractères variés.

La première en âge, ainsi qu'en importance, est la loi dite naturelle ou divine, celle gravée au fond de la conscience par le législateur suprême, en caractères ineffaçables, antérieure et supérieure à tous les codes écrits et promulgués de la main et par l'organe des hommes, à laquelle ni arrêt, ni décret, ni plébiscite, ni sénatus-consulte ne sauraient nous soustraire; la même, disait de son temps l'orateur philophe déjà cité, la mème à Athènes qu'à Rome; la même, pouvons-nous répéter de notre temps, à Paris qu'à Constantinople, en-deçà qu'au-delà des Pyrénées, des Alpes, de la Manche ou du Danube. Mais, ainsi de tous les temps et de tous lieux, on conçoit qu'elle a dû se renfermer dans le cercle restreint des généralités.

Pour l'interpréter, l'appliquer et la développer, sont intervenues les lois dites positives, à la condition de la prendre pour paradigme, exemplaire et modèle, sous peine de faillir à leur mission.

Entre la loi souche et principe et les lois subséquentes explicatives, se dessine immédiatement la différence qui les distingue. L'une immuable, imprescriptible, irrévocable, les autres essentiellement mobiles et changeantes, tenues qu'elles sont de se prêter aux progrès de la civilisation et de subir l'empire des circonstances, qui viennent quelquefois introduire une modifieation profonde dans les intérêts où les dispositions d'un peuple.

Il est cependant un point où toutes les lois positives se rencontrent, où toutes se montrent d'accord: la persuasion où elles eroient être qu'elles sont dispensées d'imposer de force l'exercice des droits, trop portés déjà à s'exagérer dans chacun, corps ou individus, et qu'il ne leur reste qu'à bien définir, qu'à tracer, en traits clairs et nets, la ligne sévère des devoirs, sévérité relative et contenue, sévérité qui, pour deve

« PreviousContinue »