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mêmes. Il est vrai que, comme ces Maximes sont remplies de ces sortes de vérités dont l'orgueil humain ne se peut accommoder, il est presque impossible qu'il ne se soulève contre elles, et qu'elles ne s'attirent des censeurs. Aussi, est-ce pour eux que je mets ici une Lettre que l'on m'a donnée, qui a été faite depuis que le manuscrit a paru, et dans le temps que chacun se mêloit d'en dire son avis; elle m'a semblé assez propre pour répondre aux principales difficultés que l'on peut opposer aux Réflexions, et pour expliquer les sentiments de leur auteur: elle suffit pour faire voir que ce qu'elles contiennent n'est autre chose que l'abrégé d'une morale conforme aux pensées de plusieurs Pères de l'Église, et que celui qui les a écrites a eu beaucoup de raison de croire qu'il ne pouvoit s'égarer en suivant de si bons guides, et qu'il lui étoit permis de parler de l'homme comme les Pères en ont parlé; mais si le respect qui leur est dû n'est pas capable de retenir le chagrin des critiques, s'ils ne font point de scrupule de condamner l'opinion de ces grands hommes en condamnant ce livre, je prie le lecteur de ne les pas imiter, de ne laisser point entraîner son esprit au premier mouvement de son cœur, et de donner ordre, s'il est pos

sible, que l'amour-propre ne se mêle point dans le jugement qu'il en fera; car s'il le consulte, il ne faut pas s'attendre qu'il puisse être favorable à ces Maximes; comme elles traitent l'amour-propre de corrupteur de la raison, il ne manquera pas de prévenir l'esprit contre elles. Il faut donc prendre garde que cette prévention ne les justifie, et se persuader qu'il n'y a rien de plus propre à établir la vérité de ces Réflexions que la chaleur et la subtilité que l'on témoignera pour les combattre. En effet, il sera difficile de faire croire à tout homme de bon sens, que l'on les condamne par d'autre motif que par celui de l'intérêt caché, de l'orgueil et de l'amour-propre. En un mot, le meilleur parti que le lecteur ait à prendre, est de se mettre d'abord dans l'esprit, qu'il n'y a aucune de ces Maximes qui le regarde en particulier, et qu'il en est seul excepté, bien qu'elles paroissent générales. Après cela, je lui réponds qu'il sera le premier à y souscrire, et qu'il croira qu'elles font encore grâce au cœur humain. Voilà ce que j'avois à dire sur cet écrit en général : pour ce qui est de la méthode que l'on y eût pu observer, je crois qu'il eût été à désirer que chaque Maxime eût eu un titre du sujet qu'elle traite, et qu'elles eussent été mises dans

un plus grand ordre; mais je ne l'ai pu faire sans renverser entièrement celui de la copie qu'on m'a donnée; et comme il y a plusieurs Maximes sur une même matière, ceux à qui j'en ai demandé avis, ont jugé qu'il étoit plus expédient de faire une Table à laquelle on aura recours pour trouver celles qui traitent d'une même chose.

AVIS AU LECTEUR,

DE L'ÉDITION DE 1666.

MON CHER LECTEUR,

Voici une seconde édition des Réflexions morales que vous trouverez sans doute plus correcte et plus exacte en toutes façons que n'a été la première. Ainsi, vous pouvez maintenant en faire tel jugement que vous voudrez sans que je me mette en peine de tâcher à vous prévenir en leur faveur, puisque si elles sont telles que je le crois, on ne pourroit leur faire plus de tort que de se persuader qu'elles eussent besoin d'apologie. Je me contenterai de vous avertir de deux choses : l'une, que par le mot d'intérêt, on n'entend pas toujours un intérêt de bien, mais le plus souvent un intérêt d'honneur ou de gloire; et l'autre, qui est la principale et comme le fondement de toutes ces Réflexions, est que celui qui les a faites n'a considéré les hommes que dans cet état déplorable de la nature corrompue par le péché ; et qu'ainsi la manière dont

il parle de ce nombre infini de défauts qui se rencontrent dans leurs vertus apparentes, ne regarde point ceux que Dieu en préserve par une grâce particulière.

Pour ce qui est de l'ordre de ces Réflexions, vous n'aurez pas peine à juger, mon cher lecteur, que comme elles sont toutes sur des matières différentes, il étoit difficile d'y en observer. Et bien qu'il y en ait plusieurs sur un même sujet, on n'a pas cru les devoir mettre de suite, de crainte d'ennuyer le lecteur; mais on les trouvera dans la Table.

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