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envoyant un Dieu Sauveur. Il peint en→ fuite l'établiffement de l'Eglife & la propagation de la Foi. Il y a dans ce morceau des coups de maître, qui ont mérité l'éloge des plus célebres Poëtes de nos jours.

Aux Humains, qu'entraînoit leur pente déréglée,
Que fervoit la raifon par le crime aveuglée ?
Pour trouver à leurs maux un remede vainqueur,
Il falloit pénétrer dans les fources du cœur,
Détromper des faux bien leur espérance avide,
Propofer à leurs vœux un bonheur plus folide,
Et réglant leurs defirs par leur propre intérêt,
Pour les porter à Dieu, leur montrer ce qu'il eft.
Ce Dieu, dont l'univers avoit perdu l'idée,
D'un rayon de fa grace éclaira la Judée.
Aux Hébreux, que choifit fon amour paternel,
Il apprit que lui feul étoit l'Être éternel,
Qui difpofe à fon gré des vents & du tonnerre,
Dont la main fur le vuide a fufpendu la Terre,
Ouvre aux traits de l'aurore un chemin dans les

airs,

Et foutient la barriere où fe brifent les mers. C'étoit peu que lui-même annonçât fon effence: Son bras, aux yeux des Juifs, confirma fa puiffance.

Il ont vu la Nature attentive à fes loix,

En lui de fon Auteur reconnoître la voix,

Le Soleil par fon ordre interrompre fa course,
Le Jourdain étonné remonter vers fa fource,
Des Monts, à fon afpect, la bafe s'ébranler,
Les Mers fe divifant, devant lui reculer.
Mais en vain, pour fonder la foi de fes Oracles,
Il s'explique à leurs yeux par la voix des mira-
cles :

Les prodiges divers qu'il produit chaque jour,
N'ont pu graver en eux la loi de fon amour.
Dans l'efprit effréné de ce peuple indomptable
La vérité s'éclipfe, & fait place à la fable:
De fes veux criminels il ne porte l'ardeur
Qu'à des Dieux qui font nés du penchant de fon

cœur.

Ainfi des Nations triomphent les preftiges. Grand Dieu! de ta juftice il n'eft plus de veftiges.

Qu'attends-tu pour punir ces forfaits éclatans? Leur cri jufqu'à ton Trône eft monté dès longtemps.

Dans un trop long fommeil ta juftice repofe. Leve-toi, Dieu vengeur, & viens juger ta caufe. De ton glaive enflammé fais fortir ces éclairs ¦Qui pénetrent les Cieux & percent les Enfers. Prens ces traits préparés pour le jour de la guerre: Sur les aîles des vents fais voler ton tonnerre, Et qu'un noir tourbillon, dans les airs déployé, Difperfe les débris du monde foudroyé.

Mais, grand Dieu! pour jamais perdras-tu ton ouvrage ?

Non: tu dois dans nos cœurs réparer ton image. Hélas! quand viendra donc l'inftant, l'heureux inftant,

Où naîtra le Sauveur que l'Univers attend !
Réforme la nature à ton culte opposée :
Commande que les Cieux répandent leur rofée.
De tes dons fur la Terre épuise la faveur,
Et qu'un germe immortel enfante le Seigneur....
Enfin va s'accomplir l'augufte Sacrifice
Qui doit du Tout-puissant désarmer la justice,
Et de l'être infini venger la Majefté,
Par un hommage égal à fon immenfité. -
De l'homme criminel quel fang lave l'injure?
La victime en mourant confterne la nature,
Le Ciel pâlit d'effroi, le Soleil est voilé,
Les tombeaux font ouverts, le monde est ébranlé.
Des deffeins du Très-haut quels nouveaux inter-
prétes

Lévent le voile obfcur qui couvroit lesProphetes!
Leurs difcours font fuivis de prodiges fréquens :
Sans étude profonds, fans génie éloquens,
Ils confondent les loix de la fageffe humaine :
L'Enfer s'émeut & tremble à leur voix fouve-
raine.

Quel étonnant projet à leurs foins eft commis?
Le Ciel veut que par eux l'Univers foit foumis...

En vain, pour renverfer ce merveilleux ouvrage,
Les Enfers déchaînés ont déployé leur rage:
La Foi dans les tourmens fonde un régne plus
fûr,

Et répand un éclat plus brillant & plus pur.
Des douleurs de la mort victime triomphante,
Du fang de fes Martyrs l'Eglife fe cimente:
Pour les fuivre au féjour de l'éternel repos,
De leurs cendres renaît un Peuple de Héros.
Telle eft, conftante Foi, ta puiffance divine:
Lorfque l'homme a connu fon augufte origine,
Etranger fur la Terre & Citoyen des Cieux,
Sur des biens paffagers il n'ouvre plus les yeux;
Pour lui, les faux plaifirs ne font plus qu'un fan-
tôme

Les fiecles un inftant, l'Univers un atôme,
Les grandeurs un éclair, qui s'efface en paiffant.
Dieu fe montre,tout rentre en fon premier néant,
Affelin.

Sur le Jugement dernier.

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Un point auffi effentiel de la Foi Chrétienne, que celui du Jugement dernier a paru digne aux Poëtes d'être revêtu des couleurs de la Poéfie. Lorfqu'ils ont travaillé à nous en faire la peinture, on doit croire qu'ils ont eu pour but de jetter un falutaire effroi dans le cœur des Chrétiens, & de leur donner lieu de penfer à un évé

nement qui fera la décision de leur bonheur ou de leur malheur éternel. On fait que les Prophétes appellent ce jour, le jour de colere & de vengeance, & qu'ils employent pour le dépeindre les expreffions les plus fortes & les plus capables d'infpirer la terreur (a). La peinture qu'en ont fait plufieurs Poëtes, eft affez vive pour frapper les efprits, fil'on veut y faire

attention.

Déja je crois le voir, j'en frémis par avance, Ce jour de châtiment comme de récompense. Déja j'entends des Mers mugir les flots troublés Déja je vois pâlir les Aftres ébranlés. Viento. Le feu vengeur s'allume, & le fon des trompettes

Va réveiller les Morts dans leurs fombres retraites.

Ce jour eft le dernier des jours de l'Univers. Dieu cite devant lui tous les Peuples, divers; Et pour en féparer les Saints, fon héritage, De fa Religion vient confommer l'ouvrage.

(a) Juxtà eft dies Domini magnus... Vox dici Domini amara... Dies tribulationis & anguftia..... In igne zeli ejus devorabitur omnis Terra. Sophon. I... Antequam veniat dies Domini magnus & horribilis. Joël. 2... Ecce dies venit fuccenfa quafi caminus, & erunt omnes fuperbi & omnes facientes impietatem, stipula. Malac. 4.

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