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Heureusement une circonstance vint favoriser son retour au Canada.

L'intendant Talon demandait au roi d'expédier dans la colonie, non pour faire la guerre, mais pour s'y établir, six nouvelles compagnies. Elles furent levées par les officiers qui étaient rentrés en France avec M. de Salières, et qui, comme Laubia, n'avaient pas tardé à le regretter. C'étaient les capitaines Laubia, Chambly, La Durantaye, Berthier, Grandfontaine et Perrot. De ces six compagnies, l'une, celle de M. de Grandfontaine fut détachée en Acadie. Il restait deux cent cinquante hommes pour le Canada. Dès la même année, 1670, ils étaient tous établis (1) dans l'étendue de la seigneurie de leur capitaine (2).

Nous aurions donc cinquante soldats qui se seraient établis dans la seigneurie de Laubia (Nicolet), dès 1670, et se seraient joints aux quelques jeunes gens des TroisRivières, qui les y avaient précédés. (3)

(1) Salone. La colonisation de la N. F. p. 167 et 190.

(2) "Je suis bien aise que tous les soldats qui ont passé l'année dernière. . . . . se sont habitués dans l'étendue de la seigneurie de leur capitaine." Le roi à Courcelles, 11 mars 1671. Arch. col. du Canada, reg. de 1671, fol. 36.

(3) Le 29 octobre 1669, M. de Laubia consentait à revenir dans la Nouvelle-France. Il s'engageait à mettre sa compagnie sur le pied de cinquante hommes et à fournir la subsistance de ses hommes jusqu'à leur embarquement moyennant 1000 écus.-P. G. Roy, Bulletin des Recherches Historiques, fév. 1921, p. 63.

APPENDICE AU CHAPITRE II.

Soldats de Laubia restés au Canada en 1668.

Nous devons à l'obligeance de M. l'abbé Az. Couillard-Després la liste suivante des soldats de la compagnie de Laubia, qui sont restés au Canada en 1668. Elle est tirée d'une liste générale ayant pour titre: "Rolle des soldats du régiment de Carignan-Salières qui se sont faits habitants de Canada en 1668". Il s'agit évidemment de la première compagnie amenée en 1665 par le capitaine Laubia. Elle contient plutôt les surnoms que les vrais noms de familles et ne donne point les noms de baptême, ce qui rend l'identification plus difficile. Autant qu'il est possible d'en juger, trois ou quatre seulement de ces soldats se sont établis à Nicolet avec Moras. Nous ne voyons les autres figurer nulle part dans les actes du temps concernant Nicolet. Voici cette liste:

Le sieur de Varennes, lieutenant,

Le sieur de Moras, enseigne,

La Badie, sergent,

La Roze, sergent,

La Montagne, La Rigueur, Le Parisien, Le Dragon, Le Solaye, La Fontaine, (1) La Violette, (2) Le Petit la fontaine, La Jeunesse, La Tour, Audoin, La Marche, Sansoucy, Desbarreaux, (3) du Boulay, des Marchets, (4) La Roye, Le Boulanger, La Rosée, La Pensée, La Fleur, Montanbau, du Marché.

(1) Peut-être Jean Joubert dit Desfontaines, établi d'abord à Manereuil (Rivière-du-Loup).

(2) Probablement Elie Prévost dit la Violette.

(3) Probablement Mariat Despigerault dit Desbarreaux.
(4) François Arnould dit des Marchés.

***

CHAPITRE III.

PREMIER ESSAI DE COLONISATION.—1668-1673.

(Suite)

SOMMAIRE.-1. Laubia revient en Canada et s'établit à Nicolet à côté de Moras, avec cinquante colons.-2. Schisme seigneurial, Laubia a gain de cause.-3. Campagne de 1671.-4. Départ de Laubia.-5. Désertion des colons.-Appendice.-1. Premiers habitants de Nicolet.-2. L'ancêtre Joseph Petit dit Bruneau.

1. A son retour, Laubia trouva Pierre Mouet en frais de s'établir sur l'île Moras, et se considérant déjà comme seigneur de Nicolet. Prévoyant la compétition que lui susciterait l'arrivée de son capitaine, Mouet s'empressa de faire acte de possession de la seigneurie, en donnant des actes de concession. Le plus ancien de ces actes connu est daté du 27 novembre 1669 (1), est écrit sur beau parchemin, et accordé à trois jeunes gens de Trois-Rivières, Jean Pepin, Jacques Pepin et Bernard de Castolay. Sur cet acte, il donne à la rivière Nicolet, le nom de rivière Moëtte.

Que valait cette concession? Elle était nulle de plein droit, comme il fut prouvé devant le comte de Frontenac, le 27 août 1678.

Laubia parait s'être établi quand même à Nicolet, qu'il appellera à son tour, rivière Laubia, s'y bâtit un manoir en 1670 et vint y résider avec sa compagnie. Dès

(1) Un autre acte de concession à Frs. Arnould dit Desmarchés est daté du 18 mai 1670. Laubia échange ce terrain pour deux autres arpents.-Autre concession le même jour à Marguerite Ayet, femme du Sieur Desgroseilliers.

leur arrivée au printemps 1670, les soldats, sous la direction des charpentiers qu'ils amenaient avec eux, levèrent des chantiers provisoires. Ils apportaient d'ailleurs des vivres et autres objets de première nécessité, hardes, instruments de travail, subsistance de deux années (1).

Laubia s'empressa de dresser un plan de concession des lots qu'il distribua aux nouveaux colons. En en prenant possession ces derniers s'obligeaient à abattre et mettre en culture, dès la première année, au moins deux arpents de terre, et d'y bâtir une petite maison (2). A l'automne 1670, ils étaient déjà tous établis, et l'année suivante, un bon nombre d'entre eux se mariaient avec des filles venues de France. Les actes de l'état civil mentionnent un mariage en 1670 et huit en 1671. Voir à l'appendice de ce chapitre l'article "Premiers habitants de Nicolet." (3)

2. La présence simultanée à Nicolet de deux seigneurs prétendant à la même seigneurie, fut une cause de malaise pour la petite colonie naissante. Il en résulta deux groupes distincts de colons soumis à une censive différente, l'un comprenant les jeunes gens des TroisRivières, qui avaient accompagné ou précédé le seigneur

(1) E. Salone, p. 174. Aide aux soldats.

(2) E. Salone, p. 175.

(3) Laubia n'a donné aucun titre légal de concession à ses censitaires, sans doute parce qu'il n'en avait pas le pouvoir. L'octroi légal de la seigneurie de Nicolet ne lui a été accordé qu'à l'automne 1672, au moment de son départ pour la France, d'où il n'est jamais revenu. "Il est probable, dit M. P. G. Roy, (Bulletin des Recherches Historiques, Fév. 1921) que M. Talon lui avait d'abord donné un billet de concession et que son titre du 29 octobre 1672 n'était que la confirmation officielle de ce billet ou de cette permission antérieure"Pierre Mouet prétendait avoir un pareil permis.

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