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SCÈNES II, III, VII ET VIII DE L'ACTE IV

SCÈNE II

LA VIOLETTE.

Monsieur, voilà votre marchand, M. Dimanche, qui demande à vous parler.

SGANARELLE.

Bon. Voilà ce qu'il nous faut, qu'un compliment de créancier. De quoi s'avise-t-il de nous venir demander de l'argent; et que ne lui disois-tu que Monsieur n'y est pas?

LA VIOLETTE.

Il y a trois quarts d'heure que je le lui dis; mais il ne veut pas le croire, et s'est assis là dedans pour attendre.

SGANARELLE.

Qu'il attende tant qu'il voudra.

DON JUAN.

Non, au contraire, faites-le entrer. C'est une fort mauvaise politique que de se faire celer aux créanciers. Il est bon de les payer

de quelque chose, et j'ai le secret de les renvoyer satisfaits sans leur donner un double.

SCÈNE III

DON JUAN.

Ah! Monsieur Dimanche, approchez. Que je suis ravi de vous voir, et que je veux de mal à mes gens de ne vous pas faire entrer d'abord! J'avois donné ordre qu'on ne me fit parler personne; mais cet ordre n'est pas pour vous, et vous êtes en droit de ne trouver jamais de porte fermée chez moi.

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, je vous suis fort obligé.

DON JUAN, parlant à la Violette et à Ragotin. Parbleu! coquins, je vous apprendrai à laisser M. Dimanche dans une antichambre, et je vous ferai connoître les gens.

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, cela n'est rien.

DON JUAN, à M. Dimanche.

Comment? vous dire que je n'y suis pas, à M. Dimanche, au meilleur de mes amis?

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, je suis votre serviteur. J'étois venu........

DON JUAN.

Allons vite, un siège pour M. Dimanche.

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, je suis bien comme cela.

DON JUAN.

Point, point, je veux que vous soyez assis contre moi.

MONSIEUR DIMANCHE.

Cela n'est point nécessaire.

DON JUAN.

Otez ce pliant, et apportez un fauteuil.

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, vous vous moquez, et....

DON JUAN.

Non, non, je sais ce que je vous dois; et je ne veux point qu'on mette de différence entre nous deux.

Monsieur....

MONSIEUR DIMANCHE.

DON JUAN.

Allons, asseyez-vous.

MONSIEUR DIMANCHE.

Il n'est pas besoin, Monsieur, et je n'ai qu'un mot à vous dire. J'étois....

DON JUAN.

Mettez-vous là, vous dis-je.

MONSIEUR DIMANCHE.

Non, Monsieur, je suis bien. Je viens pour....

DON JUAN.

Non, je ne vous écoute point si vous n'êtes assis

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, je fais ce que vous voulez. Je....

DON JUAN.

Parbleu! Monsieur Dimanche, vous vous portez bien.

MONSIEUR DIMANCHE.

Oui, Monsieur, pour vous rendre service. Je suis venu....

DON JUAN.

Vous avez un fonds de santé admirable, des lèvres fraîches, un teint vermeil, et des yeux vifs.

MONSIEUR DIMANCHE.

Je voudrois bien....

DON JUAN.

Comment se porte Madame Dimanche, votre épouse?

MONSIEUR DIMANCHE.

Fort bien, Monsieur, Dieu merci.

DON JUAN.

C'est une brave femme.

MONSIEUR DIMANCHE.

Elle est votre servante, Monsieur. Je venois....

DON JUAN.

Et votre petite fille Claudine, comment se porte-t-elle ?

MONSIEUR DIMANCHE.

Le mieux du monde.

DON JUAN.

La jolie petite fille que c'est! Je l'aime de tout mon cœur.

MONSIEUR DIMANCHE.

C'est trop d'honneur que vous lui faites, Monsieur. Je vous....

DON JUAN.

Et le petit Colin, fait-il toujours bien du bruit avec son tambour?

MONSIEUR DIMANCHE.

Toujours de même, Monsieur. Je........

DON JUAN.

Et votre petit chien Brusquet? gronde-t-il toujours aussi fort, et mord-il toujours bien aux jambes les gens qui vont chez vous?

MONSIEUR DIMANCHE.

Plus que jamais, Monsieur, et nous ne saurions en chevir.

DON JUAN.

Ne vous étonnez pas si je m'informe des nouvelles de toute la famille, car j'y prends beaucoup d'intérêt.

MONSIEUR DIMANCHE.

Nous vous sommes, Monsieur, infiniment obligés. Je....
DON JUAN, lui tendant la main.

Touchez donc là, Monsieur Dimanche. Ètes-vous bien de mes amis?

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, je suis votre serviteur.

DON JUAN.

Parbleu, je suis à vous de tout mon cœur.

MONSIEUR DIMANCHE.

Vous m'honorez trop. Je.....

DON JUAN.

Il n'y a rien que je ne fisse pour vous.

MONSIEUR DIMANCHE.

Monsieur, vous avez trop de bonté pour moi.

DON JUAN.

Et cela sans intérêt, je vous prie de le croire.

MONSIEUR DIMANCHE.

Je n'ai point mérité cette grâce assurément. Mais, Monsieur....

DON JUAN.

Oh çà, Monsieur Dimanche, sans façon, voulez-vous souper avec moi?

MONSIEUR DIMANCHE.

Non, Monsieur, il faut que je m'en retourne tout à l'heure. Je........ DON JUAN, se levant.

Allons, vite un flambeau pour conduire M. Dimanche, et que quatre ou cinq de mes gens prennent des mousquetons pour l'es

corter.

MONSIEUR DIMANCHE, se levant aussi.

Monsieur, il n'est pas nécessaire, et je m'en irai bien tout seul. Mais....

(Sganarelie ôte les sièges promptement.)

DON JUAN.

Comment? Je veux qu'on vous escorte, et je m'intéresse trop à votre personne. Je suis votre serviteur, et, de plus, votre débiteur.

Ah! Monsieur....

MONSIEUR DIMANCHE.

DON JUAN.

C'est une chose que je ne cache pas, et je le dis à tout le monde.

Si....

MONSIEUR DIMANCHE.

DON JUAN.

Voulez-vous que je vous reconduise?

MONSIEUR DIMANCHE.

Ah! Monsieur, vous vous moquez! Monsieur....

DON JUAN.

Embrassez-moi donc, s'il vous plaît. Je vous prie encore une fois d'être persuadé que je suis tout à vous, et qu'il n'y a rien au monde que je ne fisse pour votre service. (Il sort.)

SGANARELLE.

Il faut avouer que vous avez en Monsieur un homme qui vous aime bien.

MONSIEUR DIMANCHE.

Il est vrai; il me fait tant de civilités et tant de compliments, que je ne saurois jamais lui demander de l'argent.

SGANARELLE.

Je vous assure que toute sa maison périroit pour vous; et je voudrois qu'il vous arrivât quelque chose, que quelqu'un s'avisât de vous donner des coups de bâton : vous verriez de quelle manière..........

MONSIEUR DIMANCHE.

Je le crois; mais, Sganarelle, je vous prie de lui dire un petit mot de mon argent.

SGANARELLE.

Oh! ne vous mettez pas en peine, il vous payera le mieux du monde.

MONSIEUR DIMANCHE.

Mais vous, Sganarelle, vous me devez quelque chose en votre particulier.

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