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notre temps, c'est à-dire, jufques vers l'an de Jefus Chrift 400. On jette dans le lac des préfens pour la Déeffe: il n'importe de quelle efpèce ils foient. Si elle les reçoit, ils vont au fond; fi elle ne les reçoit pas, ils furnagent, fût-ce de l'argent ou de l'or. L'année qui précéda la ruine des Palmireniens, leurs préfens allèrent au fond, mais l'année fuivante tout furnageà.

(1) Licinius ayant deffein de recommencer la guerre contre Conftantin confulta l'Oracle d'Apollon de Didyme, & en eut pour réponse deux Vers d'Homère, dont le fens eft: Malheureux vieillard, ce n'eft point à toi à combattre contre les jeunes gens; tu n'as point de forces, & ton age t'accable.

(2) Un Dieu affez inconnu, nommé Befa, rendoit encore des Oracles fur des billets, à Abide, dans l'extrémité de la Thébaïde, fous l'Empire de Conftantius; car on envoya à cet Empereur des billets qui avoient été laiffés dans le Temple de Befa, fur lefquels il commença à faire des informations très

(1) Sozomène.

(2) Ammian Marcellin.

A

rigoureuses, & jetta dans les prisons, ou envoya en exil, ou fit tourmenter cruellement un affez grand nombre de perfonnes. C'eft que par ces billets on confultoit le Dieu fur la deftinée de l'Empire, ou fur la durée que devoit avoir le règne de Conftantius, ou méme fur le fuccès de quelque deffein que l'on formoit contre lui.

Enfin Macrobe, qui vivoit fous Arcadius & Honorius, fils de Théodose, parle du Dieu d'Heliopolis de Syrie & de fon Oracle, & des fortunes d'Antium, en des termes qui marquent politivement que tout cela fubfiftoit encore de fon temps.

Remarquez qu'il n'importe pour notre deffein que toutes ces hiftoires foient vraies, ni que ces Oracles aient effectivement rendu les réponses qu'on leur attribue. On n'a pu attribuer de fauffes réponfes qu'à des Oracles que l'on favoit qui fubfiftoient encore effectivement; & les hiftoires que tant d'Auteursen ont débitées, prouvent du moins que l'on ne croyoit pas qu'ils euffent ceffé,

CHAPITRE IV.

Ceffation générale des Oracles avec celle du Paganifme.

EN

N général les Oracles n'ont ceffé qu'avec le Paganisme, & le Paganisme ne ceffa pas à la venue de Jefus-Chrift.

Conftantin abattit peu de Temples, encore n'ofa-t-il les abattre qu'en prenant le prétexte des crimes qui s'y commettoient. C'eft ainsi qu'il fit renverser celui de Vénus (1) Aphacite, & celui d'Esculape qui étoit à (2) Eges en Cilicie, tous deux Temples à Oracles. Mais il défendit (3) que l'on facrifiât aux Dieux, & commença à rendre par cet Edit les Temples inutiles.

On trouve des Edits de Conftantius & de Julien, alors Céfars, par lesquels toute divination eft défendue fur peine de la vie, non-feulement celle des Aftrologues, & des Interprètes des

(1) Zogime. (2) Eufebe, vie de Conftantins (3) Theodoret.

fonges, & des Magiciens, mais auffi celle des Augures & des Arufpices, ce qui donnoit une grande atteinte à la Religion des Romains. Il eft vrai que les Empereurs avoient un intérêt particulier à défendre toutes les divinations, parce qu'on ne faifoit autre chofe que s'enquérir de leur deftinée, & principalement des fucceffeurs qu'ils devoient avoir; & tel fe révoltoit & prétendoit à l'Empire, pour avoir été flatté par un Devin.

Nous avons vu qu'il reftoit encore beaucoup d'Oracles, lorfque Julien fe vit Empereur; mais de ceux qui étoient ruinés, il s'appliqua à en rétablir le plus qu'il put. Celui du fauxbourg de Daphné, par exemple, avoit été détruit par Adrien, qui (1), pendant qu'il étoit encore particulier, ayant crempé une feuille dans la fontaine Caftalienne (car il y en avoit une de ce nom à Daphné auffi-bien qu'à Delphes), avoit trouvé fur cette feuille, en la retirant de l'eau, l'hiftoire de ce qui lui devoit arriver, & des avis de fonger à l'Empire. Il craignoit, quand il fut Empe

(1) Sozomène.

reur, que cet Oracle ne donnât le même confeil à quelqu'autre, & il fit jetter dans la fontaine facrée une grande quantité de pierres dont on la boucha. Il y avoit beaucoup d'ingratitude dans ce procédé : mais Julien (1) rouvrit la fontaine ; il fit ôter d'alentour les corps qui y étoient enterrés, & purifia le lieu de la même manière dont les Athéniens avoient autrefois purifié l'ifle de Délos.

Julien fit plus; il voulut être Prophète de l'Oracle de Didyme. C'étoit le moyen de remettre en honneur la Pro phétie qui n'étoit plus guère eftimée. It étoit Souverain Pontife, puifqu'il étoit Empereur; mais les Empereurs n'avoient pas coutume de faire grand ufage de cette dignité Sacerdotale. Pour lui, il prit la chofe bien plus férieufement; & nous voyons dans une de fes lettres qui font venues jufqu'à nous qu'en qualité de Souverain Pontife, il défend à un Prêtre Payen de faire pendant trois mois aucune fonction de Prê tre. La lettre qu'il écrivit à Arface. Pontife de la Galatie, nous apprend de

(1) Ammian Marcellin.

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