Page images
PDF
EPUB

ceux dont il ouvrage n'est

derniers sont, à mon sens, doit être le plus fier. Un point encore éprouvé quand il triomphe des censures de Visé et de Subligny; mais sa gloire est complète quand il résiste aux dégoûts de Sévigné et aux épigrammes de Fontenelle.

Il ne m'appartient point de marquer le rang de cet ouvrage; mais des hommes dont je respecte l'autorité pensent que le Génie du Christianisme est une production d'un caractère original que ses beautés feront vivre, un monument à jamais honorable pour la main qui l'éleva, et pour commencement du dix-neuvième siècle qui

l'a vu naître.

FONTANES.

le

SUR LES NOUVELLES ÉDITIONS

DU GENIE DU CHRISTIANISME,

PAR M. GUÉNEAU.

(Mercure de France, du 4 thermidor an x1, 23 juillet 1803.)

UN homme célèbre a dit du Génie du Christianisme que « le plus mince littérateur en corrigerait aisément les défauts, et que les plus grands écrivains en atteindraient difficilement les beautés1. » Ce jugement explique assez bien la fortune de cet ouvrage depuis qu'il a paru; l'admiration et l'enthousiasme qu'il a excités, les critiques de détail et les plaisanteries qu'il a essuyées, et le zèle également actif des admirateurs et des détracteurs. Au milieu

1. M. Necker.

de cette controverse, qui continue toujours pendant que les éditions se multiplient, s'il y a quelque chose de parfaitement prouvé et hors de toute discussion, c'est le succès de l'ouvrage; et il semble, au premier abord, qu'il devait dispenser l'auteur d'en écrire la défense.

Il avait suffisamment répondu aux critiques de détail, par les heureux changements qui rendent cette édition si supérieure aux précédentes; il ne devait point répondre aux plaisanteries, car les plaisanteries et les grandes pensées sont dans deux mondes différents, et ne se rencontrent jamais.

Mais l'auteur du Génie du Christianisme ambitionnait une autre gloire que celle du talent; et lorsqu'il l'a obtenue, lorsqu'à l'aide de tableaux pleins de charme et de grandeur, il a ménagé une heureuse réconciliation entre l'opinion publique et les vérités utiles; lorsque ces vérités, qui étaient hardies au moment où elles furent rappelées, sont aujourd'hui reconnues et

VII.

10

respectées de tous les bons esprits, alors, si des hommes également ennemis des lettres et de la société, veulent ternir cette gloire innocente; s'ils emploient contre l'auteur les mêmes moyens qu'ils ont de tout temps employés contre le christianisme; s'ils affectent de se méprendre sur ses véritables intentions, et que la critique dégénère en calomnie, son devoir l'oblige de la repousser; sa réputation devient inséparable de la cause qu'il défend.

Telle doit être l'unique défense, tel est aussi l'unique objet de celle qui accompagne les nouvelles éditions du Génie du Christianisme: on n'y trouve point le ton de la plupart des critiques littéraires, où l'envie est aux prises avec l'amour-propre; et sans doute on saura gré à M. de Châteaubriand d'avoir renouvelé l'exemple de ces discussions franches et polies, qui font assez d'honneur aux juges que l'on s'est choisis, pour supposer qu'ils s'intéressent à la vérité.

C'est avec le ridicule et la malveillance

qu'on l'attaque; c'est avec la simplicité et la modération qu'il se défend, mais aussi avec les armes d'une logique sévère et pressante, une sagesse de style, et même une sobriété d'imagination, qui, de la part de l'auteur du Génie du Christianisme, est une grande preuve de désintéressement.

On voit donc qu'il adresse cette défense aux lecteurs de bonne foi, et c'est dire assez qu'elle ne persuadera point le plus grand nombre des détracteurs de son ouvrage. Après tout, ce n'est pas un si grand malheur, puisque l'on doit plutôt se prévaloir de leurs critiques que les réfuter. Si l'on entre dans le fond de ces critiques, on ne peut s'empêcher de voir qu'elles sont plutôt dirigées contre le succès que contre l'ouvrage lui-même : il aurait fallu, pour contenter ces amis sévères de la vérité, que l'auteur eût écrit précisément de manière à n'être point lu; qu'il se fût resserré dans les formes de la scolastique et de la théologie, mais surtout qu'il eût beaucoup déclamé contre l'hérésie et l'incrédulité: on

« PreviousContinue »