FABLE XX. LA DISCORDE. La déesse Discorde ayant brouillé les dieux, Elle et Que-si-que-non son frère, A celui des mortels qui nous sont opposés, Et qui, se mariant sans prêtre et sans notaire, 1. Si La Fontaine introduit des personnages allégoriques de sa façon, c'est toujours en homme simple; c'est Que-si-que-non, frère de la Discorde; c'est Tien-et-mien, son père. (MARMONTEL.) Cette parenté est vue avec une profonde philosophie; elle rappelle la fameuse pensée de Pascal : « Ce chien est à moi, disoient ces pauvres enfants; c'est là ma place au soleil voilà le commencement et l'image de l'usurpation de toute la terre.» Les vers du fabuliste n'en sont qu'une version naïve et mise en action à sa manière. (NODIER.) De la Discorde n'ont que faire. Pour la faire trouver aux lieux où le besoin La Renommée avoit le soin De l'avertir; et l'autre, diligente, Couroit vite aux débats, et prévenoit la Paix; De demeure fixe et certaine ; Bien souvent l'on perdoit, à la chercher, sa peine : Comme il n'étoit alors aucun couvent de filles, L'auberge enfin de l'hyménée Lui fut pour maison assînée. 1 1 1. VAR. Assignée, dans la première édition in-4o de 1668. dans la seconde édition, de 1669, et la troisième édition, de 1678. Assinée, FABLE XXI. LA JEUNE VEUVE. La perte d'un époux ne va point sans soupirs: Entre la veuve d'une année Et la veuve d'une journée La différence est grande : on ne croiroit jamais L'une fait fuir les gens, et l'autre a mille attraits : On le dit; mais il n'en est rien, L'époux d'une jeune beauté : Partoit pour l'autre monde. A ses côtés sa femme La belle avoit un père, homme prudent et sage : 1. VAR. Dans les deux premières éditions on lit fit. Il laissa le torrent couler. A la fin, pour la consoler : Ma fille, lui dit-il, c'est trop verser de larmes : Une condition meilleure Change en des noces ces transports; Mais après certain temps souffrez qu'on vous propose Un époux, beau, bien fait, jeune, et tout autre chose Que le défunt. Ah! dit-elle aussitôt, Un cloître est l'époux qu'il me faut. Le père lui laissa digérer sa disgrâce. L'autre mois on l'emploie à changer tous les jours parure, En attendant d'autres atours. Toute la bande des Amours Revient au colombier; les jeux, les ris, la danse, On se plonge soir et matin Dans la fontaine de Jouvence. Le père ne craint plus ce défunt tant chéri; Que vous m'avez promis? dit-elle. ÉPILOGUE. Bornons ici cette carrière : Les longs ouvrages me font peur. On n'en doit prendre que la fleur.' Il faut contenter son envie. Retournons à Psyché. Damon, vous m'exhortez En sa faveur s'échauffera. Heureux si ce travail est la dernière peine |