C'est ainsi que l'a dit le principal auteur : Un fanfaron, amateur de la chasse, Le berger dit : C'est vers cette montagne. 1 Le fanfaron aussitôt d'esquiver; 1 N'est que dans le danger que l'on touche du doigt: Tel le cherchoit, dit-il, qui, changeant de langage, S'enfuit aussitôt qu'il le voit. 1. Voyez la note de la page 217. 2. VAR. Dans les deux premières éditions: du courage. FABLE III. PHEBUS ET BORÉE. Borée et le Soleil virent un voyageur Qui s'étoit muni par bonheur Contre le mauvais temps. On entroit dans l'automne, Rend ceux qui sortent avertis Qu'en ces mois le manteau leur est fort nécessaire : A tous les accidents; mais il n'a pas prévu Qu'il n'est bouton qui tienne : il faudra, si je veux, L'ébattement pourroit nous en être agréable : A qui plus tôt aura dégarni les épaules Du cavalier que nous voyons. Commencez je vous laisse obscurcir mes rayons. 1. ... Incertis si mensibus amnis abundans Exit... VIRG., Georg., lib. I, v. 115. Il n'en fallut pas plus. Notre souffleur à gage Fait un vacarme de démon, Siffle, souffle, tempête, et brise en son passage 1 Maint toit qui n'en peut mais, fait périr maint bateau : Le cavalier eut soin d'empêcher que l'orage Cela le préserva. Le vent perdit son temps; Il eut beau faire agir le collet et les plis. Qu'à la gageure on avoit mis, Récrée et puis pénètre enfin le cavalier, 2 Sous son balandras fait qu'il sue, Le contraint de s'en dépouiller : Encor n'usa-t-il pas de toute sa puissance. Plus fait douceur que violence. 1. La Fontaine avait vu ce trait dans le Cymbalum mundi de Desperriers. « J'ai peur, dit un des voleurs qui ont dérobé le livre des Destins à Mercure, que si Jupiter trouve son livre perdu, il ne fouldroye et abysme tout ce povre monde ci qui n'en peult mais, pour la punition de nostre forfaict. »> 2. Le balandras ou balandran était le manteau de voyage. Boileau a dit, dans son Discours sur la satire « Le sieur de Provins avoit changé son balandran en manteau court. » FABLE IV. JUPITER ET LE MÉTAYER. Jupiter eut jadis une ferme à donner. Ce ne fut pas sans bien tourner ; L'un alléguoit que l'héritage Étoit frayant et rude, et l'autre un autre si.3 Un d'eux, le plus hardi, mais non pas le plus sage, Le laissât disposer de l'air, Lui donnât saison à sa guise, Qu'il eût du chaud, du froid, du beau temps, de la bise, Enfin, du sec et du mouillé, Aussitôt qu'il auroit bâillé. Jupiter y consent. Contrat passé; notre homme 1. « Le crieur des dieux, c'est Mercure; c'est un de ses cent métiers. » Psyché, liv. II. 2. Occasionnait beaucoup de frais ou de dépense. 3. Un autre si, une autre objection. On dit encore des si et des mais. 4. A commandement, et aussitôt qu'il aurait ouvert la bouche. Si j'explique le sens de cette phrase, c'est que, malgré qu'elle ne paraisse pas présenter de doute, quelques commentateurs, Chamfort entre autres, s'y sont trompés ils ont donné au mot bâiller le sens de passer bail, confondant ainsi le verbe bâiller avec celui de bailler. La Fontaine a, dans les quatre éditions publiées de son vivant, mis baailler, ce qui ne laisse aucun doute sur la véritable leçon elle présente d'ailleurs un sens plus clair, plus français, et surtout plus plaisant. (W.) Tranche du roi des airs, pleut, vente,1 et fait en somme Un climat pour lui seul ses plus proches voisins : Ne s'en sentoient non plus que les Américains. Monsieur le receveur fut très-mal partagé. La température des cieux. Son champ ne s'en trouve pas mieux; Jupiter en usa comme un maître fort doux. Concluons que la Providence Sait ce qu'il nous faut mieux que nous.2 1. Il est clair que chez les peuples où la mythologie attribuait à tous les phénomènes naturels un auteur spécial qui était pris pour eux dans le langage poétique, les verbes pleuvoir, venter, tonner, devenaient susceptibles de subir tous les modes des verbes actifs; et c'est dans cette théorie que La Fontaine s'est transporté, quand il a dit d'un homme qui tranchait du roi des airs: il pleut, il vente. (N.) 2. « Hélas! que nous savons peu ce que nous faisons, quand nous ne laissons pas au ciel le soin des choses qu'il nous faut! »> MOLIÈRE, Festin de Pierre, acte V. sc. vi. |