FABLE VI. LE COMBAT DES RATS ET DES BELETTES. La nation des belettes, Non plus que celle des chats, Si l'on croit la renommée, 1. Étrètes pour étroites, à cause de la rime. Beaucoup d'éditeurs ont eu le tort de changer l'orthographe de ce mot, qui se trouve ainsi écrit dans toutes les éditions données par La Fontaine. (Voyez ci-dessus, p. 171, la fable vu du livre III, qui offre un exemple semblable.) Sa déroute fut entière, Qui, tout couverts de poussière, Les efforts des combattants. Il fallut céder au sort : Ayant chacun un plumail, 2 Des cornes ou des aigrettes, Trou, ni fente, ni crevasse, Ne fut large assez pour eux; Entroit dans les moindres creux. 1. Ces noms sont empruntés ou imites de la Batrachomyomachie, poëme héroï-comique attribué à Homère. Artarpax, voleur de pain; Psicarpax, voleur de miettes; Méridarpax, voleur de morceaux. Artarpax ne figure pas dans Homère. 2. Dans nos anciens auteurs, le mot plumail est presque toujours employé pour désigner des plumets servant d'ornement. Ainsi Rabelais a dit : «M'amie, donnez-leur mes beaulx plumails blancs, avec les pampillettes d'or. » Pantagruel, liv. IV, ch. x. La principale jonchée Fut donc des principaux rats. Une tête empanachée Le trop superbe équipage Peut souvent en un passage Les grands ne le peuvent faire. 1. La Fontaine emploie fréquemment le mot esquiver sans régime. Il dit plus loin, fable 1 du livre VI: Le fanfaron aussitôt d'esquiver. Boileau de même : Je saute vingt ruisseaux, j'esquive, je me pousse. FABLE VII. LE SINGE ET LE DAUPHIN. C'étoit chez les Grecs un usage De notre espèce en son histoire Lui pensa devoir son salut : Un dauphin le prit pour un homme, Et sur son dos le fit asseoir Si gravement qu'on eût cru voir Ce chanteur que tant on renomme.* 1. Plin., Hist. nat., lib. IX, cap. vIII. 2. Arion, qui, menacé par les matelots et contraint de se jeter à la mer, fut sauvé par un dauphin qui l'avait entendu chanter. (Voyez Plin., Hist. nat., lib. IX, cap. vin; Aul. Gell., Noctes atticæ, VII, vi, et XVI, xix, etc.) L'amitié du dauphin pour l'homme était, chez les anciens, un préjugé fondé sur ce que ce cétacé se rencontre dans toutes les mers, qu'il aime à suivre les vaisseaux et que, peut-être, il est, jusqu'à un certain point, susceptible d'être apprivoisé. (W.) Le dauphin l'alloit mettre à bord Quand, par hasard, il lui demande : Oui, dit l'autre; on m'y connoît fort: A l'honneur de votre présence? C'est une vieille connoissance. De telles gens il est beaucoup Le dauphin rit, tourne la tête, Il s'aperçoit qu'il n'a tiré Du fond des eaux rien qu'une bête : 1. Port d'Athènes. |