Page images
PDF
EPUB

:

peu nombreuses, & où quelquefois il y a peu de fang répandu. Qui a donc pa rendre ces guerres si célebres? Salluste nous l'apprend. a Les ex„ ploits des Athéniens, dit-il, peu,, vent être considérés en eux-mêmes , comme grands & magnifiques : on , peut dire pourtant, qu'ils font en „ quelque forte au-dessous de leur ré,, putation. Mais parce qu'il y a eu ;, dans la Grece une foule de beaux ,, esprits & d'excellens écrivains, ces ,, exploits font vantés dans tout l'uni,, vers, comme grands & merveilleux.

[ocr errors]

Ainfi les actions des Athéniens pa,, roiffent grandes à proportion de l'ef,, prit & de l'habileté des écrivains qui les ont célébrées. "

"

Salluste, affez jaloux d'ailleurs de 'a gloire qu'avoient acquis aux Romains les actions éclatantes dont leur histoire est pleine, rend ici justice à celles des

[blocks in formation]

• Athenienfium res gestæ, ficuti ego existi. mo, fatis amplæ magnificæque fuerunt: verum aliquanto minores tamen, quam famâ feruntur. Sed quia provenere ibi fcriptorum magna ingenia, per terrarum orbem Athenienfium facta pro maximis celebrantur, Ita eorum quæ fecere virtus tanta habetur, quantum eam verbis potuere extollere præclara ingenia. Sallust. in bello Catilin.

Grecs, en reconnoissant qu'elles ont une vraie grandeur & une vraie magnificence, quoiqu'inférieures felon lui à leur réputation. Qu'est-ce donc que cet éclat étranger & emprunté que les historiens y ont ajouté par leur éloquence? C'est que par toute la terre on vante de concert les actions des Athéniens, comme tout ce qui s'est jamais fait de plus grand: Per terrarum orbem Athenienfium facta PRO MAXIMIS CELEBRANTUR. Toutes les nations, féduites & comme enchantées par les charmes des écrivains Grecs, mettent les exploits de ce peuple au-dessus de tout ce qui s'est fait ailleurs de plus beau. Voila, felon Sallufte le service qu'a rendu aux actions des Athéniens l'histoire écrite comme elle l'est par les Grecs: & il est bien facheux que la nôtre, faute d'un pareil secours, ait laissé périr une infinité de belles actions & de belles paroles, auxquelles l'antiquité eût bien su donner du relief, & qui feroient beaucoup d'honneur à la nation.

[ocr errors]

Mais, quoi qu'il en foit, on doit convenir qu'il ne faut pas toujours juger du prix d'une action, ni du mérite de ceux qui y ont eu part, par

l'importance de l'événement. C'est dans les sieges & dans les combats, tels que ceux dont il est parlé dans la guerre du Péloponnese, que paroit véritablement toute l'habileté d'un Général. Aussi remarque-t-on que ce n'est qu'à la tête des petites armées, & dans des pays affez peu étendus, que nos plus grands Capitaines du siécle paffe ont fait paroître leur grande capacité, & ont égalé les plus fameux Capitaines de l'antiquité. Dans ces fortes d'actions le hazard n'a part à rien, & ne couvre point les fautes si l'on en fait. La prudence du Chef regle & conduit tout. Il est véritablement l'ame de fes troupes, qui n'agissent & ne se remuent qu'au signal qu'il en donne. Il voit tout, & est par tout. Rien n'échape à fon attention ni à sa vigilance. Les ordres sont donnés à propos, & exécutés de même. Ruses, stratagemes, fauffes marches, attaques vraies ou fimulées, campemens, décampemens, tout en un mot part & dépend de lui seul.

Et c'est en quoi la lecture des hiftoriens Grecs, tels que Thucydide, Xénophon, Polybe, peut être infiniment utile aux ieunes Officiers; parce

que

que ces historiens, qui étoient en mê me tems excellens. Capitaines, entrent dans un grand détail, & conduisent les lecteurs comme par la main dans les sieges & dans les combats qu'ils décrivent, leur apprenant ainfi, par l'exemple des plus grands Généraux de l'antiquité, & par une forte d'expérience anticipée, comment il faut faire la guerre.

CE N'EST PAS seulement pour les actions guerrieres que l'histoire de la Grece nous fournira de grands modeles. Nous y verrons de fameux légis. lateurs, de très - habiles Politiques, des Magiftrats nés pour le gouvernement, des hommes qui ont excellé dans tous les arts & dans toutes les fciences, des Philosophes qui ont pouffé leurs recherches aussi loin qu'on le pouvoit dans ces tems reculés, & qui nous ont laissé des maximes de morale capables de faire rougir des Chrêtiens.

Il est vrai que ces mêmes Philoso phes, fi éclairés sur de certains points., ont été entiérement aveugles fur d'autres, jusqu'à ignorer & à combattre les principes les plus clairs de la loi naturelle; & que souvent leur con

:

Doctrin

duite a démenti leur doctrine, s'étant prostitués aux déréglemens les plus groffiers. La divine providence l'a permis ainfi, & les a livrés à un sens reprouvé, pour punir leur orgueil, & pour nous instruire par leur exemple, en nous montrant de quoi sont capables les hommes, même les plus habiles & les plus éclairés, quand ils font abandonnés à leur propre foiblesse & à leur corruption naturelle, & de quels abymes la grace du divin Médiateur nous a tirés. Mais les déréglemens où ils font tombés, & du côté de l'esprit S. Au& du côté du cœur, quoique nous de- guft. de vions les détester, n'empêchent pas Chrift. qu'il n'y ait dans leurs livres d'excel- lib. 2. lentes maximes, que nous devons, fe- cap. 40. lon la pensée de S. Augustin, revendiquer comme un bien qui nous appartient, de même que les Ifraélites, en fortant de l'Egypte, s'enrichirent de scs dépouilles; & c'est ainsi qu'en ont ufé tous les Saints: Ipfi gentiles fi quid divinum De bapt. & rectum in doctrinis suis habere potue- contr. runt, non improbaverunt Sancti nofri. Donat. J'en dis autant des actions vertueufes qui fe rencontrent chez les cap. 87. payens, telles que l'histoire des Grecs nous en fournira un grand nombre. Saint

AS

lib. 6.

« PreviousContinue »