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chonte à Athènes étoit pour lors réduite à l'espace d'un an: Anaxandre & Anaxidame règnoient à Sparte.

Leur premier soin fut de se fortifier du secours des peuples voisins. Ils les trouverent fort disposés à entrer dans leurs vûes. Leur propre intérèt les y portoit. Ce n'étoit point sans crainte & fans jalousie qu'ils voioient s'élever au milieu d'eux une ville puissante, qui paroissoit manifestement vouloir étendre sa domination sur toutes les autres. Les peuples de l'Elide, ceux d'Argos, ceux de Sicyon se déclarerent en leur faveur. Avant qu'ils fufsent assemblés, il se donna un combat. * Ariftomene, second de ce nom, étoit à la tête des Messeniens. C'étoit un Chef d'un courage intrepide, & d'une extrême habileté dans le métier de la guerre. Les Lacédemoniens furent battus. Aristomene, qui vouloit donner d'abord aux ennemis une idée avantageuse de lui-mème fachant qu'elle influe sur tout le reste des entreprises, eut la hardiesse d'entrer de nuit à Sparte, & d'attacher à la porte du

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Selon plusieurs Historiens, il y avoit eu un autre Ariftomene dans la premiere guerre de

Meffenie. Diod. lib. 15. p. 378.

du temple de Minerve, furnommée Chalcioecos, un bouclier, dont l'Infcription marquoit que c'étoit un présent qu'Aristomene offroit à la déesse, des dépouilles des Lacédémoniens.

Cette bravade en effet étonna les Lacédémoniens. Mais ils furent encore plus allarmés de la puissante ligue qui se formoit contre eux. L'oracle de Delphes, qu'ils consulterent fur les moiens de réussir dans cette guerre, leur ordonna de faire venir d'Athenes un Chef pour leur donner conseil, & les conduire. La démarche étoit humiliante pour une ville aussi fiere que Sparte. Mais la crainte de s'attirer le couroux du dieu par une desobéissance si marquée, l'emporta sur tout autre motif. On députa donc vers les Athéniens. Cette demande les embarrassa. Ils n'étoient pas fachés de voir ceux de Lacédémone aux mains avec leurs voisins, & n'avoient pas envie de leur fournir un bon Général : d'un autre côté ils craignoient aussi de desobéir au dieu. Pour se tirer d'embarras, ils leur présenterent Tyr-tée. Il étoit poëte de profession, avoit quelque chose d'original dans l'esprit & de choquant dans le corps, car il

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étoit boiteux. Malgré ses défauts les Lacédémoniens le reçurent comme un chef que le Ciel mème leur en. voioit. Le succès ne répondit pas d'a. bord à leur attente. Ils furent battus trois fois confécutivement.

Les Rois de Sparte, abbattus par tant de défaites, & n'espérant pas un meilleur succès pour l'avenir, vouloient absolument retourner à Sparte, & y ramener les troupes. Tirtée s'oppofa fortement à ce dessein, & les fit revenir à son avis. Il parla aux troupes, & prononça des vers qu'il avoit préparés dans cette vûe, & travaillés avec un soin extrême. Il les confoloit de leurs pertes passées; qu'il attribuoit, non à aucune faute de leur part, mais à un malheur & à un destin que nulle fageile humaine ne peut furmonter. It leur représentoit la honte qu'il y auroit pour des Spartiates à fuir devant l'ennemi, & combien il leur seroit glorieux de périr meme, s'il le faloit, les armes à la main en combattant pour la patrie. Comme si tout danger fût disparu, & que les dieux, fatisfaits pleinement & appaisés par les défaites précédentes, fe fuffent tournés entiérement de leur

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leur côté, il leur faifoit envisager la victoire comme certaine &, comme

déja présente, & comme fielle Plat. lib. même les invitoit au combat. Tous 1. de leg. les anciens qui ont parlé du caractere Plut. in de la poésie de Tyrtée, remarquent Agid. & qu'elle étoit pleine d'un feu, d'une Cleom. ardeur, d'un enthousiasme, qui enpag. 805. flammoit les esprits, qui les élevoit au dessus d'eux-mêmes, qui a leur infpiroit je ne fai quoi de génereux & de martial, qui étouffoit en eux tout sentiment de crainte des dangers ou de la mort, & qui les rendoit uniquement attentifs au falut de la patrie, & à leur propre gloire.

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Ce fut véritablement l'effet que les vers de Tyrtée produifirent dans cette occafion fur les soldats. Ils demanderent tous d'une voix commune qu'on les conduifit contre l'ennemi. Devenus indifférens pour la vie ils ne songeoient qu'à s'assurer l'honneur de la sépulture. Ils attacherent tous à leur bras droit des bandelettes, où ils avoient inscrit leur nom & celui de leurs peres, afin que s'ils périf soient dans le combat, & que les traits traits de leurs visages vinstent à se confondre par la longueur du tems, on pût certainement les reconnoître à ces marques. Des foldats déterminés à mourir, font bien forts. Cela parut dans la bataille qui se donna. Elle fut très-fanglante, & la victoire longtems disputée : mais enfin les Messeniens cederent. Quand Tyrtée dans la suite passa à Sparte, il y fut reçu avec de grandes marques de distinction, & aggrégé au nombre des citoiens.

a Tyrtæusque mares animos in Martia bella Versibus exacuit. Horat. in Art. poet.

Le gain de cette bataille ne termina pas la guerre: elle avoit déja duré trois ans. Ariftoméne aiant ramaflé les débris de fon armée, se retira sur une montagne qui étoit d'un difficile accès, appellée Ira. Les vainqueurs avoient compté l'emporter d'emblée: mais il s'y défendit pendant onze ans, & y fit des actions de bravoure extraordinaires. Ce ne fut même que par surprise & par trahison qu'il fut obligé d'en fortir, après avoir combattu comme un lion. Ceux des Messeniens qui tomberent entre les mains des Lacédémoniens, furent réduits au fort & à l'état des Ilotes: les autres, voiant leur patrie ruinée, allerent s'établir à Zancle ville de Sicile, qui depuis fut appellée

Tome III.

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