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ARTA-losses, qui l'avoit fort bien reçu. Les XERXE Athéniens & les Lacédémoniens ne l'y

127.

laifférent pas en repos, & le redePlin. in mandérent à ce Prince, avec menaces, Thémist. s'il le refusoit, de porter la guerre dans pag. 125. fon pays. Adméte, qui ne vouloit point Diod. s'attirer sur les bras de fi formidables ennemis, & encore moins trahir fon Cornel. hôte, l'avertit du danger où il étoit, Nep. in & favorifa fa fuite. Thémistocle arricap. 8.10.

lib. 11.

Themift. va par terre à Pydne, ville de la Ma

cédoine, & là il s'embarqua fur un vaifseau marchand qui alloit en Ionie. Il n'étoit point connu des passagers. Ce vaisseau aiant été porté par la tempête près de l'île de Naxe, qui étoit alors affiégée par les Athéniens, le preffant danger où il se vit l'obligea de déclarer qui il étoit au maître du vaisseau & au pilote; & tant par prié-res que par menaces il les força de paffer outre, & de tenir la route d'Afie. Thémistocle put se souvenir alors Themift. d'un mot que son pere lui avoit dit lorfPag. 112. qu'il étoit encore fort jeune, pour l'avertir de ne pas compter beaucoup fur la faveur du peuple. Ils se promenoient ensemble le long du port. En lui montrant de vieilles galéres jettées & abandonnées sur le rivage: Voiez-vous, mon

Plut, in

fils, lui dit-il? Voila comment le peu- LoNple en use à légard de ses conducteurs, GUE-. quand il n'en tire plus aucun service. MAIN.

Deux

Il arriva donc à Cumes, ville d'Eolie dans l'Afie Mineure. Le Roi de Perse avoit mit sa tête à prix, & promis deux cens talens à qui la lui livreroit. Toute la côte étoit pleine de gens cens mille qui l'observoient pour le prendre. Il écus. s'enfuit à Æges, petite ville d'Eolie, où il n'étoit connu de personne que de son hôte Nicogéne, le plus riche du pays, & qui avoit de grandes relations avec tous les Seigneurs de la Cour de Perse. Il demeura quelques jours caché chez lui, jusqu'à ce qu'il le fit conduire en fûreté & avec bonne escorte à Suse, dans un de ces chariots couverts, dans lesquels les Perses, qui étoient. fort jaloux, avoient accoutumé de mener leurs femmes; ceux qui le conduisoient publiant qu'ils menoient à un grand Seigneur de la Cour une jeune Dame Grecque.

Quand il fut arrivé à la Cour de Perse, il s'adressa au Capitaine des Gardes, & lui dit qu'il étoit Grec de nation, & qu'il venoit pour parler au Roi d'affaires importantes qui regardoient son service. L'officier l'avertit d'une céré

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ARTA- cérémonie, dont il savoit que quelXERXE. ques Grecs étoient blesffés, mais qui étoit absolument nécessaire pour parler au Prince en personne: c'étoit de se profterner profondément devant lui. Car, dit-il, notre loi nous ordonne d'honorer ainsi le Roi, & de l'adorer ,, comme une image vivante du Dieu ,, immortel qui entretient & conferve ,, toutes choses.,, Themistocle y confentit. Quand on l'eut admis à l'audience, il se prosterna profondement devant le Roi, & l'adora; puis se relevant : Grand * Roi, dit-il par un truchement,,, je suis Themistocle A„ thénien, qui aiant été banni par les „Grecs, viens ici chercher un asyle. » J'ai fait à la vérité beaucoup de ,, maux aux Perses; mais je ne leur ai , pas moins fait de bien par les salutai,, res avis que je leur ai fait donner plus „ d'une fois : & je suis en état de leur ,, rendre encore de plus grands fervi,, ces que jamais. Mon fort est entre „ vos mains. Vous pouvez montrer ici » ou votre clémence, ou votre colere. وو Par l'une vous fauverez votre sup

*

» pliant,

Thucydide lui fait dire à peu près les mê

mes choses, mais dans une lettre qu'il avoit écrite au Roi avant que de lui parler.

رو pliant, par l'autre vous perdrez le LON» plus grand ennemi de la Grece.

GUE

Le Roi ne lui répondit rien sur l'heu- MAIN. re, quoiqu'il fût rempli d'admiration pour fon grand sens & pour sa hardiesse: mais on dit qu'avec ses amis il se félicita de cette avanture comme d'un très-grand bonheur, qu'il pria fon dieu Arimanius d'envoier toujours à ses ennemis de semblables pensées, & de les porter à se défaire ainsi de leurs plus grands personnages. On ajoute que s'étant couché, l'excès de sa joie fit qu'il s'écria trois fois tout endormi, J'ai Themistocle l'Athénien.

Le lendemain, dès la pointe du jour, il manda les plus grands Seigneurs de fa Cour, & fit appeller Thémistocle, qui ne s'attendoit à rien que de triste, sur-tout depuis que l'un des Gardes, après qu'il eut entendu fon nom, lui eut dit la veille dans la salle même du Roi qu'il venoit de quitter: Serpent de Grece, plein de ruse & de malice, la fortune du Roi t'amene ici. Mais la férénité qui paroissoit fur le visage du Roi, ne lui annonçoit rien que d'heureux. En effet, il lui fit un accueil très favorable, & lui dit qu'il Deux commençoit par lui donner deux cens cens mille talens, écus.

ARTA-talens, somme-qu'il avoit promise à XERXE quiconque le lui livreroit, & qui, parcette raison, lui étoit dûe; puisqu'il avoit apporté lui-même sa tête en se livrant à lui. Il lui ordonna ensuite de lui parler des affaires de la Grece. Mais Thémistocle ne pouvant s'expliquer que par le moien d'un Interprete, pria le Roi de lui permettre d'apprendre la langue Persanne, espérant qu'alors il pourroit être en état d'expliquer mieux lui-même ce qu'il avoit à lui communiquer, qu'il ne le pouvoit faire par le moien d'un autre. Il en est, dit-il, du discours de l'homme, comme d'une tapisserie à personnages, qui a besoin d'être déploiée & développée pour faire voir ce qu'elle renferme. Cette grace lui aiant été accordée, Thémistocle, dans l'espace d'un an, apprit si bien la langue du pays, qu'il parvint à parler le Persan plus élégamment que les Perses mêmes, & il fut en état dans la fuite de s'entretenir avec le Roi fans truchement. Ce prince lui marqua une estime & une considération extraordinaire. Il lui fit épouser une Dame des plus nobles familles de Perse: il lui donna une maison & un équipage convena

ble

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