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L'air en retentissait d'un bruit épouvantable :
La frayeur saisissait les hôtes de ces bois;
Tous fuyaient, tous tombaient au piège inévitable
Où les attendait le lion.

« N'ai-je pas bien servi dans cette occasion?
Dit l'àne, en se donnant tout l'honneur de la chasse.
Oui, reprit le lion, c'est bravement crié :
Si je ne connaissais ta personne et ta race,
J'en serais moi-même effrayé. »

L'âne, s'il eût osé, se fùt mis en colère,
Encor qu'on le raillât avec juste raison;
Car qui pourrait souffrir un âne fanfaron?
Ce n'est pas là leur caractère.

13.

Le Cerf se voyant dans l'eau.

Laudatis utiliora quæ contempseris

1. Laudatis, utiliora. Plu- | reperies 94,11; stultum existiriels neutres. Laudatis ne pour-mo 76,20; digna judicetis 77, rait être employé seul, parce 19; vera existimans 92,9 « (les) qu'il ne se distinguerait pas d'un croyant véridiques » ; escam pumasculin; ici il passe, grâce à tans 79,14 « (la) croyant une utiliora (le neutre horum 74,9 pâture »; sonos quos putes passe grâce à quid). Con- 60,12. Dans toutes ces phrases, struire: hæc narratio est testis, Phèdre s'abstient d'ajouter l'infiquæ contempseris inveniri sæpe nitif esse. Il dit même, sans esse: utiliora laudatis. se formosum jactat 52,6 « se vante d'être beau »; occasionem significat brevem 101,5 « montre que l'occasion est de peu de durée»; voir aussi 110,6. Avec un participe, il n'exprime jamais esse : voir factum 15,12.

1-2. Utiliora...inveniri; être trouvées plus utiles. De même inveniri contrarios 88,17 « être trouvés hostiles »; invēni pessimos et cognovi optimos 48,6-7 « j'ai trouvé très mauvais, j'ai reconnu très bons »; majorem

- Contempseris. Au subjonc

Sæpe inveniri testis hæc narratio est.
Ad fontem cervus cum bibisset restitit
Et in liquore vidit effigiem suam.
Ibi dum ramosa mirans laudat cornua
Crurumque nimiam tenuitatem vituperat,
Venantum subito vocibus conterritus
Per campum fugere cœpit et cursu levi

tif, la seconde personne équivaut

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Mirans (cornua) laudat souvent au français «on ». Sonos cornua. Voir la double construcquos putes 60,12 qu'on croirait | tion de natans 5,2.

biale

Traduire des notes. Ut sustineas 66,7 mirans par une locution adverqu'on supporte. De même, à l'indicatif, le futur passé dederis 110,12.

au

avec admiration. - Cornua. Ici, «bois » ; 86,11, « cornes » d'un bouc. Le latin confond volontiers les diverses sortes de cornes, comme les diverses sortes de bouches; voir ore 5,6. De même Phedre appelle dentes les « défenses » du sanglier (22,5) aussi bien que Re-stitit. De re-sistere, les dents du serpent d'eau (3,24),

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3. Ad sans mouvement près, devant. Ad januam 75,30: devant la porte. Ad lanium 48,1 à la devanture d'un marchand de viande. Voir aussi ad imam 37,3.

non de re-stare.

4. Liquore. Voir 2,8. 5-8. Dum laudat...cœpit. Voir dum 14,9.

5. Ramosa. Buffon dit : « Le bois du cerf pousse, croît et se compose comme le bois d'un arbre... Il est d'abord tendre comme l'herbe, et se durcit ensuite comme le bois... Il se divise aussi en plusieurs rameaux: le merrain est l'arbre, les andouillers en sont les branches. »

du renard (14,11), de la belette (83,9). Les « serres » d'un oiseau | sont appelées des ongles (32,12; 39,8). Pes signifie indifféremment la « jambe » d'un homme (voir manus 100,10) ou la << patte» d'un animal.

7. Venantum. Pris substantivement, les participes présents font, de préférence, le génitif pluriel en -um.

8. Fugere. Distinguer fugěre, infinitif, de fugere, parfait. Cœpit. Voir 5.8.

Canes elusit. Silva tum excepit ferum;
In qua retentis impeditus cornibus
Lacerari cœpit morsibus sævis canum.

Tunc moriens edidisse võcem hanc dicitur :
«O! me infelicem, qui nunc demum intellego

9. E-lusit : se joua de, | échappa à (comme 43,13). Le simple ludere signifie aussi bafouer quelqu'un, se jouer de lui | (126,10); sur un autre sens de ludere, voir 105,1.

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Ex-cepit. Voir 12,6.

10

134,9, et aussi 76,9. L'expression vocem edere revient 154,9.

13. Me infelicem, qui...intellego. Malheureux que je suis! je comprends..... Il y a ici un raisonnement, mais sous-entendu; le latin, en effet, a l'indicatif et Ferum le (cerf) sauvage, non le subjonctif, qui exprimecomme 41,14. Le même mas- rait ce raisonnement (voir quæ culin est dit du lion (22,8; 34,6), abstuleris, au subjonctif, 9,11du sanglier (81,3). Le féminin | 12). En français, on s'abstiendra fera est dit de la panthère d'ajouter un « puisque » ou un (46,15), des bêtes en général « car »; ce sera aussi sous-en(1,6; 12,5). Le genre dépend tendre le raisonnement. - Pour du substantif que le poète a l'accusatif d'exclamation, o! me dans l'esprit (cervus, leo, aper, infelicem, comparer o! sortem masculins; panthera, bestia, iniquam 134,2; et exemplum féminins). egregium... 34,11.

10. Qua. Voir quod 3,21.

dire 17,2.

- Demum seulement; c'estIm-peditus. Voir expe-à-dire, et pas plus tôt. De même 14,12. Le français << seulement >> a deux sens, que le latin distingue. Demum équivaut à l'allemand « erst » ; tantum ou modò équivaut à l'allemand « nur ».

11. Lacerari cœpit. Avec un infinitif passif, on met ordinairement le passif lacerari cœplus est. Phèdre n'emploie jamais cette tournure par deux passifs : il dit flagitari cœpit 20,9-10, ferri cœpit 67,6; desiderari cœpit 100,14.

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Intel-lego et neg-lego gardent au présent l'é de lěgo et font le parfait en -lexi. E-ligo, col-ligo, etc., changent l'è en i au présent, et font le parfait en -lēgi; par exception, di-ligo fait

Utilia mihi quam fuerint quæ despexeram,

Et quæ laudaram quantum luctus habuerint. »> 15

LA FONTAINE, VI, 1x :

Dans le cristal d'une fontaine
Un cerf se mirant autrefois
Louait la beauté de son bois,
Et ne pouvait qu'avecque peine
Souffrir ses jambes de fuseaux,

Dont il voyait l'objet se perdre dans les eaux.
« Quelle proportion de mes pieds à ma tête!
Disait-il en voyant leur ombre avec douleur :
Des taillis les plus hauts mon front atteint le faîte;
Mes pieds ne me font point d'honneur. »
Tout en parlant de la sorte,

Un limier le fait partir.
Il tâche à se garantir;

Dans les forêts il s'emporte.
Son bois, dommageable ornement,
L'arrêtant à chaque moment,
Nuit à l'office que lui rendent

Ses pieds, de qui ses jours dépendent.
Il se dédit alors, et maudit les présents
Que le ciel lui fait tous les ans.

Nous faisons cas du beau, nous méprisons l'utile;
Et le beau souvent nous détruit.

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Ce cerf blâme ses pieds, qui le rendent agile;
Il estime un bois qui lui nuit.

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Corvus est le corbeau proprement dit, différent de la corneille (voir en tête de la fable 4).

Il est assez naturel qu'un corbeau, dans une fable, se croie un virtuose. Buffon dit : « Non seulement le corbeau a un grand nombre d'inflexions de voix répondant à ses différentes affections intérieures, il a encore le talent d'imiter le cri des autres animaux, et même la parole de l'homme. » Voir la fable 126, le Corbeau qui dit bonjour.

Qui se laudari gaudet verbis subdolis Fere dat pœnas turpi pænitentia.

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Pœnas, pænitentia. Les deux mots n'ont aucune parenté. Pœna est emprunté au grec (Tový « rançon »). Pænitet paraît être d'origine latine, comme tædet, miseret, pudet, piget, etc. Pœna exprime l'idée de châtiment, pænitet l'idée de regret. L'orthographe pœnitet pour pænitet est fautive, comme l'orthographe mærere,

dolus est donc un composé latin d'un mot étranger. De même dolosus « rusé » (v. 11; 37,17) et dolose « avec ruse» (129,6), sont des dérivés latins d'un mot étranger. Voir dolus 24,2; et Dolus personnifié (comme sont personnifiés Veritas et Menda-mæstus pour mærere, mæstus. cium), fable 108.

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La diphtongue e ne figure que dans très peu de mots d'origine latine (monia, fœdus « traité», cœpi, cœtus, prælium).

Turpi. Voir 11,1.

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