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L'Acheteur doit paier le prix dont il eft demeuré d'accord, au tems marqué, & en forte qu'il donne (1) de fon argent, & non pas de celui d'autrui. Que s'il a paié de l'argent d'autrui, & que celui, à qui il appartenoit, l'aît révendiqué; il faut qu'il en donne d'autre, & qu'il dédommage le Vendeur de la perte que lui a caufé cette revendication.

Le Vendeur, de fon côté, eft tenu de délivrer, au tems marqué, la chose achetée, avec toutes les qualitez requifes ou par la nature même du Contract, ou en vertu d'une Convention particuliére des Contractans (2). De forte que, quand même, après la Vente accomplie, il viendroit à fe répentir de fon marché, & que n'aiant pas encore délivré la chofe vendue, il offriroit de rendre l'argent, avec les dommages & intérêts; l'Acheteur n'eft point obligé d'accepter, malgré lui, cette propofition, mais il peut toûjours contraindre le Vendeur à lui délivrer la marchandife; à moins qu'il n'y aît quelque raifon d'Humanité qui l'engage à fe relâcher de fon droit. Nous avons déja traité du cas où le Vendeur est dans l'impuiffance de délivrer la chofe, fans qu'il y aît de fa faute. Mais lors qu'il y a de fa part de la mauvaise foi, ou de la négligence; il doit rendre l'argent qu'il a reçû de l'Acheteur, & lui paier encore les dommages & intérêts. Que fi un homme a vendu la même chofe à deux Acheteurs, celui, qui a fait marché le premier, doit fans contredit être préféré, lors que la chofe n'a encore été délivrée ni à l'un ni à l'autre; &, à plus forte raifon, lors qu'il en a été déja mis en poffeffion: bien entendu que le Vendeur dédommage le dernier Acheteur de ce qu'il perd pour avoir compté fur un Contract illufoire. Mais, fi la chofe a été délivrée au dernier Acheteur, il eft clair, par les (3) principes du Droit Civil, qu'il doit être préféré au premier en datte, parce qu'il a reçû la chofe, à juste titre, des mains de celui que l'on en fuppofoit le maître: de forte que le premier Acheteur n'a contre l'autre ni action réelle, puis qu'il n'étoit point encore maître de la chofe; ni action perfonnelle, puis qu'ils n'avoient point traité enfemble là-deffus. Le Vendeur ne peut pas non plus, fous aucun prétexte apparent, fe faire rendre la chofe à celui entre les mains de qui il s'en eft deffaifi. Grotius (a) prétend, que, par le Droit même Naturel, le dernier (a) Lib. II. Cap. Acheteur, à qui la marchandise eft déja délivrée, doit être préféré au premier en datte, XII.§.15. num.2. parce, dit-il, que le transport préfent de Propriété, ou la délivrance, die au Vendeur tout le pouvoir Moral qu'il avoit fur la chofe: ce qui ne fe fait pas par une fimple Promeffe. Mais, outre qu'une fimple Promeffe de vendre n'eft pas certainement une Vente; je ne

fai fi ce grand Homme s'accorde bien ici avec lui même. Il venoit de (b) dire, que la Pro- (b) Ibid. num. I♪ priété peut être transférée au moment même du Contract, avant la délivrance de la chofe vendue. Donc, aprés une telle Vente conclue, il ne refte au Vendeur d'autre pouvoir Moral fur la chofe, que celui de faire en forte qu'elle foit remife entre les mains de l'Acheteur. Par conséquent, fi le Vendeur en difpofe autrement, ce fera fans aucun droit, & par un acte nul, qui ne fauroit tourner au préjudice de celui qui avoit le premier aquis un plein droit fur cette même chofe. Cela pole, il y a grand fujet de douter fi le privilége de la poffeffion d'une chofe délivrée fans aucun droit, doit toûjours donner la préférence au dernier Acheteur, au préjudice du premier. Au refte, le droit, qu'on a fur une chofe, ne fe perdant pas uniquement par la perte de la poffeffion, & une perfonne pouvant fe trou

S. V. (1) Emptor autem nummos venditoris facere cogitur. Digeft. Lib. XIX. Tit. I. De actiomibus empri & venditi, Leg. XI. §. 2. Voiez Cod. Lib. IV. Tit. XLIX. Leg. VII. Faute de paier au terme, l'Acheteur doit des-lors l'intérêt des deniers. Ex vendito actio venditori competit ad ea confequenda, quæ ei ab emptore praftari oportet. Veniunt autem in hoc judicium infra fcripta: In primis pretium, quanti res venit: item ufura pretii poft diem traditionis: nam cùm re emptor fruatur, aquiffimum eft eum ufuras pretii pendere. Digest. ubi fupra, Leg. XIII. §. 19,

20.

(2) Ex empto actione is, qui emit, utitur. Et inprimis fciendum eft, in hoc judicio id demum deduci, quod præftari convenit. Cùm enim fit bonæ fidei judicium, nihil magis bo

ver

næ fidei convenit, quam id præftari, quod inter contra-
hentes actum eft: quod fi nihil convenit, tunc ea præftabun
tur, qua naturaliter infunt hujus judicii poteftate. Et in pri-
mis ipfam rem præftare venditorem oportet, id eft tradere:
qua res, fi quidem dominus fuit venditor, facit & empte-
rem dominum: fi non fuit, tantum evictionis nomine vendi-
torem obligat; fi modo pretium eft numeratum, aut eo nomi-
ne fatisfactum. Digeft. ibid. §. 1, 2.

(3) Quotiens duobus in folidum prædium jure diftrahitur e
manifefti juris eft, eum, cui priori traditum eft, in deti-
nendo dominio effe potiorem. Cod. Lib. III. Tit. XXXII.
De rei vindicatione, Leg. XV. Voiez Digeft. Lib. VI. Tit.
II. De Publicana in rem actione, Leg. IX. §. 4.

(4), Sive

ver de bonne foi en poffeffion du bien d'autrui; lors qu'un tel poffeffeur vend à un tiers la chofe qui ne lui appartient pas au fond, il ne diminue rien par là des droits du véritable Propriétaire, puis que l'on ne fauroit transférer à un Acheteur plus de droit qu'on n'en a foi-même. Ainfi, quoi que l'Acheteur ait intention d'aquérir la Propriété de la chofe vendue; cependant, comme fouvent on vend ou fans le favoir, ou le fachant bien, une chofe qui appartient à autrui, le maître peut reprendre fon bien, fauf à l'Acheteur d'avoir fon (c) Voiez Plant, recours contre le Vendeur, qui eft obligé (4) à la garantie, & qui, en mettant l'Acheteur in Perfa, Act. IV. en poffeffion, n'a pû lui conférer que le droit d'aquérir la cholé vendue (5) après le terme de la Prefcription expiré (c).

Scen. IV.

De diverfes fortes particulieres

Lib. XXXIX. Tit.

princip. & Sueton. in Auguft.

Cap. LXXV. au

fujet d'une efpéce d'Encan

qu' Augußte fai

foit faire, pour

fe divertir, dans

les feftins.

§. VI. IL y a une forte particulière de Vente, qui confifte à vendre non pas une certaide Vente, ou il ne chofe déterminée, mais feulement (1) une espérance probable, à laquelle les Contractans entre du hazard. mettent un certain prix; de forte qu'encore que ce qui provient enfuite fe trouve valoir beaucoup plus, ou beaucoup moins, le Contract n'a rien pour cela de vicieux. La même (a) Voiez Digef. chofe a lieu & dans les (a) Encans, & dans les (2) Ventes en bloc, c'eft-à-dire, lors que IV. De Publica l'on vend en gros & comme en un tas confus plufieurs chofes de différens prix, fans les nis &c. Leg. IX. taxer chacune en particulier: car il entre quelque hazard dans ces fortes de Ventes. On trouve dans le Droit Romain des exemples de l'Achat d'une espérance incertaine, comme quand on achete la chaffe que fera un (3) Chaffeur, ou la pêche d'un Pêcheur. C'eft ce qui donna occafion à une dispute fameufe, dont l'Hiftoire Ancienne parle. Quelques hommes de (b) Milet étant à Cos achetérent un jour des Pêcheurs de l'Ile un coup de filet, avant qu'il fût tiré. Le filet hors de l'eau, on y trouva un trepied d'or, qu'Héléne, pour accomplir un ancien Oracle, avoit jetté dans ce même endroit en revenant de Troie. Là(b) Plutarch. in deffus il s'émût un grand débat entre les Pêcheurs, & ces Etrangers. Ceux-ci prétendoient, Edit. Wech.Voiez que le trépied leur appartenoit par les Loix du Contract; puis qu'ils avoient acheté tout Diog. Lart ce qui feroit pêché, ou le hazard d'un coup de filet. A quoi les Pêcheurs répondoient, & il y a quelque di- avec raifon, que le Contract regardoit uniquement les poiffons qui fe trouveroient pris. verfité pour les En effet, toute Convention doit être interprétée par rapport à l'efprit & à l'intention des Contractans. Or affurément ni les Pêcheurs, ni les Etrangers, n'avoient pas pensé le moins du monde au trépied d'Or ni à rien de femblable. En vain objecteroit-on, qu'il entroit du hazard là-dedans: car ce hazard ne s'étendoit qu'à la quantité de poiffons qui feroient pris, & non pas à toutes fortes de chofes qu'un cas extraordinaire pouvoit faire rencontrer dans le filet. Ainfi il falloit juger de ce trépied comme d'un Tréfor qui auroit été trouvé. Pour la décifion de l'Oracle, qui adjugeoit ce trépied au plus Sage, elle sent manifestement (4) l'avarice artificieufe des Prêtres, qui voulurent par ce moien attraper une fi belle proie: car ils voioient bien qu'il ne fe trouveroit point d'homme affez fou pour vouloir s'attribuer cet éloge magnifique du plus fage des mortels (c).

Solon. pag. 80.

Lib. I. §. 28. où

perfonnages.

(c) Voiez Valer.

Maxim. Lib. IV.
Cap. I. §. 7. ex-

tern. & Mornac.

ad Leg. XII. Dig. De act. empt.&

vend.

Des Monopoles.

§. VII. ON traite encore ici ordinairement une autre queftion, favoir, fi tout Monopole eft contraire au Droit Naturel? On fait que le nom feul de Monopole eft en horreur, & que les Loix de plufieurs Etats défendent fous des peines rigoureufes ce que l'on entend par la. Mais il faut décharger de ce tître odieux bien des chofes, qui ne le méritent pas. Si

(4) Sive tota res evincatur, five pars, habet regreffum emptor in venditorem. Digeft. Lib. XXI. Tit. II. De evictionibus &c. Voiez le refte de ce Titre.

(s) Quod fine ullius damno pars, que putatur effe vendentis, per longam poffeffionem ad emptorem tranfit. Digest. Lib. XLI. Tit. II. De adquir. vel amitt. poffeff. Leg. XLIII. princip.

§. VI. (1) Aliquando tamen & fine re venditio intelligitur: veluti cùm quafi alea emitur; quod fit cùm captus pifcrum, vel avium, vel miffilium emitur. Emptio enim contrabitur, etiamfi nihil inciderit: quia fpei emptio eft. Digeft. Lib. XVIII. Tit. I. De contrah. empt. Leg. VIII. §. 1. Voiez pourtant Plin. Lib. VIII. Epit. II.

(2) Per averfionem; expreffion de la Jurifprudence Ro

un

maine, comme, par exemple, dans la Loi LXII. §. 2. du Titre, que je viens de citer: Res in averfione empta, fi non dolo venditoris factum fit, ad periculum emptoris pertinebit: etiamfi res adfignata non fit.

(3) Veluti cùm futurum jactum retis à pifcatore emimus, aut indaginem plagis pofitis à venatore, vel pantheram ab aucupe. Digeft. Lib. XIX. Tit. I. De actionibus empti & venditi, Leg. XI. §. 18. Voiez la Loi fuivante. (4) Τὸ μαντικον γδ πᾶν φιλάργυρον γίνε. Sophocl. in Antigon. pag. 257. Edit. H. Steph. Voicz Mr. Van Dale, dans fes Traitez, De Oraculis; de Idololatria, & Superftitione; ou l'Hiftoire des Oracles, par Mr. de Fontenelic.

§. VII.

autrefois l'Alun

Lib. V. Cap. X.

in Citoien, par exemple, eft le feul d'une ville qui fache faire certaines marchandifes, ou qui ait dans les terres certaines fortes de fruits; ou fi une certaine chose ne croît que dans un Pais (a); & que l'on fe prévaille de ces avantages; il n'y a là rien que (a) Comme étoit de très-innocent, ni qui puiffe être traité de Monopole: car l'idée du Monopole fuppofe, dans l'lle de Lique celui, qui l'exerce, fe foit lui feul emparé du privilége de vendre des marchandifes, pare. Diod. Sicul. que les autres pouvoient vendre auffi bien que lui. Ce n'eft pas non plus un Monopole, pag.293. D. Edit. que de fe trouver le feul qui tranfporte des marchandises d'un Pais éloigné, où l'on n'em- Rhodom. pêche pas que les autres n'en aillent chercher. Un Peuple, qui a abondance de certaines fortes de marchandises, peut auffi légitimement s'engager par un Traité avec quelque autre Peuple, de ne les vendre qu'à lui feul. En effet, il eft libre à chacun de vendre fon bien quand & à qui bon lui femble; à moins qu'il ne s'agiffe d'une chofe abfolument néceffaire à autrui, & dont on a foi-même de refte: car en ce cas-là les Loix de l'Humanité he permettent pas de faire aucun Traité qui réduife à une fâcheufe indigence ceux qui ne fauroient avoir fans nous les chofes dont ils ne peuvent point fe paffer. Mais fi quelcun, fans être autorifé par un accord fait entre lui, & le maître des marchandifes, veut empêcher les autres, ou par force, ou par de fourdes pratiques, d'aller trafiquer dans ce Paislà, afin que tout le monde foit contraint d'acheter de lui ces fortes de marchandifes; il eft clair, qu'il péche contre l'Humanité, & qu'il attente infolemment à la liberté des autres, par une conduite qui tend fi visiblement au Monopole.

A l'égard des Monopoles, qui s'exercent de Citoien à Citoien, il faut remarquer, qu'il n'eft pas illicite d'empêcher, par autorité publique, que tout le monde ne trafique de toutes fortes de chofes, fans en avoir aquis le droit par les Loix du Païs. Ainfi, dans la plûpart des Etats de l'Europe, il ne fuffit pas de favoir faire une certaine forte de commerce, ou de métier; il faut encore, pour pouvoir l'exercer, s'aflujettir à certaines choses. Un Souverain peut auffi accorder à un Citoien, ou à une Compagnie de Marchands, le privilége de tranfporter eux feuls de certains lieux une forte de marchandife; & cela pour plufieurs raifons. Car le commerce, qui fe fait dans des Païs fort éloignez, demande de grandes dépenfes, avant qué d'être bien établi; & les commencemens en font fujets à bien des rifques. Il ne feroit donc pas jufte, qu'après l'avoir ouvert, avec tant de dangers & de dépenfes, les autres vinffent leur en enlever le profit, fans qu'il leur en coûtât rien. D'ailleurs, ces Sociétez privilégiées peuvent, dans un befoin, fecourir l'Etat de leurs richeffes beaucoup mieux que ne feroient les Particuliers. Il femble auffi, que de cette maniére le commerce des marchandises étrangères eft plus grand, & s'exerce avec plus de fidélité. On ne pense pas à tant de tromperies, à tant de fineffes, à tant de moiens de gagner, lors que le profit doit être mis en commun & partagé également avec d'autres. Mais il est de la prudence du Souverain, de n'accorder ces fortes de priviléges qu'à l'égard des chofes qui viennent de lieux fort éloignez, où l'on ne peut aller fans courir quelque rifque, & qui font de telle nature, qu'elles fervent plûtôt aux commoditez fuperflues, qu'aux néceffitez abfolues de la vie. Il ne faut pas non plus permettre aux Marchands, qui les tranfportent, d'en hauffer le prix à leur fantaisie. Il feroit auffi déraisonnable de fournir occafion à un petit nombre de gens d'amaffer des richeffes immenfes aux dépens de leurs Concitoiens, fans que les premiers procuraffent à l'Etat quelque utilité confidérable. Enfin, on ne peut guéres regarder que comme un Monopole injufte, les défenfes que feroit un Prince aux Artifans & aux Laboureurs de fes Etats, de vendre leurs ouvrages & les fruits de leur induftrie, qu'à certaines perfonnes, qui les revendroient enfuite, fur tout fi cela avoit lieu par rapport aux autres Sujets. Car de cette maniére on voit bien, qu'un petit nombre de gens attireroient à eux les richesses de l'Etat, en appauvriffant & ruinant les autres Citoiens (1). Pour ce

S. VII. (1) Il faut remarquer en paffant, ajoûtoit ici notre Auteur, que Grotius (Lib. II. Cap. XII. §. 16.) met mal à propos au rang des Monopoles ce que fit Jofeph, fur TOM. II.

qui

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qui regarde les Particuliers, confidérez fimplement comme tels, ils ne fauroient, de leur pure autorité, exercer un Monopole innocent. Car comment eft-ce qu'un Particulier, qui n'a ni autorité fur les autres, ni le droit d'emploier la force, pourroit directement & de fon chef les empêcher de négocier d'une certaine forte de marchandises? Tout Monopole des Particuliers n'eft donc fondé fur aucun droit ni fur aucun privilége, mais fe fait uniquement par des tromperies fecretes, & par des complots criminels; comme fi quelques Marchands fe fervent de rufe pour empêcher qu'aucun autre Citoien n'aille dans les lieux d'où ils tranfportent certaines marchandifes, ou que les Etrangers ne viennent eux-mêmes les vendre dans le Pais; ou fi étant d'intelligence ils achetent toutes ces marchandifes, & les gardent dans leurs inagafins, afin que devenant rares, ils puiffent les revendre enfuite à un prix exorbitant: gens qui ne confidérent point, que (2) la Terre eft la mére commune de tous les Hommes, & qui méritent d'être rigoureufement châtiez, auffi bien que ceux, qui, comme autrefois les Vendeurs d'huile du Marché de Rome, font renchérir les denrées & les marchandises, en fe donnant le mot de ne les vendre que fur un certain pied au delà du prix courant. Les Ouvriers & les Artifans imitent auffi quelquefois cette friponne(b)Voiez Grotius, rie (b). Mais on ne doit pas tant blâmer l'adreffe de Thalès, qui aiant, à ce qu'on dit, préLib. II. Cap. XII. vû, par le moien de l'Aftrologie, que l'année suivante il y auroit grande abondance d'huiNotes; & Cujas, le, prit à ferme tous les Oliviers (c) du Païs.

S. 16. dans les

Obferv. X, 19. (c) Ariftot. Polit. Lib. I. Cap. XI. Ed. Parif. Cicer. de Divin. Lib. I. Cap.XLIX. Diog. Laert. Lib. I. §. 2.50

fonne d'amaffer du bled pendant les années d'abondan-
ce, & il n'empêchoit pas que ceux, à qui il en reftoit,
ne le vendiffent. L'autre exemple, que Grotius allégue,
n'eft pas mieux appliqué: car fi ceux d'Alexandrie avoient
eux feuls prefque tout le commerce des Indes & de l'E-
thiopie, ce n'étoit point en vertu d'aucun privilege, mais

feulement à cause de la fituation du Païs; comme il paroit par ce que dit Strabon, Lib. XVII. pag. $49. Edit. Genev. Cafaub.

(2) Ἡ γῆ πάντων μήτης. δικαία γδ. ὑμεῖς ἢ ἄδικοι ὄνα τες, πεποίησθε αὐτὴν αὐτῶν μένων μητέρα. Philoftrat. de Vit. Apoll. Thyan. Lib. I. Cap. XII. princ.

En quoi con- §. I.

viennent le Con

tract de Louage,

te.

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LY A beaucoup de (1) rapport entre le Contract de Vente, qui vient d'être expliqué, & celui de Louage, dont il s'agit maintenant, par lequel on donne à autrui, & celui de Ven- moiennant un certain loier ou un certain falaire, l'ufage d'une chofe, ou de son travail & de fa peine (a). Ainfi ces deux fortes d'engagemens fuivent, à peu près, les mêmes ré(a) Voicz Grotius, Lib. II. Cap. XII. gles. Le loier ou le falaire répond au prix de la Vente; & le droit de jouir de la chofe louée, ou du travail de celui qui met à prix fon industrie, répond au droit de Propriété que l'on aquiert par l'Achat. La Vente eft confommée, dès lors qu'on eft convenu du prix le Louage s'accomplit au moment que l'on eft convenu du loier ou du falaire (2). Lors que l'on achete pour accommoder le Vendeur, les chofes fe donnent ordinairement à meilleur marché, que quand la Vente fe fait pour l'avantage de l'Acheteur: de même

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§. I. (1) Locatie & conductio proxima eft emptioni &r venditioni, iifdemque juris regulis' confiftit. Nam ut emptio & venditio ita contrahitur, fi de pretio convenerit; fic & locatie & conductio ita contrahi intelligitur, fi merces conftituta fit:& competit locatori quidem locati actio, conductori veTo conducti. Inftit. Lib. III. Tit. XXV. princip. Quari folebat de locatione & conductione, fi fortè rem aliquam utendam five fruendam tibi aliquis dederit. Ibid..§. 2. At cùm do ut facias; fi tale fit factum, quod locari folet, puta, nt tabulam pingas, pecunia data, locatio erit. Digeft. Lib. XIX. Tit. V. De prafcriptis verbis &c. Leg. V. §. 2. Voiez, fur toute cette matiére, les Loix Civiles dans leur ordre naturel, par Daumat, I. Part. Liv. I. Tit. IV.

auff

(2) Le Contract de Louage fe renouvelle par une reconduction tacite, lors que, le bail étant expiré, le Preneur continue de jouïr de la chofe louée, fans que le Bailleur s'y oppofe. Car en ce cas-là l'un & l'autre eft cenfé proroger le Contract pour le même tems, & aux mêmes conditions. Qui impleto tempore conductionis, remanfit in conductione, reconduxiffe videbitur....... Qued autem diximus, taciturnitate utriufque partis colonum reconduxiffe videri, ita accipiendum eft, ut in ipfo anno, quo tacuerunt, videantur eandem locationem renovasse, non etiam in fequentibus annis. Digeft. Lib. XIX. Tit. II. Locati, conducti, Leg. XIII. §, 11.

que

auffi une perfonne, qui vient offrir fon fervice, eft obligée de fe contenter d'un falaire plus modique, que fi on l'étoit allé chercher. Enfin, dans le Contract de Louage, aufsi bien que dans celui de Vente, c'eft ordinairement à celui, qui donne, à demander (3) combien veut avoir pour fon paiement; & à celui, qui prend, à mettre le dernier prix. Mais, comme ceux qui achetent, fans faire marché, s'engagent tacitement à paier les chofes au prix courant: de même auffi, lors qu'on s'eft loué, fans avoir parlé du falaire, on s'en remet à la difcretion & à l'équité de celui, pour qui l'on travaille (b), en forte pourtant (b) Voiez Matth. qu'il ne doit pas donner moins que ce qui fe paie ordinairement (4). Il eft encore de la nature du Contract de Louage, que, fi l'Entrepreneur d'un ouvrage (5) fait quelque perte en y travaillant, c'eft pour fon compte, & non pour celui de la perfonne, à qui il avoit loué la péine.

XX, 4. & fuiv.

nus font pour le

§. II. ON demande, fi les accidens, qui empêchent ou qui diminuent l'ufage de la cho- En quel cas les fe louée, font aux périls du Preneur, ou du Bailleur? 11 y en a qui répondent purement accidens furve& fimplement, que, (1) comme la perte d'une chofe vendue eft pour le compte de fon compte du Bailmaître; de même naturellement, & à moins qu'il n'y aît là-deffus quelque claufe particu- leur? liére ajoûtée au Contract de Louage, la ftérilité, & les autres accidens femblables, qui empêchent la jouiffance de la chofe louée, tombent fur le Preneur, en forte que le Bailleur a droit de lui demander la rente, dont ils font demeurez d'accord, quand même elle monteroit plus haut que les fruits recueillis. Car, dit-on, dans le tems que le Bailleur a donné au Preneur le droit de jouir de fon bien, l'efpérance des revenus, que celui-ci s'en promettoit, étoit eftimée fur ce pied-là; de forte que le Bailleur aiant tenu fes engagemens, il eft jufte que le Preneur, de fon côté, paie la rente, qu'il a promife. Mais, pour bien décider cette queftion, il faut, à mon avis, l'examiner d'une maniére plus précise & plus diftincte. Je dis donc, que, fi la chofe louée (2) vient à périr fans qu'il y ait de la faute du Preneur, non feulement il n'eft point tenu de la paier, mais même dès ce moment-là

(3) SA. Indica, fac pretium. Do. tua merx eft, tua indicatio eft.

Plaut. in Perfa, A&t. IV. Scen. IV. verf. 37. Ariftote dit, que, dans ces fortes de commerces, celui qui donne femble s'en remettre à la volonté de celui qui reçoit. Ο γδ προϊένα, ἔοικεν επιτρέπειν ἐκείνῳ [τῷ

Corr Ethic. Nicomach. Lib. IX. Cap. I. Il allégue là-deffus l'exemple du Sophifte Protagoras, que Platon fait parler ainfi lui-même dans le Dialogue qui porte fon nom, pag. 228. D. Edit. Francof. Wech. (je me contente de citer le paffage en François felon la traduction de Mr. Dacier) Voici le marché que je fais d'ordinaire: Quand quelcun a appris de moi, s'il veut, il me paie ce qu'on a coùtume de me donner; finon, il peut aller dans un Temple, &, après avoir juré que ce que je lui ai enfeigné vaut tant, déposer la fomme qu'il m'a deftinée.

(4) C'eft, ajoutoit nôtre Auteur, une miférable chicane que celle dont fe fervit autrefois Dénys le Tyran, pour fe difpenfer de fatisfaire un joueur de fute, à qui il avoir promis une grande récompenfe: Je vous ai rendu, lui dit-il, plaifir pour plaifir. Vous m'avez diverti par votre mélodie, je vous ai réjoui par l'espérance dont je vous ai flatté. Plutarch. de auditioné, p. 41. D. & de fortuna Alexandri, Orat. II. princ. pag. 333, 334. Ariftot. Ethic. Nicomach. Lib. IX. Chap. I. Mais, dit très-bien Ariftote, autant vaut-il ne rien recevoir, que de ne pas recevoir ce que l'on s'étoit propofé. "Oμolor Is The unter gigreads, ὅταν ὅ ἐφίεται μὴ τυγχάνη. Notre Auteur rapportoit encore, & approuvoit en même tems une fentence que prononça autrefois Bocchoris fur un autre fujet, & dans faquelle il y a une femblable maniére d'éluder un paiement. Le conte eft un peu libre; c'eft pourquoi il fuffira de renvoier à Plutarque (in Demetrio, pag. 901. D.) d'où il est tiré.

le

point tenu de le lui paier. Nam & fi faber incudem aut
malleum fregerit, non imputaretur ei, qui locaverit opus.
Digeft. Lib. XIV. Tit. II. De Lege Rhodia &c. Leg. II.
§. I. De même, fi un Vaiffeau de louage aiant effuié
une rude tempête, eft obligé de relâcher dans quelque
port, pour fe radouber; ces frais tombent fur le Mai-
tre du Vaiffeau, & non pas fur ceux, à qui appartient la
charge. Ibid. Leg. VI. Nôtre Auteur rapportoit ici une
Loi qu'il y avoit autrefois chez les Ephefiens, par laquel-
le il étoit porté, que, fi les frais d'un bâtiment alloient
au delà du quart de ce à quoi un Architecte avoit dit
qu'ils monteroient, cet Architecte devoit paier du fien
le furplus. Vitruv. de Architect. Lib. X. Prafat.

§. II. (1) C'est le fentiment de Grotius, Lib. II. Cap.
XII. §. 18. où, pour le dire en paffant, Gronovius a très-
mal expliqué ces paroles: ficut res domino perit: car il
fait dire à ce grand Homme, que, fi une chofe achetée,
& déja délivrée, vient à périr, c'est pour le compte de ce-
lui qui en eft actuellement le maître, & non pas de celui
qui l'a été. Grande merveille! comme fi perfonne pou-
voit mettre cela en question! Il ne faut pas être fort pé-
nétrant, pour voir, que Grotius parle au contraire d'u-
ne chofe vendue, mais non encore délivree, qui
néanmoins, felon ce qu'il a dit au commencement du
§. 15. eft aux périls de l'Acheteur, & dont il met la per-
te en parallele avec celle des fruits, qui avoient été
comme vendus, & qui étoient cenfez, pour ainfi dire,
délivrez au Fermier, autant que cela dépendoit du Pro-
priétaire.

(2) Si ager terra motu ita corruerit, ut nufquam fit, damno domini effe: oportere enim agrum praftari conductori, ut frui poffit. Digeft. Lib. XIX. Tit. II. Locati, conducti, Leg. XV. §. 2. in fin. Si capras latrones citra tuam fraudem abegiffe probari poteft, judicio locati cafum prafta(s) Par exemple, fi un Forgeron, en travaillant pour re non cogeris: atque temporis, quod infecutum eft, mercenous, caffe fon marteau, ou fon enclume, on n'eft-des, ut indebitas reciperabis. Ibid, Leg. IX. §. 4. (3) Si

G 2

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