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ne poffeffion? Par les Loix Romaines (2) ce Contract eft pleinement accompli, auffi-tôt qu'on eft convenu du prix de la chofe à vendre: & dès-lors les deux Contractans ont action l'un contre l'autre; l'Acheteur, pour obliger le Vendeur à lui délivrer la marchandife; & le Vendeur, pour obliger l'Acheteur à la prendre, en paiant ou fur le champ, ou au bout d'un certain tems réglé entr'eux, le prix dont ils font demeurez d'accord. Mais la Vente eft imparfaite, felon les mêmes Jurifconfultes, ou par une raifon générale, ou par quelque raifon particulière. Le premier arrive, lors que l'Acheteur, & le Vendeur (3) n'ont rien conclu, & qu'ils font feulement en marché. Car en ce cas-là, l'Obligation n'étant point encore contractée de part ni d'autre, il eft libre à chacun de fe dédire; pourvû que l'on aît agi fans tromperie, & fans aucun deffein de fe moquer de celui avec qui l'on étoit en traité: ce qui a lieu dans toute forte de Contracts. L'autre cas arrive, lors que le Contract renferme une (4) condition, ou expreffe, ou foufentendue, qui fufpend l'effet de l'Obligation; comme, par exemple, s'il s'agit d'une chofe que (5) l'on prend à l'effai. Car alors on eft cenfé avoir fuppofe tacitement, qu'on ne l'achetoit qu'au cas qu'elle fe tronvât telle que le Vendeur nous la dépeignoit, ou qu'elle fût à notre gré, après que nous l'aurions vûe, ou goûtée, ou examinée de quelque autre maniére. En effet, pour regler le jufte prix d'une marchandise, il faut toujours avant toutes chofes en bien connoître les qualitez; &, lors qu'on n'eft pas affuré de la bonne foi d'un Vendeur, c'eft une grande imprudence d'acheter de lui quoi que ce foit fans l'avoir bien examiné. Mais pour ce qui regarde le poids, la mefure, & le nombre des marchandifes (6), il n'y a point proprement de condition tacite qui les détermine & les fixe; à moins que la chofe ne fe trouve de telle nature, qu'elle foit inutile fi l'on n'en a une certaine quantité. Ce n'eft que dans l'exécu tion même du Contract que l'on régle combien on achete de piéces de marchandise, de mefures, ou de livres: avant cela la chofe vendue n'eft pas bien diftinctement défignée, on ne fait ce que l'Acheteur a aquis, ni ce qui refte au Vendeur, dans un tas de marchandifes de même forte. Par la même raifon, la délivrance de la marchandise & le transport de la Propriété ne fe fait qu'après cette détermination du nombre, de la mefure, ou du poids; à moins qu'on n'ait vendu une chofe en bloc, fans parler de la quantité que pour la défigner à peu-près, & non pas pour la déterminer au jufte: car alors il n'est pas abfolument néceffaire de compter, de mefurer, ou de pefer les inarchandises, avant qu'elles foient tenues pour délivrées. En effet, autre chofe eft de dire: Je vous vends le vin contenu dans ce tonneau, qui tient dix bouteilles; & de dire: Je vous vends dix bouteilles du vin qui eft dans ce tonnean. Enfin la Vente eft imparfaite, felon les mêmes Jurifconfultes Romains, lors que les Contractans étant (7) convenus de donner leur confentement par

من

(2) Eft autem emptio juris gentium : & ideo confenfu peragitur: & inter abfentes contrahi poteft " per nuncum, & per literas. Digeft. ibid. Leg. I. §. 2. Emptio & venditio contrahitur fimulatque de pretio convenerit: quamvis nondum pretium numeratum fit, ac ne arrha quidem data fuerit. Inftit. Lib. III. Tit. XXIV. princip. Voiez auffi Digeft. ubi fuprà, Leg. XIX. XXXIV, §. 5, 6. XXXV. $. 5, 6,7.

(3) Illud conftat, imperfectum effe negotium, cùm emere volenti fic venditor dicit, QUANTI VELIS, QUANTI EQUUM PUTAVERIS, QUANTI ESTIMAVERIS, HABEBIS EMPTUM. Digest. ibid. Leg. XXXV. §. 1.

(4) Conditionales autem venditiones tunc perficiuntur, cum impleta fuerit conditio. Digeft. ibid. Leg. VIL. §. 1. Mais cela n'eft pas particulier au Contract de Vente: toutes les Conventions généralement fuivent la même regle. Voiez ce que l'on a dit ci-deffus, Liv. III. Chap. VIII. Quod fi fub conditione res venierit, difent les Jurifconfultes Romains, fi quidem defecerit conditio, nulla eft emptio, ficuti nec ftipulatio. Digeft. Lib. XVIII. Tit. VI. De periculo & commodo rei vendita, Leg. VIII. princip.

(5) Guftus enim ad hoc proficit, ut improbare liceat. Di

écrit,

geft. Lib. XVIII. Tit. I. De contrah. empt. Leg. XXXIV. §. 5. Difficile autem eft, ut quifquam fic emat, ut ne deguftet. lbid. Tit. VI. De periculo & commodo rei vendita, Leg. IV. §. 1. Si res ita diftraéta fit, ut fi difplicuiffet, inempta effet, conftat, non effe fub conditione diftra&tam, fed refolvi emptionem fub conditione. De contrah. vendit. Leg. III.

(6) Si id, quod venierit, appareat, quid, quale, quantum fit, & pretium, & pure venit, perfecta eft emptio. Digeft. De peric. & comm. rei vend. Leg. VIII. princip. Quod fi vinum ita venierit, ut in fingulas amphoras; item oleum, ut in fingulos metretas; item frumentum, ut in fingulos modios; item argentum, ut in fingulas libras certum pretium diceretur....& de his, qua numero conftant, fi pro numero corporum pretium fuerit ftatutum: Sabinus &Caffius tunc perfici emptionem exiftimant, cum adnumerata, admenfa, adpenfave fint : quia venditio quafi fub hac conditione videtur fieri, ut in fingulos metretas, aut in fingulos modios, quos, quafve admenfus eris; aut in fingulas libras, quas adpenderis; aut in fingula corpora, que adnumeraveris. Lib. XVIII. Tit. I. De contrah. empt. &c. Leg. XXXV. §. 5.

(2) Cela n'eft pas particulier au Contract de Vente;

la

écrit, l'acte n'est pas encore paffé. Autre chofe eft, fi l'écrit ne fe fait que pour le fouve- (a) Voiez les nir de la Vente (8), ou pour la certifier (a).

Loix des Hebreux au fujet de ce

XLII.

§. III. POUR moi, il me femble qu'il faut avant toutes chofes bien diftinguer ici entre Contract, dans le Contract, & fon exécution. Le Contract eft accompli, dès lors qu'on a diftinctement & Gen. & Gent. fec.Hebr. marqué la marchandise vendue, & que l'on eft convenu du prix, fans qu'il y ait aucune Lib. VI. Cap. I. condition, ni expreffe, ni tacite, qui fufpende l'Obligation, ou qui laiffe la liberté de fe & IV. & un paffage de Theodédire. Mais l'exécution du Contract fe fait feulement lors que l'Acheteur paie le prix de phrafe, rapporté la marchandise, & que le Vendeur la lui délivre. La maniére de Vente la plus fimple & par Stobee, Serm. la plus naturelle, c'eft (1) d'exécuter de part & d'autre fur le champ ce à quoi l'on s'eft engagé. Mais lors qu'il fe paffe quelque tems entre l'accompliffement du Contract, & fon * Si la perte ou le profit de la chofe exécution de la part du Vendeur, c'est-à-dire, depuis qu'on eft convenu du prix, jufqu'à vendue, regarla délivrance de la marchandise; on demande, fi la perte ou le profit de la chofe vendue, dent l'Acheteur, qui arrivent pendant cet intervalle, regardent l'Acheteur, ou le Vendeur. Par le mot de ou le vendeur ? perte on entend ici celles qui arrivent par un cas fortuit, lors que la chofe vendue vient à périr, ou en tout, ou en partie, par l'effet d'une force extérieure & infurmontable, ou d'un vice intérieur, provenant de quelques caufes naturelles, ou lors qu'elle eft enlevée injustement au Vendeur (2). On fait, que le Droit Romain met cette perte fur le compte de l'Acheteur, quoi que, felon ces mêmes Loix, le Vendeur foit maître de la chofe vendue tant qu'il ne l'a pas encore délivrée. Mais d'où vient donc que, par tout ailleurs, lors qu'une (3) chofe appartenant à autrui périt ou eft endommagée fans la faute de celui qui l'a entre les mains, la perte tombe fur le maître de la chofe? Pour concilier ces deux décifions, quelques Jurifconfultes difent, que la derniére n'a lieu que dans les Contracts (4) en conféquence defquels l'un des Contractans a fimplement entre les mains une chofe qui appartient à l'autre; & non pas dans ceux en vertu defquels l'un des Contractans doit à l'autre une certaine chofe en efpece. Ou, comme d'autres s'expriment, la chofe eft perdue pour le maître, lors qu'on oppofe le maître à ceux qui ont fimplement l'ufage ou la garde de la chofe; & non pas lors qu'on l'oppofe à ceux qui ont droit fur la chofe, & qui peuvent fe la faire livrer, comme s'ils en étoient déja actuellement les maîtres. On allégue entr'autres raifons de cette différence, que l'Acheteur aiant pû & dû retirer d'abord la chofe vendue, en la paiant; s'il l'eût fait, elle auroit péri entre fes mains: de forte que fon retardement & fa négligence ne doivent point tourner au préjudice du Vendeur. Quelques autres difent, que, fi la chofe vendue eft, avant la délivrance, aux rifques, périls, & fortunes de l'Acheteur, ce n'eft pas parce qu'il eft le maître de cette chofe, mais parce qu'auffi-tôt que le Contract eft conclu & arrêté, le Vendeur confidéré par rapport à l'A

la même chofe a lieu dans toutes les autres fortes de Conventions. Contractus venditionum vel permutationum, vel donationum, quas intimari non eft neceffarium, darionis etiam arrharum, vel alterius cujufcunque caufa, quas tamen in fcriptis fieri placuit: tranfactionum etiam, quas in inftrumento recipi convenit, non aliter vires habere fancimus, nifi inftrumenta in mundum recepta, fubfcriptionibufque partium confirmata; & fi per tabellionem confcribantur, etiam ab ipfo completa, & poftremo à partibus abfoluta fint. Cod. Lib. IV. Tit. XXI. De fide inftrumentorum &c. Leg. XVII. Voiez Inftitut. Lib. III. Tit. XXIV. De Emptione & Venditione, princip.

(8) C'eft ce qui fe prefume ordinairement, à moins que le contraire ne paroiffe. Fiunt enim de his [obligationibus quæ confenfu contrahuntur] fcriptura, ut quod actum eft per eas faciliùs probari poffit : & fine his autem valer quod actum eft, fi habeat probationem ; ficut & nuptia funt, licèt testatio fine fcriptis habita eft. Digest. Lib. XXII. Tit. IV. De fide inftrumentorum &c. Voiez au refte fur toure cette matière du Contract de Vente, les Loix Civiles dans leur Ordre naturel, par Daumat, I. Part. Liv. I. Tit. II.

§. III. (1) C'eft ce que Plante appelle, Graca mercari fide, Alinar. Act. I. Scen. III. verf. 47. Platon (De Legi

che

bus, Lib. XI. pag. 965. A. Edit. Wechel.) veut, que dans
fa République on ne vende & l'on n'achete que de cet-
te maniére.

(2) Quum autem emptio & venditio contraéta fit....pe-
riculum rei vendita ftatim ad emptorem pertinet, tametfi ad-
huc ea res emptori tradita non fit. Itaque fi homo mortuus fit,
vel aliqua parte corporis lafus fuerit; aut ades tote, vel ali
qua ex parte, incendio confumpta fuerint; aut fundus vi flumi-
nis totus, vel aliqua ex parte, ablatus fit, five etiam in-
undatione aqua, aut arboribus turbine dejectis, longè mi-
nor aut deterior effe cœperit: emptoris damnum eft, cui ne-
ceffe eft, licèt rem non fuerit nattus, pretium folvere. Quid-
quid enim fine delo & culpa venditoris accidit, in eo vendi-
tor fecurus eft. Inftitut. Lib. III. Tit. XXIV. §. 3.

(3) Res domino fu perit, difent les Jurifconfultes: maxime qu'ils tirent de cette Loi du Code, Lib. IV. Tit. XXIV. De pigneratitia actione, Leg. IX. Pignus in bonis debitoris permanere, ideoque ipfi perire in dubium non ve‐

nit.

(4) L'omiffion d'une ligne entiére, qui fe trouve ici
dans les dernieres Editions de l'Original, faifoit dire à
P'Auteur le contraire de ce qu'il penfe. J'ai donc fuivi
la premiere Edition.
F 2
(s) Les

Lib. IV. Tit. III.
De dolo malo,
Lib. XXXV. Tit.

4. & L.XLV. Tit.

LXXXIII. §. 7.
(b)Voiez Ziegler,

fur Grotius, Lib.
II. C. XII. S. 15.

cheteur n'eft pas tant cenfé maître que débiteur, & débiteur d'une chofe en efpece, la quelle venant à périr fans qu'il y aît de fa mauvaise foi, ni de fa négligence, il n'eft plus tenu à rien envers l'Acheteur. Mais tout cela ne nous fournit pas une raifon claire & convaincante, pourquoi, le Vendeur étant obligé de mettre l'Acheteur en pleine poffeffion de la chofe vendue, celui-ci doit, plûtôt que l'autre, porter la perte qui furvient avant la dé(a) Voiez Digeft. livrance. Et il ne fert de rien d'alléguer ici quelques (a) Loix, qui difent, que, quand on a promis une certaine chofe particuliére & diftinctement défignée, ou une chofe en efpece, comme on parle, on n'en eft point garant au cas qu'elle périffe. Car il s'agit là de Pro11. Ad Leg. Fal- meffes gratuites: &, en matière de ces fortes de Promeffes, il feroit certainement abfurcid. Leg. XXX. §. de & injufte, que le Promettant fût tenu de paier la valeur de la chofe perdue; la nature De verb. oblig. même de l'affaire ne fouffrant pas une interprétation fi étendue. Mais d'où vient que dans Leg. XXXIII. & un Contract Onéreux, comme la Vente, lors que le Vendeur n'a pas encore exécuté ce à à quoi il eft tenu par le Contract (b), l'Acheteur doit fe réfoudre à perdre la marchandise, & à la paier pourtant? Pour moi, il me femble, que le meilleur moien pour découvrir ici les régles de l'Equité Naturelle, c'eft de diftinguer, fi le retardement de la délivrance vient de ce que la marchandise ne pouvoit être transportée qu'en un certain tems au lieu où elle devoit être délivrée, ou de ce que le Vendeur eft en demeure (5) de la délivrer; ou bien s'il n'a tenu qu'à l'Acheteur d'en prendre poffeffion. Dans les deux premiers cas, il n'y a point de doute que la perte ne foit pour le compte du Vendeur. Ainfi fuppofé, par exemple, qu'aiant acheté d'un homme des troupeaux qui paiffent en quelques pâturages éloiguez, ils viennent à lui être enlevez par des Voleurs, ou par des Loups, ou à périr par quelque autre accident, ou qu'il néglige de me les livrer en fon tems: je ne fuis pas obligé de les lui paier. Mais fi l'Acheteur eft en demeure de retirer la chofe vendue, il eft jufte que la perte tombe fur lui. Car dès le moment que le Vendeur est tout prêt à délivrer la . marchandise, ainfi qu'il s'y étoit engagé par le Contract; la Propriété confidérée comme un pouvoir Moral ou un fimple droit, paffe à l'Acheteur, en forte que la chofe vendue (c) Voiez ci-def- commence à lui appartenir uniquement (c). Si donc le Vendeur garde encore chez lui la fus, Liv. IV. Ch. marchandise par pure honnêteté & fans en avoir été chargé par l'Acheteur, il faudroit que celui-ci fùt bien impudent pour vouloir le rendre refponfable des cas fortuits. Que fi l'Acheteur a expreffément donné en garde la marchandise à celui qui la lui avoit vendue, elle eft cenfée demeurer entre les mains du Vendeur, non en qualité de maître, mais en qualité de Dépofitaire, qui par conféquent n'eft point refponfable des cas fortuits. En ce cas(d) Voiez ci-def- là la délivrance fe fait par une fiction de (d) main breve, mais d'une manière toute oppofus, Liv. IV. Ch. fée à celle que l'on conçoit dans la Donation d'une chofe que le Donataire avoit déja entre fes mains, ou par emprunt, ou à louage: car, au lieu qu'ici la chofe, qui étoit à autrui, commence à appartenir au Donataire, en vertu de cette délivrance feinte; là au contraire la marchandife, qui étoit au Vendeur, ceffe de lui appartenir, en forte que l'Acheteur en eft déformais le feul & véritable Propriétaire.

IX. §. S.

1X. §. 9.

Au refte, les maximes que nous venons d'établir au fujet de la perte arrivée avant la délivrance de la chofe vendue, doivent être appliquées (6) au profit furvenu dans cet in

tervalle.

(s) Les Jurifconfultes Romains difent auffi, qu'en ce
cas-la le Vendeur est tenu des dommages & intérêts,
c'est-à-dire, qu'il doit dedommager l'Acheteur de la per-
te que celui-ci a faite, ou du profit qu'il a manque de
faire, par une fuite naturelle & ordinaire du retardement.
Sires vendita non tradatur, in id, quod intereft, agitur:
boc eft, quod rem habere intereft emptoris.
venditorem fteterit quo minus rem tradat, omnis utilitas
emptoris in aftimationem venit: qua modo circa ipfam rem
confiftit. Neque enim, fi potuit ex vino (puta) negotiari,
& lucrum facere, id eftimandum eft, non magis quam fi tri-
ticum emerit, & ob eam rem, quod non fit traditum, fami

Cum per

§. IV.

lia ejus fame laboraverit: nam pretium tritici, non fervorum fame necatorum, confequitur. Digeft. Lib. XIX. Tit. L. De actionibus empti,& venditi, Leg. I. princ. & XXI, 3. (6) Celui, qui fouffre la perte, doit avoir le gain; c'eft une maxime inconteftable. Si un fonds, par exemple, étant vendu, l'alluvion y ajoûte quelque morceau de terre, c'est pour le profit de l'Acheteur. Sed & fi poßt emptionem fundo aliquid per alluvionem accefferit, ademptoris commodum pertinet. Nam & commodum ejus effe debet, cujus periculum eft. Inftitut, Lib. III. Tit. XXIV. De empt. & vendit.§. 3.

ordinairement

6. IV. LE Contract de Vente eft très-fouvent modifié par diverfes Conventions qui y DesConventions font ajoûtées ou du confentement des parties, ou en vertu des réglemens des Loix Civiles. que l'on ajoûte Sur quoi le Droit Naturel n'ordonne autre chofe fi ce n'eft de tenir ponctuellement ce dont au Contract de on eft convenu; & de fe conformer aux Loix de l'Etat, dans lequel on vit, fi l'on veut Vente. que le Contract foit valide en Juftice.

1. Ainfi rien n'eft plus ordinaire que de vendre & d'acheter à crédit, c'est-à-dire, à condition que la marchandise ne fera paiée que dans un certain tems après la délivrance. 2. On convient auffi fouvent, que la chofe vendue ne fera délivrée qu'au bout d'un certain tems, & que cependant la perte ou le profit demeurera au Vendeur, avec la Propriété de la chofe (1).

3. On vend quelquefois une (2) chofe à condition que, fi dans un certain tems on en trouve davantage, il nous fera permis de la vendre à un autre. Cela peut fe faire en deux (3) maniéres, ou en forte que la Vente foit confommée, mais fous condition qu'elle fera réfolue, fi quelque autre offre davantage de la marchandife; ou en forte que le Contract ne foit accompli que quand la condition appofée ne fe vérifie pas par l'événement. Dans le premier cas, l'Acheteur aquiert la Propriété de la chofe vendue: dans l'autre, le Vendeur demeure maître de fa marchandise, jufqu'à ce que le Contract foit pleinement accompli.

4. Il y a fouvent dans le Contract de Vente une (4) clause commissoire ou réfolutoire, par laquelle on convient, que, fi l'Acheteur ne paie pas au terme marqué, la Vente fera nulle. Cette Convention fe fait en deux maniéres, ou en forte que le Vendeur livre fur le champ la marchandise, à condition de la reprendre enfuite avec tous fes fruits, fi l'Acheteur ne paie pas au terme; ou en forte qu'il la garde, & qu'il ne foit point tenu de la délivrer, en cas que l'Acheteur manque de paier. Le dernier eft infiniment plus fûr, que l'autre. Car ordinairement le Vendeur ajoûte cette clause, afin de n'être pas obligé de prendre beaucoup de peine pour fe faire paier: or il en auroit autant, s'il lui falloit arracher fa marchandise des mains d'un mauvais paieur.

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Il n'eft pas moins ordinaire de voir dans les Contracts de Vente une claufe de (s) Retrait, appofée ou par les Contractans mêmes, ou par les Loix Civiles en matière de certains biens ce qui fe fait en diverfes façons. Quelquefois (6) on convient, que le Vendeur, ou fes Héritiers, pourront reprendre la chofe vendue, en rendant à l'Acheteur le prix ou dans un certain tems, ou toutes les fois que bon leur femblera. A l'égard du tems, on le limite, ou comme un terme d'où le Vendeur commencera à avoir la liberté de racheter la chofe vendue; ou comme un terme au delà duquel il n'aura plus la faculté de ra

§. IV. (1) Quod fi fugerit homo, qui veniit, aut fubreptus fuerit, ita ut neque dolus, neque culpa venditoris intervenerit: animadvertendum erit, an cuftodiam ejus ufque ad traditionem venditor fufceperit. Sane enim fi fufceperit, ad ipfius periculum is cafus pertinet: fi non fufceperit, fecurus eft. Inftit. ibid. Voiez Cato, de Re Ruftica, Cap. LXXX.

(2) C'eft ce que les Jurifconfultes appellent, Addictio in diem, dont il eft traité dans le Digefte, Lib. XVII. Tit. II. En voici la premiere Loi, qui contient la definition. In diem addictio ita fit : ILLE FUNDUS CENTUM ESTO TIBI EMPTUS, NISI SI QUIS INTRA KALENDAS JANUARIAS PROXIMAS MELIOREM CONDITIONEM FECERIT, QUO RES A DOMIНО АВЕАТ.

(3) Nam fi quidem hoc actum eft, ut meliore allata conditione, difcedatur, erit pura emptio, qua fub conditione refolvitur: fin autem hoc actum eft, ut perficiatur emptio, nifi melior conditio afferatur, erit emptio conditionalis. Ibid. Leg. II.

(4) Lex Commifforia, dont il eft traité dans le Digefte, Lib. XVIII. Tit. III. Cùm venditor; fundi in lege ita caverit

chat.

SI AD DIEM PECUNIA SOLUTA NON SIT, UT
FUNDUS INEMPTUS SIT, ita accipitur inemptus
effe fundus, fi venditor inemptum eum effe velit, quia id
venditoris caufa caveretur: nam fi aliter acciperetur, exufta
villa in poteftate emptoris futurum, ut non dando pecuniam
inemptum faceret fundum, qui ejus periculo fuiffet. Nam le-
gem commifforiam, que in venditionibus adjicitur, fi volet,
venditor exercebit: non etiam invitus...... Sed fi fundus
reveniffet, Arifto exiftimabat, venditori de his [fructibus]
judicium in emptorem dandum effe: quia nihil penes eum re-
fidere oporteret ex re, in qua fidem fefelliffet. Leg. II. III.

V.

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Capitolin. in

Dacier, pag. 58.

(b) Voiez Tit.

Liv. Lib. XXXI.
Cap. XIII.

(c) Jus eu

στους

chat. Sur quoi il faut remarquer, que, comme la faculté de rachat par elle-même a été (a) Voiez !. établie pour l'avantage du Vendeur, qui fe trouve quelquefois réduit (a) par une néceffité Mare & la preflante à aliéner un bien, dont il ne veut pas fe dépouiller pour toûjours: le terme que Vie de Marc- l'on prefcrit à ce droit eft limité au contraire en faveur de l'Acheteur, dont l'intérêt deAntonin, par M. mande qu'il ne foit pas obligé de rendre en trop peu de tems la chofe vendue, & qu'il puif Edit. d'Utrecht. fe quelque jour être affuré d'en avoir la poffeffion perpétuelle & irrévocable. Quelquefois auffi, lors que la Vente fe fait pour l'avantage du Vendeur, on convient qu'il fera libre à (b) l'Acheteur, ou dans un certain tems, ou toutes les fois que bon lui femblera, de rendre la chofe vendue, & de redemander fon argent. Il y a une autre forte de Retrait moins onéreux, que l'on appelle droit de (c) préférence; c'est lors que l'on ajoûte pour claufe à un Contract de Vente, qu'en cas que l'Acheteur veuille de fon pur mouvement revendre la chofe qu'il a achetée, celui qui la lui a vendue doit être préféré, pourvû qu'il la paie fur le pied de ce qu'un autre en donneroit. En plufieurs Pais même les Loix accordent ce droit de préférence à certaines perfonnes, par exemple, aux Propriétaires directs, à l'égard du fonds qu'ils avoient baillé à Emphyteofe; aux Créanciers, par rapport aux biens de leur Débiteur qui font vendus à l'encan; au maître d'un héritage, à l'égard du fonds voifin; aux Affociez, en matiére des biens de la fociété; aux parens, à l'égard des biens (d) Retractus gen- d'un parent, & cette derniére forte s'appelle Retrait (d) lignager (7). On fait auffi, que, (e) Lévitique, par la Loi Divine de Moife (e), toutes les poffeffions, qui avoient été vendues, retourXXV, 13. & fuiv. noient à leurs anciens maitres dans l'année du Jubilé. La raifon de cet établissement étoit

tilitius.

Voiez la-deffus

Mr. Le Clerc.

Virg. Eclog. III, 104, 105.

fondée fur la conftitution de la République Judaique, où il falloit entretenir la liberté, & par conféquent une jufte égalité entre les Citoiens: or le moien le plus propre d'y réuffir, c'eft d'empêcher que quelques Particuliers n'attirent à eux infenfiblement toutes les terres, qui font le principal fondement & la fource des richeffes, de peur qu'après avoir dépouillé les autres de leurs patrimoines, ils ne les tiennent fous leur dépendance; ce qui eft un acheminement à la domination d'un petit nombre de personnes, & par conféquent à la tyrannie (8).

6. Il arrive auffi fouvent, qu'en vendant un héritage, on s'en referve une petite partie, (f) Voiez les ou du moins un certain ufage. C'eft ainfi que (f) les prodigues autrefois s'affûroient ordiCommentat, fur nairement le droit de fe faire enterrer dans quelcune de leurs terres qu'ils avoient vendues. Ménius (g) vendant fa maison aux Cenfeurs Caton, & Flaccus, qui en vouloient faire un Hôtel de ville, fe referva, pour lui & pour fes defcendans, une colomme à appuier un balcon, d'où l'on pùt voir les fpectacles des Gladiateurs.

(g) Afconins Pe Divin. in 2. Ca

dianus, in Cicer.

cil. Cap. XVI. p. 328. Ed. Grav.

7. Enfin, on vend quelquefois une chofe pour un certain tems, au bout duquel elle retourne au Vendeur, fans qu'il foit obligé de rendre l'argent que l'Acheteur lui en avoit donné. C'est ainsi qu'en Angleterre les gens de qualité vendent, par exemple, pour trente ou trente-cinq ans la place de leurs fonds, en forte que ceux, qui l'achetent, peuvent y bâtir de la maniére dont ils font convenus enfemble: Contract qui approche du bail d'Emphytéofe.

Engagemens ré§. V. CES fortes de claufes ajoûtées au Contract de Vente, & la nature même du Conciproques de l'Acheteur, & tract, découvrent aisément quels font les engagemens réciproques de l'Acheteur, & du

du Vendeur.

Vendeur.

(7) C'est ici qu'il falloit placer cette Loi de Moife, qui, dans l'Original, fe trouve après l'a linea fuivant de ma Traduction.

(8) C'est pour cette raison que Lycurgue perfuada à tous les Citoiens de Sparte de remettre leurs terres en commun, & d'en faire un nouveau partage, afin de vivre enfemble dans une parfaite égalité; apres quoi il defendit à chacun d'aliéner fon heritage, de le diminuer, & de Paugmenter en aucune maniere. Voiez Plutarque, dans la Vie de ce Legislateur, & Heraclid. de Politiis, Au refte,

L'Ache

nôtre Auteur rapportoit ici la Vente en gros & en bloc, per averfionem, comme parlent les Jurifconfultes. Mais, outre qu'il en dit un mot au commencement du §. 6. on voit bien qu'elle étoit très-mal placee ici, où il s'agit, non des diverfes fortes de Vente, mais feulement des claufes ou conditions ajoûtées au Contract de Vente, foit qu'il fe faffe en gros, ou en detail. J'ai donc hardiment retranché cette petite periode egalement fuperflue, & propre à faire confondre des idees différentes.

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