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mi, qui nous attaque injuftement, & après avoir protefté qu'il nous force d'entrer en Guerre avec lui, on eft réduit, par la fupériorité des armes, à faire une Paix défavantageuse; rien n'empêche qu'on ne fe difpenfe, fi on le peut fûrement, d'exécuter les articles d'un tel Traité, & qu'on n'oppofe aux demandes du Vainqueur l'exception de la crainte injufte par laquelle il nous a contraints d'en paffer par où il a voulu; ou que du moins, avec le tems, on ne tire fatisfaction de cette injure, à la prémiére occafion favorable qui s'en préfentera. Sur ce principe, Polybe foûtient, que les Carthaginois étoient bien fondez dans la feconde Guerre Punique, parce qu'ils ne faifoient par là que tirer raison de ce qu'autrefois, pendant quelques troubles domeftiques, les Romains leur avoient enlevé la Sardaigne, & extorqué de grofles fommes d'argent: ils profitérent de l'occasion (2), dit cet Hiftorien, pour fe venger de ceux qui s'étoient fervis eux-mêmes les prémiers de l'occafion pour leur faire du tort. Autre chofe eft, lors qu'en prenant les armes l'un contre l'autre, on a fait ensemble une espece de Convention tacite, qui tient du Contract des Jeux de Hazard; ce qui arrive, lors que, dans une conteftation dont le fujet n'eft pas bien évident de part ni d'autre, on en vient d'abord à la Guerre, fans vouloir tenter aucune voie paifible d'accommodement, ou que l'on remet à la décision des armes la fatisfaction des injures & le succès des prétenfions, dont on pouvoit avoir raison par les voies de la Juftice, ou par un paisible accommodement. Car, en ce cas-là, on prend, s'il faut ainfi dire, pour Arbitre, le fort de la Guerre, & chacun des Combattans dit en lui-même au moment qu'il prend les armes : Je veux me faire raifon à la pointe de l'épée, ou risquer plutôt de perdre au delà de ce que je demande. Quand on a du malheur dans une Guerre où l'on s'étoit engagé fur ce pied-lá, on ne peut pas plus fe plaindre que le Vainqueur nous falle du tort en nous impofant des conditions defavantageufes, qu'un homme qui eft bleffé dans un Duel où il étoit allé de fon pur mouvement. Et il faut alors dire, comme Sofie à Mercure dans l'Amphitryon de Plante: (3) Tout ce que tu voudras, tu peux me battre, s'il te plaît, tu ès le plus fort.

Lib. III. C. XIX,

long l'affirmati

§. II. UNE autre queftion fort célébre que l'on agite ici, c'eft fi un Souverain ou un si un Traité de Etat doit tenir les Traitez de Paix & d'accommodement qu'il a faits avec des Sujets rebel- Paix fait avec des Sujets rebelles (a)? Pour expliquer là-deffus ma pensée en deux mots, je dis, que lors qu'un Sonve- les, eft valide? rain a réduit & dompté par les armes fes Sujets rebelles, c'est à lui à voir comment il (a)Voiez Grotius, les traitera. Mais s'il eft entré avec eux dans quelque accommodement, il eft cenfé par 5. 6, & feqq. où cela feul leur avoir pardonné tout le paffé; de forte qu'il ne fauroit légitimement fe difpen- il foûtient au fer de tenir la parole, fous prétexte que c'est à des Sujets rebelles qu'il l'a donnée. En ver- ve tu du Traité d'accommodement, les Rebelles redeviennent Membres de l'Etat, & promettent de nouveau à leur Souverain une fidele obéiflance, à condition qu'il obfervera de fon côté exactement ce à quoi il s'eft engagé envers eux de forte que ce Traité a force de Chartre ou de Loi Fondamentale de l'Etat, fur tout dans les Monarchies. Cependant ceux qui fe rebellent pour obtenir de leur Prince par force ce qu'ils fouhaittent, doivent bien le fouvenir, que, du (b) moment que les Sujets ont violé les engagemens où ils (b) Gramond. étoient envers leur Souverain, ils n'ont plus de protection ni de resources à espérer. §. IIL DANS les Traitez de Paix on céde quelquefois à l'autre Partie certaines chofes Jufques où un qui font à des Particuliers; & la nature du Domaine éminent de l'Etat fuffit Prince peut,dans pour faire voir un Traité de jufques où le Souverain peut difpofer à cet égard des biens de fes Sujets (a). En vertu de Paix, ceder les ce Domaine éminent le Souverain a droit, dans une néceffité preflante de l'Etat, ou mê- biens des Partime pour lui procurer quelque grand avantage, de donner ou d'aliéner les biens des Parti- Etats? culiers, à quelque titré qu'ils les aient aquis; en forte néanmoins que l'Etat doit les en (a)Voiez Grotius, dé- §. 7, 8, 9, 10,

(2) Καιρῷ γδ πεισθέντες, ἐμύνοντο τὲς σὺν καιρῷ βλά Jarras. Polyb. Lib. III. Cap. XXX.

(3) Ut lubet, quod tibi lubet fac, quoniam pugnis plus

vales.

Plaut. Amphitr. A&t. I. Scen. I. verf. 240.

Voiez Digeft. Lib. IX. Tit. II. Ad Leg. Aquil. Leg..
VII. §. 4. & Lib. XLVII. Tit. X. De injur. &c. Leg.
III. §. 3. & ce que l'on a dit ci-deffus, Liv. V. Chap..
IX. §. 3.

Hift.Gall. Lib.In

culiers de fes

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Lib.III. Cap.XX.

dédommager des deniers publics, ou fur le champ, ou du moins auffi-tôt qu'il en aura le moien; déduction préalablement faite de leur quote part. Dans une Monarchie, c'est au Roi à décider, s'il faut facrifier, ou non, les biens d'un Particulier; & tout le Corps des Citoiens doit contribuer pour la réparation de ce Dommage, à la requifition du Prince. Mais les Etrangers, à qui l'on céde ces biens, n'ont que faire de s'informer, s'il étoit ou non, de l'intérêt public, qu'on les leur donnât; il fuffit qu'ils les tiennent de la conceffion du Roi, pour les en rendre légitimes Propriétaires. Car, outre qu'on préfume ordinairement que tout ce que le Roi fait eft bien fait; il n'y auroit pas moien de conclurre aucun Traité valide avec les Etrangers, fi les actes du Chef de l'Etat n'étoient conftam(b) Voiez Digeft. ment réputez la volonté de tout le Corps. Au refte, les Loix de la Société (b) deman11. Pro focio, Leg. dent, que les autres Citoiens dédommagent chaque Particulier non feulement de la perte LIL S. 4. & tout de ces biens que l'on cède à l'Ennemi, mais encore de tous les autres maux que l'Ennele Titre Ad Leg. mi lui a caufez; fur tout s'il n'a contribué en aucune manière à la Guerre par fa propre Lib. XIV. Tit.II. faute. Cependant l'expérience ne fait que trop voir, que les pauvres Sujets font prefque par tout obligez de fouffrir patiemment ces pertes, & de les regarder comme de fimples malheurs, dont ils ne peuvent s'en prendre à perfonne.

Lib. XVII. Tit.

Rhod. de jactu,

Le terme marqué pour l'exécution des articles du Traité de

Paix, doit être

niere rigueur.

§. IV. SI, dans un Traité de Paix, on fixe un certain terme pour l'accomplissement des conditions dont on eft convenu (a), ce terme doit être entendu à la derniére rigueur; en forte qu'après qu'il eft expiré le moindre retardement n'eft pas excufable, à moins entendu à la der- qu'on n'ait été empêché d'effectuer plûtôt fes engagemens, par une force majeure, ou qu'il paroiffe manifeftement que ce délai ne vient d'aucune mauvaise intention. La raison en eft, qu'il peut arriver tous les jours de grandes révolutions, même en un petit espace de tems. Si donc on accordoit quelque délai à celui qui doit exécuter les conditions de la Paix, il pourroit aisément trouver l'occasion de se dispenser de tenir les engagemens. Ajoûtez à cela, qu'une Armée coûte beaucoup à entretenir, & qu'il n'eft pas fûr de la congédier, avant que de voir l'exécution des Articles de la Paix.

(a)Voiez Grotius, ubi fuprà, §. 25.

Des Combats,

qui décident des Paix. (a)Voicz Grotius,

conditions de la

ubi fuprà, §. 42. &feqq.

§. V. QUELQUEFOIS (a) on remet (1) la décifion des Articles de la Paix à un Combat entre deux, ou trois, ou un plus grand nombre de perfonnes, choifies en égal nombre de part & d'autre, ou même entre deux Armées entiéres. C'eft une question importante & difficile, de favoir, fi l'on fait bien d'expofer les intérêts de tout un Etat au hazard de ces fortes de Combats? Il femble, d'un côté, que, par ce moien, on épargne le fang humain, & qu'on abrege les malheurs de la Guerre. De l'autre on peut dire avec quelque apparence de raifon, qu'il vaut mieux s'engager même dans une Guerre fanglante, que de rifquer d'un feul coup la liberté & le falut de l'Etat, par un Combat décifif; d'autant mieux que les armes font journalières, & qu'après avoir perdu une ou deux batailles on peut fe relever par une troifiéme, où l'on fera victorieux. Cependant, fi l'on n'a d'ailleurs aucume efpérance d'un bon fuccès, & que l'on fe trouve engagé dans la Guer re avec les forces de tout l'Etat; rien n'empêche, à mon avis, qu'on n'embrafle de parti, comme le moindre de deux maux où l'on eft inévitablement expofé. Mais, lors que les (b) Voiez en un Princes fe font la (b) Guerre pour leurs intérêts particuliers, & non pas pour ceux de l'EDiodore de Sicile, tat (2); en ce cas-là l'Etat peut aisément confentir, de part & d'autre, qu'ils vuident leurs Lib.IV. Cap.LX. démêlez par un Combat fingulier; quoi que les Peines ne doivent pas en venir à cette ex

exemple dans

trémité pour maintenir des droits obfcurs & litigieux. Sur quoi il faut remarquer, que ceux qui remettent à un Combat la décifion de leurs démêlez, peuvent bien tranfiger de leurs droits, mais non pas de ceux d'autrui. Si donc un Roi, qui ne poffède pas fon

. V. (1) Voiez la Differtation de Mr. Buddé, intitulee, Jurisprudentia Hiftorica fpecimen, §. 21. jusqu'au 30. inclufivement.

(2) Λέγων [ὁ ̓Αλβανὸς] ὅτι τοῖς μὲν ἡγκοσμίοις ἢ σρατο τίδων, ὅταν ἰδίαν κατασκευάζωνται δυνασείαν, καλὸς καὶ ἀναγκαῖον ἶσαι ὁ πει δ ἀρχῆς πρὸς ἀλλήλες ἀγὼν ταῖς

Roiau

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Roiaume comme un bien propre & patrimonial, veut expofer fa Couronne au hazard d'un tel Combat; fou engagement fera nul & de nul effet, à moins qu'il ne foit accompagné du confentement du Peuple, & des perfonnes déja au monde qui ont droit, par les Loix, à la Succeffion.

(c) Comme fait

quable d'un

par les Lacédé

Dans ces fortes de Combats il arrive souvent quelque conteftation, pour favoir, qui eft le Vainqueur? Sur quoi il faut remarquer, qu'ordinairement ces Combats font décififs. Turnus, dans Si donc il n'y a que deux Combattans, celui-là fera Vainqueur, qui aura tué fon homme, Virg. Æn. XII, 931, & feqq. ou qui du moins l'aura réduit à rendre les armes, & à fe (c) reconnoitre vaincu. S'il y a (d) Voicz un plufieurs Combattans de part & d'autre (d), les prémiers qui auront tué ceux de l'autre exemple remarparti, ou qui les auront mis en fuite, & hors d'état de se défendre, feront réputez Vain- Combat entre queurs. Mais lors que deux Armées entiéres en viennent aux mains, ce n'eft pas pour l'u- des gens chois ne ni pour l'autre une marque affûrée de victoire, que d'avoir fait quelque butin fur l'En-moniens, & ceux nemi, de lui avoir laiffé enterrer fes morts, d'avoir couché fur le champ de bataille, & d'Argos; où il présenté de nouveau le combat; quoi que toutes ces circonftances, jointes à d'autres indi- dit prononcer en ces plus évidens, fervent beaucoup à faire voir que les Ennemis ont pris la fuite. Et cer- faveur des dertainement, dans un doute, la préfomption eft plus forte contre celui qui a abandonné le Lib. 1. & Pluchamp de bataille. Mais lors qu'il n'y a, de part ni d'autre, aucune marque affûrée de tarch. in Parall. victoire, les chofes demeurent au même état qu'elles étoient avant la bataille; de forte qu'il Mife. Lacon. Lib. faut, ou en revenir à la Guerre, ou entrer dans quelque nouveau Traité.

faut fans contre

niers: Herodot.

Voiez J. Meurs.

IV. Cap. XIV.

§. VI. POUR fûreté de la Paix, on y fait non feulement intervenir d'ordinaire le Ser- Des Otages. ment, mais encore on donne de part & d'autre des (1) Otages. Sur quoi il faut remarquer,

outre ce que l'on trouve dans (a) Grotius, que, fi un Otage devient Héritier & Succefleur (a) Lib.III. Cap. de celui, qui l'avoit donné, il n'eft plus tenu alors de demeurer en Orage, quoi que le XX.§.52, & feqq. Traité fubfifte encore après la mort de fon Prédécefleur car ce cas étoit tacitement excepté. Mais il doit mettre quelcun à fa place, fi l'autre Partie le demande.

la Paix.

S. VII. QUELQUEFOIS auffi d'autres Princes, fur tout ceux qui ont été Média- Des Garants de teurs de la Paix, fe rendent Garants de fon obfervation de part & d'autre, par une espece de Cautionnement, qui emporte un Traité d'Alliance, en vertu duquel ils s'engagent à donner du fecours au prémier qui fera infulté par l'autre, contre les articles & les conditions de la Paix (a). Mais ils ne font pas tenus de prendre la défense de l'un ni de l'autre, (a) Voiez Died. fi la Guerre vient à recommencer entr'eux pour quelque nouveau fujet.

§. VI. (1) Voiez ce que l'on a dit ci-deffus, Chap. II. de ce Livre, §. dern. & la Differtation de Mr. Buddé, intitulée, Jurispr. Hift. Specim. §. 54, & seqq. où cet ha

bile homme examinant l'action de Clélie, fait voir, qu'un
Otage ne doit pas fe fauver.

Sic. Lib.IV. Cap.

LV.

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Des Alliances; & des Conventions Publiques faites fans ordre

§. I. PA

du Souverain.

de fortes d'Al

ARLONS maintenant de ces fortes de Conventions Publiques (a), que l'on ap- Combien il y a pelle (1) des Alliances. Il y en a en général de deux fortes: les unes qui regardent lances?

5.1. (1) Je n'ai point trouvé de terme plus propre pour exprimer le Latin, Fadera. Le mot de Traité auroit été trop général; car on voit bien que l'Auteur exclut ici les Conventions faites pendant la Guerte, foit pour modérer ou fufpendre les actes d'hoftilite, foit pour par ler fimplement de Paix, puis qu'il en a déja traité dans les Chapitres précedens. D'ailleurs il dit lui-même dans TOM. II.

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(a) Voiez Grotius, Lib. II. Cap. XV. §. 1, & feqq.

Des Alliances

qui regardent quelles on étoit deja obligé par

des chofes aux

le Droit Naturel.

(a) Voicz Grotius,

ubifuprà, S. s.

fimplement des chofes auxquelles on étoit déja tenu par le Droit Naturel: les autres qui ajoutent un nouvel engagement aux Devoirs du Droit Naturel, ou qui du moins les déterminent à quelque chofe de précis & de particulier.

§. II. IL FAUT mettre au prémier rang (a) les Alliances où l'on s'engage de part & d'autre à fe rendre fimplement les Devoirs de l'Humanité, ou à ne fe point faire de mal (1) les uns aux autres. Parini les Anciens, on regardoit ces fortes d'Alliances comme abfolument néceffaires entre ceux qui n'étoient liez ensemble par aucun Traité. Car cette maxime du Droit Naturel, qui porte, Que la Nature aiant mis quelque parenté entre tous les Hommes, perfonne ne doit faire du mal à autrui, fans qu'on lui en ait donné fujet par quelque offenfe on par quelque injure; cette maxime, dis-je, étant effacée alors de l'efprit de la plupart des gens, on croioit, qu'il ne falloit obferver les Devoirs de l'Humanité qu'envers fes Concitoiens, & qu'on pouvoit fort bien regarder tous les Etrangers fur le pied d'Ennemis, & leur faire du mal toutes fois & quantes qu'on le jugeroit à propos pour fon propre intérêt. Mais parmi les Peuples civilifez, qui font profeffion de fuivre les Loix du Droit Naturel, ces fortes d'Alliances ne font nullement néceffaires (2). Il est vrai néanmoins, que les Peuples, auffi bien que les Particuliers, peuvent honnêtement fe faire les uns aux autres des proteftations particuliéres d'amitié, lors qu'ils commencent à contracter ensemble quelque affaire (3), ou à entrer dans quelque liaison. Du refte, des gens tant foit peu civilifez devroient prefque rougir de faire un Traité dont les Articles fe réduifent à une fimple promeffe de ne pas violer directement les maximes du Droit Naturel; comme fi la vûe feule du Devoir, fans cet engagement exprès, n'étoit pas capable de faire impreffion fur eux. A la vérité on colore quelquefois ces Traitez du beau nom d'Amitié. Mais les Loix de l'Amitié proprement ainfi nommée demandent bien plus de chofes, que les Loix de l'Humanité toute feule. Car, quoi que les Devoirs de l'Amitié ne foient pas déterminez, comme les engagemens où l'on eft entré par une Convention; un Ami eft tenu en général, comme chacun fait, de faire part volontiers de fes biens à fon Ami, de prendre foin de fa confervation & de fes intérêts, de lui donner fes bons avis, de le confoler, de le fecourir, de détourner, autant qu'il peut, les maux qui le menacent; & en tout cela il doit agir avec plus d'affection & d'empreffement, qu'il ne feroit en fa(b) vbi fuprà, veur de ceux à qui il rendroit quelque fervice par un pur principe d'Humanité. Grotius (b) rapporte ici les Alliances, par lefquelles on ftipule un droit d'Hofpitalité & un droit de Commerce dans les terres l'un de l'autre; entant que tout cela est dû à autrui (4) par le

лит. 3.

Droit Naturel.

Au refte, nôtre Auteur remarquoit ici, que Pline (Hift.
Nat. Lib. VII. Cap. LVI.) attribue à Thésée l'invention
des Alliances; ce qui, ajoûte-t-il, ne fauroit être ad-
mis qu'en ce fens, que Thésée fut le prémier qui intro-
duifit dans la Grece l'ufage de faire des Alliances, ou
bien qui y ajoûta fimplement certaines formalitez &
certaines cérémonies, pour les rendre plus folennelles.

§. II. (1) Voiez Genef. XXI, 23. Dans un Traité des
Lacédémoniens avec le Roi de Perfe, il y avoit cette
claufe: Que tous les Païs, & toutes les Villes, dont le Roi
étoit en poffeffion, & qui avoient été poffedées par fes An-
cêtres, demeureroient fous fa puiffance. Orion xazy na
πόλεις βασιλεὺς ἔχει, καὶ οἱ πατέρες οἱ βασιλέως είχον,
Bromics isw. Thucydid. Lib. VIII. Cap. XVIII. Ed. Oxon.
Mais je ne trouve point dans le refte du Traité, qui eft
fort court, les paroles fuivantes, que nôtre Auteur rap-
portoit tout de fuite en caractere Italique: Que les La-
cedemoniens & leurs Allicz, ne pourroient point aller
dans ces endroits-là), pour leur faire la Guerre, ou pour
leur caufer du dommage de quelque autre maniére, & qu'ils
n'en exigersient non plus aucun impôt ; En un mot, que
te Roi difpoferoi feul de fes Etats. C'eft là, (ajoûtoit no-
tre Auteur) un exemple de ces fortes d'Alliances; à
mains qu'on ne prenne cette claufe-pour une fimple ré-

§. III.

nonciation des Lacédémoniens à toutes les prétenfions qu'ils pouvoient avoir fur l'Afie car du refte, PAße appartenant au Roi de Perse indépendamment de ce Traité, il avoit, en vertu de cette Propriété toute feule, le pouvoir de difpofer de fes terres comme il le jugeoit à propos, & le droit d'exiger qu'aucun autre ne les envahit. Voiez auffi le Traite de Paix entre les Athéniens, & les Perfes, rapporté par Diodore de Sicile, Lib. XII. Cap. IV.

(2) Voiez ci-deffus, Liv. II. Chap. II. §. 11.

(3) L'Auteur appliquoit ici, mais mal à propos, ces paroles de Ciceron, qui, comme toute la fuite du difcours le fait voir, ne regardent que les recommanda tions favorables par lefquelles il eft bon de s'introduire dans l'amitié de quelcun. Sed tamen in omnibus novis conjunctionibus intereft, qualis primus aditus fit, & quà commendatione quafi amicitia fores aperiantur. Epift. ad Famil. Lib. XIII. Ep. X.

(4) Voiez ci-deffus, Liv. III. Chap. II. §. 9, 11, 12. Grotius cite ici ces paroles d'Arco, dans fa Harangue aux Achéens, comme renfermant la diftin&tion des Alhances qui ne concernent que ce qui étoit déja dû par le Droit Naturel, & de celles qui ajoûtent quelque chofe aux Devoirs de la Loi Naturelle: Nemo nova focietatis

§. III. LES Alliances, par lefquelles on s'engage à quelque chofe de plus que ce qui Des Alliances étoit dû d'ailleurs en vertu du Droit Naturel commun à tous les Hommes (a), fe divifent gales & de en Alliances Egales, & Alliances Inégales.

de

Les Alliances Egales, font celles que l'on contracte avec une entiére égalité de part & d'autre (1); c'est-à-dire, dans lesquelles non feulement on promet de part & d'autre des chofes égales ou purement & fimplement, ou à proportion des forces de chaque Allié, mais encore on les promet fur le même pied, en forte qu'aucune des Parties ne fe reconnoit inférieure à l'autre en quoi que ce foit. Ces Alliances, auffi bien que les Alliances Inégales, le font en vue de quelque fociété, qui regarde ou le Commerce, ou la Guerre, foit Offenfive, on Défenfive, ou d'autres chofes. A l'égard du Commerce, on peut contracter une Alliance Egale en diverfes maniéres: par exemple, en ftipulant que les Sujets part & d'autre feront francs de tout impôt & de tous droits d'entrée ou de fortie, lors qu'ils viendront fur les terres ou dans les Ports de l'autre Allié; ou qu'ils ne paieront jamais que fur le pied de ce qui eft établi dans le tems du Traité; ou qu'on n'exigera rien d'eux au delà d'une certaine taxe; ou qu'on ne leur demandera pas davantage qu'aux gens même du Pais, ou aux autres Alliez &c. Dans les Alliances Egales, qui concernent la Guerre, on ftipule, par exemple, que chacun donnera à l'autre un égal fecours de Troupes, de Vaiffeaux, ou d'autres chofes qui fervent aux expéditions militaires; & cela ou dans toutes fortes de Guerres, tant Offenfives, que Défenfives, ou dans les Guerres Défenfives feulement. Quelquefois auffi on ne fe promet du fecours l'un à l'autre que dans une certaine Guerre particulière, ou contre certains Ennemis, ou contre tous ceux qui ne font pas Alliez de l'un ou de l'autre. Enfin il y a d'autres chofes à l'égard defquelles on fait des Alliances Egales, par exemple, lors que l'on s'engage à ne point avoir de Place forte fur les frontiéres l'un de l'autre; à ne point accorder de protection, ni donner retraite aux Sujets l'un de l'autre, ou à faire prendre & renvoier ceux qui viendront fe réfugier dans le Pais; à ne point donner paffage aux Ennemis l'un de l'autre &c.

de

leurs différentes
fortes.
(a) Voiez Grotius,

ubi fuprà, §. 6.

Inégales.
ubi fupra, §. 7.
(a)Voiez Grotius,

§. IV. LES Alliances Inégales (a) font celles (1), dans lefquelles ce que l'on promet Des Alliances part & d'autre n'eft pas égal, ou bien qui rendent l'un des Alliez inférieur à l'autre. L'inégalité de la chole ftipulée eft tantôt du côté de celui qui eft d'un rang plus élevé, & tantôt du côté de l'Allié inférieur. Le prémier cas arrive, lors que le plus puiflant Allié promet du fecours à l'autre, fans en ftipuler aucun de lui à fon tour; ou lors qu'il lui promet un fecours plus confidérable que celui qu'il exige de lui à fon tour. L'autre fe voit, lors que l'Allié inférieur s'engage à faire en faveur de l'autre plus que celui-ci ne lui promet de fon côté. Ces derniéres fortes d'Alliances donnent quelquefois atteinte à la Souveraineté de l'Allié inférieur; comme cela paroit dans le Traité des (b) Romains avec les (b) Voicz Tite Carthaginois, après la feconde Guerre Punique: car il étoit porté, que les Carthaginois ne Cap. XXXVII. pourroient faire la Guerre a perfonne, ni an dedans ni hors de l'Afrique, fans le confente- Voiez auffi ce ment du Peuple Romain. Mais la Souveraineté de l'Allié inférieur demeure en fon entier, qu'Appien d' Alors la condition onéreufe qu'on lui impose n'est pas permanente, c'eft à-dire, qu'il la Grande Armépeut nie,

que

aut novi fæderis, quo nos temerè illigemus, confcribendi eft auctor: fed commercium tantùm juris præbendi reperen. dique fit, ne interdictione finium noftrorum & nos quoque regno arceamus: ne fervis noftris aliquo fugere liceat. Quid bac adverfus Romana fœdera eft? (Tit. Liv. Lib. XLI. Cap. XXIV.) Sur quoi nôtre Auteur faifoit voir ici, par la fuite du difcours, que la pensée d'Arco eft feulement, que ceux qui ftipulent fimplement les uns des autres quelque Devoir d'Humanité, ne font pas proprement Alliez; & que les Achéens pouvoient fort bien, fans préjudice de leur Alliance avec les Romains, ne pas fermer l'entrée de leur Païs aux Macédoniens.

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Live, Lib. XXX.

lexandrie dit de

nie, dans fa Pré. face, p. 2. A. Ed. κοινῶς ἐν ἀμφοτέροις ἔχωσι; Προσάγματα ἢ, τὰ τὰς ἑτί- Η. Steph. & le pus inurlivra og i dinator; Panegyr. pag. 132. Qui Traité de Pierre ne fait que les Alliances font des Traitez où l'on ftipule de Ambaffadeur de part & d'autre des conditions égales? Au lieu que ceux qui l'Empereur Jufrenferment des conditions défavantageufes & trop déraifen- tinien, avec Thea nables, au préjudice de l'une des Parties, ne font autre cho- dat, Roi des fe que des Loix qu'on lui impofe. Mais, ajoûte nôtre Au- Goths en Italie, teur, il n'eft pas néceffaire de mettre ces mots, wag dans Procop. Lib. I. Cap. VI.

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§. IV. (1)J'ai exprimé ici en propres termes ce que
notre Auteur dit dans fon Abrégé de Off. Hom. & Civ.
car ici il ne décidoit rien, du moins diftin&tement. J'ai
renvoie auffi, ou à la marge, ou dans les Notes fuivantes,
plufieurs chofes qui ne faifoient qu'interrompre fans ne-
ceffité la fuite du difcours, & la liaifon de la matière.
Lil 2
(2) C'est

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