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été commis. Le même Péché commis dans un lieu public & à la vûe des gens, eft plus grand que fi on le commettoit en cachette; non feulement parce que les Crimes fecrets font moins nuifibles à autrui, du moins en ce qu'ils ne donnent pas un exemple contagieux, mais encore parce qu'il paroit un grand fond de malice dans un homme qui n'a point de honte de pécher en préfence des honnêtes gens, comme s'il faifoit gloire de fes méchantes actions. Il eft plus vilain de s'abandonner à l'impureté dans un Temple, que dans un Cabaret. C'est un plus grand affront pour un homme, d'être battu dans l'Affeniblée des Juges, que dans fa maifon. Celui qui s'enyvre un Jour ouvrier, commet, toutes chofes d'ailleurs égales, un moindre Péché, que s'il s'enyvroit un Jour de Dévotion, ou un Dimanche.

Enfin la maniére dont on a commis le Crime, & les Inftrumens dont on s'eft fervi, marquent fouvent une intention plus ou moins forte, & par conféquent fervent alors à augmenter ou à diminuer l'atrocité du fait. Ainfi un Vol paffe pour plus criminel, lors que le Voleur a enfoncé les portes, ou percé la muraille, ou qu'il s'eft fervi de fauffes clefs ou de paffe par-tout, que s'il s'étoit gliflé dans la maifon par une porte ouverte.

fance & de la dé

(a)Voiez Grotius,

Jul. Peculatus

§. XXI. 3. IL faut encore bien examiner ici, pour juger de la grandeur d'un Crime, 3. De la connoiffi celui qui l'a commis pouvoit aifement s'en empêcher. En effet, il y a des gens (a) qui ont liberation avec l'Efprit plus pénétrant que les autres, & plus propre par conféquent à découvrir ou à com- laquelle on fe prendre les raifons pour lesquelles on doit s'abftenir du Vice. Quelques-uns auffi font en- porte au Crime. trainez avec plus de force que les autres, à une certaine forte de Péchez, par un effet du Lib. II. Cap. XX. tempérament, de l'age (b), du fexe, de l'éducation, & d'autres circonftances femblables. $. 31. num. 1. (b) Voiez Digeft. Les Enfans, les Femmes, les gens groffiers & ftupides, ou ceux qui ont été mal élevez, Lib. XLVIII.Tit. font fans contredit moins capables, que les autres, de difcerner le Jufte d'avec l'Injufte, XI. Ad Leg. le Licite d'avec l'Illicite. Il y a des Vices (c) Nationaux, pour ainfi dire. Les perfonnes bi- &c. Leg.VI.princ. lieufes font enclines à la Colére: ceux qui font d'un tempérament fanguin, ont du pan- (c) Voiez ce que chant à l'Amour. Les Vieillards ont d'autres inclinations, que les Jeunes gens, & par tout Hérules, Hift. Procope dit des pais on pardonne (1) bien des choses à l'imprudence & au feu de la Jeuneffe. Plus un Mal Vandal. Lib. II. paroit prochain, plus le trouble, où il jette, eft grand, & la fraieur, qu'il infpire, diffi- Cap. XIV. cile à furmonter. La Colére eft plus violente dans fon commencement, qu'après quelque intervalle; & le rellentiment d'une injure, qui, lors qu'elle eft encore toute récente, ne permet guéres de prêter l'oreille à la Raifon, devient moins vif avec le tems. Or en général les Crimes commis de (2) fang-froid paflent pour plus énormes, que ceux où l'on eft pouflé par quelque Paffion, ou par un effet de quelque accident imprévû qui trouble l'Ef prit. Un ancien Législateur (3) établit néanmoins une double peine pour ceux qui avoient battu quelcun, ou commis quelque autre Crime dans le vin: mais c'eft qu'y aiant plus de gens qui infultent les autres dans la chaleur de la débauche, qu'il n'y en a qui le font fans avoir bú, il avoit égard à l'utilité publique, & non pas à l'action en elle-même, qui, détachée de cette vie, eft plus pardonnable dans un homme yvre, que dans un autre qui la commet de fang-froid. De plus, comme nous l'avons déja dit, entre les Crimes qui doi

5. ΧΧΙ. (1) Οὐ ταῦτ ̓ ἐσιν τ' νεότητα οπακῶς ἐκφέρεις * προσηκόντων; ἀγνωσαί τι 7 πρεπόντων. Αλλ' ὅπε πες ἀνθρώπων γένω, ἐκεῖ καὶ παραίτησις τοῖς νεοτέροις οι χρό v Libanius, Declam. XXI. pag. 531. C. D. Ed. Parif. Morell. Ferè in omnibus pænalibus judiciis, & atati, & imprudentia fuccurritur. Digeft. Lib. L. Tit. XVII. De diverfis Reg. Juris, Leg. CVIII. Voiez Cicer. Orat. pro M. Calio, Cap. XVII. XVIII. & Gramond. Hift. Gall. Lib.

XIII.

(2) Sed in omni injuftitia permultum intereft, utrum perturbatione aliqua animi, qua plerumque brevis eft, & ad tempus, an confulto, & cogitara fiat injuria. Leviora enim funt, que repentino aliquo motu accidunt, quam ca, que meditata & preparata inferuntur. Cicer. de Offic. Lib. I. Cap. VIII. Voiez la-deffus les Commentateurs; &

vent

Platon, de Legib. Lib. IX. p. 931. C. Ed. Wech. Ariftot.
Ethic. Nicom. Lib. VII. Cap. VIII. Philon, de Leg. Special.
pag. 791. B. Ed. Parif.

(3) Pittacus, comme Ariftote le rapporte. Nu î
ίδιο αὐτῇ [Πιτιακές, τὸ τις μεθύοντας, ἂν τυπτήσωσι,
πλείω ζημίαν Σποτίνειν ἢ νηρόντων. διὰ γδ το πλείες υδρί
ζειν μεθύοντας, ἢ νήφοντας, 8 πρὸς τὴν συγΓνώμην ἀπέ
βλεψεν, ὅτι δεῖ μεθύεσιν ἔχειν μάλλον· ἀλλὰ πρὸς τὸ συμβ
egv. Polit. Lib. II. Cap. XII. in fin. Dans le Fef
tin des Sept Sages, Plutarque fait reprocher à Pittacus
par Anacharfis, que fa Loi etoit trop rude. Tev adv cust-
νου + χαλεπὸν φοβεῖται νόμον, ἐν ᾧ γέγραφας,
εάν τις
τιν μεθύων ἁμαρτάνη, διπλασίαν, ἢ τῷ νήφοντες τὴν
Zular. Pag. 155. F. Mais la raifon alléguée par Ariftote,
fuffit pour juftifier çe Legislateur,
(4) Nội

4. De l'habitude

à mal-faire.

vent leur naiffance à quelque Paffion, ceux auxquels on fe porte pour éviter quelque Mal (4), font inoins odieux, que ceux auxquels on eft pouffé par les attraits du Plaisir, fur tout d'un Plaifir fuperflu. Car, outre que l'idée du Plaifir ne fait pas de fi fortes impreffions que celles de la Douleur; on peut différer davantage la fatisfaction de fes défirs, & fe la procurer plus aifément par le moien d'un autre objet, & fans faire tort à personne. Parmi les Hommes, c'eft auffi une raison affez forte d'adoucir la Peine (5), lors que le Coupable a été pouffé au Crime par un effet de la tendreffe & de la confidération qu'il a pour fes parens.

§. XXII. ENFIN, on examine ici encore, fi le Coupable (1) a le prémier commis cette forte de Crime, ou s'il a été féduit par l'exemple des autres; & s'il l'a commis une ou plufieurs fois. Celui qui commet le prémier, dans un Etat, quelque Crime nuifible par La contagion, & qui l'enfeigne, pour ainfi dire, aux (2) autres par fon exemple, péche avec plus d'effronterie, & eft fans contredit plus coupable, que celui qui fe laisse entrainer au crime par le torrent. De même une perfonne qui s'abandonne à un Crime que l'on punit d'ordinaire fans remiffion, paffe pour plus coupable, que s'il y avoit plufieurs. exemples d'impunité; parce que, dans le prémier cas, il paroit un plus grand mépris des Loix & du Souverain, que dans le fecond. Une Action n'eft pas en elle-même meilleure ou plus mauvaise, pour avoir été réitérée plufieurs fois. Cependant, comme en matiére de Morale on a beaucoup d'égard au degré d'Intention avec lequel une personne agit, & que les chofes auxquelles on eft accoûtumé s'exécutent d'ordinaire avec un plein & entier confentement il eft aifé de comprendre pourquoi une Bonne Action passe avec raison pour plus louable, lors qu'on l'a faite fouvent, que quand on ne l'a faite qu'une ou deux fois; & une Mauvaise Action (3) au contraire pour plus criminelle, lors qu'on l'a (a) commife fouvent, que quand on ne l'a commife qu'une ou deux fois. Et il ne ferviroit de rien d'objecter, que l'Habitude rend facile la pratique des Bonnes Actions, & difficile au contraire l'abftinence des Mauvaises. Car la peine qu'un homme de bien a prife pour contracter une bonne Habitude, empêche que les Actions, auxquelles elle le porte, foient de moindre prix, quoi qu'il les produife facilement & avec plaifir. Au lieu qu'un Méchant eft d'autant plus criminel, qu'à force de mal-faire il s'eft mis en état de ne pouvoir presque plus s'en empêcher, & qu'en s'accoûtumant au Crime il a entiérement dépouillé toute honte. C'eft une foiblefle humaine que de s'oublier quelquefois: mais de retomber fou(b) Voiez Th. vent dans la même faute, c'eft une espéce de fureur. (b) Un Crime commis par une perfonne (4) agée de seize ans, n'est pas le même, toutes chofes d'ailleurs égales, lors qu'elle s'y

fa) Voiez Grotius, Lib. II. Cap. XX.

5. 30. num. 3.

Browne, de Relig.
Medic. Se&.XLI.

(4) Nôtre Auteur rapporte ici un paffage de Marc Antonin, & trois d'Ariftote, que j'ai deja citez ailleurs, Liv. I. Chap. IV. §. 7. Not. 7. ne fachant pas qu'ils fuffent ici. Voiez auffi Magn. Moral. Lib. II. Cap. VI. pag. 178. D. E. Edit. Parif. & Problem. Sect. XXIX. Quæft. XVI. & Grotius, Lib. II. Cap. XX. §. 29. num. 2.

(s) Par une Loi du Digefte, il eft ordonné de ne pas punir avec beaucoup de rigueur ceux qui ont réfugié chez eux un Voleur qui eft leur parent, ou leur allié. Eos, apud quos adfinis vel cognatus latro confervatus eft, neque abfolvendas, neque fevere admodum puniendos: non enim par eft eorum delictum, & eorum qui nihil ad fe pertinentes latrones recipiunt. Lib. XLVII. Tit. XVI. De receptatoribus, Leg. II.

§. XXII. (1) Kai & μóv☺, i ægût, & μer' iniyor σε τοίηκεν· καὶ τὸ πολλάκις τὸ αὐτὸ ἁμαρτάνειν, μέγα. Ariftot. Rhetoric. Lib. I. Cap. XIV. Et [infame eft] fi quod eft exemplum deforme pofteris traditum, quale libidinis vir Perfes in muliere Samia inftituere aufus dicitur primus. Quintilian. Inft. Orat. Lib. III. Cap. VII. pag. 240. Ed. Lugd. Bat.

(2) Non enim ibi confiftunt exempla, unde cœperunt; fed quamlibet in tenuem recepta tramitem, latiffimè evagandi fibi viam faciunt: &, ubi femel recto deerratum eft, in

aban.

præceps pervenitur: nec quifquam fibi putat turpe, qued alii fuir fructuofum. Velleius Patercul. Lib. II. Cap. III. Voiez pourtant Aul. Gell. Lib. X. Cap. XIX. & Polybe, Excerpt. Legat. XCIII. Cap. V.

(3) Voiez la Loi de l'Empereur Julien contre ceux qui avoient menti quatre fois; dans Libanius, Legat. ad Julian. comme auffi Digeft. Lib. XLVIII. Tit. XIX. De Panis, Leg. XXVIII. §. 3. Anton. Matthaus, de Criminib. Tit. de Furtis, §. 9. & feqq. & ad Leg. XLVIII. Digeft. Tit. XVIII. Cap. IV. §. 27, 28. Dans le Persu neanmoins, (comme le remarquoit encore nôtre Auteur) fous l'Empire des Incas, on étoit fort févere à punir les prémiers crimes, pour empêcher que le Coupable n'y retombât une autre fois, & pour étouffer cette mauvaise plante pendant qu'elle étoit encore en herbe; comme auffi de peur que les autres ne fe laiffaffent aller plus aifément à des actions, dont ils efpereroient de n'être pas punis pour la prémiere ou la feconde fois qu'ils les commettroient. Garcil, de la Vega, Hift. des Yncas, Liv. II. Chap. XIV.

(4) Je ne fai d'où eft tiré ce paffage. Nôtre Auteur fe contente de dire: Nec abfurde ille: [Peccatum illud, quod fedecim annos natus commiferas, non idem erit, licet cetera omnia paria fint, cùm quadragenarius fueris. Pra

Ter

I, 52. II, 23.

1. Cap. XIII.

abandonne de nouveau à l'age de quarante ans; puis qu'outre la faute inexcusable dont elle eft rendue coupable en contractant l'Habitude de pécher, elle n'a pas profité des lumiéres & des forces que la maturité de fon Jugement pouvoit lui fournir. C'eft donc avec raison que l'on a égard à tout cela dans les Tribunaux Civils. Car on pardonne plus aisément, ou du moins on inflige une Peine moins rigoureuse à ceux qui commettent pour la prémiére fois une faute commune & qui n'eft pas énorme, qu'à ceux qui y font revenus fouvent. Quelquefois auffi on ne fait grace qu'à condition que le Coupable fe corrigera (c); de forte (c) Voiez I. Reit, que, s'il vient à retomber dans le même Crime, on le punit alors & pour le préfent, & pour le paffé. C'eft avec cette reftriction qu'on peut admettre la maxime commune: Qu'un fait poftérieur (s) n'aggrave pas un Crime paffe. De là il paroit encore, en quel fens le Droit Naturel autorile une pratique femblable à celle des anciens Perfes (d), qui faifoient (d) Herodot, Lib. entrer dans l'eftimation de la Peine que méritoit un Crime, la conduite paffée de celui qui l'avoit commis, en forte que, fi, dans le cours de fa vie précédente, le bien l'emportoit fur le mal, il obtenoit fa grace. Ce n'eft pas que l'on prétendît par ce moien déterminer proprement la grandeur du Crime confidéré en lui-même; & je ne crois pas qu'on eût égard au paffé, quand il s'agiffoit de quelque action atroce, & commife manifeftement par une malice préméditée. Mais cela n'avoit lieu, felon Grotius (e); ou du moins ne de- (e) Lib. II. Cap. voit avoir lieu que par rapport à une perfonne, qui n'étant pas d'ailleurs de mauvaises XX. $.30.num.3. mœurs, s'étoit laiffé furprendre aux prémiers attraits de quelque objet défendu; ajoûtons, ou lors que le Crime n'étoit pas avéré : car alors la confidération de (6) la vie paffée de l'Accufé pouvoit faire conjecturer, s'il y avoit lieu de le croire coupable, ou non; perfonne n'arrivant que par degrez (7) au comble de l'infamie. De là vient qu'autrefois, dans le Barreau Romain, l'Accufateur ne manquoit pas ordinairement d'étaler tout ce qu'il pouvoit trouver à reprendre dans la vie de l'Accufé, comme d'autre côté l'Avocat de celui-ci n'oublioit rien pour faire voir la régularité & l'innocence de toute la conduite paffée de fa Partie, & il alléguoit même, s'il pouvoit, les éloges que d'autres en faifoient. Cette confidération eft d'autant plus forte, que la penfée de la corruption générale du Genre Humain doit obliger les Juges de la Terre à ne pas retrancher de la Société trop promtement, & fans de grandes raifons, un Citoien en qui il paroit plus de difpofition au bien qu'au mal. Cependant, quoi que dans une égalité de raifons & de preuves pour ou contre, la conduite paffée de l'Accufe forme une forte préfomtion ou à fa décharge, ou à fa charge; lors qu'il s'eft une fois bien juftifié du Crime qu'on lui reproche, il peut fort bien répondre ce qu'un Ancien Auteur confeille de dire en pareil cas; (8) Qu'il n'est pas là pour rendre compte de fa vie & de fes mœurs devant les Cenfeurs, mais feulement pour fe disculper en Juftice du Crime qu'on lui impute. Que fi un homme a entiérement (f) changé de bien (Voiez Polyb. en mal, les Loix ont droit alors de le punir pour deux raifons, & parce qu'il a commis tel ou tel Crime, & parce que d'honnête homme il eft devenu un scélérat.

Excerpt. Peirefc.

Lib. VII. & Gro

tius, ubi fuprà.

dans la determi

§. XXIII. PAR tout ce que nous avons dit ci-dellus, on voit clairement que les Cri- Quelles régles mes & les Délits font en eux-mêmes plus grands les uns que les autres, & qu'ainfi ils ne on doit fuivre méritent pas tous la même Peine. Il faut avouer pourtant, que le genre & le degré précis nation precife de des Peines infligées par les Tribunaux Humains, dépend de la volonté du Souverain, qui la nature & du

ter inveteratum enim nec excufandum peccandi habitum, omnes tunc venia impetranda caufas nobis præscidit judicii maturitas.]

(5) Cette maxime fe trouve dans le Digefte, quoi que nôtre Auteur ne le cite pas: Numquam crefcit ex poftfatto prateriti delicti aftimatio. Lib. L. Tit. XVII. De diverf. Reg. Jur. Leg. CXXXVIII. §. 1.

(6) Deinde [in cauffa conjecturali] vita hominis ex antè factis fpectabitur, [ut probabile fiat] Auctor ad Herenn. Lib. II. Cap. III. Omnibus in rebus, Judices, que graviores majorefque funt, quid quifque voluerit, cogitarit, admiferit, non ex crimine, fed ex moribus ejus, qui arguitur, TOM. II.

degré des Pei

fe ncs?

eft ponderandum. Neque enim poteft quifquam noftrum fubito
fingi, neque cujufque repente vita mutari, aut natura con-
verti. Cicer. Orat. pro P. Sulla, Cap. XXV. Voiez auffi
la Harangue pour Cluentius, Cap. XXV. à la fin.
(7) Nemo repente fuit turpiffimus.
Juven. Sat. II. verf. 83.
Voiez auffi le paffage de Ciceron, qui vient d'être cité dans
la Note précédente.

(8) Sin nihil horum fieri poterit, utatur [Defensor] ex-
trema defenfione, & dicat non fe de moribus ejus apud Cen-
fores, fed de criminibus adverfariorum apud Judices dicere.
Auctos ad Herenn. Lib. II. Cap. III.

Aaa

§. XXIII.

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II. pag. 90. Ed.

Voiez Diod. Si

LX.

(c) Nommée allufion aux nez

Rhinocolure, par

coupez de ces gens-là.

(a) Herodot. Lib. fe régie principalement fur le bien de l'Etat. Un ancien Roi (a) d'Egypte ne voulut, penH. Voiez dant tout fon régne, punir de mort aucun Criminel; mais il les condamnoit, chacun à auli Diod. Sic. proportion de fon Crime, à charrier une certaine quantité de terre pour les chauffées de Lib.I. Cap. LXV. la ville d'où ils étoient, de forte que par ce moien les Villes d'Egypte furent rehauffées, & (b) Altifanes. mifes à couvert des inondations du Nil. Un autre Roi (b) de ce pais-là, trouva plus à cul. Lib. 1. cap. propos, pour empêcher que le commerce de ces fortes de gens n'infectat les autres, de les reléguer tous dans une ville (c) qu'il fit bâtir exprès. Et au fond il n'eft pas abfolument néceffaire qu'il y ait toujours entre les Peines la même proportion, qu'entre les divers Objets qui fe trouvent offenfez par les différens Crimes: mais on peut punir chaque Crime en particulier, felon que le demande l'utilité publique, fans confidérer s'il y a une égale ou une moindre Peine établie pour un autre Crime qui paroit moindre ou plus grand en lui-même. Platon (1) veut, que tous ceux qui voleront quelque chofe de ce qui appartient an Public, foient punis de la même maniére, foit que la chofe dérobée fe trouve de pen de valeur, on de grand prix. Car, dit-il, celui qui vole une chofe de peu de valeur, n'a pas befoin à la vérité d'une fi grande force, que celui qui en vole une de grand prix, mais il est pouffé par le même défir. Du refte, celui qui emporte une chofe de grand prix d'un endroit on il ne l'avoit pas mife lui-même, commet certainement une injustice fouveraine. La Loi vent donc que l'on puniffe un Voleur plus févérement que l'autre, non felon la grandeur du vol, mais felon que l'un paroit plus incorrigible que l'autre. Ainfi l'égalité que les Juges doivent toûjours obferver indifpenfablement dans l'exercice de la Justice, confifte å punir également ceux qui ont également péché, & à ne pas pardonner à une perfonne, fans de trèsfortes raisons, un Crime dont on a puni quelque autre: car, outre que cela donne lieu ordinairement à de grands troubles, on foupçonne alors les Juges de prononcer felon leurs Paffions particuliéres, & non pas en vue du Bien Public, de forte que la Punition ne produit pas alors l'effet auquel elle eft deftinée. Cette égalité néanmoins ne doit être entendue que par rapport aux Crimes de même espéce. Car, felon que le demande le bien de l'Etat, ou felon que le Légiflateur le juge à propos, on punit, parmi les Hommes, certaines fortes de Crimes, plus rigoureufement que d'autres qui par eux-mêmes font plus énormes; & moins féverement au contraire certains Crimes plus énormes: fans que pourtant, ni en l'un ni en l'autre cas, les Criminels, qui ont encouru la Peine portée par les Loix, aient aucun fujet de fe plaindre d'une inégalité dont (2) ils avoient été avertis, & (d)Voiez Lycurg. Orat, adv. Leo- qu'il ne tenoit qu'à eux de ne pas éprouver. Le Vol, par exemple, eft de lui-même beau(c) Voicz Euri- coup moins criminel que l'Homicide: cependant les Voleurs l'Homicide: cependant les Voleurs peuvent, fans injustice, être pid. Hippol. coron. punis de mort, auffi bien que les Meurtriers, lors que la Loi les y condamne les uns & V.147. Sall. Bell. les autres. Il eft vrai que la raifon pourquoi certains Crimes inégaux par eux-mêmes font Cafaris; Ovid. également punis du dernier fupplice, c'eft qu'il n'y a point parmi les Hommes de plus grande Epift. Heroid. X, Peine que la (d) Mort; qui eft feulement plus ou moins terrible, felon qu'on fe fert, pour 82. Senec. Agam. ôter la vie, d'une voie courte & douce, ou de tourmens lents & cruels. Il y a même des Fr. verf. $12. gens qui aimeroient mieux mourir (e) que de mener une vie miférable; & un AuSueton. in Tiber. Cap. LXI. Phi teur (f) François met au nombre des fottes opinions du vulgaire, celle qui confifte à penLoftrat, in Vita A- fer bien fe venger de fon ennemy en le tuant: car, dit-il, c'est le mettre à l'abry & à con(f) Charron, de la vert de tout mal, & s'y mettre foy: c'est lui ofter tout le reffentiment de la vengeance, qui Sagee, Liv. 1. est toutefois fan principal effect. Il faut ajoûter, à moins que nôtre propre fûreté ne deman(VI.) S. 10. Voiez de, que l'Ennemi ne foit entiérement détruit. Quelquefois on flêtrit (g) le cadavre ou la Montagne, Liv.II. mémoire d'un Criminel, fur tout lors qu'il eft mort depuis long-tems; comme d'autre côChap. XXXVI. té on (h) efface quelquefois, après fa mort, les marques d'ignominie dont il avoit été cou

crat.

Catilin. in Orat.

verf.989.& Herc.

poll.Thyan. L.I.

Chap. XXXIX.

(g) Voiez Elien,

V. Hit. Lib. IV.
Cap. VII.

(h) Voiez Socrat.
Mif. Ecclefiaft.
Lib. VII. Cap.

XLIV.

5. XXIII. (1) Ἐάν τις τὸ κλίπλῃ δημόσιον, μέγα ἢ καὶ σμικρόν, δ αὐτὸς δίκης δει. σμικρόν τι γδ ὁ κλέπτων, έροτι αν ταυτῷ, δυνάμει ἢ ἐλάττονι κέκλοφεν" δ, το τὸ μείζον κινῶν, ὁ καταθέωνα, ὅλον ἀδικεῖ. Δίκης ἂν ἐδέτε τον δυτέρα ἐλάτονα, ἕνεκα μεγέθες σε κλέμματα, ὁ

vert

νόμῳ ἀξιοῖ ζημιών· ἀλλὰ τῷ 7 μ$ὶ ἴσως ἂν ἰάτιμον ἔτ ̓ sivas, tj aviarov. De Legibus, Lib. XII. au commencement, pag. 982. C. Ed. Wech.

(2) Ubi, quid futurum eft denuntiatum, culpa patientis eft. Calpurn. Flaccus, Declam. V.

(3) C'eft

rigueur de Dra

vert pendant fa vie. La détermination des Peines dépend même un peu de la volonté du Légiflateur, quoi que cette volonté ne foit pas fi abfolue, qu'elle ne doive toûjours envifager le bien de l'Etat; mais du moins le point précis de la Peine eft véritablement un pur effet de fa détermination. Ajoutez à cela, qu'il y a des Crimes fi atroces, qu'on peut trèsbien, fans aucune ombre d'injuftice, infliger les plus grandes Peines à ceux qui fe font rendus coupables du moindre degré de ces Crimes, ou qui en ont feulement formé le (3) deffein. Tels font, par exemple, un deffein formé & commencé (4) d'Affaffinat; un fimple filence (5) fur un Crime de Trahison, ou de Léze-Majefté, dont on eft informé, fans y avoir néanmoins aucune part. J'avoue, qu'autant qu'il eft poffible, on doit (i) pancher vers le côté le (6) plus doux. Mais on peut fort bien augmenter envers (i) Sans imiter la quelcun la rigueur des Peines, fi la confervation & la fûreté d'un grand nombre de gens to blame & le demande, comme, lors que le Criminel eft (k) capable de faire beaucoup de mal, fi adoucie par Son ne le punit de bonne heure. Quelquefois auffi il faut faire un exemple qui intimide les lon; ni celle des autres; fur tout lors qu'il y a quelques causes générales qui engagent au Crime (1), & dont foient de mort on ne fauroit empêcher l'effet que par des remédes violents. Les principaux de ces attraits, prefque tous les font la (7) facilité de commettre certains Crimes, & le grand nombre de ceux qui le com- de la Vega, Hift. mettent tous les jours. Comme il eft, par exemple, plus facile de voler du bêrail qui des Yncas, Liv. paît à la campagne, que de dérober quelque chofe dans une maifon (m), la Loi Divine (k) Voiez l'Apode Moife punifloit plus févérement le prémier Larcin, que l'autre. Parmi plufieurs Peu- logie pour Heroples les Vols domeftiques (n) paffent pour plus énormes, que ceux qui font faits par des étrangers. Les anciens Perfes (8) céloient le fecret du Prince avec une fidélité merveillen fe: il n'y avoit promeffe ni menace qui pût l'arracher de leur bouche; l'ancienne difcipline §. du Roiaume les obligeoit au filence fur peine de la vie. L'intempérance de la langue, parmi eux, étoit plus févérement châtiée que tout autre crime; & ils n'eftimoient pas qu'une perfon- les ne fut capable de faire rien de grand, fi elle ne favoit fe taire; puifque c'est la chofe du

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(3) C'est ce que les Empereurs Arcadius & Honorius ordonnent contre ceux qui ont tramé quelque confpiration, ou qui y font entrez pour quelque chofe, fans en être venus à l'execution. Quifquis cum militibus, vel privatis, vel barbaris fceleftam inierit factionem, aut factionis ipfius fufceperit facramentum vel dederit, de nece etiam virorum illuftrium, qui confiliis & confiftorio neftro interfunt, Senatorum etiam (nam & ipfi pars corporis noftri funt,) vel cuiuflibet poftremo, qui nobis militat, cogitaverit: (eadem enim feveritate voluntatem fceleris, quá effeltum, puniri jura voluerunt) ipfe quidem, utpote Majeftaris reus, gladio feriatur, bonis ejus omnibus fifco noftro addictis. Cod. Lib. IX. Tit. VIII. Ad Leg. Jul. Majeftatis, Leg. V. princ. Voiez là-deffus Grotius, dans fes Florum fparf. in Jus Justinian. En effet, comme le dit Senéque, l'exécution ne fait que découvrir la malice, qui étoit deja toute formée. Exercetur & aperitur opere nequitia, non incipit. De Benefic. Lib. V. Cap. XIV. Voiez Quintilian. Declam. CCCLXII. Tacit. Hift. Lib. II. Cap. LXXVII. Plutarch, in Cafar. & Vellei. Paterc. Lib. II. Cap. VIII. C'eft pourtant (difoit nôtre Auteur) une fentence trop rigoureufe que celle des Juges de l'Areopage, qui condamnerent à mort un enfant pour avoir crevé les yeux à quelques Corneilles; parce que cela marquoit un tres-mauvais naturel, & que, fi cet enfant devenoit grand, il étoit à craindre qu'il ne fit du mal à bien des gens. Quintil. Inft. Orat. Lib. V. Cap. IX.

(4) Lege Cornelia de ficariis & veneficis tenetur qui.... hominis occidendi furtive faciendi caufa cum telo ambulaverit.... Divus Hadrianus refcripfit, eum qui.... hominem on occidit, fed vulneravit, ut occidat, pro homicida damnandum. Digeft. Lib. XLVIII. Tit. VIII. Leg. I. princ. & §. 3. Voiez Philon Juif, de confuf. ling. p. 343. C. & de fpecial. Legib. p. 791. Ed. Parif. & Lyfias, Orat. in Simon. Cap. XII.

Incas, qui punif

II. Ch. XII. XIII.

dote,par H. Etienne, Chap. XVII. Lib. II. Cap.XX.

(1)Voicz Grotius, 34, 35.

(m) Exod. XXII, v. 7, 9. Voicz d'autres exem

1. comparé avec

ples, Digeft. Lib. mon- XLVII.Tit XVII.

De effractorib. & expilatorib. Leg. II. Arilor. Problem.Sect. XXIX. Quæft. XIV. Jus tin. Lib. II. C. II. Dig. Lib. XLVII. Tit. XVII. De furib. balneariis, Leg. I. & Anton. Matth. de Crim. fur ce Titre, aufli bien que fur le Tit. XIV. de Abigeis; & Philon, (6) C'eft la feconde partie de la Clemence; l'autre de Specialib. Leconfiftant à exemter entierement de la Peine, lors que gib. au fujet de le bien de l'Etat ne demande pas néceflairement qu'on l'Empoifonnepuniffe. Voicz Grotius, Lib. II. Cap. XX. 36. & le ment, p.791,79%. Parrhafiana, Tom. II. pag. 182, & fuiv. C'eft auffi une Ed. Parif. & ce des Régles du Droit Civil, que dans l'explication des que l'on a dit, Loix Penales. ou dans une application douteuse, il Liv. II. Chap. V. faut pancher toûjours vers le côté le plus doux. In pa- §. 17, 18. nalibus caufis benignius interpretandum eft. Digeft. Lib. L. (n) Les Loix RcTit. XVII. De diverf. Reg. Juris, Leg. CLV. §. 2. (7) Voiez un beau paffage de Ciceron, que l'on a rap- établir le conporté ci-deffus, Liv. V. Chap. VIII. §. 4. à la fin. traire. Voiez Di(8) More quodam Perfarum, areana Regum mirà celan- geft. Lib. XLVIII. tium fide: non metus, non fpes elicit vocem quà prodantur Tit. XIX. de Paocculta; vetus difciplina Regum filentium vita periculo fan- nis, Leg. XI. §. 1. xerat. Lingua gravius caftigatur, quàm ullum probrum: & Ant. Matth.de nec magnam rem fuftineri poffe credunt ab eo, cui tacere gra- Crim.Tit. de Fuve fit; quod homini facillimum voluerit effe natura. Q: tis,Cap.111.§.2,3. Curt. Lib. IV. Cap. VI. §. 5, 6. Ed. Cellar. J'ai fuivi la

(5) Cela paroit par l'exemple du Confeiller de Thou, dans Benjamin Priol. Hift. Gall. Lib. I. Cap. VI. & de David Berchin, dans Buchanan, Rerum Scotic. Lib. VIII. Voiez d'autres exemples de Crimes, qui peuvent être févérement punis, quoi qu'ils paroiflent peu confiderables en eux-mêmes, ou qu'ils ne foient que commen cez: Digeft. Lib. XLVIII. Tit. VIII. Ad Leg. Corn. de ficariis &c. Leg. III. §. 1, 2, 3. Lib. XLVII. Tit. XI. De extraord. crimin. Leg. I. §. 2. Valer. Max. Lib. VI. Cap. I. §. 8. Alian. Var. Hift. Lib. XIV. Cap. XXVII. Diod. Sicul. Lib. XI. Cap. LIV. Voiez auffi Ant. Matth. de Crimin. Proleg. Cap. I. §. 5, 6. & ad Lib. XLVIII. Digeft. Tit. V. Cap. III. §. 10. & Tit. XVIII. Cap. IV. Cafp. Ziogler, fur Grotius, Lib. II. Cap. XX. §. 39.

verfion de Vaugelas.

maines femblent

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