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§. 10.

dans les Contracts, c'eft qu'aucun des Contractans ne doit forcer l'autre à traiter par une crainte injufte, qu'il a lui-même caufée. C'eft ainfi qu'autrefois les Lacédémoniens obligérent ceux d'Elée à rendre des terres qu'ils s'étoient fait vendre par force à leurs anciens poffeffeurs; car, ajoûte l'Hiftorien qui rapporte ceci, ils croioient, qu'il n'y a pas (1) moins d'injustice à extorquer une chofe, fous prétexte de vente, des mains de ceux qui fe trouvent trop foibles pour s'en défendre, que de la leur enlever de vive force (a). L'hiftoire de Ver- (a)Voiez Grotius, rès, Gouverneur pour les Romains en Sicile, fournit auffi un exemple remarquable. Ce Lib. II. Cap. XII. fameux Scélerat avoit enlevé prefque toutes les ftatues, les peintures, les tapifleries, les vales précieux, & autres raretez d'une Province fi grande & fi riche. Après quoi, quand il fut accufé à Rome, il croioit pouvoir fe difculper, en difant: J'ai acheté tout cela. Mais, (2) répondit Ciceron, quand je tomberois d'accord, que vous l'auriez acheté, croiez-vous qu'il foit permis à un Préteur d'acheter tant de meubles précieux dans fon Gouvernement, c'est-à-dire, daus un Païs où il a une puissance prefque fouveraine? Admirez, Meffieurs, la fageffe de nos Péres, qui, dans un fiécle plein d'innocence, n'ont pas laiffé d'aller au devant de la moindre corruption. Ils n'ont pas permis à un Magiftrat d'acheter un Esclave, que pour le mettre en la place d'un autre, qui feroit mort à fon fervice, & dans la Provin ce: car pour de la vaiffelle d'argent on des meubles, comme le public leur en fournissoit, ils ne fe font pas imaginé qu'il put jamais y avoir un homme affez extravagant pour en acheter. Pourquoi pensez-vous, Meffieurs, qu'ils aient été fi févéres en ce point? C'est qu'ils ont crû, que c'est un vol, & non un achat, quand le Vendeur n'a pas la liberté de mettre le prix à fa marchandise. Ils ont bien vû, que, s'il étoit permis à un Gouverneur d'acheter, il ne paieroit pas la jufte valeur des chofes, & qu'il forceroit les Particuliers à vendre ce qu'ils voudroient peut-être bien conferver. Il arrive souvent néanmoins, que le Souverain ufe de fon autorité pour contraindre fes Sujets, tant perpétuels, que ceux qui ne le font que pour un tems, à faire certains Contracts, fur tout ceux de Vente, ou de Louage, comme quand on oblige les Marchands à débiter des denrées ou des marchandifes, dont le public a grand befoin; les Ouvriers ou les Artifans, à travailler; les Païfans, à fournir des chariots & des voitures; les Maîtres de navire, à louer leurs Vaiffeaux. Si le bien & la néceffité de l'Etat le demande, & que l'on paie à jufte prix le travail, & les marchandifes; il n'y a là rien que de très-légitime. Il est auffi affez ordinaire de voir, que les Particuliers d'un Etat font tenus de n'acheter certaines fortes de chofes que dans un Magasin établi pour cet effet.

point de lieu

§. VII. Au refte, l'égalité, dont il s'agit, n'a point de lieu dans les Contracts Bienfai- L'égalité n'a fans ou gratuits. Car lors que le falaire qu'on donne à une perfonne, eft égal à la peine dans les Contracts qu'elle prend pour nous, ce n'eft plus un Contract gratuit (a), c'est une autre forte d'ac- Bienfaisans. te (b). Que fi, dans un Contract gratuit, on reçoit quelque préfent en forme de récom- Lib. II. Cap.X11. penfe; §. 11.

S. VI. (1) Γνόντες μηδὲν δικαιότερον είναι βία ορισμέ της η βία αφελομύες παρά 7 τόνων λαμβάνειν. Χenoph. Hift. Græc. Lib. III. p. 288. Ed. H. Steph.

quaro,

:

(2) Verbo jam uno repellar. Emi, inquit.... Primùm, fi id, quod vis, tibi ego concedam, ut emeris cujufmodi tu judicia Romæ putatis effe, fi tibi hoc quemquam conceffurum putafti, te in Pratura atque imperio tot res, tam pretiofas, omnes denique res, qua alicujus pretii fuerint, tota ex Provincia coemiffe. Videte Majorum diligentiam, qui nihil dum etiam iftiufmodi suspicabantur verumtamen ea, qua parvis in rebus accidere poterant, providebant. Neminem, qui cum poteftate aut legatione in Provinciam effet profectus, tam amentem fore putaverunt, ut emeret argentum; dabatur enim de publico: ut veftem prabebatur enim legibus: mancipium putaverunt; quo & omnes utimur, & non præbetur à populo. Sanxerunt, NE QUIS EMERET MANCIPIUM, NISI IN DEMORTUI LOCU M. Si qui Romæ effet demortuus? imo, fi quis ibidem. Non enim te inftruere domum tuam volueTunt in Provincia; fed illum ufum Provincia fupplere.

(a) Voiez Grotius,

XVI. Tit. III. De

Qua fuit caufa, cur tam diligenter nos in Provinciis ab (b) Voiez Inftit.
L.III. Tit. XXVII.
emtionibus removerent? hac, Judices, quod putabant ereptio-
nem effe, non emtionem, cum venditori fuo arbitratu ven- De Mandato, §.
dere non liceret. In Provinciis intelligebant, fi is, qui ef- 13. & Digeft. Lib.
fet cum imperio ac poteftate, quod apud quemque effet eme-
re vellet, idque ei liceret: fore uti, quod quifque vellet, pofiti &c. Leg. I.
five effet venale, five non effet, quanti vellet, auferret. §. 9.
In Verr. Lib. IV. Orat. IX. Cap. V. J'ai fuivi la verfion
de Mr. Maucroix, qui pour n'être pas litérale n'en eft
pas moins fidéle. Voiez encore Digeft. Lib. XVIII. Tit. I.
De contrahenda empt. &c. Leg. XLVI.LXII. & Lib. XLVIII.
Tit. XI. De Lege Julia repetundarum, Leg. VI. & Lib. II.
Tit. XX. De his, qua vi, metufve caufa gefta funt, Leg.
XI. Conftitut. Sicul. Lib. I. Tit. LXXXVIII. §. 1. Tacit.
Annal. Lib. XIV. Cap. XIV. in fin. & ce que Dion Caffius
rapporte de Céfar, que, quand il ne trouvoit plus d'au-
tre prétexte pour extorquer de l'argent, il l'empruntoit.
quoi qu'il ne penfât point à le rendre jamais, & qu'il le
prit même par force à ceux qui refufoient de lui en prê-
ter. Lib. XLII,
§. VII.

D 2

penfe; le Contract tient alors un peu de celui de Louage. Il doit néanmoins y avoir de l'égalité indirectement & par accident dans le Mandement ou la Commiffion, & dans le Dépôt, entant que, fi le Procureur ou le Dépofitaire ont été obligez de faire quelques dépenfes pour l'affaire ou la chofe, dont ils s'étoient chargez, il faut les rembourfer exacte(c) Vid. dict. Tit. inent. Car, dans ces fortes de Contracts, on ne donne gratuitement que sa propre peine: Depofiti, Leg.XII. &, pour les frais, il y a une espece de Contract (1) tacite de Prêt, en vertu duquel on princip. peut fe les faire paier (c).

Dans les Contracts Onéreux

mé gratuit.

§. VIII. MAIS, en matière de Contracts Onéreux, l'égalité eft fi fort néceffaire, qu'il rien n'etre n'y a point de préfomtion d'un don gratuit qui puiffe difculper ceux qui prennent plus qu'ils ne doivent recevoir. En effet, ce n'eft pas ordinairement l'intention de ceux, qui font ces fortes de Contracts, de donner pour rien quoi que ce foit. Ainfi on ne préfume point, qu'il y aît un mélange de Contract Onéreux & de Donation; à moins que celui, qui fait, ou qui donne, ne s'en foit clairement expliqué (a); ou que du moins on voie manifefteLib. VII. Epift. ment, qu'il favoit que fa peine ou fon bien valoit davantage, que ce dont il s'eft conten(b) Cicer. de offic. té. Du refte, on ne peut que louer l'action de Scévola, qui aiant demandé (b) qu'on lui Lib.III. Cap.XV. dit tout d'un coup le prix d'une terre qu'il vouloit acheter, en donna mille écus de plus que ce qu'on la lui faifoit, croiant qu'elle valoit davantage que le Vendeur même ne l'ef

(a) Voiez Plin.

XI. & XIV.

Comment on

P'inégalité qui fe

pli.

J. 12.

De adilit. Edict.

De action. empt.

2, 3, 4.

timoit.

§. IX. DE ce que nous avons établi, il s'enfuit, que, quand même on n'auroit (a) cadoit redreffer ché aucun des défauts de la chofe, au fujet de laquelle on traitoit, ni rien exigé au delà trouve dans un de ce qu'on croioit nous être dû; fi l'on découvre enfuite de l'inégalité dans la chofe mêContract accom- me, fans qu'elle vienne de la faute des Contractans, comme, par exemple, s'il y avoit Voiez Grotius, quelque défaut caché, ou fi l'on s'eft trompé à l'égard du Prix, il faut redreffer (b) cela, Lib. II. Cap. XII. en ôtant à l'un des Contractans ce qu'il a de trop, & donnant à l'autre ce qui lui manque. (b) Voiez Digeft. Par le Droit Romain on ne peut faire caffer un Contract, ni demander un dédommageLib. XXI. Tit. I. ment de la vilité du Prix (1), que quand la lézion excede la moitié de la jufte valeur. Cet&c. Leg. I. §. 2. te fameufe Loi eft fondée principalement fur ce qu'il n'y auroit point de Tribunaux qui &Lib.xix.Tit. I. puffent fuffire à connoître du grand nombre de procès qui s'éléveroient tous les jours, fi, &vend. Leg. pour la moindre lézion, on pouvoit aller rompre la tête aux Juges (c). D'ailleurs, telle eft XIII. princ. §. 1, la nature du commerce, que quiconque ne veut pas fe laiffer tromper doit ouvrir les yeux, Voiez un paf- & bien examiner toutes chofes, avant que de s'engager à rien. Et après tout, fur quelque fage de Ciceron, haut pied qu'un Vendeur eftime fa marchandise, c'est toûjours la volonté de l'Acheteur qui te, Liv. 1. Chap. Y net le dernier prix, & qui conclut le marché. Ces raifons font bonnes en elles-mêmes; mais la Loi refferre dans des bornes trop étroites l'inégalité qui doit être redreflée; & cette limitation au furplus de la moitié du jufte prix, n'est point de Droit Naturel. En effet, bien qu'il ne faille pas importuner le Juge pour des affaires de peu de conféquence; rien ne fauroit le difpenfer de prêter fon fecours à ceux qui ont été confidérablement lézez, quoi qu'au deffous de la moitié du jufte prix. Suppofé, par exemple, que je n'aie vendu que fix-cens Ecus une maifon qui en vaut neuf-cens; pourquoi me refuferoit-on abfolu ment la protection des Loix pour le recouvrement des trois-cens Ecus, dont je fuis fruftré, puis que l'on donne action en Juftice pour de bien moindres fommes? Difons donc, qu'à la vérité entre ceux-là mêmes, qui n'ont point d'autre Loi commune que celles du Droit de la Nature & des Gens, une petite lézion, qui fe trouve dans un Contract fans la mauvaile foi des Contractans, n'eft pas un fujet fuffifant de refcifion, ou de plainte. Mais auffi,

qui a été déja ci

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S. VIL (1) Cette fiction de droit n'eft nullement nécellaire. Les maximes feules de l'Equité fuffifent pour allurer au Dépofitaire, ou à celui qui s'eft charge des affaires d'autrui, le dédommagement des dépenfes qu'il a faites pour rendre fervice au maitre du Dépôt, du à Fauteur de la Commiffion.

S. IX. (1) Rem majoris pretii, fi tu vel pater tuus mi

lors

noris diftraxerit: humanum eft, ut vel pretium te reftituen te emptoribus, fundum venundatum recipias, auctoritate Judicis intercedente: vel fi emptor elegerit, quod deeft jufto pretio, recipias. Minus autem pretium effe videtur, fi nes dimidia pars veri pretii foluta fit. Cod. Lib. IV. Tit. XLIV. De refcindenda venditione, Leg.II.

(d) Voiez ce que

cette matiére,

de fe tromper les

lors que la lézion eft confidérable, encore qu'elle n'aille pas jusqu'à la moitié du jufte prix, on peut légitimement prétendre, ou que le Contract foit caffé, ou que l'autre Contrac tant nous dédommage de ce qui manque au jufte prix. Or on juge du degré de la lézion, ou par l'énormité ou la vilité du prix; ou par les facultez de celui qui fe trouve lézé: une perfonne, qui a peu de bien, étant quelquefois extrémement incommodée d'une perte qui ne feroit rien pour un homme riche. Dans les Etats même où la Loi, dont j'ai parlé, eft établie, un Acheteur ne fauroit en confcience fe difpenfer de réparer une lézion énorme, quoi qu'elle foit au deffous de la moitié du jufte prix; le but de cette Loi n'étant pas tant d'affurer à un Contractant le gain qu'il fait au détriment de l'autre, que d'épargner aux fent les Dec Juges une foule de procès. Ainfi tout le droit, qu'elle donne, c'eft d'empêcher qu'on ne teurs Juifs fur puiffe être pourfuivi en Juftice par un Citoien du même Etat, pour une lézion qui ne paf- dans Selden, De fe point ces bornes. Les Jurifconfultes, au refte, ont raifon d'accorder le bénéfice de cet- 7. N. & G. Lib. te Loi à l'Acheteur, auffi bien qu'au Vendeur, & de l'étendre même aux autres Contracts (d). VI. Cap. V. §. X. LES Interprêtes du Droit Romain fe font fort tourmentez, pour concilier avec s'il eft naturelles principes, que nous venons d'établir, une Loi qui porte, (i) qu'il eft naturellement lement permis permis de fe tromper l'un l'autre à l'égard du prix de ce que l'on vend, ou de ce que l'on uns les autres en achete. Pour moi, je ne trouve point ici d'explication plus commode, que celle de Gro- vendant, ou en tius (a), qui fait voir, que quand on dit, qu'une chofe eft permife, on n'entend pas toû- (a) Lib. II. Cap. jours, qu'elle foit jufte ou innocente; mais quelquefois cela fignifie feulement, qu'on XII. §. 26. peut la faire impunément, & que celui, avec qui l'on avoit traité, n'a point action contre nous, fi l'on veut fe prévaloir de la Convention: c'eft-à-dire, qu'étant appellé en Juftice pour cause de lezion au deffous de la moitié du jufte prix, il fuffit de répondre, qu'on a ainfi fait fon marché; de forte que, felon le Proverbe commun en nôtre Langue, celui qui ne veut pas ouvrir ses yeux, n'a qu'à ouvrir fa bourse (2). Le mot de naturellement ne fignifie pas non plus toûjours ce que l'on doit faire, ou ce qui s'accorde avec le Droit Naturel, mais ce qui eft conforme à la coûtume établie. C'est ainsi que St. Paul dit aux Corinthiens (b): La nature elle-même ne vous enfeigne-t-elle pas, que fi un homme porte des che- (b) 1. Ep. Chap. veux longs, cela lui eft honteux; mais que fi une femme a de longs cheveux, cela lui eft honorable, parce que les cheveux lui ont été donnez pour lui fervir de voile (3). On peut alléguer ici une autre Loi du Droit Romain, dont voici les paroles: (4) Telle est l'effence

5. X. (1) Idem Pomponius ait, in pretio emptionis & venditionis naturaliter licere contrahentibus fe circumvenire. Digeft. Lib. IV. Tit. IV. De minoribus, Leg. XVI. §. 4. Voiez auffi Lib. XIX. Tit. II. Locati, conducti, Leg. XXII. §. 3. Lex Bajuvariorum, Tit. XV. Cap. IX. §. 1. & Capitul. Carol. Lib. V. Cap. CCX. Nôtre Auteur citoit plus bas, Xenophon, Apomnem. Socrat. Lib. II. in fine; A. Gellius, Lib. XII. Cap. XII. Senec. de Benefir, Lib. VI. Cap. XXXVIII. Capitular. Carol. Lib. I. Cap. CXXXI.

(2) L'Auteur remarquoit ici, que l'artifice, dont Jacob fe fervit (Genef. XXX, 37.) pour augmenter le nombre du bétail qui lui devoit revenir, eft d'autant plus excufable, qu'il avoit affaire à un Beau-pére fort avare, & de très-mauvaise foi, qui ne cherchoit qu'à le tromper en toutes manieres, & qui lui avoit impofé de trèsdures conditions, puis qu'il ne lui donnoit pour fa peine qu'une partie du betail qui naiffoit, pendant que tous les accidens & toutes les pertes étoient fur le compte de Jacob. Genef. XXXI, 39. Voiez la Note de Mr. Le Clerc fur le verf. 12.

(3) Le terme de l'Original (nouar), ajoûtoit ici nôtre Auteur, peut néanmoins fignifier ici le trop grand foin d'orner & d'ajufter les cheveux, qui eft le partage des femmes, & qui ne fied pas bien aux hommes.

Sint procul à nobis juvenes, ut fæmina, compti. Ovid. Heraid. Epift. 4. v. 75. D'ailleurs il eft deshonnête,même felon le Droit Naturel, qu'un homme te ferve d'un ajuitement, qui,en vertu d'une

de

coûtume fort ancienne, diftingue le fexe féminin d'avec le
mafculin. Mais, fans aller chercher toutes ces explica-
tions fubtiles, il fuffit de dire, que St. Paul parle de la
coûtume établie de fon tems, de laquelle on ne pouvoit
s'éloigner fans fe fingularifer mal à propos, & fans pé-
cher contre la bienfeance. Le mot de nature eft fouvent
oppofé à celui d'inftruction; & on fait, que la coûtume
eft une feconde nature, qui fait qu'on n'a pas besoin de
maître pour apprendre ce qu'elle a une fois bien établi
dans un Païs. Notre Auteur, à la fin du Chap. critiquoit
un Jurifconfulte (Mornacius) qui prétend, que, dans la
Loi du Code, dont il s'agit, naturellement lignifie adroi
tement (supus), en forte que le fens eft, felon lui, qu'on
peut fe tromper adroitement; comme fi naturaliter fe
rapportoit à circumuenire: Opinion trop ridicule, pour
meriter d'être réfutée.

ad

(4) Hoc enim folum, quod paulo minore pretio fundum
venditum fignificas, ad refcindendam venditionem invali-
dum eft. Quod fi videlicet contractus emptionis atque ven-
ditionis cogitaffes fubftantiam, & quod emptor viliore com-
parandi, venditor cariore diftrahendi vorum gerentes
hunc contractum accedant,, vixque poft multas contentiones,
paulatim venditore de eo quod petierat detrahente, emptore
autem huic, quod obtulerat, addente, ad certum confen
tiant pretium: profecto perfpiceres &c. Cod. Lib. IV. Tit.
XLIV. De refcindenda vendit. Leg. VIII. Voiez le Titre
de Edilitio Editto, Leg. XVIII, XIX, & de contrahenda
emptione, Leg. LXXI.

achetant?

XI. verf. 14, I Em

ché, par le Philo

de l'Achat & de la Vente, c'est-à-dire, la pratique conftante de ce Contract, que l'Acheteur & le Vendeur entrent en traité, l'un avec intention d'acheter à bon marché, & l'autre à deffein de vendre cher, en forte que ce n'eft pas fans peine qu'après bien des conteftations, le Vendeur rabattant peu à peu de ce qu'il demandoit, & l'Acheteur ajoutant à ce qu'il (c) Voiez la défi- avoit offert, ils demeurent enfin d'accord d'un certain prix (c). En effet, les Hommes nition d'un Mar- étant naturellement portez à tâcher de gagner du bien, on a crû que le commerce fophe Anachar- ne pourroit guéres s'entretenir parmi les Citoiens, moins encore avec les Etrangers, fis, dans Diogen. fi l'on ne donnoit quelque chofe à l'habileté & à l'adreffe des Marchands. On fe moque Laërt. Lib. I. §. 105. & Elian. même de ceux qui fe font laiflé dupper (d). Ajoûtez à cela, que, comme il eft presque V. H. XIV, 44 impoffible aux Contractans de trouver le point précis d'une égalité parfaite, ils font cenLib. I. Satyr. II, fez fe tenir quittes tacitement de ce que l'un peut avoir qui vaille un peu plus, que ce qu'il 103, 104, 105. & donne à l'autre (e). Ainfi c'eft une Loi généralement établie dans le commerce, qu'il eft Plin. Lib.I. Epift. permis à chacun d'acheter ou de vendre le plus avantageufement qu'il lui eft poffible, pour(e) Voicz un paf- vu qu'il ne trompe perfonne à l'égard du fond même de la chofe; car alors ce feroit un (f)

(d)Voiez Horace,

XXIV. princip.

fage de Montagne,cité dans une Note fur Liv. IV. Chap. XIII. §. 6. (f) Voicz Fulgent. Myth. Lib. 1. Cap. XXIII.

véritable larcin.

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Ce que c'eft que §. I. ticulier leurs principales efpéces. Les Interprêtes du Droit Romain entrent là

PRE's avoir traité des Contracts en général, il faut maintenant examiner en par

le Mandement; & la Gestion d'affaires.

deffus dans un grand détail. Mais, comme la plupart de leurs décisions font tirées du Droit de la Nature & des Gens, nous ne ferons, en les rapportant ici, que les remettre dans leur place naturelle.

Parmi les Contracts Bienfaifans ou gratuits, il faut, à mon avis, mettre (1) au premier

5.1. (1) Il falloit plûtôt mettre au premier rang la Donation, dont il y a lieu de s'étonner que l'Auteur ne dife rien abfolument. Je parle des Donations entre vifs: car il a traité ailleurs des Donations à caufe de mort, Liv. IV. Chap. X. §. 9. On voit même, que dans fon Abrégé (De Offic. Hom, & Civ. Lib. I. Cap. XII. §. 13.) il oppole le tranfport gratuit de Propriété, ou la Donation, à celui qui fe fait par Contract. Ce qui lui a fait ainfi exclurre les Donations du rang des Contracts, c'est, fans doute, une trop grande déférence en cet endroit pour les décifions du Droit Romain; qui néanmoins appelle quelquefois les Donations du nom de Contract, comme dans le Code, Lib. II. Tit. XX. De his, que vi, metufve caufa gefta funt, Leg. VII. Il faut done donner ici, en peu de mots, une idee générale de la Donation entre vifs, que l'on exprime ordinairement par le mot de Donation tout feul. C'eft un Contract, par lequel on fe dépouille d'une chofe qui nous appartient, pour en transférer gratuitement la pleine Propriété à une autre perfonne, qui accepte le bienfait. Ainfi il a uniquement pour principe un mouvement de Libéralité; & le Donateur fe dépouille actuellement de fon bien, fans que le Donataire ait à attendre fa mort. Lors que la Donation a été duement & légitimement faite, on ne peut la révoquer fans de très-fortes raifons. Alia autem donationes funt, qua fine ulla mortis cogitatione fiunt, quas inter vivos appellamus.... qua fi fuerint perfecta, temerè revocari non poffunt. Inftitut. Lib. II. Tit. VII. §. 2. Dat aliquis ea mente, ut ftatim velit accipientis fieri, nec ullo cafu ad fe revertis & propter nullam aliam caufam facit, quam ut liberalitatem & munificentiam exerceat: hae pro

non ....

rang

priè donatio appellatur. Digeft. Lib. XXXIX. Tit. V. Leg.
I. princ. Ces raifons font 1. Lors que le Donataire man-
que de fatisfaire aux charges & conditions fous lefquel-
les la Donation a été faite. Generaliter fancimus, omnes
donationes lege confectas, firmas illibatafque manere, fi
quafdam conventiones, five in fcriptis donationi
impofitas, five fine fcriptis habitas, quas donationis ac-
ceptor fpopondit, minimè implere voluerit. Cod. Lib. VIII.
Tit. LVI. De revocandis donationibus, Leg. X.
2. L'in-
gratitude du Donataire, comme, s'il attente à la vie ou
à la réputation du Donateur, s'il fe porte à lui faire
quelque outrage ou quelque violence, s'il lui caufe ma-
licieufement quelque dommage ou quelque perte con-
fidérable, fi, le Donateur etant réduit à la neceffité,
il lui refufe la nourriture. Si non donationis acceptor in-
gratus circa donatorem inveniatur, ita ut injurias atroces
in eum effundat, vel manus impias inferat, vel jacture
molem ex infidiis fuis ingerat, que non levem cenfura
fubftantia donatoris imponat. vel vita periculum aliquod
ei intulerit. Ibid. 3. La naiffance inefpérée des enfans
qui furviennent au Donateur: car on préfume, qu'il
n'auroit pas fait la Donation, s'il eût eû des enfans; &
qu'ainfi il n'a donné que fous cette condition tacite,
que, s'il venoit à avoir des enfans, la Donation feroit
nulle. Si unquam libertis patronus filios non habens bona
omnia vel partem aliquam facultatum fuerit donatione lar
gitus, & poftea fufceperit liberos, totum quicquid largi-
tus fuerat, revertatur in ejufdem donatoris arbitrio ac di-
tione manfurum. Ibid. Leg. VIII. Mais il faut fuppofer
pour cela, que le Donateur aît donné tous fes biens, ou
la plus grande partie. Car fi la Donation étoit peu con-
fidera-

rang le (2) Mandement ou la Commiffion, qui confifte à fe charger, fans intérêt, & de pure bonne volonté, des affaires de quelcun, qui nous en prie lui-même. Cette forte de Contract ne fuppofe pas, comme les autres, directement & par fa nature la Propriété & le Prix des choses; mais feulement par accident, entant que celui, qui a donné la commiffion, doit rembourfer le Procureur des dépenfes qu'il a faites pour l'exécuter; celui-ci ne s'étant engagé qu'à ne rien demander pour la peine.

Lib. XLIV. Tit.

Que fi l'on fe charge des affaires de quelcun à fon infu, & qu'on (3) les ménage bien; (a) Voier Digeft. c'eft ce qui s'appelle Geftion d'affaires, pour laquelle les Loix Romaines donnent action, VII. De Obligat. & que l'on peut fort bien (4) fonder fur un Mandement ou une Procuration tacite, auffi & Action. Leg. bien que les (5) engagemens qu'il y a entre un Tuteur & fon Pupille (a). V. princ. & §. I.

mains étoient

dont ils s'étoient

Lib. III. Tit. II.

§. II. COMME l'on fe charge de prendre foin des affaires d'autrui par un pur principe Les anciens Red'Humanité & d'Amitié, qui eft ce qu'il y a de plus facré parmi les Hommes, & de plus fort religieux à avantageux à la Société; on tient avec raifon pour une action noire & abominable de fe bien ménager les fervir d'un fi beau prétexte pour tromper une perfonne, qui nous a confié fes intérêts, dans affaires d'autrui, la haute idée qu'elle s'étoit faite de nôtre probité (a). Auffi voions-nous que les anciens chargez Romains avoient un refpect tout particulier pour les engagemens de cette forte de Con- (a) Voiez Digeft. tract. (1) C'étoit, felon eux, la plus grande des infamies, non feulement de gérer de man- De his qui notanvarfe foi, pour fon propre intérêt, les affaires d'autrui dont on s'eft chargé, mais encore de tur infamia, Leg. s'aquitter négligemment de fa commiffion. C'est pourquoi on donna action de Mandement, à Tit. I. Mandati, laquelle on attacha une aussi grande flétrissure, qu'à l'action même de Larcin. La raison en eft, à mon avis, difoit un grand Orateur, qu'on ne confie le foin des affaires, auxquelles on ne peut pas vaquer foi-même, qu'à des amis, fur la fidélité defquels on fe repofe, & qui ne fauroient par confequent manquer aux engagemens où ils font entrez dans ces fortes d'occafions, fans violer l'afile commun de tous les hommes, & fans détruire, entant qu'en eux

fidérable en comparaison de ce qui refte au Donateur, on peut raisonnablement préfumer, qu'il n'auroit pas laiffe de la faire, quand même il auroit eû efpérance d'avoir des enfans; fur tout file Donataire n'eft pas accommodé. 4. Enfin la Donation eft révoquée en partie, lors que le Donateur ne s'eft pas refervé affez de bien, pour laiffer la Légitime aux personnes à qui il ne lui eft pas permis de l'oter: car en ce cas-là le Donataire doit rendre ce qui manque pour achever la portion qui leur revient de droit, & dont le Donateur n'a pas pû difpofer, à leur préjudice. Voiez Cod. Lib. III. Tit. XXIX. De inofficiofis donationibus, & Tit. XXX. De inofficiofis dotibus. On peut confulter fur toute cette matiére, les Loix Civiles dans leur ordre naturel, par Daumat, I. Part. Liv. I. Tit. X. (2) Voiez ce que l'on a déja dit ci-dessus, Liv. III. Chap. IX.

(3) L'expreffion du Droit Romain, utiliter gerere, ne fignifie autre chofe que cela, c'est-à-dire, faire pour l'intérêt de celui, dont on ménage les affaires à fon infu, ce que la Prudence veut que l'on faffe, & ce qu'il auroit fait vraisemblablement lui-même. Ainsi, pourvú qu'il n'y ait pas de nôtre faute, on n'eft point garant du fuccès, ni moins en droit de demander un dédommagement des dépenfes néceffaires ou utiles, parce qu'il Le trouve que l'affaire n'a pas réüffi. Is autem qui negotiorum geflorum agit non folùm fi effectum habuit negotium, quod geffit, actione ifta utetur: fed fufficit, fi uriliter geffit, etfi effectum non habuit negotium: & ideo, fi infulam fulfit, vel fervum agrum curavit, etiamfi infula exufta eft, vel fervus obiit: aget negotiorum geftorum. Digeft. Lib. III. Tit. V. De negotiis geftis, Leg. X. §. 1.

(4) Voiez ce qui a été dit ci-deffus, Liv. IV. Chap. XIII. §. 7.

(5) Il n'eft point néceffaire de fuppofer ici ni une Procuration tacite, ni un Quasi-Contract, comme parlent les Jurifconfultes Romains. La grande maxime de l'Equite Naturelle, qui porte, Qu'on ne doit causer du dom

eft,

mage à perfonne, & que, fi on l'a fait, il faut indispen
fablement le réparer; cette Loi, dis-je, fi generale & fi
incontestable, fuffit pour fonder les Obligations réci-
proques, tant des Tuteurs, & de leurs Pupilles, que de
ceux qui ont pris foin des affaires d'un autre à fon infù,
& de celui à qui ils ont fidelement rendu ce bon office.
11 feroit aifé de le faire voir, fi la chofe ne parloit d'elle-
même. Voiez ce que j'ai dit fur Liv. III. Chap. VI. §. 2.

§. 11. (1) In privatis rebus fi qui rem mandatam non mo-
do malitiofius geffiffet, fui quaftus aut commodi caufa, ve-
rùm etiam negligentiùs, eum majores fummum admififfe de-
decus exiftimabant. Itaque mandati conftitutum eft judi-
cium, non minus turpe quam furti. Credo propterea, quod,
quibus in rebus ipfi intereffe non poffumus, in his opera noftra
vicaria fides amicorum fupponitur : quam qui ladit, op-
pugnat omnium commune prafidium, &, quantum in ipfo
eft, difturbat vita focietatem. Non enim poffumus omnia
per nos agere: alius in alia eft re magis utilis. Idcirco ami-
citia comparantur, ut commune commodum mutuis officiis
gubernetur. Quid recipis mandatum, fi aut neglecturus, aut
ad tuum commodum converfurus es? cur mihi te offers, ac
meis commodis officio fimulato officis & obftas? recede de
medio, per alium tranfigam. Sufcipis onus officii, quod te
putas fuftinere poffe, quod minimè videtur grave iis, qui
minime ipfi leves funt. Ergo idcirco turpis hac culpa eft,
quod duas res fanctiffimas violat, amicitiam & fidem. Nam
neque mandat quifquam ferè nifi amico: neque credit nifi
ei, quem fidelem putat. Perditiffimi igitur eft hominis, fi-
mul & amicitiam diffolvere, & fallere eum, qui lafus non
effet, nifi credidiffet. Cicer. Orat. pro Sext. Rofc. Amerin.
Cap. XXXVIII. XXXIX. Dans le Marchand de Plaute,
un jeune homme dit à fon Pére: Je vous ai fouvent ous
dire, que tout homme fage doit s'aquitter, avant toute au-
tre chofe, des commiffions dont il eft chargé. Act. II. Scen. III.
verf..42.

Sape ex te audivi, Pater: Rei mandata omnes fapientes primùm pravarti decet. §. III.

I. & Lib. XVII.

vel contra, Leg

I. §. 4.

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