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Ennius; & dans

ria en Amérique,

il ne devienne pas fon ennemi, c'eft-à-dire, qu'il lui obéiffe: car on ne fauroit vraifem(b) Voiez ce que blablement préfumer, qu'une perfonne donne la vie à une autre, afin que celle-ci aquédit Médée, dans rant des forces avec l'àge, aquiére en même tems le droit de lui réfifter. Ainfi, dans l'EEuripide, verf. tat Naturel, toute femine devient en même tems Mére & Maîtreffe de l'Enfant, qu'elle dit met au monde. L'excellence du Sexe mafculin ne donne ici aucun avantage au Pére. Car pourtant, que les femmes de la l'inégalité qu'il y a entre les forces naturelles des deux Sexes, n'eft pas affez grande, pour Province de Pa- mettre un homme en état de s'affujettir une femme fans aucune réfiftance, & fans avoir & du Pais de befoin de la réduire fous fa puiffance par la voie de la guerre. Ajoûtez à cela (3), que, fi Chili,accouchent ce que la femme contribue à la génération eft moins confidérable (4) que la part que fans douleur ; & l'homme y a, la femme (b) effuie plus de peine & d'incommodité, puis qu'elle porte fon fruit affez long-tems dans fon fein, & qu'elle l'y nourrit de fa propre fubftance. Enfin, dans l'Etat purement Naturel, où l'on ne conçoit ni Souverain, ni Famille, on ne peut favoir qui eft le Pére d'un Enfant, fi la Mére ne le déclare. Ainfi l'Enfant appartient à celui-à qui la Mére le donne, & par conféquent il étoit déja à elle. De là vient que, par le Droit Romain, les (c) Enfans nez hors du Mariage fuivent la Mére; ce qui (d) avoit lieu auffi chez les Lyciens, à l'égard des Enfans nez dans le Mariage, jufques-là qu'ils portoient même le nom de la Mére.

que les Efpagnoles, qui y ont demeuré long

tems, s'y accoû

tument.

() Voiez plus (d) Herodot. Lib. 1. pag. 44. Ed.

bas, §. 5.

H. Steph.

De quelle maniére cette auto

de la Mére à

perfonne?

(a) Voiez Euripid. Alceft. verf. 666, & feqq. & Libanius, Orat. XIII. paffages neanmoins, qui ne font pas pré

cifément au fujet.

§. III. CETTE autorité originale de la Mére fur fon Enfant, paffe à d'autres, felon rité paffe, felon le même Auteur, en diverfes maniéres. 1. Lors que la Mére renonce elle-même à fon le même Auteur, droit, en expofant l'Enfant qu'elle vient de mettre au monde. Car alors celui qui l'éléquelque autre ve, aquiert fur lui la même autorité, que la Mére, qui en ôtant, autant qu'en elle étoit, fon Enfant, la vie qu'elle lui avoit donnée, l'a difpenfé par là de l'obligation où il étoit envers elle'; de forte que l'Enfant doit tout (a) à celui qui l'a fauvé, & comme à une perfonne qui lui tient lieu de Mére, & comme à fon Maitre (1). C'eft-là le feul cas, où à l'on aquiert quelque autorité fur une perfonne par droit de premier occupant. Et quand même l'Enfant feroit obligé, nonobftant cela, d'avoir du refpect pour la Mére, & de renouer, pour ainfi dire, avec elle les liens de l'amitié naturelle, fi elle venoit enfuite à fe repentir de fa barbarie; elle ne pourroit le recouvrer que du confentement & par la ceffion de celui qui l'a élevé, le dédommageant avant toutes chofes de la nourriture, & des autres dépenfes qu'il peut avoir faites pour cet Enfant. 2. Celui qui a une autorité... abfolue fur une perfonne, étant auffi maître de tout ce qui lui appartient; lors qu'une Femme eft devenue prifonniére de guerre, fon Enfant eft fous la puiffance de celui qui les a pris l'un & l'autre. Sur quoi il faut remarquer pourtant (2), que le vainqueur aquiert fur l'Enfant un droit différent du pouvoir que la Mére avoit fur lui. 3. Si une Mére est Citoienne de quelque Etat, le Souverain de cet Etat, de qui elle dépend, est aussi maître de l'Enfant, qu'elle met au monde. Et ici encore il faut remarquer (3), que le pou voir du Souverain fur l'Enfant n'eft pas de la même nature que celui de la Mére; & que le Gouvernement Civil ne détruit pas le droit de la Mére, mais y met feulement certaines bornes, & le laiffe même en quelques endroits affez entier. 4. Si un homme époufe une femme à condition qu'elle dépendra de lui, leurs Enfans feront fous la puiffance du Pére, à caufe de l'autorité qu'il a fur la Mére. Mais fi une femme revêtue de l'autorité fouverai

obligat. qua ex diverf. hom. ftat, oriuntur, §. 16. Mais ce-
la eft manifeftement contraire aux idées de Hobbes. La
fuite même du raifonnement le fait affez fentir, & Hob-
bes s'en explique fans détour, De Cive, Cap. IX. §. 2.
où il dit, que la Mére peut, ou élever, ou nourrir son
Enfant, SUO ARBITRIO ET JURE. Voiez auffi le-
Léviathan. En général nôtre Auteur mêle ici un peu trop
fes idées & fes raifonnemens avec ceux de Hobbes, fans
les diftinguer. Je fuppléerai à cela en indiquant ce qu'il
a ajoûté du fien.

(3) Cette raifon eft de nôtre Auteur; quoi que Mr.
Budde l'attribue auffi à Hobbes, dans l'endroit que je

viens de citer.

ne,

(4) C'est ce que les Phyficiens & les Médecins modernes n'accorderont pas, comme chacun fait. Voiez Euripid. in Oreft. verf. ss2. & feqq. paffage, que nôtre Auteur citoit plus bas.

§. III. (1) Tout ce qui eft dit enfuite jufqu'au fecond chef, eft de nôtre Auteur, & conforme à fes principes. Il faut feulement ajoûter, que cela a lieu à l'égard du Pére, auffi bien qu'à l'égard de la Mére.

(2) Ceci est encore de nôtre Auteur.
(3) Autre réflexion de nôtre Auteur.

ne, fe marie avec un de fes fujets, les Enfans dépendront néceffairement de la Mére: fans quoi elle ne feroit pas maîtreffe. En un mot, on peut dire généralement, que toutes les fois que l'union d'un homme avec une femme eft telle, que l'un dépend de l'autre, les Enfans, qui naiffent, font fous la puiffance de celui des deux qui commande. Hors ce cas-là, dans l'Etat Naturel, les Enfans appartiennent toûjours à la Mére; à moins qu'il n'en aît été autrement convenu entr'elle, & le Pére: car elle peut difpofer de fon droit, comme elle le juge à propos. C'eft ainsi que, s'il en faut croire quelques Auteurs, les Amazones alloient trouver leurs voifins pour en avoir des Enfans, &, après avoir accouché, gardoient les Filles, & renvoioient les Garçons à leurs Péres. Mais, dans les Sociétez Civiles, fi une femme & un homme s'uniffent enfemble par un Contract dans les formes & felon les Loix, les Enfans font fous la puiffance du Pére; parce que, tous les Gouvernemens Civils aiant été établis par des hommes, l'autorité domeftique appartient à chaque Pére de famille. Que s'il n'y a qu'un Concubinage, ou un Mariage de confcience, les enfans dépendent du Pére, ou de la Mére, felon que cela fe trouve réglé par les

Loix de l'Etat.

par

demens de l'au

§. IV. POUR moi, je conviens d'abord, que, bien qu'il faille fuppofer ici, comme Véritables fontout ailleurs, la Caufe premiére & univerfelle, qui eft DIEU, cela n'empêche pas torite paternelqu'il ne foit permis de rechercher les Caufes fecondes & immédiates. En vain quelques- le. uns difent-ils, que toute autorité d'un homme fur un autre lui eft communiquée de Dieu par une espece de commission, & que l'homme n'a qu'un pouvoir emprunté. Quelque air de dévotion qu'affectent ceux qui tiennent un pareil langage, ce n'eft là qu'une vaine déclamation, qui même dans le fond eft fort injurieufe à Dieu. En effet, un pouvoir emprunté eft le même, que celui de la perfonne, de qui on le tient: toute la différence qu'il y a, c'eft que celui, de qui il émane, le poffède en propre, au lieu que l'autre ne l'a entre les mains que comme un pouvoir étranger. Or n'eft-ce pas fe faire une idée bien baffe de la Majefté infinie du Créateur, que de croire les Hommes capables d'être revêtus du même pouvoir, que DIEU?

Cela pofé, il n'y a point de doute, que l'acte de la génération ne donne lieu à un Pére & à une Mére, d'aquérir für leurs Enfans un droit valable, & par rapport aux Enfans eux-mêmes, & par rapport à tout autre, en forte que, comme celui, qui eft maître d'une chofe, eft auffi maître des fruits qu'elle produit, de même celui, fous la puiflance de qui eft une perfonne, aît le droit le plus prochain fur les Enfans qui font nez d'elle. J'ai dit, que cela donne lien: car la génération (1) toute feule n'eft pas, à mon avis, un titre fuffifant de l'autorité que l'on aquiert fur une Créature Humaine, à qui l'on donne la naiffance. En effet, quoi qu'un Enfant foit produit de la fubftance de fon Pére & de fa Mére; cependant, comme il devient une perfonne femblable à eux, & qui leur eft égale par rapport aux droits naturels, communs à tous les Hommes, il faut quelque chofe de plus pour le foûmettre à leur empire: d'autant mieux que l'acte de la génération aiant d'ordinaire uniquement pour but le plaifit, qui l'accompagne, un Pére & une Mére ne fauroient prétendre qu'en vertu de cela feul les Enfans foient tenus de leur obéir, bon-gré mal gré qu'ils en aient; outre que la conception (a) & (a) Voiez ar la naiffance n'eft pas une chofe qui foit au pouvoir des hommes, qui y fervent d'inftrument. Lib.v. C. XVIIL

S. IV. (1) Il eft certain, que, comme nôtre Auteur le prouvera plus bas, l'Education eft le fondement principal & immédiat du Pouvoir Paternel, & des Devoirs reciproques d'un Enfant envers fon Pére. Mais il ne faut pas pour cela exclurre la Génération, qui, à dire vrai, eft le fondement original des engagemens d'un Pere, & par confequent de fon Pouvoir. En effet, d'où vient qu'un Pére & une Mére font obligez, plûtôt que toute autre perfonne, d'elever un Enfant, qui ett né d'eux? C'eft, à mon avis, parce qu'en s'uniffant l'un avec l'autre pour un acte naturellement deftiné à la propagation de l'efpece, ils fe font ou doivent du moins s'être' ta

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citement engagez à élever le fruit qui en pourroit nai-
tre. Car il n'importe quel qu'ait été le motif de leur com-
merce: & quand même ils ne fe feroient propofez que
de fatisfaire leurs détirs, il fuffit que la nature meine
de la chofe, qu'ils ne pouvoient ignorer, de bonne foi,
donne lieu de préfumer leur engagement. Cela eft fi
vrai, que nôtre Auteur lui-même voulant prouver, que

les Pérès & les Méres doivent la nourriture à leurs En-
fans, a dit ci-deffus, Liv. IV. Chap. XI. §. 4. qu'en tes
mettant au monde ils fe fent engagez a leur conferver, au-
tant qu'il dépendroit d'eux, la vie qu'ils leur avoient don-
(2) Cet

née.

X 2

tant. Inftit. divin,

(b) Voiez Ecclé

fiaftiq. VII, 23.

XXX, 1, & fuiv.

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à

Il y a donc deux raifons, fur lefquelles eft fondée l'autorité d'un Pére, & d'une Mére, fur leurs Enfans. 1. La Loi Naturelle, par cela même qu'elle prefcrit la Sociabilité, or donne aux Péres, & aux Méres, d'avoir foin de leurs Enfans, fans quoi la Société ne fauroit abfolument fubfifter; & même, pour les engager plus fortement à la pratique d'un Devoir fi néceffaire, la Nature leur a infpiré une tendreffe extrême pour leur lignée. Or le moien qu'un Pére, & une Mére, élevent bien leurs Enfans, s'ils n'ont le pouvoir de diriger leurs actions, & de prendre foin de leur confervation, dans un âge où ils ne font pas encore capables de fe conduire, & de pourvoir eux-mêmes à leurs befoins, ni de connoître feulement leurs intérêts (b)? Puis donc que quiconque oblige à une fin, eft censé donner en même tems le pouvoir d'emploier les moiens abfolument néceffaires pour y parvenir: il s'enfuit, que la Nature, en ordonnant aux Péres, & aux Méres, d'avoir foin de leurs Enfans, leur confére fur eux par cela feul autant d'autorité qu'il leur en faut pour cet effet; & par conféquent qu'elle impofe auffi aux Enfans l'Obligation de fe foûmettre à la direction de leurs P'éres & de leurs Méres, fans quoi le droit de ceux-ci feroit inutile.

2. De plus, l'autorité des Péres & des Méres eft encore fondée fur un confentement présumé des Enfans, & par conféquent fur une espece de Convention tacite. En effet, comme un Pére & une Mére, par cela même qu'ils veulent conferver leur Enfant, promettent de le bien élever, autant qu'il dépendra d'eux, & de remplir exactement l'Obligation que leur impofe la Nature: de même, quoi que l'Enfant n'aît pas encore l'usage de la Raifon, & qu'ainfi il ne foit pas en état de s'engager expreffément aux Devoirs réci proques, qui répondent à l'engagement du Pére & de la Mére; les foins feuls des Parens mettent par eux-mêmes l'Enfant dans une Obligation auffi forte, que s'il avoit donné un confentement formel: quoi qu'elle n'ait fon effet actuellement que quand il eft venu en âge de comprendre ce que fon Pére & fa Mére ont fait pour lui. En effet, on a lieu de préfumer, que fi en naillant il eût eû l'ufage de la Raifon, & qu'il eût pû confidérer, qu'il ne pouvoit point abfolument fe conferver en vie fans le foin de fes Parens, & par conféquent fans l'autorité qui leur eft néceflaire pour fe charger de fon éducation, il s'y feroit volontiers foûmis, à condition qu'ils s'aquitaffent bien de l'engagement, où ils entroient fon égard: confentement, qui étant préfumé (2) fur un fondement raifonnable, vaut autant qu'un confentement formel (c); de même qu'une perfonne, de qui on a fait les affaires en fon abfence & à fon infû, eft cenfée (d) s'être engagée tacitement à nous dédommager des dépenfes que nous avons fait pour lui rendre fervice. D'où il paroit, qu'un Pére commence à être revêtu actuellement du Pouvoir Paternel fur fes Enfans, lors qu'il entreprend de les nourrir & de les élever, afin qu'ils deviennent des Membres utiles à la Société Humaine. Quelcun a objecté, que les Obligations réciproques des Péres, & des Enfans, ne fauroient en aucune maniére être fondées fur une Convention tacite, parce, dit-il, que le confentement, exprès, ou tacite, ne peut avoir lieu proprement qu'en matiére d'actions, qui étoient auparavant libres & entiérement indifférentes: or ni le Pére, ni l'Enfant, n'avoient pas la liberté de fe difpenfer de leurs engagemens-mutuels. Mais rien n'empê che, qu'un feuf & même Devoir ne foit également fondé & fur quelque maxime de la Loi Naturelle, & fur une Convention tacite. L'Homme ne peut pas fe difpenfer d'obéir à DIEU; & cependant Dieu, dans fon Alliance, ftipule des Fideles une obéiffance qu'ils lui devoient déja fans cela. Un Citoien est obligé d'aller à la Guerre pour le bien de l'E

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tat:

guée, fuffit de refte. Par cela feul que la Nature met les Enfans dans un état, où ils ont abfolument befoin d'être fecourus & dirigez par autrui, & qu'elle charge les Péres & les Méres de ce foin; elle impofe fuffifaniment aux premiers l'Obligation de fe foûmettre au Pouvoir des derniers.

tat: & néanmoins les Soldats, que l'on enrolle, s'engagent volontairement, & avec ferment. Pourquoi donc ne pourroit-on pas fuppofer, que, quand un Pére fe charge actuellement de l'éducation de fes Enfans, il y a là un confentement tacite des Enfans mêmes, qui fait, qu'ils n'ont pas fujet de fe plaindre, comme s'ils avoient été foûmis à fon Pouvoir paternel malgré eux & fans aucune néceffité?

du Pere, ou de la

communs ?

Lib. III. Tit. I.

Leg. VII. §. 13.

S. V. POUR ce qui regarde la Queftion, fi le Pére a plus d'autorité fur fon Enfant, que Quel des deux, la Mére, on la Mére plus que le Pére? il faut diftinguer, fi l'on vit dans un Etat, ou Mere, a plus hors de toute Société Civile; & fi l'Enfant eft né enfuite de quelque Convention faite d'autorité fur entre le Pére & la Mére, ou s'il n'y a point eû entr'eux de Convention. Dans la Liberté leurs Enfans Naturelle, fi le Pére & la Mére ont eû commerce enfemble fans aucun engagement au delà de l'acte de la copulation, l'Enfant eft à la Mére. Car en ce cas-là, à moins qu'une femme ne déclare, qui eft le Pére de fon Enfant, on ne fauroit le connoitre, du moins d'une certitude telle qu'il la faut ordinairement pour prouver les chofes de fait; puis que la Mére a pû avoir affaire à d'autres hommes (a). C'eft pour cette raifon que, par le Droit Ro- (a)Voiez Inftitut. main (1), les enfans nez des Courtifanes font adjugez à la Mére. Que s'il y a eu quelque De rerum divisioengagement entre le Pére, & la Mére, on verra par leurs Conventions, quel des deux ne, §. 31, 32. Didoit avoir l'autorité fur l'Enfant: car il eft contre les régles, que deux perfonnes aient cha- Tit. I. De adquir. cune en même tems une autorité fonveraine fur quelcun. Cet engagement donc ou ren- rerum dominio, ferme l'autorité de l'homme fur la femme, c'eft-à-dire, un Mariage légitime; & en ce Je ne fai pourcas-là les Enfans dépendent fans contredit du Pére: ou tend uniquement à la propagation quoi l'Auteur cide l'efpece, & ici, quoi que régulièrement le marché commence par l'homme, qui veut te ici ces deux avoir des Enfans pour lui, & non pas pour la femme, & qui fe referve d'avance l'autorité fur eux, il peut arriver néanmoins, par un cas extraordinaire, que la femme recherche l'homme. C'est ce que faifoient autrefois les Amazones; & c'est ce qui arrive néceffairement aujourd'hui même, lors qu'une Princeffe Souveraine fe marie, fans rien perdre de fon autorité : car alors le Prince, qu'elle époufe, ne devient pas tant Roi, à proprement parler, que Mari de la Reine. Et quoi que l'un des deux mariez femble fe difpenfer du foin de fes Enfans, dont la Nature charge indifféremment le Pére & la Mére, ces fortes de Conventions n'ont rien de contraire au Droit Naturel. Car la Nature ne demande pas précisément, que le Pére, & la Mére, travaillent chacun par lui-même & immédiatement à l'éducation de leurs Enfans, mais il peut fuffire, que l'un des deux s'en charge principalement: de même qu'une Mére n'eft pas toûjours indifpenfablement obligée d'alaiter (b) (b) Plutarque, elle-même fon Enfant, mais elle peut le mettre en nourrice; comme d'autre côté un Pére de Educar, des peut donner à fon Fils un bon Gouverneur, fur qui il fe repofe du foin de l'inftruire & de Enfans, & Faveveiller à fa conduite.

Loix.

dans fon Traité

rin dans A. Gell Lib. XII. Cap. I.

foûtiennent le contraire. L'Al

coran l'ordonne;

religieufement fava. Voiez Ferdinand Pinto,

par les femmes

de

Mais comme, dans les Sociétez Civiles, qui ont été formées par les hommes, & non pas par les femmes, le Mari eft régulièrement le Chef de la Famille; tout Pére de famille a auffi l'autorité fur fes Enfans, en forte que les ordres de la Mére confidérez en eux-mê- & cela s'oblerve mes ne font prefque regardez que comme de fimples avis, & que, s'ils ont force entiére d'obliger, ils la tirent toute du pouvoir que le Mari communique à fa Femme. Car, comme un Mari peut fagement confier à fa Femme une partie du gouvernement des affaires de la Famille de même l'autorité du Pére fur fes Enfans n'exclut pas les foins de la Mére; quoi que les Loix (c) Civiles puiffent faire là-deffus divers réglemens. Et lors que le Pére (c) Par exemple, vient à mourir, fi la Mére conferve le gouvernement de la Famille, il eft jufte qu'elle hé- chez les Babylorite auffi du Pouvoir Paternel (d). Que fi elle fe remarie, & que ce fecond Mari fe char- dependent du

5. V. (1) Vulgo concepti dicuntur, qui Patrem demonflrare non poffunt; vel qui poffunt quidem, fed eum habent, quem habere non licet: qui & fpurii appellantur.... Lex natura hac eft, ut qui nafcitur fine legitimo matrimonio, Matrem fequatur, nifi Lex fpecialis aliud inducit. Digeft. Lib. I. Tit. I. De ftatu hominum, Leg. XXIII. XXIV. Les

Itin. Cap. LIV.

niens,les Garçons

Pere, & les Filgeles de la Mere.

Egyptiens ne fuivoient pas cette régle. Voiez Diodor. Si Pietro della Valle,
cul. Lib. I. Cap. LXXX. pag. 72. A. Edit. Rhodom. L'Au- Iriner.. Part. I.
teur citoit encore une fentence du Philofophe Pythago- Ep. XVII.
ricien Theages, que l'on trouvera dans les Opufcula My- (d) Voicz Genef.
thologica, Phyfica, & Ethica, imprimez à Amfterd. en XXI, 21. compa-
ré avec XXIV, 4.
1688. pag. 683, 684.
J. VI.

X 3

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(e) Cela ne fe
pratique pas
chez les Chinois.
Voiez Neuhof.

ge de l'éducation des Enfans du premier lit, ils lui doivent le même refpect qu'à leur propre Pére (e).

§. VI. * VOIONS maintenant, jufques où s'étend le Pouvoir des Péres & des Méres fur Legat. pag. 281. leurs Enfans. Et ici il faut diftinguer entre les Péres de famille qui vivent dans la Liberté *Jufques où s'é- Naturelle, & ceux qui font Membres d'une Société Civile; comme auffi entre le Pouvoir tend le Pouvoir d'un Pére confidéré précisément comme Pére, & celui qu'il a entant que Chef d'une Famille

Paternel?

XI. De extraord.
XLVIII. Tit. VIII.

particuliére.

Le Pouvoir qu'a un Pére confidéré comme tel, c'eft celui qui lui eft néceflaire pour s'aquitter des Devoirs que la Nature lui impofe envers fes Enfans, & qui par conféquent eft auffi étendu qu'il le faut pour fatisfaire à cette Obligation. Or un Pére, entant que Pére, doit fur tout bien élever fes Enfans, c'est-à-dire, les nourrir & les gouverner juf ques à ce qu'ils foient en état de pourvoir eux-mêmes à leurs befoins, & de fe conduire, felon la portée naturelle de leur efprit; afin qu'ils deviennent utiles à la Société Humaine: car, pour ce qui regarde la génération, elle n'eft que l'occafion, & non pas une partie des Devoirs paternels. L'Education étant donc le Devoir propre des Péres & des Méres, ils doivent y travailler avec beaucoup de foin: d'autant plus qu'elle est de la derniére conféquence (1), & qu'elle influe fur tout le refte de la vie.

D'où il paroit, que le Pouvoir Paternel ne s'étend pas jufqu'à donner droit de défai(a) Voiez Digest. re (a) un Enfant encore dans le fein de fa Mére, à moins que fans cela la Mére & l'EnLib. XLVII. Tit. fant (b) ne doivent inévitablement périr tous deux; ou de l'expofer (2), & de le tuer même, lors qu'il eft venu au monde, moins encore s'il a déja vécu quelque tems. Car, quoi XLV. Toy, de qu'un Enfant foit formé de la fubftance de fon Pére & de fa Mére, il leur eft d'abord égal, ficariis, Leg.VIII. entant que (c) Créature humaine (3), en forte du moins que tout le monde, & fes Parens & Tit. XIX. De même peuvent lui faire du tort.

pænis, Leg.
XXXVIII. §. 5.

(b) Voiez Ant.
ad Leg. XLVII.
Dige. Tit. V.
dans fes Florum

Matth. de crimin.

5. 5. & Grotius,

Sparfiones ad Jus
Juftinian.ad Leg.
XXXIX. Dig. de
pænis.

(c) Voiez Plin.
Lib. IX. Ep. XII.

num. 2.

(d) Voiez Plin.
Hift. Nat. Lib.
IX. Cap. XXIII.

Le Pouvoir Paternel, confidéré comme tel, ne renferme pas non plus le droit de vie & de mort fur les Enfans, qui ont commis quelque mauvaise action, mais feulement (d) celui de les châtier doucement. En effet on n'exerce ce Pouvoir fur les Enfans, que pendant un âge tendre, où ils ne font guéres capables de tomber dans ces crimes atroces, qui méritent la mort. Il vaut mieux chaffer de chez foi un Enfant rebelle & incorrigible. Ainfi

ces. Οὐκεν

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....

§. VI. (1) Πήγη γδ καὶ ῥίζα καλοκαγαθίας, τὸ νομίμα
Tuxer waidelas. Une bonne éducation eft la fource & le fon-
dement de la Vertu & de la Probité. Plutarch. de liber, educ.
pag. 4. B. Ed. Wech. Platon dit, que les plus excellens
Elprits font ceux qui deviennent les plus mechans, lors
qu'ils font mal élevez; & que les petits Genies ne font
gueres capables ni de grandes Vertus, ni de grands Vi-
καὶ τὰς ψυχὰς ἔτω φαιν τὰς εὐρνεςά-
κακῆς παιδαγωγίας τυχέσας, διαφερόντως κακός
γίγνεθα. δ οἴει τὰ μεγάλα αδικήματα, καὶ τὴν ἄκρα τον
πονηρίαν, in quúrns, dar' ex on revans qúews Tegeй-
διαλλυμψης γίγνειας, ἀσθενῆ ἢ φύσιν, μεγάλων ἔτε αγα-
θῶν ἔτε κακῶν αἰτίαν ποτὲ ἔτες ; De Republica, Lib.
VI. pag. 676. D. Edit. Wech. L'Auteur citoit encore ici
Horat. Lib. IV. Od. IV, 33. & feqq. Stobaus, Serm.
LXXXI. Libanius, Declam. XX. Au refte, on trouvera
quantité de beaux préceptes pour l'Education des En-
fans, dans le Traité de Plutarque, qui vient d'être ci-
té; comme auffi dans les Effais de Montagne, Liv. II.
Chap. VIII. intitulé, de l'affection des Péres aux Enfans;
dans Charron, de la Sageffe, Liv. III. Chap. XIV. mais
fur tout dans l'excellent Traité de Mr. Locke, dont on
a fait plufieurs Editions en Anglois & en François.

(2) Voiez Philon, de fpecial. Legib. p. 794, 795. Ed.
Parif. Diodor. Sicul. Lib. I. Cap. LXXVII. Lactant. Inft.
divin. Lib. VI. Cap. XX. Lex Wifigoth. Lib. VI. Tit. III.
Cap. VII. Grotius fur l'Exode, XXI, 22. Selden. de J. N.
&G. fec. Hebr. Lib. IV. Cap. I. Au refte la coûtume dé-
teftable & inhumaine d'expofer les Enfans, ou de les

la

tuer même, étoit très-commune autrefois dans la Gréce, & dans l'Empire Romain. Ariftote l'approuve, Politic. Lib. VII. Cap. XVI. Nôtre Auteur citoit ici Plutarch. in Lycurg. Diodor. Sic. Lib. I. Cap. LXXX. Strab. Lib. XVII. où il remarque, comme une chofe particuliere, queles Egyptiens elevoient tous leurs Enfans. Tacite fait la même remarque, à l'égard des Juifs; Hift. Lib. V. & Denys Halicarnaffe, à l'égard des Aborigenes, Lib. I. pag. 13. [On peut voir là-deffus le Julius Paulus de Mr. Noodt, où il a traité à fond cette matiére.] Nôtre Auteur remarquoit encore, que l'on trouve des exemples de la même coutume dans un Roiaume des Indes, dont Sopitès étoit Roi, Q. Curt. Lib. IX. Cap. I. & chez les Cathéens du même Païs, Strab. Lib. XV. p. 481. comme auffi dans la Chine, & dans l'Ile Formofa. Mais il faut que je rapporte tout du long une Loi du Digefte, qui eft auffi citée dans l'Original, & où le Jurifconfulte Paul femble condamner cette abominable coûtume. Necare videtur non tantùm is qui partum perfocat : fed & is qui abjicit; & qui alimonia denegat ; & is qui publicis locis mifericordia caufà exponit, quam ipfe non habet.,, On ,, tue fon fruit, non feulement lors qu'on l'étouffe,

mais encore lors qu'on l'abandonne; lors qu'on lui , refufe la nourriture; & lors qu'on l'expofe dans un ,, lieu public, afin qu'il trouve dans les autres une com,, paffion, dont on n'a point été touché foi-même en,, vers lui. Digeft. Lib. XXV. Tit. III. De agnofcendis, & alendis liberis &c. Leg. IV.

(3) Voiez ci-deffus, Liv. I. Chap. I. §. 7.

(4) Voicz

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