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LES VIES

DES

HOMMES ILLUSTRES.

TOME I.

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CHEZ FIRMIN DIDOT FRÈRES, LIBRAIRES,
IMPRIMEURS DE L'INSTITUT DE FRANCE,

RUE JACOB, 56.

M DCCC XLIX.

NOTICE

SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE RICARD.

Dominique Ricard naquit à Toulouse le 23. mars 1741, dans le sein d'une famille qui le fit élever avec soin. Il fit de rapides progrès, et il avait à peine atteint l'âge prescrit par les règlements de l'université, qu'il fut reçu bachelier en théologie. Il quitta bientôt sa patrie pour se rendre à Auxerre, et y occuper une chaire d'éloquence au collége de cette ville. La pureté et la douceur de ses mœurs lui acquirent l'estime et l'amitié de tous ceux qui le connurent, et l'on s'empressa de le nommer chanoine honoraire de la cathédrale. Il n'était que simple ecclésiastique, n'ayant jamais voulu s'engager dans les ordres. Il n'avait guère plus de vingt-cinq ans lorsqu'il fut choisi, en 1766, pour prononcer, dans la salle du collége, l'Éloge funèbre du Dauphin, fils de Louis XV. En parlant de la piété du prince vertueux que la France venait de perdre, l'orateur s'écria: « Grand Dieu! touchons-nous à ce « moment terrible où le puits de l'abime ouvert « va laisser sortir cette fumée qui doit même obs« curcir le soleil, selon l'expression de votre « prophète? (Apocalypse, chap. IX.) La foi va-t« clle s'éteindre sur la terre? et ce royaume, au« trefois si célèbre par son amour pour la religion « et pour sa doctrine, va-t-il se laisser enlever « ce précieux héritage, et enrichir les étrangers « de ses dépouilles? Quel spectacle, et qu'il est « déplorable aux yeux de la foi! Le démon de « l'irréligion et de l'incrédulité a répandu presque partout un esprit d'orgueil et de révolte.... Pres« que partout on ne voit que des philosophes sans «< sagesse, que des hommes sans raison, qui, « voulant expliquer la philosophie par la raison, « se montrent également ennemis de l'une et de « l'autre, se dégradent honteusement en voulant « détruire les seuls titres de leur grandeur, et tombent dans un véritable néant, plus funeste « mille fois que celui qu'ils se donnent pour ter

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PLUTARQUE. - I.

« me. » A cette époque, on aurait pu taxer l'auteur d'hyperbole; mais il voyait bien les effets dans la cause, et le mal a fait depuis de terribles progrès.

En 1770, il prononça un Discours latin sur le mariage de Louis XVI, alors dauphin, avec Marie-Antoinette, archiduchesse d'Autriche. Le style de ce discours montre combien il était versé dans la langue de Cicéron; les portraits et les maximes qu'on y trouve font honneur à son jugement. Le collége d'Auxerre ayant été supprimé, il se vit contraint de venir à Paris pour y chercher des moyens d'existence. Quoique l'éducation fût une carrière pénible et remplie d'écueils, surtout dans un temps de dissolution et de vertige, il s'y engagea néanmoins avec courage, et la parcourut avec succès. Ses instructions et ses exemples furent des semences de vertu qui germèrent dans le cœur de ses élèves. Il ne pouvait être fermé à la reconnaissance : aussi chérirentils cet excellent maître, auquel le même sentiment attacha leurs parents. Après la mort de ceux-ci, il resta lui-même si fidèle à leurs enfants, qu'on a dit de son amitié qu'elle était un héritage de famille. En effet, on ne peut guère aimer vé ritablement une personne, sans être attaché à ses enfants: heureuse habitude du cœur, qui lui rend ses pertes moins sensibles, et le rattache en quelque sorte à la vie, au moment du plus grand déchirement qu'il puisse éprouver.

Le séjour que Ricard fit à Auxerre lui rappela sans doute Amyot, qui avait été évêque de cette ville, et dont la statue existait encore dans la cathédrale, avant la révolution. Cet illustre savant a mérité la reconnaissance de la postérité, par sa traduction complète des OEuvres de Plutarque. Quoiqu'il eût à surmonter beaucoup de difficultés, il fut cependant favorisé dans cette entreprise par le caractère de notre langue, qui

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