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tue, des autels, et il en a dans tous les cœurs vertueux. Pourrait-on le rendre comptable des abus de sa profession? On donne des lauriers au héros belliqueux, des myrtes à l'amour, le Panthéon au génie... Comment récompensera-t-on le chirurgien qui, dans l'obscurité d'un hospice, périt sans éclat, sans gloire, victime de son dévouement, en respirant un air infect, en domptant sans cesse ses sens révoltés ?... Ah sa récompense est dans son cœur, sa conscience; aucune académie ne décerne de semblables prix.

Quelle couronne posera-t-on encore sur la tête des quatre jeunes médecins, des deux sœurs, qui ont volé, à BarceJonne, au secours des malheureux pestiférés!.... elle sera composée d'immortelles, sans doute, de pierres précieuses moins pures encore que leur belle âme;

mais nous apprenons avec un douloureux étonnement que ces deux sœurs, héroïnes de l'humanité, et un des quatre docteurs, le généreux Mazet, a promptement reçu la mort, pour prix de son héroïsme. Amis de l'humanité, calmez vos vifs regrets, ces ombres révérées ont reçu, dans le séjour céleste, la récompense de leur haute vertu, et l'admiration de l'Europe entière leur élèvera sans doute à Barcelonne même, théâtre de leur sacrifice, un obélisque qui éternisera leur glorieuse infortune, de même qu'on a conservé, à Marseille, le nom immortel de Belsuns, lorsque cette ville fut, en 1721, la proie d'une peste terrible en ses ravages.

On m'affirme en ce moment que les deux sœurs n'ont pas été victimes de leur religieux dévouement. Quel bonheur!.

CONCERT SPIRITUEL,

PETIT APERÇU PHILOSOPHIQUE.

Tous les théâtres, à Paris, sont fermés pendant les jours les plus augustes, consacrés à la religion, c'est-à-dire, pendant toute la semaine sainte. C'est le temps où l'homme, pénétré d'une pro→ fonde anagogie de l'âme, imbu de l'avenir de son néant terrestre, et de son im mortalité divine, doit se recueillir dans une profonde méditation de lui-même, de l'éternité et des souffrances de son Rédempteur.Beaucoup de fidèles fréquentent les églises, et prouvent à l'observateur qu'il est encore quelques vertus, dans

ce siècle de corruption. Le tombeau de notre Sauveur est visité dans un silence respectueux, et l'image de cette victime céleste force à la réflexion les esprits les plus légers. Ainsi tous les peuples, sous des forines religieuses et des cultes différens, ont leur semaine - sainte. Les Turcs out leur ramazan, les Asiatiques, des pélerinages sur les rives du Gange, les Mahometans visitent, à la Mecque, le tombeau de leur prophète, et la plupart des nations se réunissent dans ce sentiment général de mortifications, qu'il faut consacrer à la divinité, une époque où elle reçoive sans partage tout l'encens du cœur des mortels. Cependant on est si affamé de spectacles, à Paris, que cette passion insatiable a su se ménager encore une réserve dans ces jours de dévotion, qui n'admettent aucune dissipation frivole. Cette réserve est la

Concert-spirituel, couleurs et dénomination mystiques, qui ne me paraissent pas détruire le plaisir profane qui en résulte, puisqu'il s'agit là, plutôt d'en-' tendre d'excellente musiqué, de mélodieux virtuoses, que de nourrir son âme de pensées vraiurent religieuses. Les femmes y font assaut de toilette, et l'éclat du diamant ne me paraît pas du tout encore la parure d'une âme vraiment contrite. Les riches et les grands ne sauraient-ils donc s'abaisser même devant la Divinité au tombeau....

Pour le peuple, qui parcourt les temples, il puise, dans le spectacle solennel des souffrances et de la mort de JésusChrist, des jouissances, des consolations infinies; son âme s'élève, se remplit même d'un saint orgueil; le peuple, dis-je, devient en quelque sorte fier de partager ses douleurs avec un Dieu; les

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