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HARVARD COLLEG

MAY 28 1920
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UN SONGE PROPHÉTIQUE

UN

POUR PRÉFACE.

N jour que, saturé de vicissitudes humaines, accablé d'ennui, de dégoûts affreux.., pourrait on en être étonné?.. je suis auteur....; un jour, dis-je, 'qu'étendu tristement sur mon trop modeste lit de sangle, j'invoquais les douceurs du sommeil, et me sentais insensiblement plongé dans les vapeurs du repos, respirant à longs traits l'oubli des maux trop réels de la vie, et des caprices hautains de mon libraire, je démêlai à travers mille tableaux bisarres, voluptueux ou effrayans, tous sortis du palais brillant des chimères , une scène magique, qui, toute bâtie qu'elle était sur l'aile éphémère des songes, n'en,

prit pas moins à mes yeux un caractère frappant de vérité. L'appareil idéal était vraiment magnifique, et jamais l'Académie Royale de Musique, dans ses plus grandes pompes théâtrales, n'a présenté au parterre émerveillé une féerie si séduisante! Ile enchanteresse des cygnes, bosquets amoureux d'Amathonte, palais merveilleux d'Armide amours aériens de Flore et Zéphire, vous n'êtes rien en comparaison de ces charmantes rêveries : c'était enfin l'imagination, cette déesse elle-même, livrée à toute l'ivresse de sen pouvoir; on sait

que

lorsque le corps sommeille,

Elle aime à retracer les tableaux de la veille. Je la vois au héros présenter des lauriers, Au jeune homme un carquois, un char et des coursiers,

Jeter le barde aux bords d'une mer blanchis

sante;

Et quelquefois aussi, terrible et menaçante

Dans des rêves vengeurs effrayer les tyrans, Ou présenter l'exil aux favoris des grands. Déesse au front changeant, mobile enchante

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Mère des passions, des arts et des talens, Qui, peuplant l'univers de fantômes brillans, Et d'espoir tour-à-tour, et de crainte suivie, Ou dore ou rembrunit le tableau de la vie.

Quant à mon songe, à moi, toutes mes facultés étaient délicieusement suspendues entre le charme du coup de théâtre et la crainte qu'il ne s'évanouît: décriVons-le ce songe extraordinaire, il est d'ailleurs la base de ce léger édifice littéraire; je me flatte qu'il ne déplaira pas au lecteur. N'est-il pas bien prouvé que nous ne sommes heureux que par des illusions???...

Sur des groupes de nuages éclatans de

pourpre, d'azur et d'opale, et par de-là les régions éthérées, s'élevait un temple superbe sur le frontispice duquel on lisait en lettres de feu: L'ILLUSION. La magie, la démence, le prestige, l'enthousiasme, le délire, formaient sa cour. L'optique, appuyée sur la statue d'Archimède, un prisme dans la main, en faisait jaillir mille rayons de diverses couleurs, changeait de nature les objets, en les revêtant d'un vernis imposteur, et la peinture et l'art, ainsi que la lumière, concouraient à rendre l'autel de l'illusion éblouissant de splendeur.

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« Je suis, dit la déesse, en étendant

» une baguette d'or qu'elle tenait dans » la main droite, et en daignant m'a» dresser la parole, l'unique reine de >> l'univers : le bonheur ne naît que par » mon ministère; j'attache aux choses les plus frivoles un prix infiai; les lau

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