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partis même également incertains, la sagesse voudroit qu'on choisît celui qui est le plus avantageux avec le moins de risque. Si ce que je dis se trouve vrai, dit Socrate, il est très-bon de le croire: et si après ma mort il ne se trouve pas vrai, j'en aurai toujours tiré cet avantage dans cette vie, que j'aurai été moins sensible aux maux qui l'accompagnent ordinaireCe raisonnement de Socrate est bien remarquable. Si ce que je dis est vrai, je gagne topt, en ne hasardant que peu de chose; et s'il est faux, je ne perds rien; au contraire, j'y gagne encore beaucoup.

ment."

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,,Mes amis, une chose encore qu'il est très-juste de penser, c'est que şi l'âme est immortelle, elle a besoin qu'on la cultive et qu'on en soin, non seulement pour ce temps que nous appelons vie, mais encore pour le temps qui la suit, c'est-à-dire pour l'éternité: et la moindre négligence sur ce point peut avoir des suites infinies. Si la mort étoit la ruine et la dissolution du tout, ce seroit un grand gain pour les méchans après leur mort, d'être délivrés en même temps de leur corps, de leur âme et de leurs vices. Mais, puisque l'âme est immortelle, elle n'a d'autre moyen de se délivrer de ses maux, et il n'y a de salut pour elle que de devenir très-bonne et très-sage: car elle n'emporte avec elle que ses vertus ou ses vices, qui sont une suite ordinaire de l'éducation qu'on a reçue, et la cause d'un bonheur ou d'un malheur éternel,"

,,Au sortir de cette vie il s'ouvre deux routes, dont l'une mène à un lieu de supplices éternels les âmes qui se sont souillées ici-bas par des plaisirs honteux et par des actions criminelles; l'autre conduit à l'heureux séjour des Dieux, celles qui se sont conservées pures sur la terre et qui dans des corps humains ont mené une vie toute divine.“

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Quand Socrate eut achevé de parler, Criton le pria de lui donner ses derniers ordres, à lui et aux autres amis, sur ce qui regardoit ses enfans et toutes ses affaires, afin qu'en les exécutant, ils eussent la consolation de lui faire quelque plaisir.,,Je ne vous recommande aujourd'hui autre chose, reprit Socrate, que ce que je vous ai toujours recommandé, qui est d'avoir soin de vous. Vous ne sauriez vous rendre à vous mêmes un plus grand service, ni me faire à moi et à ma famille un plus grand plaisir. Criton lui ayant ensuite demandé comment il souhaitoit qu'on l'enterrât: comme il vous plaira, dit Socrate; si pourtant vous pouvez me saisir, et que je n'échappe pas de vos mains." Et en même temps regardant ses amis avec un petit sourire, „je ne saurois venir à bout, dit-il, de persuader à Criton que Socrate est celui qui s'entretient avec vous, et qui arrange toutes les parties de son discours; et il s'imagine toujours que je suis celui qu'il va voir mort tout à l'heure. Il me confond avec mon cadavre: c'est pourquoi il me demande comment il faut m'enterrer." En finissant ces paroles, il se leva, et passa dans une chambre voisine pour se baigner. Après qu'i fut sorti du bain, on lui rapporta ses enfans, car il en avoit trois, deux. tout petits, et un qui étoit déjà assez grand. Il leur parla pendant quelque temps, donna ses ordres aux femmes qui en prenoient soin, puis les fit retirer. Étant rentré dans la chambre, il se mit sur son lit.

Le valet des Onze entra en même temps et lui ayant déclaré que le temps de prendre la ciguë étoit venu (c'étoit au coucher du soleil), ce valet se sentit attendri, et tournant le dos, il se mit à pleurer. „Voyez le bon coeur de cet homme! dit Socrate; pendant ma prison il m'est venu voir souvent, et s'est entretenu avec moi. Il vaut mieux que tous les autres. Qu'il me pleure de bon coeur!" On rapporta la coupe. Socrate demanda ce qu'il avoit à faire. Rien autre chose, reprit le valet, sinon, quand vous aurez bu, de vous promener jusqu'à ce que vous sentiez vos jambes appésanties, et de vous coucher ensuite sur votre lit. Il prit la coupe sans aucune émotion, et sans changer ni de couleur ni de visage, et regardant cet homme d'un oeil ferme et assuré à son ordinaire: Que ditesvous de ce breuvage? lui dit-il. Est-il permis d'a faire des libations?" On lui répondit qu'il n'y en avoit que pour une prise. „Au moins, continua-t-il, il est permis et il est bien juste de faire ses prières aux Dieux, et de les supplier de rendre mon départ dessus la terre et mon dernier voyage heureux; c'est ce que je leur demande de tout mon coeur." Après avoir dit ces paroles, il garda quelque temps le silence, et but ensuite toute la coupe avec une tranquillité merveilleuse, et avec une douceur qu'on ne sauroit exprimer.

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Jusque-là ses amis s'étoient fait violence pour retenir leurs larmes: mais en le voyant boire, et après qu'il eût bu, ils n'en furent plus les maîtres, et elles coulèrent en abondance. Apollodore, qui n'avoit presque cessé de pleurer pendant toute la conversation, se mit alors à hurler, et à jeter de grands cris, de manière qu'il n'y eut personne à qui il ne fit fendre le coeur. Socrate seul n'en fut point ému: il en fit même quelques reproches à ses amis, avec sa douceur ordinaire. Que faites-vous? leur dit-il. Je vous admire. Eh, où est donc la vertu? N'étoit-ce pas pour cela que j'avois renvoyé ces femmes, de peur qu'elles ne tombassent dans ces foiblesses? Car j'ai toujours ouï dire qu'il faut mourir tranquillement et en bénissant les Dieux. Demeurez donc en repos, et témoignez plus de fermeté et plus de force." Ces paroles les remplirent de confusion, et les forcèrent de retenir leurs larmes.

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Cependant il continuoit à se promener, et quand il sentit ses jambes appésanties, il se coucha sur le dos, comme on lui avoit recommandé.

Le poison alors produisit son effet de plus en plus. Quand Socrate vit qu'il commençoit à gagner le coeur, s'étant découvert, car il avoit la tête couverte, apparemment afin que rien ne le troublât;,, Criton, dit-il, et ce furent ses dernières paroles, nous devons un coq à Esculape: acquittez-vous de ce voeu pour moi, et ne l'oubliez pas,“ Il rendit bientôt après le dernier soupir. Criton s'approcha, et lui ferma la bouche et les yeux. Telle fut la fin de Socrate, la première année de la XCV. Olympiade et la soixante et dixième de son âge.

Le peuple d'Athènes n'ouvrit les yeux que quelque temps après la mort de Socrate. Leur haine étant satisfaite, les préventions se dissipèrent; et le temps ayant donné lieu aux réflexions, l'injustice criante de ce jugement se montra à eux dans toute sa noirceur. Tout déposoit dans

la ville, tout parloit en faveur de Socrate. L'Académie, le Lycée, les maisons particulières, les places publiques, sembloient encore retentir du son de sa douce voix. Là, disoit-on, il formoit notre jeunesse, et apprenoit à nos enfans à aimer la patrie et à respecter leurs pères et leurs mères. Ici, il nous donnoit à nous-mêmes d'utiles leçons, et nous faisoit quelquefois de salutaires reproches pour nous porter plus vivement à la vertu. Hélas ! comment avons-nous payé de si importans services! Athènes fut plongée dans un deuil et dans une consternation universelle; les écoles furent fermées, et tous les exercices interrompus. On demanda compte aux accusateurs du sang innocent qu'ils avoient fait répandre. Mélitus fut condamné à mort et les autres furent bannis. Plutarque observe que tous ceux qui avoient trempé dans cette calomnie, furent en telle abomination parmi les citoyens, qu'on ne leur vouloit point donner de feu, ni leur répondre quand ils faisoient quelque question, ni se trouver avec eux aux bains; et l'on faisoit jeter l'eau où ils s'étoient baignés, comme étant souillée par leur attouchement: ce qui les porta à un tel désespoir, que plusieurs se firent mourir.

Les Athéniens, non contens d'avoir ainsi pun ses calomniateurs, lui firent élever une statue de bronze de la main du célèbre Lysíppe, et la placèrent dans un lieu des plus apparens de la ville. Leur respect et leur reconnoissance passèrent jusqu'à une vénération religieuse; ils lui dédièrent une chapelle comme à un héros et à un demi-dieu, laquelle ils nommèrent en leur langue Zwngarstov, c'est-à-dire la Chapelle de Socrate.

FONTENELLE.

BERNARD LE BOVIER DE FONTENELLE, den 11. Februar 1657 zu Rouen geboren, war als Kind so schwächlich, dafs niemand das hohe Alter, welches er erreicht hat, ahnte. Seine Brust war immer leidend, aber sein Magen desto stärker. Er war stets bemüht, alle heftige Erschütterungen des Körpers und der Seele zu vermeiden. Von ungestört heiterer Laune hat er nie laut gelacht, und eben so wenig, seiner eigenen Versicherung nach, je geweint. Er studirte mit glücklichem Erfolge unter den Jesuiten in seiner Vaterstadt und schrieb bereits in seinem dreizehnten Jahre einen kleinen Aufsatz in lateinischer Sprache, der des Druckes werth geachtet wurde. Nach Vollendung seiner Schulstudien legte er sich, dem Wunsche seines Vaters, eines geachteten Advokaten, gemäfs, auf die Rechte, die er aber bald, aus Verdrufs über den Verlust des ersten Processes, den er zu führen übernommen hatte, mit der Literatur und Philosophie vertauschte. In seinem 23sten Jahre liefs er sich in Paris nieder, wo der Ruhm der Gebrüder Corneille, seiner Oheime

von mütterlicher Seite, und der vertraute Umgang mit SaintPierre und andern geistreichen Männern, anregend auf ihn einwirkte. Er zog bald durch einige witzige Gedichte, die er in den Mercure galant einrücken liefs, die Aufmerksamkeit des Publikums auf sich. Im Jahr 1683 gab er seine in Lucian's Manier geschriebenen Dialogues des morts heraus, die den Grund zu seinem Ruhm legten. Sie haben sämmtlich, wie das hier abgedruckte. Gespräch, eine moralische Tendenz. In vielen giebt sich eine gesunde Philosophie zu erkennen; im Allgemeinen tragen sie aber nur zu sehr den Stempel des affektirten Geschmacks ihrer Zeit an sich. Der beste Dialog ist unstreitig der letzte, erst in den späteren Ausgaben hinzugekommene, des Titels: Jugement de Pluton sur les dialogues des morts, den wir seiner Lünge wegen nicht gehen konnten. Die wichtigsten unter seinen übrigen Werken sind folgende: 1) Lettres du Chevalier d'Her... 1685. Diese öfters gedruckten Briefe sind anonym erschienen und er hat nie den Muth gehabt, sie öffentlich als seine Arbeit anzuerkennen. Sie haben zwar ein ächteres Gepräge, als die witzelnden Briefe Balzac's und Voiture's, verrathen aber dennoch ein zu sichtbares Bestreben nach sinnreichen Ausdrücken und Wendungen, als dass sie sich zur Nachahmung empfehlen liefsen. Sie sind nach Trublet's Bemerkung die einzigen galanten Briefe, die man liest, welches beweist, mit welchen Schwierigkeiten diese Gattung des Stils zu kämpfen hat. 2) Entretiens sur la pluralité des mondes, 1686, sein berühmtestes Werk, in welchem er auf das glücklichste Gründlichkeit mit Witz und Leichtigkeit zu verbinden weifs. Nur Schade, wie Voltaire sagt, dafs sich diese sonst so vortreffliche Schrift um die Hirngespinnste der Cartesischen Wirbel dreht, daher sie die Nachwelt vielleicht nicht zu den klassischen Werken der Franzosen zählen wird*). 3) Histoire des oracles, 1687, ein lehrreiches und unterhalten des Werk, das den Hauptsachen nach aus der Kompilation des Vandale geschöpft ist. Der Titel verspricht zu viel. Es sollen darin eigentlich nur zwei häufig hehauptete Sütze widerlegt werden, nämlich dafs die Orakel mit Christi Geburt aufgehört haben, und dafs sie ein Werk des Teufels gewesen sind. 4) Poësies pastorales, avec un discours sur l'églogue et une digression sur les anciens et les modernes, 1688. Als Dichter verdient Fontenelle keinen vorzüglichen Rang, am wenigsten als Schäferdichter. Er läfst seine Hirten, wie Guarini im Pastor fido, die Sprache der Hofleute reden, und weifs ihrer Unterhaltung nicht die Einfalt, Unschuld und Natur zu geben, die in Theokrit's und Gefsner's Idyllen so sehr gefüllt. Den meisten Beifall verdient noch die Ekloge Ismène, die sich durch Natürlichkeit und Anmuth auszeichnet.

*) In Bode's geschützter Uebersetzung sind Fontenelle's Irrthümer berichtigt worden. Die vielen gründlichen Anmerkungen, womit sie begleitet ist, sind, ins Französische übersetzt, zugleich mit dem Original, zu Berlin, 1783 in 8. erschienen.

Rechnet man hierzu den Apologue de l'amour et de l'honneur, das Sonett Daphné und Le portrait de Clarice, so hat man alle die Gedichte Fontenelle's, welche sich in dem Andenken der Nachwelt erhalten werden. 5) Histoire de l'Académie des Sciences. Fontenelle war vom Jahr 1699, in welchem die Pariser Akademie der Wissenschaften erneuert wurde, bis 1741 Sekretär dieser gelehrten Gesellschaft, und gab als solcher jährlich einen' Band heraus, der die Geschichte derselben, d. h. Auszüge aus den vorgelesenen Mémoires, und Denkschrif ten auf die verstorbenen Mitglieder enthält. Dies ist nach dem Urtheil der Kenner das ausgezeichnetste seiner Werke. Meisterhaft ist die Präcision und Klarheit, mit der er seine Auszüge macht. L'ignorant l'entendit, le savant l'admira, sagt Voltaire. Vorzüglich bewundernswerth sind die Éloges, welche 1731 im Haug in 2 Bünden in 12. besonders gedruckt sind. Er zeigt sich darin als einen Mann von mannigfaltigen Kenntnissen, der im Stande war, das Verdienst grofser Münner zu würdigen. Er ist Metaphysiker mit Malebranche, Mathematiker mit Newton, Gesetzgeber mit Peter dem Grofsen, Staatsmann mit d'Argenson, und Arzt mit Boerhave. Walckenaer sagt in dem ihm gewidmeten Artikel im 15ten Bande der Biographie universelle: Il semble en quelque sorte avoir épuisé toutes les formes, pour attirer la curiosité du vulgaire sur ces sages bienfaiteurs de la société; il intéresse vivement à leurs nobles passions et au succès de leurs recherches; il n'est pas jusqu'à leur ignorance et à leur simplicité, dans le commerce de la vie, dont il ne sache tirer parti; et en se rendant complice de la vanité de ses lecteurs, qu'aurait genée le tableau uniforme de la supériorité de tant d'hommes éminens, il peint leurs manières bizarres et leurs innocens ridicules avec tant d'art et de mesure, qu'il sait par cela même les rendre encore plus respectables et nous faire admirer ceux dont il fait rire. 6) Élémens de la géométrie de l'infini. Paris 1727, 4. Dieses Werk würde jetzt vergessen sein, wenn es nicht einen Theil der Mémoires de l'Académie des Sciences ausmachte. Man sehe, wie sich d'Alembert in dem Artikel Infini der Encyclopédie darüber äussert. 7) Ein Trauerspiel Idalie, sechs Lustspiele und– die Opern Thétis et Pélée, Lavinie und Endymion, die nur einen vor- · übergehenden Beifall fanden. 8) Recueil des plus belles pièces des poètes françois avec de petites vies des poètes, 5 Bände in 12., 1692. 9) Abhandlungen sur l'existence de Dieu, sur le bonheur et sur l'origine des fables. 10) l'Histoire du théâtre françois jusqu'à Pierre Corneille, la Vie de Pierre Corneille und Réflexions sur l'art poétique, drei Aufsätze, die erst in der von ihm besorgten Ausgabe seiner Werke vom Jahr 1742 (6 Bände in 12.) gedruckt worden sind. Die Betrachtungen über die Dichtkunst gehören zu seinen durchdachtesten Schriften. 11) Théorie des tourbillons Cartésiens, 1752, in welchem Werke er sich als einen eifrigen Bewunderer des Descartes zeigt, dessen Irrthümer selbst ihm heilig sind. Diese und verschiedene unbedeutendere Schriften, die Auszüge aus den akademischen Abhandlungen

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