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« Monsieur le vicomte,

« Permettez que je m'associe à l'admiration univer« selle j'éprouve depuis trop longtemps ce sentiment « pour résister au besoin de vous l'exprimer.

« Vous réunissez la hauteur de Bossuet à la profon«deur de Montesquieu : vous avez retrouvé leur plume « et leur génie. Vos articles sont de grands enseignements « pour tous les hommes d'État.

« Dans le nouveau genre de guerre que vous avez créé, vous rappelez la main puissante de celui qui, dans

« d'autres combats a aussi rempli le monde de sa gloire. << Puissent vos succès être plus durables : ils intéressent << la patrie et l'humanité.

Tous ceux qui, comme moi, professent les principes « de la monarchie constitutionnelle, sont fiers de trouver << en vous leur plus noble interprète.

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Agréez, monsieur le vicomte, une nouvelle assu

«rance de ma haute considération,

« Dimanche, 30 octobre. »>

« HORACE SÉBASTIANI. »

Aisi tombaient à mes pieds amis, ennemis, adversaires, au moment de la victoire. Tous les pusillanimes et les ambitieux qui m'avaient cru perdu commençaient à me voir sortir radieux des tourbillons de poussière de la lice : c'était ma seconde guerre d'Espagne; je triomphais de tous les partis intérieurs comme j'avais triomphé au dehors des ennemis de la France. Il m'avait fallu payer de ma personne, de même qu'avec mes dépêches j'avais paralysé et rendu vaines les dépêches de M. de Metternich et de M. Canning.

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FÊTE DU ROI. RETRAIT DE LA LOI SUR LA POLICE

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Le général Foy et le député Manuel moururent et enlevèrent à l'opposition de gauche ses premiers orateurs. M. de Serre et Camille Jordan descendirent également dans la tombe. Jusque dans le fauteuil de l'Académie, je fus obligé de défendre la liberté de la presse contre les larmoyantes supplications de M. de Lally-Tollendal. La loi sur la police de la presse, que l'on appela la loi de justice et d'amour, dut principalement sa chute à mes attaques. Mon opinion sur le projet de cette loi est un travail historiquement curieux; j'en reçus des compliments parmi lesquels deux noms sont singuliers à rappeler.

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« Monsieur le vicomte,

« Je suis sensible aux remercîments que vous voulez bien m'adresser. Vous appelez obligeance ce que je regardais comme une dette, et j'ai été heureux de la « payer à l'éloquent écrivain. Tous les vrais amis des let« tres s'associent à votre triomphe et doivent se regarder «< comme solidaires de votre succès. De loin comme de près, j'y contribuerai de tout mon pouvoir, s'il est pos«sible que vous ayez besoin d'efforts aussi faibles que les

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<< miens.

« Dans un siècle éclairé comme le nôtre, le génie est « la seule puissance qui soit au-dessus des coups de la disgrâce; c'est à vous, monsieur, qu'il appartenait d'en

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«< fournir la preuve vivante à ceux qui s'en réjouissent « comme à ceux qui ont le malheur de s'en affliger. « J'ai l'honneur d'être, avec la considération la plus distinguée, votre, etc., etc.

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« ÉTIENNE. »

« Paris, ce 5 avril 1826.

« J'ai bien tardé, monsieur, à vous rendre grâce de « votre admirable discours. Une fluxion sur les yeux, des « travaux pour la Chambre, et plus encore les épouvan<< tables séances de cette Chambre, me serviront d'excuse. « Vous savez d'ailleurs combien mon esprit et mon âme << s'associent à tout ce que vous dites et sympathisent avec << tout le bien que vous essayez de faire à notre malheu«reux pays. Je suis heureux de réunir mes faibles efforts « à votre puissante influence, et le délire d'un ministère

qui tourmente la France et voudrait la dégrader, tout « en m'inquiétant sur ses résultats prochains, me donne « l'assurance consolante qu'un tel état de choses ne peut « se prolonger. Vous aurez puissamment contribué à y « mettre un terme, et si je mérite un jour qu'on place « mon nom bien après le vôtre dans la lutte qu'il faut << soutenir contre tant de folie et de crime, je m'estimerai « bien récompensé.

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Agréez, monsieur, l'hommage d'une admiration « sincère, d'une estime profonde et de la plus haute con« sidération.

« Paris, ce 21 mai 1827. »

BENJAMIN CONSTANT.

C'est au moment dont je parle que j'arrivai au plus haut point de mon importance politique. Par la guerre d'Espagne j'avais dominé l'Europe; mais une opposition violente me combattait en France: après ma chute, je devins à l'intérieur le dominateur avoué de l'opinion. Ceux qui m'avaient accusé d'avoir commis une faute irréparable en reprenant la plume étaient obligés de reconnaître que je m'étais formé un empire plus puissant que le premier. La jeune France était passée tout entière de mon côté et ne m'a pas quitté depuis. Dans plusieurs classes industrielles, les ouvriers étaient à mes ordres, et je ne pouvais plus faire un pas dans les rues sans être entouré. D'où me venait cette popularité? de ce que j'avais connu le véritable esprit de la France. J'étais parti pour le combat avec un seul journal, et j'étais devenu le maître de tous les autres. Mon audace me venait

de mon indifférence: comme il m'aurait été parfaitement égal d'échouer, j'allais au succès sans m'embarrasser de la chute. Il ne m'est resté que cette satisfaction de moimême, car que fait aujourd'hui à personne une popularité passée et qui s'est justement effacée du souvenir de tous?

La fête du roi étant survenue, j'en profitai pour faire éclater une loyauté que mes opinions libérales n'ont jamais altérée. Je fis paraître cet article :

« Encore une trêve du roi !

« Paix aujourd'hui aux ministres !

Gloire, honneur, longue félicité et longue vie à

« Charles X! c'est la Saint-Charles!

« C'est à nous surtout, vieux compagnons d'exil de << notre monarque, qu'il faut demander l'histoire de « Charles X.

(༥

« Vous autres, Français, qui n'avez point été forcés « de quitter votre patrie, vous qui n'avez reçu un Français de plus que pour vous soustraire au despotisme im«< périal et au joug de l'étranger, habitants de la grande « et bonne ville, vous n'avez vu que le prince heureux : << quand vous vous pressiez autour de lui, le 12 d'avril « 1814; quand vous touchiez en pleurant d'attendrisse«ment des mains sacrées, quand vous retrouviez sur un « front ennobli par l'âge et le malheur toutes les grâces « de la jeunesse, comme on voit la beauté à travers un « voile, vous n'apercevicz que la vertu triomphante, et << vous conduisiez le fils des rois à la couche royale de ses pères.

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Mais nous, nous l'avons vu dormir sur la terre,

«< comme nous sans asile, comme nous proscrit et dé

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