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fait mention de cette coûtume dans fon Livre des Fastes, en recherche lui-même l'origine, & voici ce qu'il dit fur cette matière:

Cur igitur miffa vinctis ardentia tædis
Terga ferant vulpes, caufa docenda mihi.

C'est-à-dire, Il faut que j'allègue la raison, pour laquelle on lâche des renards, au dos defquels on a attaché des flambeaux allumez.

Et il ajoûte:

Frigida Carfeoli nec olivis apta ferendis
Terra, fed ad fegetes ingeniofus ager.
Hac ego Pelignos natalia rura petebam,
Parva, fed affiduis uvida femper aquis.
Hofpitis antiqui folitas intravimus ades.

Filius hujus erat primo lafcivus in ævo ;
Addideratque annos ad duo luftra duos.
Is capit extremi vulpem fub valle falicti,
Abftulerat multas illa cohortis aves.
Captivam ftipula fænoque involvit, & ignes
Admovet: urentes effugit illa manus.
Quà fugit, incendit veftitos meffibus agros:
Damnofis vires ignibus aura dabat.

Factum abiit: monumenta manent: nam vivere captam
Nunc quoque lex vulpem Carfeolana vetat.
Utque luat panas gens hæc, cerealibus ardet:
Quoque modo fegetes perdidit, ipfa perit.

C'eft-à-dire, Le païs de Carféole eft froid, pen propre pour les oliviers, mais fertile en bled, c'eft par-là que j'allois à Peligni mon païs natal , qui quoique petit eft arrofé de quantité de ruiffeaux

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qui ne tariffent jamais. Nous logeâmes felon notre colitume chez un ancien hôte....... dont le fils étoit à la fleur de fon âge, & n'avoit encore que douze ans. Il venoit de prendre au bout d'une valéė plantée de faules un renard, qui avoit attrapé beaucoup d'oifeaux dans une baffecourt. Ce jeune homme attacha de la paille & du foin au corps de cet animal, & y mit le feu. Le renard fentant la flamme prend la fuite à travers les champs, brule les moiffons par-tout où il paffe, pendant que le vent contribue à augumenter l'incendie. Cet événement eft paffé, mais les monumens en reftent. Une Loi de Carfeole défend de laiffer en vie les renards que l'on a pris. On a accoûtumé de leur attacher de la paille & de les bruler, de la même manière que celui, qui avoit été pris par le fils de notre hôte, avoit brulé les moiffons.

Bochart réfute folidement le fentiment d'Ovide touchant l'origine de la coûtume, qu'on avoit à Rome de lâcher dans le cirque des renards, au dos defquels on avoit attaché des flambeaux allumez. Peut-être pourroit-on réfuter aufli folidement les raifons, qui le perfuadent que c'eft à l'Hiftoire de Samfon que cette coûtume doit être rapportée.

Un Auteur Anonyme a une idée bien fingulière fur l'action que nous venons de rapporter. Il croit que Samfon ne lâcha point de renards fur les bleds des Philiftins, mais qu'il brula leurs gerbiers avec trois cens gerbes, auxquelles il avoit mis le feu après les avoir attachées les unes aux autres. Je ne connois que par les Journalistes la Differtation, où l'on foûtient une

6 BOCHART ubi fupra.

opi

opinion fi nouvelle. 7 Voici comme feu Mr. Bernard l'expofe: Ce qui a trompé les Interprètes, dit-il, c'eft que les anciens Juifs cherchoient des fens bieroglyphiques ou mystiques dans des mots équivoques. Ils voulurent infinuer dans cette Hiftoire, que Samfon avoit été plus fin que les Philiftins, quelque fins que ceux-ci euffent été en le trompant. Ils dirent donc que Samfon avoit chaffe les renards, c'est-à-dire, que Samfon avoit pris les Philistins qui étoient fins comme des renards. Ils cachèrent cette opinion fous le nom equivoque, o'byw, schua- ̄ lim, au lieu de hy, fchoalim, qui fignifie pro*C'eft prement des gerbes. De même le mot * Zanah, une faute la queue, fignifie dans tout le droit des Juifs la d'impref dernière partie de quelque chofe que ce foit. Dans le Journal, un jardin ou il y a du moins cinq jeps, par la Loi il faut lire des Juifs le cinquième arbre, ou le cinquiéme fep, zanab, eft toujours appellé la queue. Ainfi la derniére gerbe des gerbiers, mife à terre, a été appellée la queue par une figure élegante & fort propre. Si cet extrait eft complet & fidele, comme je le fuppofe, il fuffit pour renverfer tout ce fyftême, de nier que P'Hiftoire des renards de Samfon foit un hieroglyphe, que nous ne faurions réfuter plus ainplement, parce que nous n'avons pas l'Ouvrage, dans lequel on a prétendu l'établir.

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Lorsque les Philiftins eurent appris que c'étoit Samfon, qui avoit reduit leurs grains en cendre, ils craignirent qu'il ne fit de plus grands ravages dans leur païs, & pour appaifer fon courroux ils brulerent la femme, qui lui avoit été infidèle, & fon père qui l'avoit portée à cette infidélité, ou qui y avoit du moins confenti. Cette

fatis

7 Monf. BERNARD; l'extrait d'un petit livre in 12. fans nom de lieu ni d'année, Differtation fur l'âneffe de Bileam, les renards de Samfon, la machoire d'âne,

fatisfaction déplut à Samfon, & pour en avoir une plus grande il fe jetta fur les Philistins, & il remporta fur eux une victoire, dont l'Hifto. rien n'a pas rapporté les circonftances.

Mais les expreffions, qu'il emploic pour marquer la grandeur de cette défaite, font des plus obfcures, qui fe trouvent dans les Livres facrez. Il y a mot pour mot dans l'Hebreu, & il leur frappa P'épaule, fur la cuiffe d'une grande plair, on pourroit traduire auffi la cuiffe fur le côté. Il eft plus ailé de réfuter la plupart des fens, que les Interprètes ont donnez à ces expreffions, que d'en marquer le véritable: & j'avoue que je ne comprens pas comment on peut avoir un fentiment fixe fur des fujets fi obfcurs.Nous ne donnons donc que pour des conjectures les fentimens, qui ont été proposez jufques ici fur ce paffage, comme ce que difent quelques Commentateurs, que c'étoit là une façon de parler proverbiale, qui répond à celle de notre Langue, battre dos & ventre, pour dire défaire entiérement: comme la penfée du Paraphrafte Chaldaïque, qui croit que l'Hiftorien a voulu marquer la Cavalerie & P'Infanterie: comme l'idée de la Vulgate, qui traduit, Il en fit fi grand carnage, que mettant les jambes fur la cuiffe its demeurèrent tout interdits: comme celle

de Paul de Burgos & de Junius, qui penfent que c'étoient des termes de mépris: comme l'opinion de quelques autres Savans, qui prétendent que Samfon coupa Samfon coupa les jambes & les cuiffes des Philiftins, à peu près comme on coufoit

le corbeau d'Elie, l'Antechrift, Repub, des Lettres 1. O&ob 1707. pag. 407.

8 Voi. CALMET fur Juges XV. 8. pag. 234.

Gen. xxx. 8.

poit les jarrets des chevaux, pour les rendre
inhabiles au combat. 9. Mr. le Clerc veut
auffi que nous prenions pour une fimple con-
jecture ce qu'il propofe fur ce fujet. Il préfu-
il
me que l'on s'exerçoit aux jeux de la lutte
dans la Paleftine, comme parmi les Grecs, &
parmi divers autres Peuples Les preuves
qu'il allègue de cette hypothèse pourront trou-
ver des contredifans: il la fonde fur ce que
dit Rachel en parlant de Léa: J'ai fortement
Lutte contre ma four, auffi j'ai eu la victoire: c'est
pourquoi elle le nomma Nephthali: il veut l'établir
auffi fur ce qui eft raconté de la lutte de Jacob.
Si le combat de la lutte étoit établi dans la Pa-
leftine du temps de Samfon, on peut fuppofer
qu'il s'y fignala: & les paroles, que nous avons
citées, fignifieront, qu'avec un coup de genou
il fracafla la cuiffe de ceux, qui curent la temé-
rite d'entrer en lice avec lui.

Après que Samfon eût vangé la mort de fa femme & celle de fon beau-père, il defcendit, Jug, xv. 8. ce font les termes de l'Hiftoire, & il s'arrêta dans un quartier du Rocher d'Hetham. La crainte de fatiguer mon Lecteur par un trop grand nombre de conjectures m'empêche de rapporter ici celles qu'on a faites fur ce paflage: contentons nous de remarquer qu'il eft parlé dans le I. livre des Chroniques d'une bourgade appel1 Chron. Iée Hetham, qui étoit dans le pais échu à la Tribu de Siméon. Mais fi l'on peut prefumer que la caverne, dans laquelle Samfon fe refugia, étoit dans le territoire de cette bourgade, on ne fauroit le prouver.

IV. 32.

Cette retraite de Samfon fut regardée par les

9 CLERICUS fur Juges XV. pag. 8.134.

Phi

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