qui mettra des vaiffeaux en mer, qui fe chargera de les conduire? qui entreprendra des caravannes? on manquera alors du neceffaire, & des chofes utiles; s'il n'y a plus de befoins, il n'y a plus d'arts, plus de fciences, plus d'invention, plus de mécanique. D'ailleurs cette égalité de poffeffions & de richeffes en établit une autre dans les conditions, bannit toute fubordination reduit les hommes à fe fervir eux-mêmes, & à ne pouvoir étre fecourus les uns des autres, rend les loix frivoles & inutiles, entraine une anarchie univerfelle: attire la violence, les injures, les maffacres, l'impunité. Si vous fuppofez au contraire que tous les hommes font pauvres, en vain le Soleil fe leve pour eux fur l'horizon, en vain il échauffe la terre & la rend feconde; en vain le Ciel verfe fur elles fes influences; les fleuves en vain Parrofent, & répandent dans les diverfes contrées la fertilité & l'abondance; inutilement auffi la mer laiffe fonder fes abîmes profonds, les rochers & les montagnes s'ouvrent pour laiffer foüiller dans leur fein, & en tirer tous les trefors qu'ils y renferment. Mais fi vous établiffez que de tous les hommes répandus dans le monde, les uns foient riches, & les autres pauvres & indigens, vous faites alors que le befoin rapproche mutuellement les hommes, les lie, les les reconcilie; ceux-cy fervent, obeiffent, inventent, travaillent, cultivent, perfectionnent; ceux-là joüiffent, ncurriffent, fecourent, protegent, gouvernent; tout ordre eft rétabli, & Dieu le découvre. * Mettez l'autorité, les plaifirs & l'oyfiveté d'un côté: la dépendance, les foins & la mifere de l'autre, ou ces chofes font dépla cées par la malice des hommes, ou Dieu n'eft pas Dieu. Une certaine inégalité dans les conditions qui entretient l'ordre & la fubordination, eft l'ouvrage de Dieu, ou fuppofe une loi divine: une trop grande difproportion, & telle qu'elle fe remarque parmy les hommes, eft leur ouvrage, ou la loy des plus forts. Les extrémitez font vicieuses, & partent de l'homme toute compensation est juste & vient de Dieu. Si on ne goûte point ces Caracteres, je m'en étonne; & fi on les goûte, je m'en étonne de même. FIN.. N6 |