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Je la vois de Phébée empruntant le flambeau
D'un reflet lumineux argenter le ruisseau,

Et dans ses flots d'azur peindre cet arbre antique
A Dodone jadis déïté prophétique.

Sa retraite est au sein des bois mystérieux.
Là, Tibulle accordait son luth mélodieux;
Les bois ont de Milton exalté l'énergie;
Rubens même leur doit le feu de son génie.
Les bois parlent à l'ame: ah! ce n'est pas en vain]
Que tu les recherchais, gracieux Le Lorrain,
De l'agreste nature interprète fidelle!

Sous leurs dais tu broyas ta palette immortelle.
On croît respirer l'air dans tes charmans tableaux.
De tes ormes l'on voit s'agiter les rameaux;
Et tes nuages d'or, et ton onde tremblante,
Tout paraît animé sur ta toile savante.

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C'est Palès qui forma cet artiste enchanteur.
Si vous osez prétendre à la même faveur,
Elèves, imitez sa touche vaporeuse;
Variez vos sujets : que l'obier, que l'yeuse
Que l'élégant mélèze ombrage vos hameaux :
Tout paysage plaît dont les arbres sont beaux.
Qu'ils soient peints largement : par des teintes brillantes
Rendez légers vos ciels et vos eaux transparentes.
Mais l'aride précepte est souvent incertain?
Le goût dans les beaux arts domine en souverain.
Le sombre Michel-Ange, au fond des catacombes
Assis, et méditant sur de pieuses tombes,
Du dieu qui l'embrâsait reconnaissant la voix,
Des arts à son génie asservissait les lois :
Tel Le Poussin, errant dans des sites sauvages,
Un Homère à la main, créait ses paysages.
Dans l'antique âge d'or doucement transporté,
Solitaire, il rêvait l'idéale beauté.

Les bois, ses confidens, se peuplaient de dryades,
Et les flots amoureux caressaient les Naïades.
La nature par-tout enchantait ses pinceaux.
Vous
que séduit l'espoir d'être un jour ses rivauz,
Ah! consultez souvent ses riches paysages :
Apprenez à penser dans ses mâles ouvrages.

Si ce talent divina su vous enflammer;
Vous aimerez les champs, vous les ferez aimer.
O champs, dont tant de fois je regrettai les charmes
Vous qui des passions ignorez les alarmes,

De ma timide muse agréez le salut!

Heureux l'homme de bien qui vous offre en tribut
Un cœur pur, du bonheur source à jamais féconde!
Il laisse aux grands oisifs des vains plaisirs du monde
Qui sur des sens flétris amassent les douleurs.
Oui, les champs dédaignés sont l'asile des mœurs =
Ils inspirent les vers, les tableaux, l'harmonie,
Et de l'amant des arts mûrissent le génie.

J. A. MARC.

STANCES PLAINTIVES.

A la douce philosophie

J'avais consacré mes beaux jours.

Au tombeau d'un époux enchaînant les amours
J'implorais l'amitié, pour embellir ma vie.

Malgré la rigueur de mon sort,

De richesse de rang n'étant point envieuse,
J'avais l'art innocent de me montrer heureuse;
Mais à des yeux jaloux le bonheur est un tort.

L'obscurité, qui m'est si chère;
Mes tranquilles plaisirs, enfans de la raison;
Rien n'a pu désarmer l'envie et la colère:
Elles viennent troubler må dernière saison.

Si mon ame compatissante

Plaint un infortuné, gémit sur ses malheurs;
La haine est aux agnets, et, toujours agissanite,
Cherche à calomnier la cause de mes pleurs.

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D'une muse badine et tendre

Je laisse quelquefois échapper les accens :
Le sentiment se plait à les entendre;

Mais ils irritent les méchans.

Ah! courons dans les bois y chercher l'innocence f
Le vice a trop long-tems blessé mes faibles yeux.

Il est encor des mortels vertueux,

Et mon cœur a besoin de leur douce présence.

Je verrai la nature et la simplicité

Sourire, sans dépit, à ma muse champêtre ;
Et mes vers, ignorés de la postérité,
Vivront paisiblement sur l'écorce d'un hêtre.

Je chanterai les amans ingénus,
L'aimable bienfaisance et les amis fidèles;
Dans l'heureux âge d'or tous sujets bien connus,
Mais dont l'âge de fer a détruit les modèles.

Par Mme DE MONTANCLOS.

ÉNIGME.

BRUIT subit, importun, symptôme de santé,
Produit non sans effort et certaines grimaces,
J'occasionne une action de grâces,

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Un acte de civilité.

LOGOGRIPHE.

PEU Convenable à l'allégresse,
Avec mon chef quand on me laisse
J'annonce toujours la tristesse,
Fort souvent même la faiblesse,
Quelquefois aussi la tendresse
Et la voluptueuse ivresse.
Très-fréquente dans la jeunesse,
J'assiége encore la vieillesse,
Ma tête à bas, quoique traîtresse,
Par ma bravoure et ma prouesse
Je suis l'appui de la noblesse,
Du point d'honneur la vengeresso
Et de Bellone la prêtresse.
Qui me dirige avec adresse
Des insolens les torts redresse.
Si tu ne veux que je te blesse

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Allons, vîte, point de paresse,

Lecteur dévine, le tems presse.

(V. B. d'Agen.)

CHARADE.

Je ne veux point vous tenir en cervelle,
Ni tourner au-tour du dernier.
Songez bien qu'à rendre l'entier

On doit toujours être fidelle.

J'ai dit, lecteur. A vous donc le premier.

B.

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Mots de l'ENIGME, du LOGOGRIPHE et de la CHARADE insérés dans le dernier Numéro.

Le mot de l'Enigme est Zigzag.

Celui du Logogriphe est Megalantropogénésie (1), dans lequel on trouve : mort, espion, généalogie, atropos, Lerne, amant, Napoléon, timon, raison, orages, port, ortie, galanterie, Erato, Nestor Egée, Solon, impôt, esprit, Mentor, lion, été, printems, Laerte, * Enée, Ménélas, Priam, Agis, Salomon, Léon, rose, Nérée, Latone, mi, la, ré, si, sol, manne, magister, Platon, mer, émail, Gange, Nil, Tage, Tigre, Tesin, Ismare, Pô, Tanaïs, alose, ·merlan, sole, mars, aigle, merle, gelinote, rale, ortolan, linote, pie, serin, paon, pigeon, Siméon, Antoine, Martin, Simon , Pison, Pilate, Lemnos, Négrepont, Salamine, Oléron, Minos, poison, Pomone, Moïse, Aglaé, Eglé, Egérie, nègre, Néron, or, argent, Astrée, poésie, lèpre, Atrée, Porsenna, sanglier, Asie, anatomie (2).

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O Celui de la Charade est Carcasse.

(1) La Mégalantropogénésie, ou l'Art de faire des enfans d'esprit, ouvrage de M. Robert le jeune, docteur en médecine. Se vend à Paris, chez Lenormand, imprimeur-libraire.

(Note justificative du mot.)

(2) Nous avons supprimé dans l'explication du mot les 550 substantifs, les 39 adjectifs et beaucoup d'autres noms qui y sont contenus. Cette nomenclature, très-sèche, nous aurait pris trois à quatre pages.

LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS.

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ETAT ACTUEL DU TUNKIN DE LA COCHINCHINE ET DES ROYAUMES DE CAMBOGE, LAOS, et LAC-Tпo; par M. DE LA BISSACHÈRE, missionnaire qui a résidé dix-huit ans dans ces contrées. Traduit d'après les relations originales de ce voyageur. Deux vol. in-8°. Prix, 10 fr., et 12 fr. franc de port. A Paris, chez Galignani, rue Vivienne, no 17; et chez ArthusBertrand, libraire, rue Hautefeuille, no 23.

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(DEUXIÈME ARTICLE.)

POUR achever de donner une idée de l'industrie des habitans du Tunkin, nous devons, avant de passer à leurs mœurs, à leur religion, à leur histoire, dire un mot de leur pêche. Cet art est porté dans ce pays à sa perfection; et le Tunkinois fait aux poissons une guerre calculée sur l'étude de l'instinct, des goûts, des aversions de ces animaux. La ligne, le filet, les nasses sont faits avec plus d'adresse et maniés avec plus d'habileté dans ce pays que dans tout autre. Le missionnaire nous représente même le Tunkinois tantôt, plongeant au fond de l'eau pour y chercher le poisson, tantôt se formant avec le secours des oiseaux une troupe auxiliaire pour le prendre. Peu s'en faut qu'il ne métamorphose même en poissons les pêcheurs du Tunkin. «< Quelque» fois, dit-il, ces pêcheurs jouent (1) avec les poissons ‚» qui, les prenant pour de nouveaux compatriotes, se » familiarisent avec eux et les suivent : les plongeurs » vont se jeter dans les filets, d'où on les retire avec les » poissons qui les ont suivis. » On ne sait lequel il faut le plus admirer ou de la faculté que le Tunkinois a de rester si long-tems dans l'eau sans respirer, ou de la façi

(1) Tome I, pag. 150.

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