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La Fontaine, Jean de

181.138-c

QUI ORDONNE

AU SIEUR DIDOT L'AÎNÉ

D'IMPRIMER

POUR L'ÉDUCATION

DE M. LE DAUPHIN

DIFFÉRENTES ÉDITIONS

DES AUTEURS FRANÇOIS ET LATINS.

AUJOURD'HUI, premier avril mil sept cent quatre-vingt-trois,

le ROI étant à Versailles, bien informé de la beauté des éditions sorties des presses du sieur Didot l'aîné, et voulant récompenser et encourager les soins qu'il s'est donnés pour perfectionner en France la gravure des caracteres d'imprimerie et la fabrication des papiers, l'a choisi pour faire les éditions des ouvrages destinés à l'éducation de M. LE DAUPHIN; et lui ordonne, en conséquence, d'imprimer sous les formats in-4°, in-8° et in-18, les principaux auteurs nationaux et latins, en commençant par le Télémaque, dont SA MAJESTÉ agrée la dédicace : à la charge par le sieur Didot l'aîné que chacune des éditions qui sortiront de ses presses pour cet objet soit faite avec des caracteres et des papiers fabriqués dans le royaume, et qu'en outre le sieur Didot l'aîné indemnisera, suivant l'estimation, ceux de ses confreres qui

pourroient avoir la propriété de l'impression de quelques uns des ouvrages que SA MAJESTÉ desire former partie de la Collec

tion destinée à l'éducation de M. LE DAUPHIN. Mande SA MAJESTÉ au sieur LE NOIR, Lieutenant-général de Police et Commissaire du Conseil pour la Librairie, de tenir la main à ce que le sieur Didot l'aîné n'éprouve pour ce aucuns troubles ni empêchements; et pour assurance de sa volonté, ELLE lui a fait expédier le présent Brevet qu'ELLE a signé de sa main et fait contresigner par moi Conseiller-Secrétaire d'État et de ses Commandements

et Finances.

LOUIS.

AMELOT.

A MONSEIGNEUR

LE DAUPHIN.

MONSEIGNEUR,

S'il y a quelque chose d'ingénieux dans la république des lettres, on peut dire que c'est la maniere dont Ésope a débité sa morale. Il seroit véritablement à souhaiter que d'autres mains que les miennes y eussent ajouté les ornements de la poésie, puisque le plus sage des anciens a jugé qu'ils n'y étoient pas inutiles.

a

J'ose, MONSEIGNEUR, vous en présenter quelques essais. C'est un entretien convenable à vos premieres années. Vous êtes en un âge où l'amusement et les jeux sont permis aux princes; mais en même temps vous devez donner quelques unes de vos pensées à des réflexions sérieuses. Tout cela se rencontre aux fables que nous devons à Ésope. L'apparence en est puérile, je le confesse; mais ces puérilités servent d'enveloppe à des vérités importantes.

Je ne doute point, MONSEIGNEUR, que vous ne regardiez favorablement des inventions si utiles et tout ensemble si agréables: car que peut-on souhaiter davantage que ces deux points? Ce sont eux qui ont introduit les sciences parmi les hommes. Ésope a trouvé un art singulier de les joindre l'un avec l'autre : la lecture de son ouvrage répand insensiblement dans une ame les semences de la vertu, et lui apprend à se connoître, sans qu'elle s'apperçoive de cette étude, et tandis qu'elle croit faire tout autre chose. C'est une adresse dont s'est servi très heureusement celui sur lequel Sa Majesté a jeté les yeux pour vous donner des instructions. Il fait en sorte que vous apprenez sans peine, ou, pour mieux parler, avec plaisir, tout ce qu'il est nécessaire qu'un prince sache. Nous espérons beaucoup de cette conduite. Mais, à dire la vérité, il y a des choses dont nous espérons infiniment davantage : ce sont, MONSEIGNEUR, les qualités que notre invincible monarque vous a données avec la naissance; c'est

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