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sanes toutes nues. Le moyen, dit Dupaty (1), d'avoir des mœurs et des statues!

Il était de l'essence même du paganisme de dégrader la nature; et, après avoir enlevé au peuple la connaissance de Dieu, de la morale et tous moyens d'instruction, on excitait encore ses sens au désordre, afin de n'avoir plus à conduire qu'une brute. Denys le tyran flétrissait les fils de Dion, dont il redoutait l'énergie; Tibère faisait violer par les bourreaux les filles condamnées à mort, car, pour que Tibère fût dieu, il fallait que toute âme humaine subît le niveau de la corruption. Dans l'Orient, la loi forçait les femmes à marcher nues, à la manière des bêtes; et elle prescrivait aux pères, à l'égard de la fille; à la mère, à l'égard du fils, les fonctions données, du moins, au bourreau par Tibère.

L'humanité, parvenue à cette dégradation, ne pouvait plus aspirer qu'au néant : « Nous jurons, disaient les gla» diateurs, de nous laisser enchaîner, brûler, battre, tuer » par le fer, et de souffrir ce qu'il plaira à Eumolpès d'or>> donner. Comme de vrais gladiateurs, nous livrons nos >> corps, nos âmes, avec un respect religieux, au maître (2). »

<< Brûle ma tête, si tu le désires, perce mon cœur d'un » javelot, et déchire mon corps à coups de fouet (3). » En Syrie, des femmes se couchaient sur le ventre pour élever lentement d'autres femmes, dont elles étaient les esclaves, (1) Voyage en Italie.

(2) Sacramentum juravimus uri, vinciri, verberari, ferroque necari, et quidquid aliud Eumolpes jussisset. Tanquam legitimi gladiatores domino, corpora, animasque religiosissime addicimus. (Petronii sat., ch. 117.)

(3) Ure meum, si vis, flamma caput et pete ferro

Corpus et intorto verbere terga seca.

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jusqu'au marchepied de leur char. Dans la Perse et dans la Thrace, les concubines se disputaient l'honneur d'être brûlées vives sur la tombe d'un homme. En Chine, encore de nos jours, lorsque le fils du soleil convoite l'héritage d'un riche seigneur, il lui envoie des bourreaux; le seigneur illumine son palais, va au-devant des messagers de l'empereur, se prosterne devant le tabernacle qui renferme son arrêt de mort, baise la terre à chaque mot de cet arrêt, et lorsque, à tant de bontés, son gracieux souverain a bien voulu joindre l'envoi d'un cordon de soie, le seigneur, entouré de sa famille et de toute sa maison, baise encore la terre pour remercier le divin fils du soleil, et il s'étrangle à côté de sa bière ouverte et au milieu des portraits de ses aïeux. Là, les sujets sont au roi ce que tous les hommes sont à Dieu, selon la morale si vantée de Confucius. Le Romain, sous l'empire, remercie le dieu qui lui enlève l'honneur et la vie; Salutant te, Cæsar, morituri! Les autres bêtes du cirque n'avaient pas d'aussi lâches inclinations.

Et vos martyrs, me dira-t-on, en quoi leur abnégation différait-elle de celle des gladiateurs? Mes martyrs grandissaient en marchant au supplice, ils avaient pitié de l'aveuglement de leurs bourreaux. Purifie ton âme, César, et tu comprendras ma foi, disait l'un d'eux pour qui la mort était moins redoutable que la perte de l'innocence. Leur mort était un témoignage rendu à la liberté de leur vie ; elle n'était pas une adhésion à la volonté d'un maître, elle était une protestation terrible contre le principe du despotisme, un appel énergique et solennel au juge suprême qui condamne la force brutale. Mes martyrs mouraient pour ne pas courber leur front sous le joug de la tyrannie,

pour donner au monde abattu l'exemple d'un courage que rien n'abat, et la victoire est restée à leur héroïsme. La personnalité humaine date de l'ère des martyrs. Autant la lâcheté de ces Romains, qui se laissaient égorger par leurs maîtres, est ignominieuse et dégradante, autant la mort sublime et le courage des martyrs élèvent l'âme et l'attendrissent. La foi des uns était pleine d'une espérance qui les élevait au-dessus de la corruption; la résignation des autres n'était que la corruption et la servilité se prolongeant jusque dans les bras de la mort.

Mais quel esprit, ajoutera-t-on, prévaut aujourd'hui dans le monde? Celui des gladiateurs païens ou celui des martyrs? Quel esprit?... Entendez les murmures que provoque mon hymne à la liberté, et comptez les esclaves!

FIN

AU LECTEUR.
AVANT-PROPOS.

INTRODUCTION.

CHAPITRE Ier.

TABLE.

Pages.

1

5

-

- De l'origine de nos erreurs et de nos maux.

58

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CHAPITRE IV. - Erreur de la raison ou panthéisme.

189

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Paris. Typ. de Mme Ve Dondey Dupre, rue Saint-Louis, 46.

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