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« Les mathématiques sont fort belles; mais, hors une vingtaine de théorèmes utiles pour la mécanique et l'astronomie, le reste n'est qu'une curiosité fatigante. » (Tom. IX, pag. 484.)

A Damilaville.

« J'entends par peuple la populace qui n'a que ses bras pour vivre. Je doute que cet ordre

de citoyens ait jamais le temps ni la capacité de s'instruire; ils mourraient de faim avant de devenir philosophes. Il me paraît essentiel qu'il y ait des gueux ignorants. Si vous faisiez valoir comme moi une terre, et si vous aviez des charrues, Vous seriez bien de mon avis. » (Tom. X, pag. 396.)

« J'ai lu quelque chose d'une antiquité dévoilée, ou plutôt très-voilée. L'auteur commence par le déluge, et finit toujours par le chaos : j'aime mieux, mon cher confrère, un seul de vos contes que tout ce fatras. » (Tom. X, pag. 409.)

Année 1766.

Je serais très-fâché de l'avoir fait (le Christianisme dévoilé), non-seulement comme académicien, mais comme philosophe, et encore plus

comme citoyen. Il est entièrement opposé à mes principes. Ce livre conduit à l'athéisme, que je déteste. J'ai toujours regardé l'athéisme comme le plus grand égarement de la raison, parce qu'il est aussi ridicule de dire que l'arrangement du monde ne prouve pas un artisan suprême, qu'il serait impertinent de dire qu'une horloge ne prouve pas un horloger.

« Je ne réprouve pas moins ce livre comme citoyen; l'auteur paraît trop ennemi des puissances. Des hommes qui penseraient comme lui ne formeraient qu'une anarchie.

«Ma coutume est d'écrire sur la marge de mes livres ce que je pense d'eux vous verrez, quand vous daignerez venir à Ferney, les marges du Christianisme dévoilé chargées de remarques qui prouvent que l'auteur s'est trompé sur les faits les plus essentiels.» (Correspondance gén. tom XI, pag. 143.)

Année 1762. A Damilaville.

« Les frères doivent toujours respecter la morale et le trône. La morale est trop blessée dans le livre d'Helvétius, et le trône est trop peu respecté dans le livre qui lui est dédié. » (Le despotisme oriental.)

Il dit plus haut, en parlant de ce même. ouvrage : « On dira que l'auteur veut qu'on ne soit gouverné ni par Dieu, ni par les hommes. » (Tom VIII, pag. 148.)

Année 1768. A M. de Villevieille.

« Mon cher marquis, il n'y a rien de bon dans l'athéisme. Ce système est fort mauvais dans le physique et dans le moral. Un honnête homme peut fort bien s'élever contre la superstition et contre le fanatisme; il peut détester la persécution; il rend service au genre humain s'il répand les principes de la tolérance: mais quel service peut-il rendre s'il répand l'athéisme? Les hommes en seront-ils plus vertueux, pour ne pas reconnaître un Dieu qui ordonne la vertu? Non, sans doute. Je veux que les princes et leurs ministres en reconnaissent un, et même un Dieu qui punisse et qui pardonne. Sans ce frein, je les regarderai comme des animaux féroces qui, à la vérité, ne me mangeront pas quand ils sortiront d'un long repas, et qu'ils digéreront doucement sur un canapé avec leurs maîtresses, mais qui certainement me mangeront, s'ils me rencontrent sous leurs griffes quand ils auront faim, et qui, après m'avoir

mangé, ne croiront pas seulement avoir fait une mauvaise action.» (Tom. XII, pag. 349. )

Année 1749.

« Je ne suis point du tout de l'avis de Saunderson, qui nie un Dieu, parce qu'il est né aveugle. Je me trompe peut-être; mais j'aurais, à sa place, reconnu un être très-intelligent, qui m'aurait donné tant de suppléments de la vue; et, en apercevant, par la pensée, des rapports infinis dans toutes les choses, j'aurais soupçonné un ouvrier infiniment habile. Il est fort impertinent de deviner qui il est et pourquoi il a fait tout ce qui ́existe; mais il me paraît bien hardi de nier qu'il est. » (Corresp. gén., tom. IV, pag. 14.)

Année 1753.

« Il me paraît absurde de faire dépendre l'existence de Dieu d'a plus b, divisé par z.

« Où en serait le genre humain, s'il fallait étudier la dynamique et l'astronomie pour connaître l'Être-Suprême ? Celui qui nous a créés tous doit être manifesté à tous, et les preuves les plus communes sont les meilleures, par la raison qu'elles sont les plus communes; il ne faut que

des yeux et point d'algèbre pour voir le jour. » (Corresp. gén., tom. IV, pag. 463.)

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Mille principes se dérobent à nos recherches, parce que tous les secrets du Créateur ne sont pas faits pour nous. On a imaginé que la nature agit toujours par le chemin le plus court, qu'elle emploie le moins de force et la plus grande économie possible: mais que répondraient les partisans de cette opinion, à ceux qui leur feraient voir que nos bras exercent une force de près de cinquante livres pour lever un poids d'une seule livre; que le cœur en exerce une immense pour exprimer une goutte de sang; qu'une fait des milliers d'oeufs pour pro

carpe

duire une ou deux carpes, qu'un chêne donne un nombre innombrable de glands, qui souvent ne font pas naître un seul chêne? Je crois toujours, comme je vous le mandais il y a longtemps, qu'il y a plus de profusion que d'économie dans la nature. » ( Tom. IV, pag. 463.)

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