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On peut de même associer à la rime :

fait, forfait,front, affront, tester, détester,

1877

jour, séjour,

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jours, toujours.

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Quoiqu'il ne soit pas très difficile de rapporter ces mots à la même famille, le public des lecteurs peu accoutumés à ce genre d'analyse n'y voit que le sens principal, qui pour lui diffère assez pour faire du simple et du composé des mots distincts.

Mais on ne pourrait pas faire rimer ensemble:

bonheur et malheur,

jouer et déjouer,

ordre et désordre,

battre et débattre,

nom et prénom,

Parce

vue et entrevue,
coudre et découdre,
parvenir et venir,
dire et redire,

ami et ennemi,

que dans ces mots l'air de la famille, est trop visible.

On a donc blâmé ces vers de Voltaire :

Je connais trop les grands; dans le malheur

amis,

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On sent, par les exemples ci-dessus, quelle désagréable illusion et quelle fatigante monotonie produit la rime à l'hémistiche.

CHAPITRE V.

DES LICENCES POÉTIQUES.

Elles consistent, comme on va voir, dans le libre emploi de plusieurs termes dont la prose ne se sert qu'avec réserve, dans le retranchement ou l'addition de quelques lettres, et dans certaines transpositions.

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1879

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En général, la poésie étant un langage extraordinaire, elle aime les termes qu'un usage universel n'a pas encore rendus trop vulgaires; elle se plait quelquefois à rajeunir des termes vieillis, abandonnés par la prose, comme penser, repentance, etc. Elle recourt souvent aux équivalents et aux périphrases.

De combien de manières n'exprime-t-elle pas Jupiter, Mercure, Applon, Cerbère, Achille... Qu'on lise nos différents poètes, on trouvera qu'ïs ont dit peut-être de plus de cent manières il est jour, il est nuit.

Quelquefois ils comptent singulièrement :

Mais aujourd'hui qu'enfin la vieillesse venue,`
Sous mes faux cheveux blonds déjà toute che-
nue,

A jeté sur ma tête avec ses doigts pesants
Onze lustres complets surchargés de trois ans.

Oui dà, monsieur. — Quatre fois dix écus,
Seront par an ton salaire, et de plus,
D'assez bon vin chaque jour une pinte
Rajustera ton cerveau qui te tinte.

C'est-à-dire cinquante-huit ans.

Il serait inutile de nous appesantiri ce n'est qu'en lisant et en relisant ls bons modèles qu'on peut prendre le ge nie de la langue poétique.

2 Altérations orthographiques.

Ce discours te surprend, docteur, je l'apperçoi,
L'homme de la nature est le chef et le roi. BoL.

Hélas! si vous saviez comme il était ravi!

Comme il perdit son mal sitôt que je le vi! MOL.

On retranche quelquefois l's dans la personne singulière du présent e du passé. Les meilleurs auteurs ont pris cette licence, mais ils en ont use avec une grande sobriété, surtout dans le style élevé.

Vous régnez, Londre est libre, et vos lois triomphantes. VOLT.

Malgré les réclamations de Thomas Corneille, les poètes sont en possession de conserver ou de retrancher l's dans Londres, Athènes, Démosthènes, et autres noms propres semblables.

Le démon des combats siffle encor sur nos têtes. Rouss.

Grâce à lui, vous vivez, grâces à vous je meurs.

Cependant que j'embrasse une image frivole,

Rome entière m'appèle aux murs du Capitole. VOLT.

Aveuglé par son zèle, il te désobéit,

Et pense te venger alors qu'il të trahit. VOLT.

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Que durant notre enfance ont enduré nos pères. CORN..

S'il n'est pas permis à un poète, dit Voltaire, de se servir en ce cas du participe absolu, il faut renoncer à faire des vers. Le fait est que dans tout Boileau il n'y a pas un exemple de cette licence, et qu'on n'en trouverait peut-être pas dix dans Corneille, Racine et Voltaire lui-même. On peut donc faire des vers sans pécher contre la première règle de la syntaxe, celle qui ordonne l'accord de l'adjectif avec son substantif.

3. Transpositions. Transpositions élégantes.

Craignez d'un vain plaisir les trompeuses Au joug de la raison sans peine elle fléchit

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Cette transposition du régime ne se fait guères que dans le style badin et familier.

Tenez, prenez mes cantiques sacrés.

Sacrés ils sont, car personne n'y touche. VOLT.

Cette transposition n'a lieu que dans le genre marotique. Ce genre a plusieurs autres constructions qui lui sont propres, et qu'on ne peut apprendre qu'en étudiant les modèles.

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1882

Les rimes sont mêlées lorsqu'on ne suit point un ordre uniforme. Les satires, les épîtres, l'art poétique et le lutrin de Boileau, la Henriade, les tragédies excepté Tancrède, (qui est en rimes croisées) les comédies, les élégies, sont composées en rimes suivies.

Presque toutes les odes, tous les sonnets, tous les rondeaux, et toutes les ballades sont à rimes croisées.

Le plus grand nombre des fables, des madrigaux, des chansons, sont à rimes mêlées.

On trouve des pièces tout entières où la même rime est répétée d'un bout à l'autre. On leur donne le nom de monorime. Tel est l'insipide morceau de M. Lefranc :

Nous fûmes donc au château d'If,

C'est un lieu peu récréatif,

Défendu par le fer oisif

De plus d'un soldat maladif.

Ce fait, du roc désolatif,
Nous sortîmes d'un pas hâtif...

En répétant d'un ton plaintif:
Dieu nous garde du château d'If.

Vieilles rimes. Les plus connues sont l'empérière, la couronnée, la fraternisée, la kirielle, la sénée, la batelée, l'annexée, l'enchaînée, la brisée, l'équivoque.

Pour montrer à quelles puériles entraves on s'assujettissait, nous citerons des exemples de quelques-unes de ces rimes :

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Quand on avait commencé une pièce de l'une de ces manières, il la fallait continuer sur ce pied.

Principe. De quelque manière que les rimes soient disposées, ordinai1883 rement on ne peut mettre de suite plus de deux rimes masculines, ni

plus de deux rimes féminines.

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