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L'homme dont vous m'avez cité les ta. 1 M. Sicard met une virgule après la lents est fort au-dessous de sa renommée. partie italique. Il paraît donc qu'il n'a pas la respiration bien longue. puis

S.CARD.

qu'il est obligé de couper en deux mor ceaux une phrase de vingt-une syllabes, et de séparer impitoyablement le sujet et le verbe.

règle des gRAMMAIRIENS :

Le point, disent les grammairiens, se met après un sens fini.

Mais qu'est-ce qu'un sens fini? à quels signes le reconnaître?

VOICI NOTRE RÈGLE.

Lorsque la chaîne ou l'attraction des mots cesse, mettez un

point.

Relisez les phrases déjà citées, et voyez si les mots que nous avons délimités par le point ne sont pas tous réellement enchaînés, attirés les uns par les autres.

Voir l'exception n° 1676.

Comme le point termine nécessairement toute phrase achevée, il reparaîtra dans tous les exemples que nous donnerons pour établir la theorie de la virgule et des autres signes de la ponctuation.

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On voit que la virgule est un signe d'énumération, soit que les mots énumérés soient des substantifs, des adjectifs, des verbes ou des invariables; elle est un signe constant d'une plus grande ellipse.

Tout penaillon y vante sa besace,
Son institut, ses miracles, sa crasse.

C'est-à-dire,

Tout penaillon y vante sa besace.

y vante son institut.
y vante ses miracles.

y vante sa crasse.

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On a vu (n° 1676) que, dans le style coupé, on remplace souvent le point par la virgule, comme dans un cri redoutable, etc.

Je cours, j'écris, j'invente des scandales.

VOLT.

Ils font de vains efforts, ils crient, ils sirritent. J.-J. R. Emil. 1.

NUMERO II.

Et précédé ou non précédé de la virgule.

Ponctuation de Didot,

Et précédé de la virgule.

1. Imitez le canard, la grue, et la bécasse.
LA F. 1, S.
Et ce n'est plus ce ridicule temps
Où le capuce, et la toque à trois cornes,
Le scapulaire, et l'impudent cordon,
Ont extorqué des hommages sans bornes.
VOLT. Pauvre Diable.
Jeu, bal, spectacle, et soupers agréables
Rendent ses jours à-peu-près tolérables.
VOLT. La Bégueule.
2. Loin derrière elles étaient trois assistants,
Secs, décharnés, pâles, et chancelants.
VOLT. Sesostris.
Avouez-moi que vous aviez tous deux
Les ongles longs, un peu noirs, et crasseux.

éditions stéréotypes.

Et non précédé de la virgule.
Je lui contai ma honte et ma détresse.
VOLT. Pauvre Diable.
Vos griffes et vos dents m'ont assez confondu.
VOLT. Le Marseillais et le lion.

Je critiquai, sans esprit et sans choix.

VOLT. Pauvre Diable.
Les voleurs sont tel et tel prince,
Comme le Transylvain, le Turc et le Hongrois.
LA F. 1, 13.

Vous m'avez donne le sujet,
Le dialogue et la morale. LA F. 12, 9.
Triste et honteux, je quittai mon pirate.
VOLT. Pauvre Diable,
Il vous recommanda d'être clément et sage.
VOLT. Le Marseillais et le lion.

VOLT. Le Mondain. Je cherche une pàture et moins fade et moins

3. Elle båtit un nid, pond, couve, et fait éclore.
LA F. 4, 22.
il le fit, et fit bien.
LA F. 3, 1.

Gertrude était dévote, et non point médisante.
VOLT. Gertrude.

Le poète s'égaie en mille inventions,
Orne, élève, embellit, agrandit toutes choses,
Et trouve sous sa main des fleurs toujours
écloses. BOILEAU, Art poétique. 3.
Ainsi la tragédie agit, marche, et s'explique.

Id.

allez, et prospérez. VOLT. Pauvre Diable.

creuse. Id.

D'un bout du monde à l'autre on ment

Et l'on mentit. VOLT. Le Dimanch. Quand je souge à cette fable,

Dont le récit est menteur

Et le sens est véritable,

Je me figure un auteur... LA F. 5, 10.

Celui (le champ) de son voisin fructifie et rap-
porte. Id. 5, 4.

Cet objet le surprend, l'étonne et le confond.
LA F. Adonis.

Voyons, par la construction idéologique, si en effet il y a, dans les phrases de la première colonne et dans celles de la seconde, une différence qui en motive une dans la manière de ponctuer.

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La même idéologie devait donc faire admettre la même ponctuation dans les phrases des deux colonnes.

Je sais bien que lorsqu'il y a plus de deux substantifs, plus de deux adjectifs, plus de deux verbes énumérés, on est enclin à continuer l'emploi de la virgule, et qu'on en sent peu l'utilité, lorsque l'énumération ne porte que sur deux. Mais alors pourquoi Didot, qui a écrit sans ponctuation on ment et l'on mentit, fructifie et rapporte, etc. ponctue-t-il? Il le fit, et fit bien, etc. Pourquoi, ajouterons-nous, a-t-il séparé par une virgule le second et du passage suivant, tandis qu'il n'en a point mis devant le premier?

Puisqu'on plaide et qu'on meurt, et qu'on devient malade,

Il faut des médecins, il faut des avocats. La F. 12, 28.

Pourquoi ponctue-t-il ainsi?

Prétendait trouver un mari

Jeune, bien fait, et beau, d'agréable manière,

Point froid et point jaloux : notez ces deux points-ci. La F.

7, 5.

De deux choses l'une; ou il faut regarder le mot et comme rendant inutile la virgule et ponctuer comme dans la deuxième colonne, ou le regarder toujours comme signe d'un membre ponctuable, et ponctuer.

NUMÉRO III.

Ponctuation de Didot, éditions stéréotypes.

NI et ou précédés de la virgule.
1. Tu n'as point l'air de te faire officier,
Ni courtisan, ni financier, ni prêtre.
VOLT. Pauvre Diable.
Nul à Paris ne se tient dans sa sphère,
Dans son métier, ni dans son caractère.
VOLT. Les Chevaux et les Anes.
Je ne peux plus remuer ni pieds, ni
pattes, de ce doigt là.

BEAUM. Mariage de Figaro.
Ni mon grenier, ni mon armoire
Ne se remplit à babiller. LA F. 4, 3.

NI et ou non précédés de la virgule.
Ni loups ni renards n'épiaient
La douce et l'innocente proie.
LA F. 7,
. il s'était vanté...
De ne craindre ni chat ni chatte,
Ni coup de dent ni coup de patte.
LA F. 12, 26.
Chacun a son défaut, où toujours il revient;
Honte ni peur n'y remédie. La F. 8, 12.
La plainte ni la peur ne changent le destin

Id.

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C'est ici la même analogie que pour et. La ponctuation de la première colonne est conforme aux principes, celle de la seconde ne peut être adoptée que comme exception.

NUMÉRO IV.

Si entre le dernier nominatif et le verbe on peut ou non mettre une virgule.

Le désespoir, la honte, le courroux,
L'ont suffoqué. La F. 8, 12.

Suite.

L'oncle, la sœur, la tante, le beau-père,
Ne brillaient pas parmi les beaux esprits.
VOLT. La Bégueule.

Dans ce cas, l'esprit supplée un substantif pluriel récapitulatif, et c'est avec ce substantif que se fait l'accord du verbe. Car ce n'est ni le désespoir seul, ni la honte seule, ni le courroux, mais ces trois choses qui l'ont suffoqué. Le même raisonnement s'applique à la seconde phrase.

:

Sans la virgule mise après le dernier substantif on aurait le courroux l'ont suffoqué, le beau-père ne brillaient pas, car le substantif singulier ainsi affronté à un verbe pluriel, annoncerait un accord qui n'existe point; ce qui au moins produirait un mauvais effet.

Marli, Versailles et leurs petits jets d'eau
N'ont rien auprès qui surprène et qui pique.
VOLT. Le Russe à Paris.
Les cris perçants des funèbres oiseaux,
Les hurlements des ours et des panthères
Font retentir les antres des forêts.

VOLT. La Bégueule.

Quoique de fait le verbe dans ces deux exemples s'accorde avec un substantif pluriel récapitulant sous-entendu, on n'est point choqué de l'absence de la virgule après le dernier substantif, parce qu'il est au pluriel.

Au reste la virgule, dans ce cas même, serait plus conforme au principe.

1685

NUMÉRO V.

Ce qu'il faut entendre dans 'une phrase par une partie divisible, ou une division.

D'après l'idée générale. que. nous avons donnée de la ponctuation, n° 1673, ce n'est que la virgule qu'on peut employer, lorsque la phrase n'a que des divisions sans subdivisions. Mais quand y a-t-il division dans une phrase? voilà ce qu'il importe de déterminer.

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Un sot, qui malheureusement n'est

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Le Cid a une voix qui a été très-honorable à son auteur.

Le stupide est un sot qui ne parle

pas stupide, m'a fatigué hier de son ba-point. LA BRUY. 12.
bil. Id. 12.

Ton œil, qui voit tout jaune, est tout plein de Un œil qui voit tout jaune est rempli de jau-
jaunisse.

nisse.

Ma patrie est dans ces lieux-ci, où mon La patrie est aux lieux où l'âme est enchaînéc. âme est enchaînée.

VOLT. Zaire.

Qu'on retranche la phrase ou la partie de phrase renfermée entre les deux virgules, comme entre deux parenthèses, il reste encore un sens fini.

On peut dire Le temps change nos humeurs, un sot m'a fatigué

hier.

Suite.

1686 Soumis avec respect à sa volonté sainte,

RAC.

Je crains dieu.
J'en jure par le Styx, serment qui fait
trembler les dieux mêmes.

FEN. Telem. 7.
Juvénal, élevé dans les cris de l'école,
Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole.
BOILEAU.

Un homme soumis à la volonté de Dieu est loujours content.

Jurer par le Styx est le serment des dieux mêmes.

Un poète élevé dans les cris de l'école pousse jusqu'à l'excès, etc.

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