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Mais on ne dit pas que la communication vient dans un camp, on ne fait pas rudesse à quelqu'un, le propre du bon sens n'est pas de briller, on ne porte pas la mémoire de quelqu'un.

Ainsi pour ne pas faire de liaisons ou alliances de mots illégitimes, il faut donc bien s'assurer, lorsqu'on multiplie à la suite d'un mot les compléments, si tous lui conviennent également bien.

Le seul moyen de s'en assurer, c'est de compter, de confronter un à un chacun des compléments avec le mot complété.

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Deux causes contribuent à faire mal additionner les compléments. On oublie de les comparer tous au mot auquel on les rapporte, ou bien on croit pouvoir faire des alliances de mots que l'usage n'a point consacrées. Car une des plus grandes difficultés de l'art de parler et d'écrire consiste à connaître les alliances qu'autorise l'usage. Par exemple il faut sa

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Ce sujet est immense, il est du ressort du dictionnaire. Le plus complet et sans contredit le meilleur est encore celui de l'Académie.

Autre sorte de faute.

Un magistrat doit toujours juger sui-y 1611 vant et conformément aux lois.

Un magistrat

Phrase blamée par Wailly.) doit juger..

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La cause de cette sorte de faute, qui est très-fréquente dans les auteurs de seconde et troisième classe, c'est qu'on ne songe qu'au dernier mot régissant ou complété, et qu'on croit faire le rapport du complément à un des mots qui ont même régime, tandis qu'en effet ils en ont plusieurs.

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L'art de l'écrivain est de savoir choisir pour mot régisseur un mot qui convienne à tous les mots régis. Revoyez les belles phrases, les sublimes périodes de Chénier, Corneille, Racine, Voltaire, Bossuet, que nous avons citées.

VICE CAPITAL,

12 Ou répétitions et compléments en cascade, c'est-à-dire accumulations des degrés dans la même phrase.

D

Ce vice consiste dans la violation du grand principe énoncé n° 1581.

« La poésie qui avait brillé avec tant d'éclat sous les yeux d'Auguste,

s'éclipsa peu-à-peu sous ses successeurs, dans les ténèbres de la bar

» barie qui amena du fond du nord ce déluge des nations féroces qui » forma des débris de l'empire romain la plupart des états qui subsistent » aujourd'hui en Europe.

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Construction incomplète.

avec tant d'éclat,

sous les yeux d'Auguste,

L'abbé DUBOS.

peu-à-peu sous ses successeurs

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s'éclipsa {

dans les ténèbres de la barbaric qui *

(du fond du nord

*amena

le déluge des nations féroces qui forma des débris de l'Empire romain la plupart des états qui **

subsistent aujourd'hui en Europe, qui... qui... qui... qui.

Le vice n'est point dans la répétition de qui; il pourrait être répété vingt fois dans la même période si c'était dans le même degré, témoin le passage de Bossuet :

« Jésus avait environ trente ans lorsqu'il commença à paraître étant, » comme on le croyait, fils de Joseph, qui fut fils d'Héli, qui fut fils de Mathat, qui fut fils de Lévi, qui fut fils de Melchi, qui fut fils de Janna, qui » LeMaistre de SACY, Évang. de st-Luc.

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...

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Voyez comment ces deux phrases, celle de l'abbé Dubos, et celle de Lemaistre de Sacy, ou plutôt de Saint-Luc, quoique contenant deux fois moins de mots que celles de Bossuet citées n° 1586, s'étendent trois fois plus en largeur, et combien ces qui, qui, qui sont insupportables... Dans l'abbé Dubos il y a de plus une cascade de verbes : éclipsa,.... amena,... forma.

Par le début de Saint-Luc, on prévoit où l'évangéliste veut arriver, et qu'au moins il s'arrêtera à Adam qui fut crée de Dieu. Mais quand M. l'abbé Dubos ourdit une période, ses lecteurs ne savent jamais où il les mènera.

1

Tableau comparatif de compléments du même degré, et de compléments en cascade.

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Qu'il avait des talents, des vertus, de la gloire;
Qu'un duc de Benevent, dès qu'il était majeur,
Etait du monde entier l'amour et la terreur;
Qu'il pouvait conquérir l'Italie et la France;
Que son trésor ducal regorgeait de finance;
Qu'il avait plus d'argent que n'en eut Salomon.
VOLT. L'Educ. du Prince.

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On cabale

à la cour;
à l'armée,

au parterre.

VOLT. Les Cabales.

Il y a voix pour instruire,
pour flatter,

pour reprendre.

Compléments de differents degrés.

Je vous prie de demander des nouvelles du dégât de la grêle.

Phrase blâmée par Wailly. NOTA. Cette phrase serait encore plus insupportable, si de n'était un peu déguisé dans des et du.

L'un (le juge méchant) pèche avec connaissance, et il est inexcusable; mais l'autre (le juge ignorant) pèche sans remords, et il est incorrigible: mais ils sont également criminels.

FLÉCHIER, blámé par Wailly. NOTA. M. Wailly, dont les jugements sont toujours très-sains lorsqu'il s'agit du style, blâme M. Andry de Bois-Regard, qui regardait comme des négligences les mais répétés, lorsqu'ils ont le même rapport il y trouve, au contraire, une beauté.

Amau, s'imaginant qu'il était celui que le rci pensait honorer de la sorte, lui dit qu'il fallait que cet homme fût conduit par toute la ville par le plus grand du royaume. Phrase blâmée par Wailly.

Les maîtres doivent s'appliquer à faire comprendre à leurs élèves le sens des choses, et à donner à leurs leçons toute la netteté dont elles sont susceptibles. Phr. blâmée par Wailly.

Un homme, témoin d'une querelle entre deux amis, est quelquefois forcé de se

Phr. citée par Wailly, déclarer pour l'un des deux, pour ne pas
les avoir tous deux pour ennemis.
Phrase blámée par Wailly.

Combien d'autres règles également intéressantes, d'autres conséquences également heureuses, ne pourrions-nous pas déduire de la science de

1615

la construction directe? Nous nous bornerons aux observations suivantes:

1o. Toute phrase ou période construite d'après l'ordre des idées ressemble à un arbre généalogique, ou à un arbre naturel. Elle ne commence ni ne peut jamais commencer que par un seul mot. C'est le tronc, la racine, ou la souche de l'arbre, tout le reste en est un épanouissement, une continuation; c'est comme dans l'arbre les branches et les rameaux.

2o. Pour faire la construction idéologique, il faut connaître à fond les convenances grammaticales; ce sont elles qui donnent le fil qui guide dans le labyrinthe.

3. La construction idéologique sert à montrer qu'on a ce fil, qu'on est -dans la voie, qu'on a bien opéré; car il est impossible de faire la construction idéologique d'une mauvaise phrase.

Comment oser se dire grammairien, si l'on n'est pas capable de répondre à cette question:

Etant donné un mot quelconque, dans telle ou telle phrase, dire quel en est le rapport?

Mais si cette question peut se faire sur un mot, pourquoi pas sur deux, sur trois, sur tous les mots de la phrase?

La construction idéologique est donc d'une indispensable nécessité. Comment s'assurer de la bonté d'une phrase ou d'une période, si l'on est incapable d'en concevoir l'ordonnance, l'enchaînement, d'en proportionner, d'en nombrer les parties?

4. La construction idéologique fait voir quelle pitié doit inspirer le préjugé vulgaire dans lequel on est, qu'il n'y a point, ou qu'il y a peu d'inversions dans notre langue; et combien sont risibles ceux qui veulent juger des inversions, et qui n'ont pas la moindre idée de ce qu'il faut appeler ordre.

5. Les grammairiens divisent les propositions en principales et en incidentes, ou completives, en directes et en obliques, en relatives et en correlatives, etc., etc. Les rhéteurs distinguent les périodes en membres et en incises.

Dans une phrase ou période tout se lie, tout s'enchaîne, depuis le premier mot jusqu'au dernier. On pourrait donc compter les mots. Mais comment détacher les propositions, comment découper les membres d'une période, et puis faire des incises?

Nous démontrerons, quand on voudra, que cette opération a toujours été mal faite nous dirons même qu'elle nous paraît souvent impossible, et nous ne doutons point qu'elle ne soit toujours parfaitement inutile.

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