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At tuba terribilem sonitum procul ære canoro

Increpuit.

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'Cachinnus, c'est un rire immodéré. Cachinno onis se dit d'un homme qui rit sans retenue: ces deux mots sont formés du son ou du bruit que l'on entend quand quelqu'un rit avec éclat.

Il y a aussi plusieurs mots qui expriment le cri des animaux, comme béler, qui se dit des brebis.

Baubari, aboyer, se dit des gros chiens. Latrare, aboyer, hurler; c'est le mot générique. Mutire, parler entre les dents, murmurer, gronder, comme les chiens: mu canum est, undè mutire, dit Charisius.

Les noms de plusieurs animaux sont tirés de leurs cris, surtout dans les langues originales. Upupa, huppe, oiseau.

Cuculus, qu'on prononçait coucoulous, un cou

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Hirundo, une hirondelle.

Ulula, chouette.

Bubo, hibou.

Graculus, un choucas, espèce de corneille.
Gallina, une poule.

Cette figure n'est point un Trope, puisque le mot se prend dans le sens propre; mais j'ai cru qu'il n'était pas inutile de la remarquer ici.

XX. Qu'un même mot peut être doublement figuré.

Il est à observer que souvent un mot est dou blement figuré, c'est-à-dire, qu'en un certain sens il appartient à un certain Trope, et qu'en un autre sens il peut être rangé sous un autre

Roi, le plus roi qui fut one couronné;
Dieu tout-puissant te doint, pour t'estréner,
Les quatre coins du monde à gouverner,
Tant pour le bien de la ronde machine,
Que pour autant que sur tous en es digne.

4o On se sert de périphrase par nécessité, quand il s'agit de traduire, et que la langue du traducteur n'a point d'expression propre qui réponde à la langue originale. Par exemple, pour exprimer en latin une perruque, il faut dire coma adscititia, une chevelure empruntée, des cheveux qu'on s'est ajustés. Il y a en latin des verbes qui n'ont point de supin, et par conséquent point de participe; ainsi, au lieu de s'exprimer par le participe, on est obligé de recourir à la périphrase fore ut, esse futurum ut; j'en ai donné plusieurs exemples dans la syntaxe

XVIII. L'HY PALLAGE.

VIRGILE, pour dire mettre à la voile, a dit, dare classibus austros; l'ordre naturel demandait qu'il dit plutôt, dare classes austris.

Cicéron, dans l'oraison pour Marcellus, dit à César qu'on n'a jamais vu dans la ville son épée vide du fourreau, gladium vagina vacuum in urbe non vidimus. Il ne s'agit pas da fonds de la pensée, qui est de faire entendre que César n'avait exercé aucune cruauté dans la ville de Rome; il s'agit de la combinaison des paroles qui ne paraissent pas liées entre elles comme elles le sont dans le langage ordinaire; car vacuus se dit plutôt du fourreau que de l'épée.

Ovide commence ses Métamorphoses par ces paroles.

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La construction est animus fert me ad dicere formas mutatas in nova corpora; mon génie me porte à raconter les formes changées en de nouveaux corps : il était plus naturel de dire à raconter les corps, c'est-à-dire, à parler des corps changés en de nouvelles formes.

Vous voyez que, dans ces sortes d'expressions, les mots ne sont pas construits ni combinés entre eux comme ils le devraient être selon la destination des terminaisons et la construction ordinaire. C'est cette transposition ou changement de construction qu'on appelle hypallage, mot grec, qui signifie changement.

Cette figure est bien malheureuse: les rhéteurs disent que c'est aux grammairiens à en parler: grammaticorum potiùs schema est quàm tropus, dit Vossius; et les grammairiens la renvoient aux rhéteurs. L'hypallage, à vrai dire, n'est point une figure de grammaire, dit la nouvelle Méthode de Port-Royal; c'est un Trope ou une figure d'élocution.

Le changement qui se fait dans la construction des mots par cette figure ne regarde pas leur signification; ainsi en ce sens, cette figure n'est point un Trope, et doit être mise dans la classe des idiotismes ou façons de parler particulières à la langue latine. Mais j'ai cru qu'il n'était pas inutile d'en faire mention parmi les Tropes; le changement que l'hypallage fait dans la combinaison et dans la construction des mots est une sorte de Trope ou de conversion. Après tout, dans quelque rang qu'on juge à propos de placer l'hypallage, il est certain que c'est ne figure très-remarquable.

Trope. On peut avoir fait cette remarque dans quelques exemples que j'ai déja rapportés. Quand Virgile dit de Bitias, que pleno se proluit quro, auro se prend d'abord pour la coupe; c'est une synecdoque de la matière pour la chose qui en est faite; ensuite la coupe se prend pour la liqueur qui était contenue dans cette coupe; c'est un emétonymie du contenant pour le contenu.

Nota, marque, signe, se dit en général de tout ce qui sert à faire connaître ou remarquer quelque chose; mais lorsque nota (note), se prend pour dedecus, marque d'infamie, tache dans la réputation, comme quand on dit d'un militaire, il s'est enfui en une telle occasion c'est une note; il y a une métaphore et une sy→ necdoque dans cette façon de parler.

Il y a métaphore, puisque cette note n'est pas une marque réelle, ou un signe sensible qui soit sur la personne dont on parle ; ce n'est que par comparaison qu'on se sert de ce mot; on donne à note un sens spirituel et métaphorique.

Il y a synecdoque, puisque note est restreint à la signification particulière de tache, dedecus.

Lorsque, pour dire qu'il faut faire pénitence et réprimer ses passions, on dit qu'il faut mortifier la chair, c'est une expression figurée qui peut se rapporter à la synecdoque et à la métaphore. Chair ne se prend point alors dans le sens propre, ni dans toute son étendue ; il se pread pour le corps humain, et surtout pour ics passions, les sens ainsi c'est une synecdoque mais mortifier est un terme métaphorique; on veut dire qu'il faut éloigner de nous toutes les délicatesses sensibles; qu'il faut punir notre corps, le sevrer de ce qui le flatte, afin d'affaiblir l'appétit charnel, la convoitise, les passions, les soumettre à l'esprit, et pour ainsi dire les faire mourir,

:

Le changement d'état par lequel un citoyen romain perdait sa liberté, ou allait en exil, ou changeait de famille, s'appelait capitis minutio, diminution de tête ; c'est encore une expression métaphorique qui peut aussi être rapportée à la synecdoque. Je crois qu'en ces occasions, on peut s'épargner la peine d'une exactitude trop recherchée, et qu'il suffit de remarquer que l'expression est figurée, et la ranger sous l'espèce de Trope auquel elle a le plus de rapport.

XXI. De la subordination des Tropes, ou du rang qu'ils doivent tenir les uns à l'égard des autres, et de leurs caractères particuliers.

QUINTILIEN dit (1) que les grammairiens, aussi-bien que les philosophes, disputent beaucoup entre eux pour savoir combien il y a de différentes classes de Tropes, combien chaque classe renferme d'espèces particulières, et enfin, quel est l'ordre qu'on doit garder entre ces classes et ces espèces.

Vossius soutient qu'il n'y a que quatre Tropes principaux, qui sont la métaphore, la métonymie, la synecdoque et l'ironie: les autres, à ce qu'il prétend, se rapportent à ceux-là, comme les espèces aux genres; mais toutes ces discussions sont assez inutiles dans la pratique, et il ne faut point s'amuser à des recherches qui souvent n'ont aucun objet certain.

Toutes les fois qu'il y a de la différence dans le rapport naturel qui donne lieu à la significa

(1) Circa quem (tropum) inexplicabilis, et grammaticis inter ipsos, et philosophis pugna est, quæ sint ge nera, quæ species, quis numerus, quis cui subjiciatur. Quint. Inst. Orat. Lib. VIII. c. VI.

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