cifions en matiere d'ouvrages paffoient pour des arrêts fouverains,& rien n'êtoit bon ou mauvais, qu'autant que Longin l'avoit approuvé ou blamé. Eunapius dans la vie des Sophiftes, paffe encore plus avant. Pour exprimer l'eftime qu'il fait de Longin, il fe laiffe emporter à des Hyperboles extravagantes, & ne fçauroit fe refoudre à parler en ftile raisonnable d'un merite auffi extraordinaire que celui de cet Auteur. Mais Longin ne fut pas implement un Critique habile. Ce fut un Miniftre d'état confiderable : & il fuffit, pour faire fon éloge, de dire, qu'il fut fort confideré de Zenobie cette fameuse Reine des Palmyreniens, qui ofa bien fe declarer Reine de l'Orient aprés la mort de fon mari Odenat. Elle avoit appellé d'abord Longin auprés d'elle pour s'inftruire dans la langue Grec

que

Mais de fon Maître en Grec, elle en fit à la fin un de fes principaux Miniftres. Ce fut lui qui encouragea cette Réine à foûtenir la qualité de Reine de l'Orient, qui lui rehauffa le cœur dans l'adverfité, & qui lui fournit les paroles altieres qu'elle écri vit à Aurelian, quand cet Empereur la fomma de fe rendre. Il en coûta la vie à nôtre Auteur: Mais fa mort fut également glorieuse pour lui, & honteuse pour Aurelian, dont on peut dire, qu'elle a pour jamais flétri la memoire. Comme cette mort eft un des plus fameux incidens de l'hiftoire de ce tems-là, le Lecteur ne fera peut-être pas faché que je lui raporte ici ce que Flavius Vofpicus en a écrit. Cet Auteur raconte, que l'armée de Zenobie & de fes Alliez aiant été mife en fuite prés de la ville d'Emeffe, Aurelian alla mettre le fiége de

vant Palmyre, où cette Princeffe s'êtoit retirée. Il y trouva plus de refiftance qui ne s'étoit imaginé, & qu'il n'en devoit attendre vrai femblablement de la refolution d'une femme. Ennuié de la longueur du fiége, il effaia de l'avoir par composition. Il écrivit donc une Lettre à Zenobie, dans laquelle il lui offroit la vie & un lieu de retraite, pouveu qu'elle fe rendit dans un certain tems. Zenobie, ajoûte Vopifcus, répondit à cette Lettre avec une fierté plus grande que l'état de fes affaires ne le lui permettoit. Elle croyoit par là donner de la terreur à Aurelian. Voici fa réponfe.

ZENOBIE REINE DE L'ORIENT, A L'EMPEREUR AVRELIAN. Perfonne jufques ici n'a fait une demande pareille à la tienve. C'est la vertu; Aurelian, quž doit tout faire dans la guerre. Tis:

me commandes de me remettre entre tes mains : comme fi tu ne fçavois pas que Cleopatre aima mieux mourir avec le titre de Reine, que de vivre dans toute autre dignité. Nous attendons le fecours des Perfes. Les Sarazins arment pour nous. Les Armeniens fe font déclarés en nôtre faveur. Une troupe de voleurs dans la Syrie a défait ton armée. fuge, ce que tu dois attendre,quand toutes ces forces feront jointes. Tu rabatras de cet orgueil avec lequel, comme maître abfolu de toutes chofes, tu m'ordonnes de me rendre. Cette Lettre ajoûte Vopifcus donna encore plus de colere que de honte à Aurelian. La ville de Palmyre fut prife peu de jours aprés, & Zenobie arrêtée, comme elle s'enfuyoit chez les Perfes. Toute l'armée demandoit fa mort. Mais Aurelian ne voulut pas deshonorer la victoire par la mort d'une femme. Il referva

donc Zenobie pour le triomphe, & fe contenta de faire mourir ceux qui l'avoient affiftée de leurs confeils. Entre ceux là, continuë cet Historien, le Philofophe Longin fut extrêmement regreté. Il avoit été appellé auprés de cette Princeffe pour lui enfeigner le Grec. Aurelian le fit mourir pour avoir écrit la Lettre precedente. Car bien qu'elle fut écrite en langue Syriaque,on le foupçonnoit d'être l'Auteur. L'Hiftorien Zofime témoigne que ce fut Zenobie elle-même qui l'en accusa. Zenobie, dit il, fe voiant arrêtée rejetta toute fa faute fur fes Miniftres qui avoient, ditelle abusé de la foibleffe de fon efprit. Elle nomma entre autres Longin, celui dont nous avons encore plufieurs écrits fi utiles. Aurelian ordonna qu'on l'envoit au fuplice. Ce grand perfonnage, pourfuit Zofime, fouf