Page images
PDF
EPUB

d'œil de Guillaume Tell pour enlever la pomme sans toucher l'enfant.

[ocr errors]

PRÉTENTIONS. - Le plus innocent des mensonges, parce qu'il n'en impose à personne ; le plus dangereux des témoins, parce qu'il dépose toujours contre la personne en faveur de laquelle il parle. Les prétentions à la jeunesse donnent toujours à une femme quelques années de plus qu'elle n'en a. Valsain n'était qu'un homme ignorant; ses prétentions à l'esprit en ont fait un sot. Les prétentions à la naissance sont les plus ridicules, et pourtant les plus modestes de toutes.

» RIDICULE.

Ce n'est pas un défaut; ce n'est pas un vice; ce n'est pas un crime c'est bien pis.

» SENTIMENT.

Affection nervale. Ma

dame telle a un sentiment. Ne vous découragez pas; on peut changer de sentiment; on peut même en avoir plusieurs à-la-fois. Il y a des femmes qui sont tout sentiment : comment se fait-il que les femmes à sentiment n'aiment pas les hommes à sentiment? C'est que le sentiment, chez les hommes, n'a pas le même siége, le même empire, la même expression.

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

femme vous dit qu'un homme a de grunds talens, il est toujours malhonnête de rire.

» VALEUR. — Dans les revers, les poltrons l'appellent témérité, extravagance. Montaigne n'était pas de cet avis: Le vrai vaincre, dit-il, a pour son rôle le choc, et non pas le salat; et consiste l'honneur de la vertu à combattre, non à battre.

:

» VÉRITÉ. — Vieux mot exprimant une chose toute nouvelle. -Antoine Pérez disait que c'était pour savoir la vérité que les rois entretenaient des fous auprès d'eux depuis long-tems ils ne sont plus entourés que par des sages. - Vous avez pour vous la force ; j'ai pour moi là vérité : la lutte peut être longue, mais la victoire me restera. La violence est passagère, la vérité est éternelle. N'est-ce pas Massillon qui a dit cela ?

» VIE. Grammaticalement parlant, jamais on n'a tant abusé de la vie. C'est après la nature le mot dont nos poètes, et sur-toutnos romanciers, font le plus d'usage : l'amour même a perdu de son crédit; ce n'est plus qu'une vie dans la vie. Je m'informe de la santé d'une jolie femme; elle me répond qu'elle porte légèrement la vie.

Un bon bourgeois, à qui je demande si sa femme est accouchée, me dit que depuis huit jours son enfant essaie la vie. Je parle du prix du tems à un jeune homme dissipé il convient avec moi qu'il éparpille sa vie. Une femme à sentiment, pour me donner une idée de l'état de son ame me dit qu'elle se balance sur la vie, entre le passé qu'elle regrette et l'avenir qu'elle craint. Pour moi, sans être attaqué du spléen, je déclare que je suis las de la vie; je n'y entends plus rien, depuis qu'on la place dans le discours comme on la reçoit et comme on la donne, sans savoir ce qu'on fait. >>

[graphic][subsumed]
[blocks in formation]

CELUI qui se charge de peindre les mœurs de son siècle et de son pays à beau répéter, comme La Bruyère, qu'il fait des tableaux et non pas des portraits, c'est toujours parmi les peintres de cette dernière classe qu'on s'obstine à le ranger. Au lieu de s'attacher à l'ensemble de sa composition, à la vérité des attitudes, à la franchise de l'expression, à l'exactitude plus ou moins rigoureuse du costume, on s'amuse à rechercher dans ses figures les traits épars des originaux qui ont pu lui servir de modèles, et, donnant un nom propre à chacun des vices, des défauts ou des ridicules dont il trace l'image,

on fait d'une critique générale une satire personnelle, et l'on ameute contre l'observateur tout ceux à qui l'on fait ou qui se font à euxmêmes l'application directe de sa censure. Cette tourbe de sots et de méchans (dont chacun en particulier craindrait de se faire reconnaître par ses plaintes) nomme d'office (parmi ce qu'il y a de plus diffamé dans la bande) des mandataires chargés de défendre, per fas et ne fas, tous les vices, tous les abus, tous les préjugés, toutes les sottises qu'ils représentent. Un des moyens les plus innocens que ces enfans perdus emploient contre l'écrivain qui les voue eux et leurs commettans à l'opprobre ou au ridicule, c'est de se retrancher dans quelque asile respectable, et d'accuser ensuite la direction du trait qui vient les y poursuivre; semblables à ces malfaiteurs qui se réfugient dans les églises, et crient ensuite au sacrilege contre la justice dont le bras les saisit au pied des autels.

C'est ordinairement derrière leur politique que ces gens-là cherchent à cacher leurs mœurs. Dernièrement j'entendais, en traversant une antichambre, l'un des coryphées de la secte se récrier, d'une voix de capucin, contre mon

« PreviousContinue »