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Partout un silence de mort !

Je cherchais... mon regard avide
Aperçut les lunettes d'or.

-"Pourquoi, dis-je tout bas, grand'mère

N'a-t-elle pas ses yeux de verre ?

-Au ciel, c'est qu'elle a maintenant

D'autres yeux pour voir son enfant! (bis) (1)

No IV.

LA ROSÉE.

Plan: 1. Ce que c'est eau qui se condense pendant la nuit sur les plantes et le gazon.

2. Ses causes: a) eau en vapeur dans l'atmosphère ; des eaux et de la terre ; transpiration des végétaux. 3. Saison où elle est plus abondante : le printemps; rition matin et soir.

4. Ses effets: fraîcheur, douceur, parure, fertilité.
5. Ce qu'elle devient : dissipée par le vent et le soleil.

Développement.

vapeur qui s'élève

temps de son appa

Le Créateur s'est plu à embellir la nature. chef-d'œuvre de ses mains. Dans ses conseils divins, rien d'inutile, malgré les apparences et le voile du mystère qui les tiennent cachés au regard et à la pensée de l'homme. Quand le soleil s'incline à l'horizon, messager glorieux du Souverain qui règne dans les profondeurs lointaines, l'eau de la mer, des fleuves, des rivières, des lacs silencieux prend son essor vers les nues, transportée sur l'aile chaude des derniers rayons. Elle se condense, se resserre gouttelette contre gouttelette, formant dans l'air des gazes flottantes que l'oeil distingue à peine, à l'heure du crépuscule. Peu à peu le sol vêtu de blés, d'herbes, de plantes, les collines hérissées d'arbustes et de bosquets, les montagnes agrandies de leurs forêts, se refroidissent au dernier baiser du soleil qui disparaît, lassé de sa course monotone. Puis les gouttelettes, rafraîchies dans l'atmosphère, tombent et tombent encore en fine et imperceptible poussière liquide: c'est la rosée du soir.

(1) On trouvera la belle musique de cette romance chez notre ami, M. HUDON, à Ottawa (Voir aux Annonces de la REVUE).

La nuit suit en silence sa course paisible et reposante. Aux heures succèdent les heures, sous le regard souriant des étoiles et de la lune. Dans le grand domaine de la nature, tout dort excepté les oiseaux nocturnes et les carnassiers altérés de sang, tout languit et repose excepté la douleur qui torture l'homme couché sur sa croix, excepté le remords qui ronge la conscience coupable et rebelle. Refroidie et obscure, la terre, enveloppée de vapeurs qui flottent dans l'atmosphère, reçoit la pluie fine des perles argentées qui se dépose, goutte à goutte, sur le brin d'herbe voisin de la fleur, son amie parfumée, sur la feuille déployée en large éventail ou allongée comme les doigts d'une main végétale, sur la plume de l'oiseau ou sur le toit de la chaumine enfumée du bucheron: ce sont les pleurs de l'aurore, disaient jadis les poètes; c'est la

rosée du matin.

Le laboureur matinal l'a vue scintiller aux buissons, suspendue en frèles tissus sur la toile légère de l'araignée; cent fois, en passant sous les berceaux de verdure et les dômes en voussure des hautes futaies, il l'a entendue tomber sous ses pas, monotone, presque silencieuse, imposante dans l'immensité du paysage doré des premiers rayons du soleil.

Quelle traîcheur alors dans les champs, les prairies, sur la lisière des bois et dans les clairières! Quelle douceur pénétrante on respire avec les bouffées d'air pur et printanier, au sortir de l'étouffante atmosphère de la nuit. Et cette rosée rafraîchissante qui repose est de la nature rajeunie, nne parure qui réjouit, une fertilité qui la désaltère. Les plantes et les autres végétaux ont respiré, transpiré tout comme l'homme et les êtres sans raison : ils reprennent la vigueur d'une vie qui se sent renouvelée et leur concert harmonieux qui s'inaugure avec le piailler ent matinal des petits oiseaux et le cri strident du criquet ou de la cigale, concert inconscient qui se prolonge jusqu'au crépuscule nocturne.

Gaze flottante, perles éblouissantes, la fécondante rosée s'évapore par degrés ou s'absorbe dans le tissu végétal de la robe de la nature. La brise et le zéphir, secondant de leur haleine l'ardeur des rayons solaires, dissipent la liqueur cristalline ou la répandent sur le sol desséché et altéré; le phénomène artistique, devenu bana par sa fréquence même, s'évanouit à l'oeil indifférent du vulgaire; mais le poète et le penseur chrétiens en bénissent la Providence divine!

Les Gouttelettes de rosée.

Deux larmes scintillaient aux yeux du hel enfant :
Deux gouttelettes de rosée !

Perles dans une fleur que l'aurore en passant
De sa lèvre humide a baisée. -

Son petit cœur glacé se gonflait haletant,
Et mon âme en était brisée !...

Deux larmes scintillaient aux yeux du bel enfant :
Deux gouttelettes de rosée ! (1)

**

Pleurs et rosée.

Je rêve, et la pâle rosée

Dans les plaines perle sans bruit,
Sur le duvet des fleurs posée

Par la main fraîche de la nuit.

D'où viennent ces tremblantes gouttes ?
Il ne pleut pas, le temps est clair.
C'est qu'avant de se former, toutes
Elles étaient déjà dans l'air.

D'où viennent mes pleurs? Toute flamme,
Ce soir, est douce au fond des cieux;

C'est que je les avais dans l'âme

Avant de les sentir aux yeux.

On a dans l'âme une tendresse

Où tremblent toutes les douleurs,

Et c'est parfois une caresse

Qui trouble, et fait germer des pleurs. (2)

SULLY PRUDHOMME.

(1) Les autres couplets de cette mélodie se trouvent - musique superbechez M. Hudon. (Voir aux Annonces de la REVUE.)

(2) Il est dans le cœur une source d'émotion dont les joies, comme les douleurs, font monter les larmes aux yeux. Quand le poète contemple et peint la nature, il mèle des idées morales à ses sensations.

boles dans les choses.

Il voit des sym

N° V.

DÉVELOPPEMENT PAR ANALYSE.

I. Le Fleuriste.

Le fleuriste a un jardin dans un faubourg; il y court au lever du soleil, et il en revient à son coucher. Vous le voyez planté et qui a pris racine au milieu de ses tulipes, et devant la Solitaire : il ouvre de grands yeux, il frotte ses mains, il se baisse, il la voit de plus près, il ne l'a jamais vue si belle, il a le cœur épanoui de joie. I la quitte pour l'Orientale; de là, il va à la Veuve; il passe au Drap d'or; de celle-ci à l'Agathe, d'où il revient enfin à la Solitaire, où il se fixe, où il se lasse, où il s'assied, où il oublie de dîner. Aussi est-elle nuancée, bordée, huilée, à pièces emportées; elle a un beau vase ou un beau calice; il la contemple, il l'admire Dieu et la nature sont en tout cela ce qu'il n'admire point: il ne va pas plus loin que l'oignon de sa tulipe, qu'il ne livrerait pas pour mille écus, et qu'il donnera pour rien quand les tulipes seront négligées et que les œillets auront prévalu.

Cet homme raisonnable qui a une âme, qui a un culte et une religion, revient chez soi, fatigué, affamé, mais fort content de sa journée il a vu des tulipes!

II.-L'Amateur de prunes.

Parlez à cet autre de la richesse des moissons, d'une ample récolte, d'une bonne vendange : il est curieux de fruits; vous n'articulez pas, vous ne vous faites pas entendre. Parlez-lui de figues et de melons, dites que les poiriers rompent de fruit cette année,

I. Le Fleuriste.-En regardant de près, on découvre aisément le procédé de La Bruyère dans ce portrait.

1. Lieu et temps: la première phrase.

2. Objet de la passion du fleuriste : les diverses variétés de tulipes: Solitaire, Orientale, etc, - Après l'objet, la peinture de son engouement et de sa passion: effets de celle-ci sur son extérieur: "il ouvre de grands yeux... il oublie le dîner"; sur son âme : "il la contemple... admire..." etc.

3. Conclusion piquante et mordante de l'auteur: "Cet homme... des tulipes!"

II. L'Amateur de prunes. Il y a trois parties distinctes dans ce second portrait.

que les pêchers ont donné avec abondance: c'est pour lui un idiome iucońnu; il s'attache aux seuls pruniers : il ne vous répond pas. Ne l'entretenez pas même de vos pruniers : il n'a de l'amour que pour une certaine espèce; toute autre que vous lui nommez le fait sourire et se moquer. Il vous mène à l'arbre, cueille artistement cette prune exquise; il l'ouvre, vous en donne une moitié et prend l'autre : -"Quelle chair! dit-il; goûtezvous cela? cela est-il divin? voilà ce que vous ne trouverez pas ailleurs !" Et là-dessus ses narines s'enflent, il cache avec peine sa joie et sa vanité par quelques dehors de modestie. 0 l'homme divin, en effet ! homme qu'on ne peut jamais assez louer et admirer! homme dont il sera parlé dans plusieurs siècles ! que je voie sa taille et son visage pendant qu'il vit; que j'observe les traits et la contenance d'un homme qui seul entre les mortels possède une telle prune !

N° VI.

XIII. LA MAIN.

LA BRUYÈRE.

A.-Plan.

I.-Début: Excellence, importance... coup d'œil général...

II.-Milieu: 1. Description ou énumération des diverses parties... 2. Usage, c'est-à-dire utilité et avantages: dans les métiers... les arts... l'éloquence le geste, la mimique... la musique...

III.-Fin: Beauté de la main et des doigts consacrés pour bénir, absoudre, offrir l'Hostie... Son œuvre sera couronnée au ciel.

D'abord, l'auteur écarte de nos yeux, par éliminations successives, tout ce qui, dans la campagne, laisse son personnage insensible,

Ensuite, il nous peint l'homme, arrêté devant son arbre préféré et goûtant avec un visiteur une de ses prunes.

Enfin, il termine, en criblant de ses railleries, exagérées à dessein, le maniaque ridicule.

Remarques :-Inutile d'insister ici sur les détails : il y aura profit, et beaucoup, à les faire voir aux élèves. -- Ce que l'auteur a voulu dire se résume én deux mots: Il est des maniaques qui préfèrent une fleur, un fruit à tout le reste, jusqu'à se rendre excentriques et ridicules,

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