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vienne, sur le signe définitif du Créateur, la ressaisir, la ranimer ou pour subir les douleurs du supplice qui n'expie rien, ou pour ceindre la couronne qui ne se flétrit plus !

III. LES YEUX.

A. E. R.

A.-Plan.

.-2. Utilité pratique...

I. Début œil... organe de la vision... nature... parties... excellence... II. Milieu: 1. Description de l'œil, du pourtour...scientifique... littéraire... artistique... morale.

III. Conclusion: Dangers... surveillance, modestie... vision céleste, fondement de la béatitude.

B- Développement.

(Devoir d'élève).

L'œil est le sens qui se recommande le plus à l'attention de l'observateur: il est l'organe de la vision dans l'homme et la série animale. Aucun sens n'est plus merveilleux de sa nature, plus délicat par sa structure, plus expressif par son langage muet, plus révélateur des sentiments de l'âme, plus nécessaire et plus utile par son rôle physique. Il se compose d'une dizaine de parties qui s'enboîtent et s'emchâssent les unes dans les autres, comme les rouages d'une montre; membranes et humeurs ont chacune leur valeur, leur fonction sur les rayons lumineux qui les viennent caresser et embellir à la fois. Quelle merveille de l'artiste divin! La privation ou la perte de cet organe sera toujours l'une des plus inconsolables épreuves de la vie et l'apologie la plus éloquente de l'excellence de la vision.

* *

Logé dans les cavités de l'orbite, glissant et mobile sur des membranes rougeâtres et humides, protégé par les paupières bordées de cils protecteurs, lesquelles palpitent tout le jour comme des papillons pour s'appesantir et se clore paisiblement durant le sommeil; entouré par une éminence légèrement arquée et défendu par une palissade de bruyère épaisse contre la poussière et les ruisseaux de sueur qui descendent du front; garanti en bas par

l'émergence presque imperceptible de la joue, l'œil domine en roi, commande en maître, exerce son empire sur le corps humain et sur la nature extérieure. A travers l'écartement du double rideau des paupières, son globe gracieux saisit par sa blancheur luisante, par ce coloris irisé bleu comme l'azur, noir comme l'ébène, gris comme le granit, roux comme le marbre, verdâtre comme les ondes de l'océan; et tandis qu'au centre la prunelle magique rayonne, étincelle, flamboie, ou bien caresse, apaise, captive, l'éclat d'un vernis diaphane, plus beau que le cristal le plus pur, achève de conquérir l'admiration à ce bijou animé et unique dans

la création.

Mais l'admiration serait-elle stérile? Non pas: "l'œil est la lumière du corps," a dit lui-même le divin Maître. Il concourt, par son utilité pratique, au mouvement, au déplacement, aux nécessités usuelles de la vie. Que signifient les locutions proverbiales, inventées par le bon sens du peuple? "Avoir bon pied, bon œil," c'est être vigilant, alerte, vigoureux; "avoir l'œil exercé" c'est voir bien et promptement soit le gibier, soit l'ennemi, soit le péril qui menace dans une navigation côtière ou sur la voie ferrée; "avoir le compas dans l'œil " se dit d'un artisan qui apprécie avec exactitude les dimensions à la seule vue de la surface ou de la distance; "avoir l'œil au guet," c'est faire attention à ce qui se passe, c'est aussi "avoir l'œil à une affaire," à un contrat, à un compte, ou l'avoir sur une chose," en veillant sur elle attentivement, comme une mère doit "avoir l'œil sur ur" le berceau de son enfant. Que ne pourrait-on ainsi "faire passer sous les yeux ?" Il suffirait d'examiner le rôle pratique de l'oeil pour "faire ouvrir de grands yeux" au lecteur étonné.

"Suivez de l'œil" le savant dans son laboratoire, Pasteur et Edison, l'écrivain à sa table de travail, Littré et Brunetière, l'artiste armé de sa palette ou de son ciseau, Raphaël et MichelAnge; savants et artistes "ont les yeux au bout des doigts," ce qui veut dire qu'ils sont doués de talent, de finesse et de tact; écrivains et littérateurs "ont des yeux d'aigle, de lynx et d'Argus," c'est-à-dire une grande pénétration d'observation, de raisonnement qui leur permet de voir loin et juste. Ce qui toutefois ne laisse point entendre que la cécité altère l'intelligence ou amoindrit nécessairement la valeur artistique, littéraire de celui qui en est frappé. Quelle belle galerie historique l'on pourrait former de ces aveugles célèbres, dont l'artiste sulpterait le visage sur le modèle

des statues grecques, sans yeux ou sans regard! Il n'est pas moins vrai que de tous les sens la vue est le plus esthétique, le plus indispensable à l'efflorescence des chefs-d'œuvre de l'esprit humain.

Il joue aussi un très grand rôle dans la morale.

On l'a dit et on le redira avec raison: “les yeux sont le miroir de l'âme," et tout le monde sait qu'il n'y a pas que la maman qui sache "lire dans les yeux" de l'enfant, de l'adolescent, du jeune homme et de la jeune fille. Le regard est l'indice des qualités morales, des sentiments et des passions, des vices et des vertus. Le langage commun a consacré cet axiome en termes vrais, justes et hardis; on dit couramment "avoir l'œil spirituel, sagace, malin, doux, tendre, inquiet, méchant, agaçant, fripon; avoir les yeux mourants, languissants, tristes, sombres, rêveurs, hagards, effarés, effrontés." L'orgueil brille dans les yeux; la colère les gonfle, comme la douleur les voile, ainsi que l'horreur et la compassion. On "aime quelqu'un comme ses propres yeux, plus que ses yeux," tandis qu'à d'autres on sait faire les gros yeux, et les rouler" avec indignation et reproche.

*

*

Heureusement que l'âme a aussi un œil, et la foi des yeux ! Heureusement que "l'œil de Dieu voit tout, pénètre tout, perce le fond des abîmes !

Un proverbe espagnol dit que "les yeux sont toujours enfants," c'est-à-dire que le plus mauvais spectacle amuse ceux qui le regardent. C'est traduire gracieusement le danger de la curiosité malsaine, des occasions pernicieuses à l'innocence et à la délicatesse. C'est faire l'éloge indirect de la prudence, de la modestie, de la réserve, de la vertu. La vertu seule, conservée sans tache ou reconquise à main armée dans une lutte qui ne s'achève qu'au tombeau, méritera à l'œil régénéré la béatitude de la vision céleste. W. C.

* * *

Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l'aurore ;
Ils dorment au fond des tombeaux,
Et le soleil se lève encore.

Les nuits, plus douces que les jours,
Ont enchanté des yeux sans nombre;

Les étoiles brillent toujours,

Et les yeux se sont remplis d'ombre.

Oh! qu'ils aient perdu le regard,
Non, non, cela n'est pas possible!
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu'on nomme l'invisible;

Et comme les astres penchants
Nous quittent, mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leur couchants,
Mais il n'est pas vrai qu'elles meurent.

Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore,
De l'autre côté des tombeaux

Les yeux qu'on ferme voient encore.

SULLY PRUDHOMME.

IV.-L'ODORAT.

A. -Plan.

I. Début : Ce sens est le moins noble... utilité... moins développé chez l'homme que dans certains animaux, pour qui il sert de moyen de connaissance.

II. Milieu: 1. Description du nez... ses parties... ses variétés, occasion de proverbes et locutions... 2. Ses avantages: organe conducteur des odeurs... des aveugles... des dégustateurs... son affaiblissement... usage.

III. Conclusion: sens du mot au figuré... application morale... surnaturelle.

B.-Développement.

(Devoir d'élève.)

L'odorat est au dernier degré de la hiérarchie des sens : c'est le moins noble, le mons esthétique de tous. Faut-il en conclure qu'il est inutile? Nullement. Dieu l'a donné à l'homme, et l'on sait que l'œuvre entière du Créateur est belle et bonne.

Dans la série animale, ce sens est parfois plus subtil et plus développé que chez l'homme; ce sens, selon Buffon, est pour les animaux comme un œil qui voit les objets, non seulement où ils sont, mais même partout où ils ont passé. Si l'homme connait par la vue,

par la raison et la réflexion, la brute atteint la connaissance, seulement à l'aide des yeux, de l'instinct et de l'odorat. dans les desseins de Dieu, elle est faite pour concourir aux plaisirs et aux besoins de l'homme, son maître.

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Avez-vous jamais rencontré quelque visage, privé de cette partie saillante qui est placée entre le front et la bouche? Quelle repoussante difformité! Quelle infirmité humiliante ! Le nez n'est donc point chose si indifférente, bien que d'en parler seulement provoque le sourire. Par sa base ou racine il tient fortement au léger prolongement aigu de l'os frontal, et par sa partie antérieure il se laisse plier à droite et à gauche, flexible et docile sous la main qui le touche. Les ouvertures nasales livrent passage à l'air respirable et aux odeurs une légère cloison interne les sépare, et la membrane, sorte de tapis rouge qui les revêt, est sillonnée de ramures nerveuses qui perçoivent les senteurs.

La variété de forme que prend cet appendice central du visage est vraiment étonnante: pourquoi faut-il qu'elle soit plaisante aussi? Les nez à la Cyrano prêtent un fondement au proverbe qui parle de "mener les gens par le bout du nez," et si celui-ci dépasse souvent les proportions communes, que de fois il reste au-dessous des moindres en plongeant si loin sa racine qu'il semble disparaître. Tel est doté d'un "beau nez à porter lorgnon ou lunettes: on dit que c'est "avoir du nez," et "bon nez" sans doute; tel autre " aperçoit le bout du sien" pointu, aigu, effilé en lame de rasoir, et on le voit "porter au vent," "en haut" et "en l'air." Nez aquilin et royal, nez de perroquet ou de furet; nez retroussé, camus ou camard; nez aplati, épaté, écrasé la nature est capricieuse, parfois cruelle, car le reste de la figure ne déplaîrait pas, sans le "trop ou le trop peu" du nez: et le mordant Pascal a dit du "nez de Cléopâtre que s'il eût été plus court-c'est le 'trop '— la face de la terre aurait changé."

Mais le nez possède des qualités, présente des avantages: "bien fait," il exige tribut et subvention de la beauté physique. Ce cornet naturel recueille l'arome des fleurs, des foins et des prés, des bois et des jardins, le long du sentier champêtre et ensoleillé, les senteurs du parfum artificiel, comme il condense les émanations odorantes des grèves océaniques, d'une rue populeuse où passent tour à tour les bouffées des magasins de tabac, de souliers,

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