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tera dans l'art de les faire surgir, de les ordonner dans un plan logique, de les revêtir d'un style personnel.

L'expérience de l'enseignement nous suggère ici deux observations importantes :

1o Une fois la semaine au moins, écrire au tableau noir devant tous les élèves, réunis en classe de littérature, le titre d'un sujet Ex.: La lampe du sanctuaire. Interroger les élèves à tour de rôle, écrire au tableau leur réponse, sans se soucier pour le moment du plan ou de l'ordonnance, les aider au moyen des sources d'invention que nous avons indiquées, chercher ensuite à coordonner le résultat dans un plan déjà prévu et préparé par le professeur.

Au besoin, il serait utile de signaler deux ou trois plans différents, en rapport avec le tour d'esprit des élèves.

2o. Donner soi-même, au tableau noir, si c'est possible, le développement complet d'un plan ainsi trouvé en commun: Ex: L'analyse littéraire de la Besace (ou d'une autre fable). Au début, durant les deux premiers mois de l'année scolaire, exercer la chose entière à ce genre de travail d'invention et de disposition, sans exiger autre chose, d ordinaire, que de leur faire prendre note, sur leur cahier de devoirs littéraires, du sujet traité au tableau. Indiquer un sujet différent comme devoir à développer sur copie durant l'étude.

I.--Sujets.

1. Eglise (édifice)..--2. Clocher.--3. Cloche.--4. Orgue.-5. Fonts baptismaux. 6. Chaire. - 7. Table sainte. -8. Confessionnal. —9. Autel. -10. Tabernacle.-11. La lampe.-12. Le cierge.-13. Reposoir.-14. Messe solennelle; basse; -de Requiem.-15. Vêpres et bénédiction. 6. Messe de minuit.-17. Messe du jour de Pâques. -18. Le Vendredi Saint, etc., etc.: une première messe; un enterrement; un mariage; cérémonie de la première communion, —de la confirmation.

II. Essais de plans.

1. Eglise où? en ville, à la campagne, sur une colline, dans la plaine, au fond d'un vallon, sur le bord de la mer...

Quand ? le matin, le soir, en semaine, le dimanche (foule), éclairée par le soleil levant ou couchant.

Nature? ancienne, neuve, style (roman ou gothique) modeste ou grandiose... basilique, cathédrale, paroissiale... consacrée, bénite demeure de Dieu, porte du ciel...

Comparaison ?-avec les autres édifices de l'endroit palais

de justice, mairie, habitations privées... image de l'Eglise, assemblée des âmes ayant les mêmes croyances...

Contraste-Pagode, mosquée, synagogue, temple des cultes

dissidents...

Pourquoi, fin 2-culte public à Dieu, à Jésus-Christ, à Marie, aux saints; sacrements... culte privé...

Nécessité ?-en raison du culte extérieur, de la participation aux mêmes sacrements, aux mêmes rites... en raison de la tradition universelle...

Conclusion ?--sentiments, résolutions pratiques, conduite à tenir dans le lieu saint...

N.B. On voit qu'il est facile de réunir les éléments d'une description très intéressante, en ayant soin de laisser toute liberté aux sentiments et aux expansions personnelles.

2. Le Clocher.-Chercher d'abord des synonymes: flèche, aiguille, tour, campanile; -par contraste ou rapprochement: dôme, coupole, minaret, donjon, tourelle, phare...

Temps, lieu? ancien, nouveau ;

forme, élégance; -situation...

couleur, proportion,

Origine ?-les premiers clochers furent construits isolément; aujourd'hui encore les campaniles, comme des phares... Ex.: la tour penchée de Pise.

Nature, utilité, convenance ?-mât d'une nef orientée vers le soleil levant... demeure aérienne de la cloche, dont la voix, etc...; calvaire contemporain surmonté du signe rédempteur... etc.

Exemples? Citer les plus beaux, les flèches les plus élevées... Conclusion?-signification, aspect de loin, symbolisme, clocher natal, baptème, première communion, agonie et mort: voix d'outre-tombe...

3. La cloche. -On trouvera tous les élements d'un devoir dans le numéro de juin de la Revue (p. 261.)

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L'on peut consulter également les pages 232: le cierge, et 275: un enterrement.

B. CLASSE DE SECONDE ou DE BELLES-LETTRES.

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1. Le roman est une œuvre d'imagination en prose où l'auteur cherche à plaire, à exciter l'intérêt, soit par la singularité des aventures, soit par la peinture des mœurs et des passions.

2. Il a pour objet la nature extérieure, témoin de nos joies et de nos douleurs, le milieu moral, coutumes de famille et de société, éducation, religion et tradition, et la vie de tels individus.

3. Les moyens d'expression de cet objet sont d'une complexité diverse: description, narration, dialogue, lettres, portraits, discours, dissertations et réflexions morales.

4. Le but du romancier doit être de plaire, tout en élevant l'âme et en rendant les hommes meilleurs, d'instruire l'esprit et de corriger les mœurs.

5. Les principales espèces de roman sont :- le roman de caractères, peinture de ce qu'il y a de plus personnel et de plus particulier dans les individus : Gil Blas de Lesage ; —le roman de mœurs, peinture des habitudes communes à un groupe d'individus: de là des "sous-espèces": le roman rustique, dans G. Sand et A. Theuriet, le roman militaire, dans Descaves et Art Roë, le roman des gens de mer, dans P. Loti; le roman psychologique, étude vivante de l'âme des personnages, chez P. Bourget ; —le roman réaliste, peinture exacte et précise des menus détails, des faits observés et notés sur place au jour le jour, comme l'ont fait Balzac et Flaubert; le roman naturaliste, peinture grossière de l'homme dans ses états morbides, avec ses tares et ses laideurs. tout s'y ramène à la matière et à l'animalité, aux instincts et aux appétits, comme chez l'immonde et lépreux Zola; le roman impressionniste, où le réalisme s'orne d'images pittoresques, chatoyantes, fortes et précises jusqu'à l'illusion; telle est la manière de Daudet et des Goncourt; le roman historiqne, qui prétend ressusciter l'image et l'âme du passé, et qui est en même temps une

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œuvre d'imagination de ce genre sont les œuvres de W. Scott' de Hugo, de Mérimée.

Triste littérature, servie à des milliers d'âmes qui s'en repaissent avec avidité, au détriment du vrai, de la vertu, du sérieux, des aspirations grandes et nobles, du dévouement, du devoir et du sacrifice!

Il faudra bien un jour classer et débrouiller ces œuvres complexes dont notre siècle mourant a été si fâcheusement prodigue.

6. Au roman se rattache la nouvelle, qui s'en distingue par deux caractères : la moindre étendue et la forme plus exclusivement narrative; tel le Dernier des Abencerages de Chateaubriand.

No II.

La chaleur d'été.

(1) Respectueux de toutes les autorités constituées, nous professons à l'égard des savants des Observatoires la déférence la plus absolue. Cependant, malgré toutes leurs explications, une chose est toujours restée pour nous à l'état de problème, à savoir: pourquoi le soleil de l'été est un soleil qui chauffe, et celui de l'hiver un soleil qui ne chauffe pas. Ce qui rend la différence plus piquante, c'est que, pendant l'été de l'hémisphère boréal, le foyer de chaleur s'éloigne précisément de notre planète, et qu'il s'en rapprochc à mesure qu'arrivent les frimas.

(2) Nous savons tous ce que l'on peut dire sur l'obliquité des rayons solaires et sur l'échauffement graduel du sol. Evidemment il doit y avoir un phénomène qui nous intrigue, une cause quelconque, et messieurs les astronomes sont mieux qualifiés que personne au monde pour nous dire, la voilà. Tout ceci n'empêche pas que, durant les jours très froids, alors que la lumière solaire est aussi vive qu'en été, vous passez souvent de l'ombre au soleil Il n'est pas sans intérêt de constater comment on peut écrire un article de journal sur la chaleur torride de ce dernier été du siècle. -Nous ne considérons point le style, qui n'a rien d'élégant,—il a même des négligences,--mais seulement l'invention des idées et leur enchaînement.

(1) L'écrivain entre en matière en cherchant la cause de la chaleur : il procède au moyen d'une donnée astronomique, sous forme de problème.

(2) Il indique cette cause: l'obliquité des rayons en hiver et leur position verticale en été.

sans éprouver la moindre impression réchauffante, alors que, depuis une semaine, la même opération ne peut s'effectuer sans que le malheureux promeneur, au moment où il franchit la limite fatale, sente aussitôt des projectiles de feu s'abattre directement sur sa tête, comme venant d'une batterie formidable, subitement démasquée.

Tout se passe, en un mot, comme si l'astre n'émettait en hiver que des rayons de lumière, et comme si, au moment même où la distance devient plus considérable entre nous et lui, il se décidait capricieusement à y joindre des rayons de chaleur.

(3) La chaleur! fait-elle assez gémir, transpirer, panteler, depuis une huitaine de jours! Arrivée en retard, elle se rattrape à merveille, ce qui est fort naturel. Les mouchoirs ne chôment pas, les éventails ont de l'ouvrage. Les parapluies masculins s'ouvrent sans vergogne à côté des ombrelles féminines. Les bancs et les chaises des promenades publiques tremblent sous des effondrements et des anéantissement désespérés. Les mastroquets et les débitants de glace au détail sont dans une jubilation exceptionnelle...

(4) La chaleur n'a pas que des effets physiques; elle a encore des effet sociaux, et, comme ces derniers ne relevaient ni du roman ni de la science juridique, les deux écrivains qui s'en sont occupés le plus volontiers jusqu'ici ont été Montesquieu et Daudet, l'auteur de l'Esprit des lois et l'auteur de Tartarin. Ces deux hommes éminents ont raisonné et déraisonné à qui mieux mieux sur le rôle de la température dans la formation des caractères nationaux. Pourquoi les hommes du nord ont-ils triomphé des hommes du midi? Parce que, selon eux, le froid avait exalté la vigueur des uns, pendant que les autres se trouvaient alanguis par la chaleur.

Conception simpliste, à laquelle on ne peut objecter qu'une toute petite chose, à savoir: la domination plusieurs fois séculaire exercée, avant l'invasion des barbares, par les Méridionaux sur les gens du Nord.

Pour Daudet, on le sait, le soleil est un grand coupable. C'est lui qui fait mentir Tartarin, Roumestan, et tous leurs pareils. C'est lui qui fait fleurir l'exagération sur la côte d'Azur, et, par un

(3) Il passe aux effets de la chaleur: d'abord aux effets physiques; observez bien la peinture réaliste dont il se sert dans ce dessein.

(4) Nouveaux effets : les effets sociaux, fondés sur les assertions de deux écrivains célèbres; il analyse, discute et rejette leurs conclusions; c'est une façon habile de développement.

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