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Apprenez un fecret qu'ignore l'Univers,

Leur dit alors le Dieu des vers.

Jadis avec Homere aux rives du Permeffe,
Dans ce bois de Lauriers, où feul il me fuivoit,
Je les fis toutes deux, plein d'une douce yvreffe
Je chantois; Homere écrivoit.

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REMARQUES.

qu'on ne puiffe fouhaiter qu'il eut pris pour les fix premiers Vers, un tour, qui fût moins languiffant.

De leur Auteur, dit-il, M. Rouffeau, qui, plus d'une fois, a pris plaifir à joûter contre fes Maîtres, a fait l'application du même Vers de l'Anthologie à M. Le Marquis de La Fare dans une Epigramme de quatorze petits Vers, qu'il nomme mal-à-propos Sonnet, parce

CHANG. Vers 5. & 6. Apprenez
un fecret &c. ] Au lieu de ces deux
Vers, il n'y avoit que celui-ci
dans la première compofition:
apprenez le vray nom. BROSS.
qu'elle eft compofée de deux
Stances de quatre Vers, & d'une
de fix, aïant un repos au troi-
fiéme. Je mets ici cette Epigrama
me. On pourra la comparer avec
celle de nôtre Auteur, & fixer
le prix de l'adreffe
, avec la-
quelle le Difciple imite le Maître,

L'autre jour la Cour du Parnaffe
Fit affembler tous fes Bureaux,
Pour juger au rapport d'Horace,
Du prix de certains Vers nouveaux:
Après maint Arrêt toujours jufte
Contre mille Ouvrages divers,
Enfin le Courtifan d' Augufte
Fit rapport de vos derniers Vers.
Auffi-tôt le Dien du Permesse
Lui dit: Je connois cette Pièce ;
Je la fis en ce même endroit.
L'amour avoit monté ma lire ;
Sa Mère écoutoit, fans mot dire ;
Je chantois, La Fare écrivoit.

Dans l'Epigramme de nôtre Au teur, Homère cft feul avec Apollon. Dans celle de M. Rouffean, VENUS avoit êté préfente à l'Action, qui cependant êtoit reftée inconnue. Difons le vrai; Veous n'écoute Apollon, que pour

fournir un Vers, qui rime avec Lire, Chés M. DESPRE'AUX, suivoit rime exactement avec écrivoit. Trouvera-t-on chés M. Rouffean, qu'endroit rime auffibien avec ce même mot, écrie veit.

·

XXVII.

A Madame la Prefidente DE LAMOIGNON, fur le Portrait du P. BOURDALOUE, qu'elle m'avoit envoyé.

Du plus grand Orateur dont la Chaire se vante,

M'envoyer le Portrait, illuftre Presidente,

3

C'eft me faire un prefent qui vaut mille prefens. J'ay connû Bourdalouë, & dés mes plus jeunes ans 5 Je fis de fes Sermons mes plus cheres delices : Mais luy, de fon cofté, lifant mes vains caprices, Des Cenfeurs de Trevoux n'eut point pour moy les yeux: Ma franchise furtout gagna fa bienveillance.

Enfin aprés Arnauld, ce fut l'Illuftre en France, 10 Que j'admiray le plus, & qui m'aima le mieux.

REMARQUES.

XXVII. Tit. A Madame la Prefidente de Lamoignon, ] C'eft M. Broffette, qui la nomme. Elle n'eft point nommée dans l'Edition de 1713.

VERS 7. Des Cenfeurs de Trevour] Quelque tems avant que M.Defpréaux fit cette Epigramme, les Auteurs du Journal de Tré voux avoient écrit contre lui. Le P. Bourdalone mourut le

13.

Mai 1704. BROSS.

Le nom de Trévoux fe trouve dans l'Edition de M. Broffette & dans celles de Paris 1726. 1735. & 1740. Il n'y a dans celle de 1713. que trois ***.

Au fujet du P. Bourdaleue, voïés Sat. X. 346.

Sur les Journalistes de Trévoux, voïés, Sat. XII. 343. Epigram mes XXV. XLVI. XLVII.

XXVIII,

Sur la maniere de reciter du Poëte SANTE U L.

Qu

U AND j'apperçois fous ce Portique Ce Moine au regard fanatique

Lifant fes vers audacieux

Fairs pour les habitans des Cieux 5 Ouvrir une bouche effroyable, S'agiter, fe tordre les mains;

>

Il me femble en luy voir le Diable,
Que Dieu force à louer les Saints.

REMARQUES.

XXVIII. Tit. du Poëte Santeul. Il n'eft point nommé dans l'Edition de 1713. Il eft feulement indiqué de cette manière du Poëte S***.

Ses vers

VERS 3. & 4. audacieux Faits pour les habitans des Cieux] Il a fait des Hymnes à la louange des Saints. DESP. Lorfque Jean-Baptifle Santeul, Chanoine Régulier de faint Vic& l'un des plus fameux

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Poëtes Latins du XVII. fiècle,
alla préfenter au Roi les Hymnes,
qu'il avoit faites pour S. Louis;
il les récita de la manière qu'il
récitoit tous fes Vers, c'eft-à-
dire en s'agitant comme un
Poffédé, & faifant des contor-
fions & des grimaces, qui firent
beaucoup rire les Courti fans.
M. Defpréaux, qui fe trouva là,
fit fur le champ cette EPIGRAM-
ME.

A voir de quel air effroyable,
Roulant les yeux tordant les mains
Santeul nous lit fes Hymnes vains ;
Diroit-on pas que c'est le Diable
Que Dieu force à louer les Saints?

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XXIX.

Vers pour mettre au bas du Portrait de M. RACINĖ,

DU U Theâtre François l'honneur & la merveille,
Il fceut reffufciter Sophocle en fes écrits;

Et dans l'art d'enchanter les cœurs & les efprits,
Surpaffer Euripide & balancer Corneille.

REMARQUES.

XXIX. Vers 1. Du Theatre François &c.] M. Perrault avoit dit en 1687. dans fon Poëme du

Siècle de Louis le Grand, en par lant de l'eftime, que la Poftérité fera de CORNEILLE.

Mais quel fera le fort de l'illuftre Corneille Du Théatre François l'honneur & la merveille; Qui fut fi bien mèler aux grands événemens L'Héroïque beauté des nobles fentimens ; Qui des Peuples preffés vit cent fois l'affluence Par de longs cris de joie honorer fa préfence; Et les plus fages Rois, defa veine charmés Ecouter les Héros, qu'il avoit animés. M. Racine n'eft nommé nulle part dans les Ouvrages de M. Perrault contre les Anciens, quoique cet illuftre Moderne méritât de leur être oppofé. M. Defpréaux en fut piqué. Ce qui me fait croire qu'il donne exprès à Racine les mêmes titres, que M. Perrault avoit donnés à Corneille; & que pour qu'on ne fe mé

prenne pas à fon intention, it affecte de commencer fon Epigramme par le fecond des Vers de fon Adverfaire que je viens de rapporter.

VERS 4.& balancer Corneille. ] C'eft-à-dire, balancer la réputation que Corneille s'êtoit acquife. Notre Auteur avoit d'abord fait fon Vers ainfi :

Balancer Euripide & furpaffer Corneille.

11 ne le changea que pour ne point irriter les partifans trop outrés de CORNEILLE. Je ne ferai point fâché, difoit - il, que dans la fuite des tems quelque Critique fe donne la licence de rétablir mon Vers de la manière que je l'avois fait. Son fentiment eft expliqué dans fa VIII. Réflexion Critique, où il dit, en parlant du

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Grand Corneille : que "non feu-
lement on
ne trouve point
mauvais qu'on lui compare
, aujourd'hui M. Racine, mais
qu'il fe trouve même quantité
de gens, qui le lui préfèrent.
La Poftérité jugera qui vaut le
mieux des deux. Car, ajoûte-
t-il, je fuis perfuadé que les
Ecrits de l'un & de l'autre

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XXX.

Les mêmes VERS d'une autre manière.

Du Theâtre François l'honneur & la merveille
J'ay fceu reffufciter Sophocle dans mes Vers,

Et fans me perdre dans les airs,

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Du repos des Humains implacable ennemie,

J'ay rendu mille amans envieux de mon fort.
Je me repais de fang, & je trouve ma vie
Dans les bras de celui qui recherche ma mort.

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