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anglais, veut faire regarder Mahomet comme un Numa & comme un Théfée. J'avoue qu'il faudrait le respecter, fi né prince légitime, ou appelé au gouvernement par le fuffrage des fiens, il avait donné des lois paifibles comme Numa, ou défendu fes compatriotes, comme on le dit de Théfée. Mais qu'un marchand de chameaux excite une fédition dans fa bourgade; qu'affocié à quelques malheureux coracites, il leur perfuade qu'il s'entretient avec l'ange Gabriel; qu'il fe vante d'avoir été ravi au ciel, & d'y avoir reçu une partie de ce livre inintelligible, qui fait frémir le fens commun à chaque page; que pour faire refpecter ce livre il porte dans fa patrie le fer & la flamme; qu'il égorge les pères; qu'il raviffe les filles; qu'il donne aux vaincus le choix de fa religion ou de la mort; c'eft affurément ce que nul homme ne peut excufer à moins qu'il ne foit né turc, & que la fuperftition n'étouffe en lui toute lumière naturelle.

Je fais que Mahomet n'a pas tramé précisément l'espèce de trahison qui fait le sujet de cette tragédie. L'hiftoire dit feulement qu'il enleva la femme de Séide, l'un de fes difciples, & qu'il perfécuta Abufofian, que je nomme Zopire; mais quiconque fait la guerre à fon pays, & ofe la faire au nom de DIEU, n'eft-il pas capable de tout? Je n'ai pas prétendu mettre feulement une action vraie fur la fcène, mais des mœurs vraies; faire penfer les hommes comme ils pensent dans les circonftances où ils fe trouvent, & représenter enfin ce que la fourberie peut inventer de plus atroce, & ce que le fanatifme peut exécuter de plus horrible. Mahomet n'est ici autre chose que Tartuffe les armes à la main.

132 LETTRE AU ROI DE PRUSSE.

Je me croirai bien récompensé de mon travail, fi quelqu'une de ces ames faibles, toujours prêtes à recevoir les impreffions d'une fureur étrangère qui n'est pas au fond de leur cœur, peut s'affermir contre ces funeftes féductions par la lecture de cet ouvrage ; fi, après avoir eu en horreur la malheureu fe obéissance de Séide, elle fe dit à elle-même: pourquoi obéirais-je en aveugle à des aveugles qui me crient: haïffez perfécutez, perdez celui qui eft affez téméraire pour n'être pas de notre avis fur des chofes même indifférentes que nous n'entendons pas ? Que ne puis-je fervir à déraciner de tels fentimens chez les hommes ! L'efprit d'indulgence ferait des frères, celui d'intolérance peut former des monftres.

C'est ainsi que pense VOTRE MAJESTÉ. Ce ferait pour moi la plus grande des confolations de vivre auprès de ce roi philofophe. Mon attachement eft égal à mes regrets; & fi d'autres devoirs m'entraînent, ils n'effaceront jamais de mon cœur les fentimens que je dois à ce prince, qui pense & qui parle en homme, qui fuit cette fauffe gravité fous laquelle fe cachent toujours la petiteffe & l'ignorance, qui fe communique avec liberté, parce qu'il ne craint point d'être pénétré, qui veut toujours s'inftruire, & qui peut inftruire les plus éclairés.

Je ferai toute ma vie avec le plus profond refpect & la plus vive reconnaiffance, &c.

DE M. DE VOLTAIRE

A U

PAPE BENOIT XIV.

Bmo PADRE,

LA SANTITA VOSTRA perdonerà l'ardire che

prende uno de' più infimi fedeli, ma uno de' maggiori ammiratori della virtù, di fottomettere al capo della vera religione quefta opera contro il fondatore d'una falfa e barbara setta.

A chi potrei più convenevolmente dedicare la fatira della crudeltà e degli errori d'un falfo profeta, che al vicario ed imitatore d'un Dio di verità e di manfuetudine?

VOSTRA SANTITA mi conceda dunque di poter mettere a i fuoi piedi il libretto e l'autore, e di domandare umilmente la fua protezzione per l'uno, e le fue benedizioni per l'altro. In tanto profundiffimamente m'inchino, e le baccio i facri piedi.

Parigi, 17 agosto 1745.

DE LA LETTRE PRECEDENTE.

TRES-SAINT PERE,

VOTRE

OTRE SAINTETÉ voudra bien pardonner la liberté que prend un des plus humbles, mais l'un des plus grands admirateurs de la vertu, de confacrer au chef de la véritable religion un écrit contre le fondateur d'une religion fauffe & barbare.

A qui pourrais-je plus convenablement adreffer la fatire de la cruauté & des erreurs d'un faux prophète, qu'au vicaire & à l'imitateur d'un DIEU de paix & de vérité?

Que VOTRE SAINTETÉ daigne permettrè que je mette à fes pieds & le livre & l'auteur. J'ofe lui demander fa protection pour l'un, & fa bénédiction pour l'autre. C'eft avec ces fentimens d'une profonde vénération, que je me profterne, & que je baife vos pieds facrés.

Paris, 17 août 1745

DU SOUVERAIN PONTIFE

BENOIT XIV

A M. DE VOLTAIRE.

BENEDICTUS P. P. XIV, dilecto filio falutem & apoftolicam benedictionem.

SETTIMAN

ETTIMANE fono ci fu prefentato da sua parte la sua belliffima tragedia di Mahomet, la quale leggemmo con fommo piacere. Poi ci prefentò il cardinale Paffionei in di lei nome il fuo eccellente. poëma di Fontenoy... Monfignor Leprotti ci diede pofcia il diftico fatto da lei fotto il noftro ritratto; ieri, mattina il cardinale Valenti ci presentò la dilei lettera del 17 agosto. In quefta ferie d'azzioni fi contengono molti capi per ciascheduno de' quali ci reconofciamo in obbligo di ringraziarla. Noi gli uniamo tutti affieme, e rendiamo a lei le dovute grazie per cofi fingolare bontà verfo di noi, afficurandola che abbiamo tutta la dovuta ftima del fuo tanto applaudito merito.

Publicato in Roma il di lei diftico (*) fopradetto, ci fu riferito effervi ftato un fuo paefano letterato che in una publica converfazione aveva detto peccare in una fillaba, avendo fatta la parola hic breve, quando fempre deve effer longa.

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