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Le vieux Danube, ouvrant ses ondes paternelles,
Reçoit, sauve ses fils à la gloire infidèles,

Et cache leur terreur sous l'abri d'un rempart.

O Dieux! toute une armée aura donc pris la fuite! La honte de son chef l'indigne; elle s'irrite, Rappelle les combats, relève l'étendard.

Du hasard et du nombre, ô triomphes faciles! Haslach!.... Braves Français, voilà vos Thermopyles. Ici des légions, et là quelques soldats.

Leur gloire par des fers ne sera point flétrie ;

Ils mourront. Pardonnez, enfans de la patrie,
Je vous ai crus trahis par le Dieu des combats.

Rien ne peut étonner cette troupe d'Alcides.
Calmes, présens partout, sous la foudre intrépides,
Leurs corps sont des rochers qui bravent les assauts.
Enfin Léonidas saisit un drapeau, vole,
Enfonce les Germains, les frappe, les immole ;
Sous nos glaives vengeurs le sang coule en ruisseaux.

Fuyez, fuyez encor, légions trop timides;

De la mort dans vos rangs allez remplir les vides,
Ou craignez de tomber sous les coups du lion.
Bientôt Napoléon.... A ce nom, l'épouvante
Repousse vers ses murs cette foule tremblante;
Telle l'ombre d'Achille effrayait Ilion.

L'aiguillon du remords les ramène aux batailles.
Impuissante chaleur! nouvelles funérailles !
Du feu de leur courroux c'est le dernier éclair.
Précipité des cieux, son antique domaine,
Leur aigle consterné loin du soleil se traîne,
Et n'ose regarder l'oiseau de Jupiter,

A l'aspect de la foudre Ulm fait ouvrir ses portes.
O déshonneur! j'ai vu de nombreuses cohortes
Sortir, avant l'assaut, de ces murs tout entiers!
Mais un cercle est tracé par la main du génie:
Il faut ici du joug subir l'ignominie,
Ou d'un sang inutile arroser nos lauriers.

Arrêtons-nous, ô Muse! admire ce spectacle!
De l'Europe et des Rois le vainqueur et l'oracle
Prelude à son triomphe en ce jour solennel.
Autour de ce héros qu'attend le Capitole,
Montenotte, Lodi, Castiglione, Arcole,

Brillent avec leurs sœurs d'un éclat immortel.

Deux fleuves à ses pieds roulaient dans les campagnes ;
Nos guerriers, ses enfans couronnaient les montagnes ;
Tous confondaient sur lui leurs avides regards;
Tous s'écriaient : « Voilà le Dieu de la Victoire!
« Nos fronts sont éclairés des rayons de sa gloires
« Il écarte de nous la mort et les hasards. »

O Français ! suspendez ces transports légitimes.
Ils viennent, vos captifs; que vos cœurs magnanimes
Respectent les vaincus, et plaignent le malheur.
A quelle extrémité les destins t'ont réduite,
Terre d'Arminius! pleure: un nouveau Thersite
Attache à tes drapeaux sa honte et sa terreur.

Des mains de tes soldats il voit tomber les armes !
Notre gloire attestant ses coupables alarmes,
Condamnera son nom à l'immortalité.

Les yeux sont fatigués de compter ces esclaves :
Leurs forces et leur nombre irritaient tous nos braves.

« Quel malheur, disaient-ils, ou quelle indignité!

<< La

peur a donc glacé leurs mains inanimées ?

« Avec moins de soldats dévorant trois armées,

<< Jeune encor, l'Italique avait conquis la paix.

« Nous étions moins nombreux, quand sa foudre imprévue

<< Du mont de Jupiter avec nous descendue,

« Vengea dans un seul jour sa gloire et les Français. »

Du voile épais des cieux l'ombre se décolore:
Ils brillent des clartés d'une seconde aurore,
Et leur robe d'azur reprend sa pureté.

Voilà qu'au même instant de la voûte éthérée
Descend d'un vol tranquille une vierge sacrée,
L'idole des Français, l'auguste Humanité.

Les fêtes de la paix sont ses plus belles fêtes;
Ses regards attentifs observaient nos conquêtes,
Notre innocente gloire a désarmé son cœur.
Elle vient consacrer une époque nouvelle;
Et, tenant d'une main sa couronne immortelle,
Ses transports en ces mots s'adressent au vainqueur:

« Guerrier, quand tu parus sur la scène du Monde,
« Mon cœur, je l'avouerai, dans sa douleur profonde,
«Craignit un Alexandre, et plaignit l'univers ;
<< Mais deux fois, descendu de ton char de Victoire,
« Tu me montras la Paix, compagne de ta gloire,
« Et du bonheur public tous les canaux rouverts.

« Les Alpes, l'Eridan, le Nil, les Pyramides,
« Soumis, non ravagés par tes exploits rapides,
« De César, d'Alexandre, admiraient le rival :

«

Aujourd'hui, dépouillés du sceptre de la guerre,

« Ces deux fiers conquérans, sous qui tremblait la Terre, ← Descendent des hauteurs où tu n'as plus d'égal.

«Toi seul as mérité de porter ma couronne;

« La voix du Monde entier par mes mains te la donne :
« Ton génie a sauvé des peuples de guerriers.

« Consacre par mon nom le siècle de ta gloire :
« Bienfaiteur des mortels, réunis dans l'histoire
« Les palmes de Minerve à tes brillans lauriers. »

La Déesse, à ces mots, remonte vers les nues.
Ses paroles dans l'air par l'écho répandues,
Excitent dans l'armée un long frémissement;
Sur leurs glaives vainqueurs, par le héros lui-même,
Tous jurent d'imiter cette vertu suprême:
Et les vaincus en pleurs entendent ce serment.

Le bruit t'en a frappé; rappelle ta constance,
Veuve de Sobieski, toi qui, pour ta défense,
N'a pas même son ombre et son noble cercueil !
Tes murs nous sont ouverts, et tes palmes sont prêtes;
Reçois nos légions: garde, garde tes fêtes;

Un héros les épargne à tes Rois dans le deuil.

M. P. F. TISSOT.

La ville de Vienne, défendue et sauvée par ce héros de la fureur des Ot

tomans.

DE AUSTERLIĊIENSI PRÆLIO.

CARMEN DITHYRAMBICUM.

POSCE lyram; siluisse nefas tibi, Musa: triumphe!,
Io triumphe! nobili ter et quater
Carmine depropera.

Victor hyperboreas, nec toto Marte, phalanges
Fudit Napoleon tuus.

Illa, illa nostro restitit fracta objice;
Quæ Scythicis, immane fremens, eruperat antris
Barbara diluvies.

Tua res agitur; amplam tibi victoriam,
Vel qua doles, partam puta,

O felix nimis ac nimis
Europa tanto vindice!

Hæc tibi, æternis memoranda fastis,
Attulit longam bona lux salutem;
Hæc tibi leges placidosque ritus,
Hæc tibi cultos retinere mores
Præstitit; blandos eadem reducet
Artium lusus. Properate, vates,
Pars triumphorum quoque magna, tantis
Debitam rebus properate laudem.

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