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P RÉ FA C Е.

Les plus violents bouleversements ne sauraient rompre la chaîne qui lie le présent au passé. Tout se tient dans l'ordre politique et social. La littérature qui est l'expression fidèle de la société, doit par conséquent former un ensemble qu'il faut parcourir dans son entier pour saisir le caractère particulier des diverses époques d'une langue, et se faire une juste idée de l'esprit, de la mission et de l'influence des écrivains de chaque siècle. Nous n'avions donc qu'à nous laisser guider par cette vérité, banale aujourd'hui, pour tracer le plan de l'ouvrage que nous offrons au public. Il fallait raconter la naissance et la formation de la langue française, reproduire ses développements et les crises qu'elle a subies, indiquer son génie propre; il fallait enfin faire connaître exactement le mouvement des idées et donner une histoire de la littérature. C'est ce que nous avons essayé dans l'Introduction et dans les Tableaux littéraires qui précèdent les six périodes que nous avons distinguées.

Notre but étant d'offrir aux élèves un guide sûr et complet de l'histoire de la littérature, nous avons dû songer plutôt à faire, dans les Tableaux littéraires, un résumé des nombreux travaux publiés en France sur ce sujet, qu'à composer un ouvrage neuf, auquel le manque d'espace nous eût empêché de donner toute la perfection désirable. Nous avons donc consulté les savants écrits de MM. Ampère, Baron, Chevallet, Demogeot, Fuerison, Gérusez, Magnin, Nisard, Raynouard, Sainte-Beuve, Saint-Marc-Girardin, Sayous, Villemain, etc. nous avons cherché à les rendre accessibles aux jeunes intelligences en les fondant dans un nombre assez restreint de pages. Toutes les fois que nous l'avons pu, ce sont ces célèbres maîtres eux-mêmes que nous avons fait parler; ce sont eux qui apprécient et qui jugent.

Il est absolument nécessaire de connaître l'homme pour juger l'écrivain sans prévention. Nous avons donc mêlé à la critique littéraire les détails les plus caractéristiques de la vie des auteurs qui ont surtout influé sur leur siècle, et consacré une notice biographique à ceux des écrivains de moindre importance dont nous avons donné des extraits.

On s'étonnera au premier abord de ne pas trouver dans ce livre des citations d'un assez grand nombre d'auteurs qu'on est habitué à voir figurer dans presque toutes les chrestomathies. Mais, en y réfléchissant, on reconnaîtra que ces galeries bariolées de morceaux choisis dans les poètes et les prosateurs du troisième et même du quatrième ordre ont une influence très-pernicieuse. Quand on est loin des lieux où une langue est parlée dans toute sa pureté, le seul moyen d'en acquérir une connaissance complète, d'en pénétrer le génie, d'en apprécier toutes les qualités, c'est de l'étudier historiquement dans les ouvrages des grands maîtres. L'imitation des meilleurs modèles en tous genres peut seule apprendre à parler et à écrire avec élégance et pureté.

Le présent recueil ne porte l'enseigne d'aucun préjugé d'école, d'aucun système exclusif: il réserve à côté des grands écrivains des XVIIe et XVIII° siècles une large place pour nos contemporains. Notre travail est aussi neuf que le comporte une pareille matière. Nous n'y avons rien introduit qui ne soit digne d'être conservé, et tous nos soins ont tendu à faire des choix qui puissent inspirer à la jeunesse le goût du beau, du vrai, de l'honnête et du juste; tout en éveillant son intérêt pour la littérature en lui faisant connaître la vie et l'histoire de la nation française.

Sept ans se sont écoulés depuis que la France littéraire a paru, et nou en donnons aujourd'hui la septième édition.

Nous ne pouvions mieux reconnaître cet accueil si bienveillant qu'en faisant tous nos efforts pour perfectionner notre œuvre. Nous nous sommes empressés de mettre à profit les communications qui avaient pour objet de nous signaler quelques améliorations à y introduire. Tous les désirs, on le concevra sans peine, n'ont pu être satisfaits; nous avons dû ne tenir compte que de ceux qui avaient de leur côté la majorité des voix et qu'il était possible de mettre d'accord avec nos intentions premières. C'est à ce titre que nous nous sommes décidés à adopter l'orthographe actuelle pour tout le XVII et le XVIIIe siècle, et à séparer la partie ancienne de la moderne; non pas que nous croyions avoir admis d'abord un principe erroné, mais parce que nombre de personnes compétentes nous ont fait observer que le temps, consacré dans la plupart des écoles à l'étude de la littérature française, ne permettait pas d'y atteindre le but que nous nous étions proposé, et que nous rendrions service aux maîtres et aux élèves en faisant une concession à la pratique.

Berlin, mars 1864.

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