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18 SUR L'HIST, ECCLESIASTIQUE, &c.

condamnées à coucher avec les jeunes gens de la ville d'Ancyre. L'abbé Fleuri devait au moins s'apercevoir que les jeunes gens étaient plus condamnés qu'elles. Quoi qu'il en foit, St Théodote prie DIEU de faire mourir les fept vierges; DIEU lui accorde fa demande. Elles font noyées dans un lac; St Théodote vient les repêcher, aidé d'un cavalier célefte qui court devant lui. Après quoi il a le plaifir de les enterrer, ayant, en qualité de cabaretier, enivré les foldats qui les gardaient.

Tout cela fe trouve dans le fecond tome de l'hiftoire de Fleuri, et tous fes volumes font remplis de pareils contes. Eft-ce pour infulter au genre humain, j'oferais prefque dire, pour infulter à DIEU même, que le confeffeur d'un roi a ofé écrire ces déteftables abfurdités ? difaitil en fecret à fon fiècle : Tous mes contemporains font imbécilles, ils me liront et ils me croiront? ou bien, difait-il : Les gens du monde ne me liront pas, les dévotes imbécilles me liront fuperficiellement, et c'en eft affez pour moi ?

Enfin l'auteur des difcours peut-il être l'auteur de ces honteuses niaiseries? voulait-il, attaquant les ufurpations papales dans fes discours, perfuader qu'il était bon catholique, en rapportant des inepties qui déshonorent la religion? Difons pour fa juftification qu'il les

rapporte comme il les a trouvées, et qu'il ne dit jamais qu'il les croit. Il favait trop que des abfurdités monacales ne font pas des articles de foi, et que la religion confifte dans l'adoration de DIEU, dans une vie pure, dans les bonnes œuvres et non dans une crédulité imbécille pour des fottifes du pédagogue chrétien. Enfin, il faut pardonner au favant Fleuri d'avoir payé ce tribut honteux. Il a fait une affez belle amende honorable par fes difcours.

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L'abbé de Longuerue dit que lorfque Fleuri commença à écrire l'histoire eccléfiaftique, il la favait fort peu. Sans doute il s'inftruifit en travaillant, et cela eft très-ordinaire ; mais ce qui n'eft pas ordinaire, c'est de faire des difcours auffi politiques et auffi fenfés après avoir écrit tant de fottifes. Auffi qu'eft-il arrivé?on a condamné à Rome fes excellents difcours, et on y a très-bien accueilli fes ftupidités : quand je dis qu'elles y font bien accueillies, ce n'est pas qu'elles y foient lues, car on ne lit point à Rome.

CHAPITRE I V.

C'EST

De l'hiftoire juive.

une grande queftion parmi plufieurs théologiens, fi les livres purement historiques des Juifs ont été infpirés ; car pour les livres

de préceptes et pour les prophéties il n'eft point de chrétien qui en doute, et les prophètes eux-mêmes difent to us qu'ils écrivent au nom de DIEU; ainfi on ne peut s'empêcher de les croire fur leur parole fans une grande impiété mais il s'agit de favoir fi DIEU a été réellement dans tous les temps l'hiftorien du peuple juif.

:

Le Clerc et d'autres théologiens de Hollande prétendent qu'il n'était pas même néceffaire que DIEU daignât dicter toutes les annales hébraïques, et qu'il abandonna cette partie à la fcience et à la foi humaine. Grotius, Simon, Dupin, ne s'éloignent pas de ce sentiment. Ils penfent que DIEU difpofa feulement l'efprit des écrivains à n'annoncer que la vérité.

On ne connaît point les auteurs du livre des Juges, ni de ceux des Rois et des Paralipomènes. Les premiers écrivains hébreuxcitent d'ailleurs d'autres livres qui ont été perdus, comme (a) celui des Guerres du Seigneur, (b) le Droiturier, ou le livre des juftes, (c) celui des Jours de Salomon, (d) et ceux des Annales des rois d'Ifraël et de Juda. Il y a furtout des textes qu'il eft difficile de concilier

(a) Nomb. chap. XXI, v. 14.

(b) Josuẻ, chap. X, v. 13; et II des Rois, v. 1

(c) III des Rois, chap. XI, v. 41.

par

18.

(d) III des Rois, chap. XIV, v. 19, 29, et ailleurs

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exemple, on voit dans le Pentateuque que les Juifs facrifièrent dans le défert au Seigneur, et que leur feule idolâtrie fut celle du veau d'or; cependant il eft dit dans Jérémie, (e) dans Amos, (f) et dans les Difcours de St Etienne (g) qu'ils adorèrent pendant quarante ans le dieu Moloch et le dieu Remphan, et qu'ils ne facrifièrent point au Seigneur.

Il n'eft pas aifé de comprendre comment DIEU dicta l'hiftoire des rois de Juda et d'Ifraël, puifque les rois d'Ifraël étaient hérétiques, et que même quand les Hébreux voulurent avoir des rois, DIEU leur déclare expreffément, par la bouche de fon prophète Samuel, que c'eft (h) rejeter DIEU que d'obéir à des monarques; or plufieurs favants ont été étonnés que DIEU voulût être l'hiftorien d'un peuple qui avait renoncé à être gouverné par lui.

Quelques critiques trop hardis ont demandé fi DIEU peut avoir dicté que le premier roi Saül remporta une victoire à la tête de trois cents. trente mille hommes, (i) puifqu'il dit qu'il n'y avait que deux épées (k) dans toute la (e) Chap. VII, v. 22.

(f) Chap. V, v. 26.

(g) Actes des apôtres, chap. VII, v. 43.
(h) I des Rois, chap. X, v. 19.

(i) I des Rois, chap. XI, v. 8.

(k) I des Rois, chap. XIII, v. 20, 22.

nation, et qu'ils étaient obligés d'aller chez les Philiftins pour faire aiguifer leurs coignées et leurs ferpettes.

Si DIEU peut avoir dicté que David, qui était (1) felon fon cœur (m) fe mit à la tête de quatre cents brigands chargés de dettes.

Si David peut avoir commis tous les crimes que la raison peu éclairée par la foi ofe lui reprocher.

Si DIEU a pu dicter les contradictions qui fe trouvent entre l'hiftoire des Rois et les Paralipomènes.

On a encore prétendu que l'hiftoire des Rois ne contenant que des événements fans aucune inftruction et même beaucoup de crimes, il ne paraiffait pas digne de l'être éternel d'écrire ces événements et ces crimes. Mais nous fommes bien loin de vouloir defcendre dans cet abyme théologique; nous refpectons, comme nous le devons, fans examen, tout ce que la fynagogue et l'Eglife chrétienne ont refpecté.

Qu'il nous foit feulement permis de demander pourquoi les Juifs, qui avaient une fi grande horreur pour les Egytiens, prirent pourtant toutes les coutumes égyptiennes ; la circoncifion, les ablutions, les jeûnes, les (1) I des Rois, chap. XIII, v. 14. (m) I des. Rois, chap. XXII, v. 2.

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