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Quand une telle expression pourroit être de quelque considération à l'égard des enfans du testateur, pourroit-on opposer une cause si vague, si générale, si indéterminée, à des créanciers légitimes? Est-il certain que le motif de la mère ait été la prodigalité, la dissipation de son fils? Mais cette cause même estelle prouvée ? On ne rapporte point d'autres dettes du fils qu'une seule de 2500 livres, dont M. de Bullion est créancier; car, à l'égard de celle dont il s' s'agit aujourd'hui, il y a grande apparence qu'elle n'est pas si réelle que le prétendent ceux qui soutiennent la substitution.

Catherine Baron passe un billet au profit de Mirlavaud, Mirlavaud met son ordre pour Sola, et, après plusieurs cessions différentes, le billet revient enfin à Sola, lequel obtient une condamnation contre Catherine Baron, ou ceux qui la représentent.

Il nous a paru, par toutes les pièces qui nous ont été communiquées, une grande intelligence entre Sola et Mirlavaud; les requêtes données par Sola en cause d'appel, contre les créanciers, se trouvent dans le sac de Mirlavaud. Il y a plus; nous avons observé dans le fait, que Catherine Baron a obtenu une sentence au châtelet, qui condamne Mirlavaud à lui rendre le billet de 4500 livres, ou la valeur; cette sentence n'a été signifiée qu'à celui contre lequel elle avoit été obtenue, c'est-à-dire à Mirlavaud. Cependant au châtelet on a trouvé cette sentence dans le sac de Sola: ce fait parut si considérable pour prouver l'intelligence qui étoit entre eux, que Sola dénia d'abord que cette pièce fût dans son sac; mais on le convainquit de fausseté par la copie collationnée de cette sentence, qui fut délivrée aux créanciers par le rapporteur du procès.

Toutes ces circonstances pourroient persuader que Sola et Mirlavaud sont la même personne; que la condamnation obtenue sous le nom de Sola, est en effet au profit de l'appelant, et que bien loin qu'il soit ici le débiteur, il est au contraire le créancier qui veut profiter d'une somme de 4,500 livres sous

un nom interposé, contre la foi de l'indemnité qu'il a donnée.

Mais, sans entrer dans toutes ces circonstances, il est certain que les parties de M. le Verrier sont des créanciers légitimes, créanciers antérieurs à la substitution; que les conditions marquées par la loi la loi pour faire un acte de cette nature, n'ont point été observées ; qu'ainsi cet acte, qu'on pourroit à peine opposer au fils, ne peut valoir contre des créanciers; que la mère n'ayant pas satisfait aux formalités prescrites par le droit et par vos arrêts, a été sans pouvoir; que la nature a repris ses droits, et a rendu au fils, ou, pour mieux dire, à ses créanciers, ce qui ne pouvoit leur être ôté; et qu'en un mot on ne peut confirmer une telle substitution sans attaquer les principes de droit les plus certains, et les maximes les plus inviolables.

Enfin Mirlavaud peut aisément satisfaire à la condamnation que vous prononcerez contre lui; ce n'est point absolument un paiement qu'on lui demande, c'est un billet qu'il a encore apparemment en sa puissance; il peut, sans toucher aux biens substitués, sans diminuer le patrimoine de ses enfans, s'acquitter de la dette dont on lui demande le paiement.

Ainsi l'appel au néant, ordonner que ce dont est appel, etc., recevoir la partie de Me Duchesneau intervenante, la substitution confirmée, et faire distraction de la légitime.

Jugé suivant les conclusions, par arrêt du 3 avril 1691, par , par M. le président de Nesmond, qui ajouta en prononçant, sans tirer à conséquence, suivant l'avis de M. Talon, président à Mortier.

ENTRE Nicolas Mirlavaud, écuyer, appelant d'une sentence rendue par le prévôt de Paris ou son lieutenant civil, au profit de Catherine Baron, veuve d'André Salvatory, et à présent femme de Henri de Levy, le trente-un août mil six cent quatre-vingt-trois, et d'une ordonnance rendue par ledit lieutenant civil, le douze août mil six cent quatre-vingt-neuf, sur requête à lui présentée par M. Louis le Verrier, avocat en la cour, et Antoine Boucher, créanciers et directeurs des droits des autres créanciers de ladite Baron, saisies et arrêts

faites en conséquence, le cinq décembre audit an; et d'une autre sentence rendue par ledit lieutenant civil au profit desdits le Verrier et Boucher, le dix-sept septembre audit an mil six cent quatre-vingt-neuf, et de tout ce qui s'en est suivi, d'une part; et lesdits le Verrier et Boucher, esdits noms de créanciers et directeurs, intimés, d'autre; et encore entre damoiselle, Louise-Antoinette Ducay, femme non commune en biens dudit Nicolas Mirlavaud, son mari, tutrice de ses enfans et d'elle, quant à la substitution faite à leur profit par Anne de Ravien, veuve de défunt Paul Mirlayaud, mère dudit Nicolas Mirlavaud, demanderesse en requête du seize mars mil six cent quatre-vingt-dix, tendante à ce qu'elle soit reçue partie intervenante en la cause pendante en la susdite cause d'appel d'entre lesdits le Verrier et Boucher, esdits noms, d'une part, et ledit Mirlavaud d'autre; faisant droit sur son intervention, ordonner que la substitution faite par ladite Ravien, mère dudit Mirlavaud, par acte du vingt-quatre août mil six cent quatre-vingt-huit, tant de ses meubles qu'immeubles, aux enfans nés et à naître de leur mariage, l'usufruit réservé audit Mirlavaud, sera confirmé, et, en conséquence, adjuger à ladite demanderesse, audit nom de tutrice; quant à ladite substitution, la propriété, tant des meubles que des immeubles, étant de la succession de ladite veuve Mirlavaud, sans avoir égard à la demande et saisies desdits directeurs, dont ils seront déboutés, avec main-levée desdites saisies faites ès mains des débiteurs de ladite succession, avec dépens, d'une autre part; et lesdits le Verrier et Boucher, esdits noms des créanciers et directeurs des autres créanciers de ladite Baron, et ledit Mirlavaud, défendeur, d'autre. Après que Duchesnau, pour ladite Ducay; le Verrier, pour lui et en son nom, et pour Boucher; et Marais, pour Mirlavaud, ont été ouïs pendant deux audiences, ensemble d'Aguesseau, pour le procu-, reur-général du roi :

LA COUR a mis et met l'appellation au néant; ordonne que ce dont a été appelé sortira effet; condamne l'appelant en l'amende de douze livres et aux dépens, reçoit la partie de Duchesnau partie intervenante. Ayant égard à sa requête, ordonne que distraction sera faite de la légitime délaissée, au profit des créanciers, sans tirer à conséquence; dépens à l'égard des parties de Duchesnau compensés. Fait ce trois avril mil six eent quatre-vingt-onze.

CINQUIÈME PLAIDOYER.

DU 14 MAI 1691,

Dans la cause des sieurs GANTHERON et THOMASSIN, contre un ancien vicaire de la paroisse de Champigny, pourvu par dévolu de la chapelle de NotreDame, dans cette paroisse.

1.° Quelles sont les conditions requises pour rendre un bénéfice sacerdotal?

2. Si l'on peut prescrire contre le titre de fondation, en ne satisfaisant pas aux obligations qu'elle impose aux titulaires pendant un long temps?

3.0 Si le défaut de date rend un acte nul, et s'il étoit d'usage de la marquer dans tous les actes au douzième et au treizième siècle?

4. Si la signature des actes étoit alors en usage, ou s'il suffisoit d'y apposer un sceau; et si l'acte est valable lorsqu'il y est porté, qu'il a été scellé, et qu'il en reste des vestiges, quoique le sceau méme ne subsiste plus ?

L'ANTIQUITÉ des actes qui semblent favoriser les prétentions du dévolutaire, la longue possession qui sert de fondement aux défenses de l'ancien titulaire du bénéfice, forment toute la difficulté de cette cause.

Il y a deux chapelles en l'église paroissiale de Champigny, l'une dédiée sous l'invocation de la Vierge; l'autre a pour patron Saint-Jacques et SaintJean. Quoiqu'il ne s'agisse que de la chapelle de Notre-Dame, il est cependant nécessaire d'expliquer en peu de mots la fondation de la chapelle de SaintJacques; c'est de ce titre qu'on emprunte toutes les

inductions différentes dont on se sert pour assurer la fondation de la chapelle contentieuse.

Il paroît que l'année 1202, plusieurs particuliers fondèrent une chapelle en l'honneur de Saint-Jacques et de Saint-Jean, dans l'église de Champigny; ils voulurent que le chapelain qui la desserviroit, fût obligé à la résidence, qu'il en fit un vœu solennel entre les mains du curé de la paroisse, lorsqu'il prendroit possession de la chapelle; ils le chargèrent de dire la messe tous les jours, d'assister au service divin avec le curé; ils lui attribuèrent un certain revenu pour acquitter toutes ces fondations.

L'acte qui contient toutes ces charges, est un acte authentique approuvé par l'évêque, scellé et daté; on ne peut lui donner atteinte dans la forme.

:

A l'égard de la chapelle Notre-Dame, on rapporte aujourd'hui un acte à peu près semblable à celui que nous venons de vous expliquer chapelle fondée dans la même église avec les mêmes conditious; le chapelain obligé à la résidence, chargé de dire la la messe tous les jours, d'assister au service divin avec le curé, d'exercer même ses fonctions en cas qu'il soit absent pour cause légitime clause expresse, que cette chapelle ne pourra être conférée qu'à un prêtre.

Mais cet acte paroît imparfait dans la forme; point de date, point de sceau, point de signature.

Quoique les fondations de ces deux chapelles ne soient pas également incontestables, elles ont élé toutes deux également négligées, et la possession contraire aux titres les avoit presque entièrement effacés, lorsque le vicaire de Champigny, témoin continuel de la négligence des chapelains, instruit plus particulièrement de la fondation de ces deux chapelles, a jeté un dévolu sur l'une et sur l'autre. Il a obtenu des provisions en cour de Rome, avec la condition d'opter celui des deux bénéfices qu'il jugeroit à propos. Il en a pris possession; c'est ce qui a donné lieu à la complainte sur laquelle vous avez à prononcer. Il n'est point encore ici question

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