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concouru avec tant de zèle, disons même avec tant de bonheur, à la fin qui leur est commune, c'est-àdire, à la gloire de celui qui prononce ses oracles par la bouche de l'église, et qui les fait exécuter par l'autorité des rois.

Des ténèbres d'autant plus dangereuses qu'elles empruntoient l'apparence et l'éclat de la plus vive lumière, commençoient à couvrir la face de l'église. Les esprits les plus élevés, les ames les plus célestes trompées par les fausses lueurs d'une spiritualité éblouissante, étoient celles qui couroient avec le plus d'ardeur après l'ombre d'une perfection imaginaire : et si Dieu n'avoit abrégé ces jours d'illusion et d'égarement, les élus mêmes, s'il est possible, et s'il nous est permis de le dire après l'écriture, auroient été en danger d'être séduits.

La vérité s'est fait entendre par la voix du pape, et par celle des évêques : elle a appelé la lumière, et la lumière est sortie du sein des ténèbres. Il n'a fallu qu'une parole pour dissiper les nuages de l'erreur; et le remède a été si prompt et si efficace, qu'il a effacé jusqu'au souvenir du mal dont nous étions menacés.

Un des plus saints pasteurs que Dieu, dans sa miséricorde, ait jamais donnés à son église ; un pape digne par son éminente piété d'être né dans ces siecles heureux où le ciel mettoit au nombre de ses saints tous ceux que Rome avoit élevés au rang de ses pontifes, est celui que la providence a choisi pour faire ce discernement si nécessaire, mais si difficile, entre la vraie et la fausse spiritualité. La gloire en étoit due à un pontificat si pur, si désintéressé, si pacifique; il semble que Dieu, dont les yeux sont toujours ouvert sur les besoins de son église, ait prolongé les jours de notre saint pontife, qu'il ait ranimé sa vieillesse comme celle de l'aigle, pour parler encore le langage de l'écriture, et qu'il lui ait inspiré une nouvelle ardeur à l'extrémité de sa course, pour le mettre en état d'être non-seulement l'auteur, mais le consommateur de ce grand ouvrage.

L'église gallicane représentée par les assemblées des évêques de ses métropoles, a joint son suffage à celui du saint siége: animée par l'exemple et par les doctes écrits de ces illustres prélats qui se sont déclarés si hautement les zélés défenseurs de la saine doctrine, elle a rendu un témoignage éclatant de la pureté de sa foi. La vérité n'a jamais remporté une victoire si célèbre ni si complète sur l'erreur; aucune voix discordante n'a troublé ce saint concert, cette heureuse harmonie des oracles de l'église. Et quelle a été sa joie, lorsqu'elle a vu celui de ses pasteurs dont elle auroit pu craindre la contradiction, si son cœur avoit été complice de son esprit, plus humble et plus docile que la dernière brebis du troupeau, prévenir le jugement des évêques, se hâter de prononcer contre lui-même une triste, mais salutaire censure; et rassurer l'église effrayée de la nouveauté de sa doctrine, par la protestation aussi prompte que solennelle d'une soumission sans réserve, d'une obéissance sans bornes; et d'un acquiescement saus ombre de restriction!

Que restoit-il après cela, si ce n'est qu'un roi dont le règne victorieux n'a été qu'un long triomphe, encore plus pour la religion que pour lui-même, voulut toujours mériter le titre auguste de protecteur de l'église et d'évêque extérieur, en joignant les armes visibles de la puissance royale à la force invisible de l'autorité ecclésiastique ?

C'est lui qui, après avoir donné aux évêques la sainte consolation de traiter en commun des affaires de la foi suivant la pureté de l'ancienne discipline, met aujourd'hui le dernier sceau à leurs délibérations, en ordonnant que la constitution du pape, acceptée les églises de son royaume, sera reçue, publiée, par

et exécutée dans ses états.

Nous avons vu avec plaisir les évêques renouveler en faveur de ce grand prince, ces saintes acclamations, ces vœux si tendres et si touchans que les pères des conciles généraux ont faits autrefois en

faveur des empereurs romains. Qu'il nous soit permis d'emprunter aussi leurs éloquentes expressions, et de dire après eux avec encore plus de vérité : Grâces immortelles au nouveau David, au nouveau Constantin, illustre par ses conquêtes, plus illustre encore par son zèle pour la religion. Vainqueur des ennemis de l'état, il triomphe avec plus de joie de ceux de l'église. Destructeur de l'hérésie, vengeur de la foi, auteur de la paix, plein de ce double esprit qui forme les grands rois et les grands évêques, roi et prêtre tout ensemble, ce sont les termes du concile de Chalcédoine, que la Providence, qui lui a donné ce cœur royal et sacerdotal, le conserve long-temps sur la terre pour la gloire de la religion, et pour notre bonheur : que le Dieu qu'il fait régner en sa place, étende le cours de sa vie au delà des bornes de la nature et que le roi du ciel protège toujours celui de la terre. Ce sont les voeux des pasteurs, ce sont les prières des églises ; et nous osons dire, messieurs, que ce sont encore plus, s'il est possible, et vos souhaits et les nôtres.

Ne craindrons-nous point de mêler à des applaudissemens si justement mérités, les protestations solennelles que le public attend de nous en cette occasion, contre les conséquences que l'on pourroit tirer un jour de l'extérieur et de l'écorce d'une constitution qui ne renferme rien dans sa substance, que de saint et de vénérable.

seurs,

Mais sans attester ici avec nos illustres prédécesla foi de ce serment inviolable qui nous a dévoués à la défense des droits sacrés de l'église et de l'état, ne nous suffit-il pas de pouvoir nous rendre ce témoignage à nous-mêmes, que nous marchons avec autant de confiance que de simplicité, dans la route que nos pasteurs nous ont tracée ?

Comme eux nous adhérons à cette doctrine si pure que le chef de l'église, le successeur de saint Pierre, le vicaire de Jésus-Christ, le père commun de tous les fidèles, vient de confirmer par sa décision.

Mais comme cux aussi, et nous devons dire même,

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encore plus qu'eux; nous sommes obligés de conserver religieusement le dépôt précieux de l'ordre public, que le Roi veut bien confier à notre ministère; et de le transmettre à nos successeurs, aussi pur, aussi entier, aussi respectable que nous l'avons reçu de ceux qui nous ont précédés.

Après cela, nous ne nous engagerons point dans de longues dissertations, ni sur la forme générale de la constitution dont nous venons au nom du Roi requérir l'enregistrement, ni sur les clauses particulières qu'elle renferme.

Nous savons que le pouvoir des évêques et l'autorité attachée à leur caractère d'être juges des causes qui regardent la foi, est un droit aussi ancien que la religion, aussi divin que l'institution de l'épiscopat, aussi immuable que la parole de Jésus-Christ

même.

Que cette doctrine établie par l'écriture, confirmée par le premier usage de l'église naissante, soutenue par l'exemple de ce qui s'est passé d'àge en âge et de génération en génération dans les causes de la foi, transmise jusqu'à nous par les pères et par les docteurs de l'église, enseignée par les plus saints papes, attestée dans tous les siècles la par bouche de ceux qui composent la chaîne indissoluble de la tradition, et surtout par les témoignages anciens et nouveaux de l'église de France; n'a pas besoin du secours de notre foible voix, pour être regardée comme une de ces vérités capitales que l'on ne peut attaquer sans ébranler l'édifice de l'église dans ses plus solides fondemens.

Que si des esprits peu éclairés avoient besoin de preuves pour être convaincus de cette grande maxime, il sufliroit de les renvoyer aux savans actes de ces assemblées provinciales que la postérité conservera comme un monument glorieux des lumières et de l'érudition de l'église gallicane.

C'est là qu'ils apprendront beaucoup mieux que dans nos paroles, quelle multitude de faits, quelle

nuée de témoins s'élèvent en faveur de l'unité de l'épiscopat.

C'est là qu'ils reconnoîtront que si la division des royaumes, la distance des lieux, la conjoncture des affaires, la grandeur du mal, le danger d'en différer le remède, ne permettent pas toujours de suivre l'ancien ordre et les premiers vœux de l'église, en assemblant les évêques; il faut au moins qu'ils examinent séparément ce qu'ils n'ont pu décider en et que leur consentement exprès ou tacite, imprime à une décision vénérable par elle-même, le sacré caractère d'un dogme de la foi.

commun;

Et soit que les évêques de la province étouffent l'erreur dans le lieu qui l'a vu naître, comme il est presque toujours arrivé dans les premiers siècles de l'église; soit qu'ils se contentent d'adresser leurs consultations au souverain pontife sur des questions dont ils auroient pu être les premiers juges, comme nous l'avons vu encore pratiquer dans ce siècle; soit que les empereurs et les rois consultent eux-mêmes et le pape et les évêques, comme l'orient et l'occident en fournissent d'illustres exemples; soit enfin que la vigilance du saint siége prévienne celle des autres églises, comme on l'a souvent remarqué dans ces derniers temps; la forme de la décision peut être différente, quand il ne s'agit que de censurer la doctrine, et non pas de condamner la personne de son auteur; mais le droit des évêques demeure inviolablement le même, puisqu'il est vrai de dire qu'ils jugent toujours également, soit que leur jugement précède, soit qu'il accompagne, ou qu'il suive celui du premier siége.

Ainsi, au milieu de toutes les révolutions qui altèrent souvent l'ordre extérieur des jugemens, rien ne peut ébranler cette maxime incontestable qui est née avec l'église, et qui ne finira qu'avec elle: que chaque siége, dépositaire de la foi et de la tradition de ses pères, est en droit d'en rendre témoignage, ou séparément, ou dans l'assemblée des évêques, et que c'est de ces rayons particuliers que se forme

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